[À bord du Helios Ascendant] - Des retrouvailles tant attendues - [PV Allana]

Le lendemain du rp Décisions difficiles

Si j’étais honnête et moins emmerdée que je ne le suis actuellement par la réserve que m’impose mon statut depuis un an dans des réunions aussi officielles, j’admettrais que je comprends le point de vue d’Orfeo, et que je comprends pourquoi la décision que nous avons prise de manière collégiale est aussi difficile à accepter pour notre cher Maître d’armes en chef. En tout cas, je peux l’entendre. Pour avoir connu les horreurs des champs de bataille lors de la campagne de Lord_Over il y a vingt ans, et plus encore pour m’être trouvée sur le sol même de Kashyyyk lors de la dernière confrontation, je l’entends. Nous sommes, tous deux, des guerriers, des combattants. Je ne suis pas un très bon stratège, moi non plus, je me considère davantage dans mon élément en tant que guerrière ou bien tacticienne. Je n’ai pas cette vision d’ensemble, ce recul que l’on attend de la part des stratèges et des grands décisionnaires. Mon esprit est déjà, sur ce plan, fort occupé pour tout ce qui concerne l’Ordre Vert. Nul doute que la Padawan Verte que j’étais à l’époque se serait insurgée et aurait gueulé au scandale face aux choix que nous avons fait dans cette salle de réunion, sous la forme d’un conseil de guerre… et je pense que Jaylen aurait choisi de suivre la décision qui a été entérinée. Cela aurait donné lieu, nul doute, à un débat enflammé entre la jeune femme corellienne que j’étais et l’Iridonien expérimenté.

Néanmoins, le constat posé par l’Amiral Solaris et Maître Ombrelune reste sans appel : vu la conjecture actuelle, il n’y a aucun doute que le Consortium d’Hapès va vouloir appuyer son assaut et continuer son invasion sur d’autres mondes, sans attendre gentiment que la République organise sa défense. Et je sais que Ruusaan est un monde au moins aussi symbolique que ne l’est Kashyyyk aux yeux des républicains, et plus encore des Jedi de Tython, et d’autant plus pour les Seigneurs et Dames Jedi. Mon cœur déplore la décision et souffre de devoir faire attendre nos alliés Wookies face au joug Hapien et Sith, mais mon esprit comprend le choix qui a été fait et accepte de reconnaître les arguments avancés. Nous devons stopper net leur fer de lance sur Ruusaan et, ensuite, rebondir pour reconquérir la terre natale des Wookies. Si nous obtenons une victoire à Ruusaan, nous aurons plus de forces et plus de légitimité aux yeux de ces profiteurs de sénateurs pour demander un appui militaire pour Kashyyyk.

Je sais que mes collègues de Tython m’attendaient au tournant concernant l’implication de l’Ordre Vert. Hélas, je ne suis pas une Dame Jedi, je ne suis pas un despote et je ne suis pas cheffe d’état.  Je ne peux pas décider pour le secteur corellien, ça, c’est une décision politique qui devra être prise par les sénateurs des Cinq Frères, de manière concertée avec le sénateur de Corellia. Je suis en effet la dirigeante de l’Ordre Jedi Corellien, mais sur le plan diplomatique-politique, je suis une représentante. Je ne suis qu’une ambassadrice. Les seules décisions que je peux prendre sont celles pour l’Ordre Vert.

Néanmoins, cela met aussi en lumière la particularité de la position tant du secteur corellien que de l’Ordre Vert dans leur macrocosme à la fois commun et respectif. Je sais que les velléités indépendantistes de certaines pensées corelliennes ne rassurent guère la République et Tython. J’en suis consciente en tout cas. Je sais que l’élection du nouveau Maître des Jedi Verts, il y a maintenant un an, a été observée avec grande attention et une certaine inquiétude par nos pairs plus traditionnels. J’ai accepté l’héritage de Jaylen en connaissance de cause, et ce sera mes travaux de Meetra Surik.  Je dois maintenir et renforcer cet équilibre fragile, ce statuquo délicat entre les Verts et l’Ordre Jedi entier. Je sais que cela ne plaira pas à tous mes collègues de l’Ordre de Tython, mais je n’ai aucune intention de laisser l’Ordre Vert être cannibalisé et se laisser totalement être absorbé par nos cousins de là-bas. Nous prêterons nos bras et nos esprits pour combattre ensemble face à des ennemis communs et pour défendre nos valeurs, notre histoire et nos connaissances communes avec eux. Nos cœurs, en revanche, resteront toujours étroitement associés à Corellia et aux mondes des Cinq Frères. Nous participerons évidemment à la lutte contre les Sith et contre les ennemis de la République, nous ferons notre part du travail, mais notre allégeance première ira toujours en direction du secteur corellien. Nous demander de renoncer à cet engagement, c’est nous demander de renoncer à nos racines. Et cela, même pour moi en tant que représentante de la faction autonomiste, ce n’est pas envisageable.

Force… je me dis que parfois, mes collègues du Haut-Conseil ne se représentent pas les efforts titanesques que je fournis pour maintenir et renforcer nos relations abîmées avec l’Ordre de Tython. Je veux bien travailler en bonne entente avec eux, mais je n’ai aucune intention de trahir ma patrie. Je n’ai aucune intention de défendre une pensée indépendantiste – dans le sens que Corellia et les Cinq Frères se retirent de la République pour réaffirmer leur indépendance, un scénario oh-combien naïf et utopiste à mes yeux dans la situation galactique actuelle – mais je n’ai pas envie de sacrifier notre culture, notre identité et notre histoire sur l’autel des ambitions des Unionistes. Si l’Ordre Jedi dans son ensemble peut être considéré comme un macrocosme constitué de plusieurs composantes – les Prophètes Jedi, l’Ordre « classique », les Sorcières de Dathomir – je considère qu’à l’instar de ces dernières, nous avons notre identité propre et, de fait, notre droit à maintenir une certaine autonomie. Tant que je n’aurais pas cette garantie et que je n’aurais pas trouvé d’éventuel successeur qui aurait les épaules d’endosser mes responsabilités à ma suite, je n’ai pas l’intention de changer ma position. C’est aussi la principale raison pour laquelle j’ai refusé, à deux reprises, les postes de Grand Maître et de Maître de l’Ordre Jedi que l’on m’avait encouragée, informellement, à candidater pour. Comme je l’ai dit à feu Grand Maître Lucius, je suis « trop verte » pour le second cas : trop jeune et trop corellienne. Comme je l’ai laissé entendre à mes collègues lors du 6e conclave de l’Ordre Jedi, la sécurité et la stabilité de l’Ordre Vert sont prioritaires et je ne m’y engagerai pas sans qu’elles ne soient garanties. Et en plus, il y avait un bien meilleur candidat tout trouvé pour le job : Maître Dante Garvan. Il fera nettement moins ruer dans les brancards que moi, vis-à-vis des plus traditionnalistes des Jedi. Si j’avais eu ces garanties, si j’avais eu un successeur apte et volontaire… j’aurais pu faire un autre choix.

Enfin, las de ces réflexions ! Nous avons déjà eu des sujets assez écrasants comme cela hier, à peine égayés par la perspective d’un projet que Dalek, Arsenicia, l’Amirale Solaris et moi prévoyons à bord. Là encore, je vais devoir gérer de sacrés discussions avec le Conseil Vert pour les quelques traditions dont je vais devoir tordre le cou pour le mettre en place, mais c’est un sujet pour une autre fois.

Comme pour symboliser cette séparation nette entre mon rôle de Maître des Jedi Verts et mon identité en tant que personne – la Maîtresse Verte et citoyenne corellienne Allana Fern, j’ai laissé dans ma cantine l’apparat « de cérémonie » échu à mon rang et j’ai également, pour une rare fois, troqué mes robes Jedi émeraudes. Je leur ai préféré une tenue civile sombre, sous la forme d’un haut noir sans manches assez lâche pour ne pas me serrer au niveau du ventre et d’un pantalon noir assorti, accompagné de bottines brunes à épaisses semelles et surtout confortables. Une veste en cuir –un peu usé, mais de bonne qualité – marron recouvre mon haut, laissé ouverte, et une écharpe en tissu beige recouvre mon cou. Je n’ai gardé de Jedi que mes sabres-laser – mon double-lame principal et mon sabre-laser à lame simple de quand j’étais Padawan Verte – aux côtés de mes blasters corelliens.

Car là, c’est en tant qu’Allana Fern que je me dirige, avec aplomb, vers la salle de détente des officiers. Bien plus détendue qu’au cours de la réunion, je laisse une expression avenante se poser sur mes traits alors que mes yeux bleus-gris observent avec curiosité leurs alentours et leur entourage passager. Bon, mes cheveux auburn n’aident pas beaucoup à me mêler dans la foule militaire mais sans mes bures Jedi, j’espère être un peu plus discrète ainsi en civile qu’avec ma tenue émeraude. Dalek ne m’accompagne pas cette fois – nous restons indépendants – mais il sait où je me rends et surtout à la rencontre de qui je me porte. Mon sourire se fait encore plus enjoué à cette perspective, expectatif.

Depuis le temps que je me disais qu’il fallait im-pé-ra-ti-ve-ment que je lui rende visite, on y est !

Que voulez-vous, même après que votre fauconneau Banshee ait déployé ses ailes et se soit envolé du nid, vous ne pouvez pas vous empêcher d’aller vous enquérir de ses nouvelles et d’observer son vol. Kayla a beau n’être « que » ma nièce, je la connais depuis qu’elle est toute petite et je me suis attachée à elle, plus encore suite à mon retour dans l’Ordre Vert. Je crois que je commence à comprendre cette inquiétude dont je raillais gentiment ma belle-sœur, surtout dans les temps belliqueux d’en ce moment. Ma chère petite Banshee a depuis un an maintenant pris son envol vers les cieux qui la fascinaient tant, et combattait désormais le plus souvent la tête dans les étoiles et les pieds bien loin de la terre ferme. Un sourire tendre se glisse sur mes lèvres à cette pensée : en dehors de mon amour pour l’art du combat au sabre-laser, mon ancienne élève est aussi parvenue à paver son propre chemin et son inclination pour la technologie – que je ne partage absolument pas – l’a guidée jusqu’à nos jours. Mon cœur se serre en repensant à sa cérémonie d’élévation au rang de Chevalier Vert : c’était l’une des dernières cérémonies présidées par Jaylen en tant que Maître des Jedi Verts, et moi en simple Maîtresse Verte. Je me demande bien ce qu’elle a pu faire du crédit corellien que par tradition, j’avais fait frapper et que je lui avais donné après la cérémonie, en tant que mentor à son apprentie accomplie.

L’amusement me traverse alors que je me souviens d’une promesse qu’elle m’avait faite, des années plus tôt : s’en souvenait-elle encore, après tout ce temps ? Si oui, j’attends de pied ferme son défi.

Bon, ça aussi ça ne change pas beaucoup : elle n’est pas tout à fait à l’heure. J’y suis habituée, avec le temps, et choisit de l’attendre après avoir commandé une tasse de chocolat chaud. Il ne vaut pas une boisson maison, mais il n’est pas mauvais pour autant. On verra si elle en veut, ou du kaff ou du thé. De bonne humeur, je profite de l’occasion pour laisser mon esprit glisser avec douceur sur les fils du Réseau de Vie, afin de m’exercer et de ressentir les présences de ceux et celles qui nous entourent. J’ai toujours une certaine facilité avec ce talent, ce qui change net avec les autres arts délicats de la Force, et je soupçonne que mon Empathie de Force n’y est pas tout à fait étrangère. Identifiant avec aisance sa présence parmi celles des Jedi présents à bord, je la localise bientôt et sent qu’elle s’approche d’ici. Mes yeux bleus-gris s’ouvrent et se portent vers elle alors que cette chère Kayla fait enfin son entrée.


- Désolée de t’avoir fait attendre. Je suis contente de te voir, ça fait longtemps.  Tu te portes comment ?


Mon sourire s’élargit encore en la voyant bien portante et égale à elle-même, assez amusée par sa tenue constellée de taches d’huile. Nul besoin de me demander ce qu’elle faisait avant de venir, ainsi que la cause de son retard. Relevant son large sourire, je me dis que cette convocation soudaine pour ce mini conseil-de-guerre a certes amené à une bien longue réunion, mais m’a aussi offert cette super occasion de rattraper un peu de temps perdu. Je n’hésite pas un instant à me lever de mon siège et, sans me soucier des apparences un seul instant, sourire rayonnant aux lèvres, je lui ouvre mes bras.


- Kayla ! Comme je suis contente de te voir, ma grande ! En pleine forme qui plus est. Ça fait quoi, un an déjà que tu es une Jedi Verte accomplie ? Force, que le temps passe vite !  


M’étant approchée d’elle en délaissant ma tasse de chocolat chaud, via de vives foulées malgré ma petite taille, je pose mes mains affectueusement sur ses bras avant de l’étreindre. Je ne suis pas aussi inquiète que son père Corran à son propos – c’est un père-poule, que voulez-vous – mais je ne peux pas tout à fait m’empêcher de prendre discrètement de ses nouvelles par mes propres canaux et de garder un œil sur la belle jeune femme qui me fait face. Une vraie corellienne, de cœur et de sang.


- Ca fait trop longtemps que tu n’es pas venue sur Corellia saluer ta vieille tante. Eh bien, comme tu vois, je me porte plutôt bien. Dalek sera ravi de te revoir, lui-aussi. Tu le sais sans doute déjà, mais il est à bord lui-aussi. Je n’étais pas particulièrement enchantée par la perspective d’une interminable réunion, mais quand j’ai su où elle aurait lieu, je n’ai pas hésité un instant. Allez viens, installe-toi ! Tu veux boire ou manger quelque chose ? Je me rappelle que tu oubliais parfois de le faire, quand tu étais absorbée dans une tâche. Disais-je avec une joie vibrante dans la Force.


Et bien sûr, tout ceci en corellien ! Entre corelliennes, c’est bien la moindre des choses de nous exprimer dans notre langue maternelle bien aimée. Oh, je me doute qu’elle doit avoir des questions et bien des sujets que nous pouvons aborder, mais moi aussi je suis curieuse de savoir ce qu’elle a pu vivre et connaître comme expériences ces derniers mois, et ce qui lui ferait plaisir tant que je suis à bord de l'Hélios Ascendant.

S’il y a bien une chose que je ne troquerais pour rien au monde dans notre culture de Jedi Corelliens, c’est bien que l’on n’ait pas renié nos sentiments et les liens tissés entre nos proches. Il n’y a cette réserve, cette pudeur, cette distance, cette je-ne-sais-quelle froideur que je perçois parfois – il y a des exceptions notoires, ce n’est pas une règle absolue – mais plus fréquemment chez les cousins de Tython. Une frange non-négligeable d’entre eux – fort heureusement, elle n’est pour l’heure pas majoritaire au Haut-Conseil – applique strictement à la lettre le très ancien, plurimillénaire code Jedi. Personnellement, je crois que je n’aurais pas fait long feu là-bas, vu comment j’étais dans ma jeunesse. Trop de contraintes et trop d’entraves m’auraient fait exploser et je m’en serais vite retournée dans mes pénates, ou j’aurais pris mon envol bien loin de Tython sur une carrière bien éloignée de la Force.

J’imagine que c’est ça, d’avoir la tête et les yeux dans les étoiles. On en perd la notion du temps qui s’écoule, on garde une certaine distance involontaire sur les faits qui se passent sur la terre ferme. En même temps, le temps passe vite quand on ne s’ennuie pas et qu’on aime ce que l’on fait. Un sourire amusé perdure donc sur mes lèvres, bienveillant et chaleureux. Elle n’a pas changé, ma chère Kayla. Elle n’a pas l’air très surprise non-plus de savoir que Dalek m’ait accompagnée à bord du vaisseau. D’une part, il était invité aussi en tant que participant au front de Kashyyyk et je sais que plusieurs de mes pairs du Haut-Conseil apprécient son point de vue et ses remarques qui s’avèrent intéressantes. D’autre part, disons que je lui ai fait assez de belles frayeurs en une seule année qu’il me garde à l’œil, d’autant plus maintenant que je porte maintenant notre enfant à venir. Je laisse ma nièce se préparer son thé, savourant ma propre boisson attiédie depuis de mon côté, avant de l’écouter avec attention.

« Après tout ça » … cela peut inclure beaucoup de choses, et je suis assez lucide pour ne pas y voir suggéré la mention de la guerre froide entre les trois puissances, qui s’embrase de nouveau entre le Consortium d’Hapès et la République Galactique. Rien qu’au cours de la réunion, puisqu’elle est affectée à la 9ème flotte et moi responsable de l’enclave de Corellia, nous serons de nouveau séparées. Son optimisme et sa manière de penser à l’après me donnent cependant du baume au cœur. Oui, aussi sombre que soit la période dans laquelle nous nous engageons, nous devons garder l’espoir de traverser des temps meilleurs par la suite. Quoi qu’il en soit, je connais ma jeune Banshee : elle ne voudra pas rester en arrière-garde, quoi qu’on puisse lui en dire. Elle est têtue, c’est bien une Fern. La perspective, plus agréable que mes sujets de préoccupation actuelles, me séduit assez bien :


- Une sortie entre filles, hein ? Pourquoi pas. On pourra y aller toutes les deux, ou bien accompagnées par Ellen ou Adea, ce qui te plaira ! Dans tous les cas, ça me tenterait bien.


Pas que je n’aime pas Corran, mais mon très cher frère aîné a un balai dans le cul à mes yeux, et on a bien du mal parfois à le décoincer afin qu’il puisse se détendre un bon coup. Je sais que ma belle-sœur Ellen arrive – cette sainte – à le détendre et le faire sortir de sa réserve, mais nous n’arrivons pas à sa cheville. Il n’y a guère, je pense, qu’Ellen et leurs filles qui arrivent à le dérider. Pas faute d’essayer, pourtant ! Je ne m’y prends peut-être pas de la bonne manière, vous me direz, mais quand même !

Ah ça, Kayla me connaît bien. On voit que la petite s’est coltinée ma compagnie pendant près d’une demi-décennie en tant que mentor, et une décennie en général. Elle s’est fait une bonne idée de mon caractère. S’il y a bien un point où nous nous rejoignons toutes deux, c’est d’être hyperactives et de ne pas beaucoup aimer les longues réunions. Joignant mes mains, mes avant-bras se posent sur la table.


- Elle était longue, mais il y a eu de l’animation et une invitée surprise. C’est toujours comme ça quand il y a des divergences d’opinion. Au moins, Dalek a eu la bonne idée de penser à faire amener des boissons et de quoi grignoter par K6 et Rex. Disons que ça va bouger. Je laisserai à ton Amirale le soin de l’annoncer. Surtout qu’il reste des éléments à voir de nos différents côtés. Je sais que c’est culotté venant de moi, mais dans tous les cas, tu feras attention à toi, d’accord ? Faire des exploits c’est bien, revenir pour en parler, c’est encore mieux. 


Je me doute qu’Ellen et Corran diront quelque chose d’approchant, d’autant plus en tant que parents de Kayla. Pour ma part, je ne me prononce qu’en tant que tante et ancien mentor, sur ce point. Je n’ai pas envie non plus qu’Adea perde sa grande sœur en raison d’une trop grande intrépidité. Mes propos sont sérieux, mais un brin plus légers sur les derniers mots, essayant d’alléger mon propos.


- Je serais bien restée à bord, mais ma jambe n’est pas encore remise et comme tu sais, je préfère de loin avoir les pieds sur terre ferme que la tête dans les étoiles. Á chacune son terrain de jeu de prédilection, je suppose. On ne peut pas dire que je n’ai pas de quoi me triturer les méninges, avec les projets de vaisseaux-académie et une certaine enquête de longue haleine. - commentais-je avec humour avant d’ajouter avec plus de sérieux - puis bon, faut bien des Corelliens pour parler affaires avec des Corelliens, au risque de se faire bien plumer.


Tant pour le Haut-Conseil Jedi qu’en vue de l’opération majeure à venir sur Ruusaan que l’aide à la résistance sur Kashyyyk, des discussions avec la CorSec et la Guilde Corellienne sont à prévoir et je dois m’y coller, avec l’aide de Dalek que j’ai réquisitionné pour le projet des vaisseaux-académie. Mon temps n’est malheureusement pas infini, loin s’en faut, et je dois déléguer certaines tâches pour ne pas couler.

Et c’est à mon tour de me positionner comme auditrice, une fonction que je sais bien honorer, surtout pour un proche. Un sourire fier s’étire sur mes lèvres à la mention de son nouveau grade de Capitaine d’escadrille. C’est une belle progression, pour une Corellienne aussi jeune. Je m’intéresse au cas qu’elle me présente, à savoir des pirates qu’elle soupçonne avoir été aussi et surtout des mercenaires. Je prête une oreille attentive à son exposé, à ses observations et à ses arguments. Étrange coïncidence, en effet. Ah ça, le respect de la hiérarchie est de rigueur dans les corps armés, mais j’entends sa frustration. J’en ai partagé de similaires au cours de mes expériences, sur divers sujets, côté Jedi et côté armée. Je commente avec un ton chaleureux à son encontre :


- Je ne doute pas que la Force et Corell t’en donneront l’opportunité de l’être. Tu sais, tu n’as pas raté grand-chose sur Kashyyyk. Je veux dire, on avait quand même deux membres du Haut-Conseil sur place, plus trois membres du Conseil Vert : Arsenicia, Dante, Dalek, Layli, Karaar et moi. Faute d’appui militaire suffisant aux forces sur, c’était très mal engagé. Là où tu iras, nous serons mieux préparés. Je ferais tout ce que je peux, à mon niveau, pour que ce soit le cas cette fois-ci.


Je ne serais pas fâchée de parler de sujets plus joyeux, surtout que je ne peux pas compter sur l’appui de l’alcool comme soutien moral en ce moment, ce qui représente une source notoire de frustration et un merveilleux objet de pique cordiale de mon entourage. Il était hors de question qu’on se reprenne une claque similaire à celle reçue sur le monde natal des Wookies, tout comme le fait que nous n’allons pas les abandonner pour autant. Tant que la sécurité de Corellia n’est pas compromise, nous le ferons. Ah, ce n’est pas toujours facile de jouer l’équilibriste entre les deux facettes du Maître des Jedi Verts. Kayla n’ira pas seule, Arsenicia sera sur place elle-aussi. Cela devra me réconforter comme tel. Sa question sur le déroulement de ma grossesse et de notre enfant à venir me redonne du baume au cœur et un sourire joyeux aux lèvres. C’est un sujet plus réjouissant à aborder, je n’hésite pas un instant.


- Écoute, beaucoup mieux que je ne le craignais après ses débuts… disons, en fanfare. Je n’aime pas l’admettre, mais être sur Corellia me rassérène un peu et rend la chose plus simple à endurer. Après avoir traversé Andara et Kashyyyk, elle mérite bien que je la ménage un peu. Je déteste le dire, mais va falloir que je me ménage davantage. Oui, on n’a pas encore fait l’échographie de vérification mais on est sûrs avec Dalek. C’est une fille, on le sent dans la Force. Niveau des prénoms, il y avait du choix, mais on aimait beaucoup « Mara ».  


« Mara » en hommage à « Mara Jade », une illustre Jedi des temps anciens que même des Corelliens respectent beaucoup. Une très belle femme à la vie tumultueuse, au fort caractère, très intelligente, indépendante, sûre d’elle, qui a connu à la fois une République et un Empire, la vie de Sith, Jedi et celle de mercenaire, une personne qui ne se laisse pas être marchée sur les pieds. En voilà une transition toute trouvée pour un autre sujet, presque tout aussi important à mes yeux. Mes yeux bleus-gris se font plus espiègles alors que je conclus mes propos d’un ton voulu léger.


- J’espère que tu as pris une tenue plus habillée dans tes affaires. Á la rigueur, ton uniforme devrait faire l’affaire, mais il va y avoir une célébration à bord, d’ici peu.


Je ne préfère pas penser à ce qu’on conspire me concernant, pour la robe de cérémonie, la parure éventuelle, la mise en beauté en général, les chaussures et tout ce que je honnis d’ordinaire. Je n’ai aucun doute qu’Ellen va être impliquée dans ces préparatifs, et la connaissant, elle va être sérieuse. Je n’en dis pas plus en attendant et dégustant une gorgée de chocolat chaud attiédi, j’observe avec curiosité et attention la réaction de Kayla face à mon annonce inhabituellement succincte.

Je suis ravie de la voir aussi emballée par l’idée de passer une après-midi entre filles. Connaissant sa mère, je pense qu’elle sera contente de pouvoir passer du temps avec sa chère fille aînée, qu’elle voit bien trop peu à son goût. Cela ne fera pas de mal non plus à sa petite sœur de passer du temps avec sa grande sœur, je veillerai à ne pas faire de traitement de faveur envers l’une ou l’autre des frangines pour ne pas susciter quelque jalousie similaire à celle qui avait terni, un temps, mon lien avec mon frère.


- Il ne faudrait quand même pas que cette foutue guerre nous prive du sel de la vie, et cela inclut de pouvoir partager du temps avec ses proches. Je suis ta tante, je serai là pour toi.


Un sourire franchement amusé m’échappe face à sa petite pique concernant ma propre témérité, haussant légèrement un sourcil pour indiquer que je ne suis pas dupe pour autant là-dessus. Nous sommes bâties d’un bois similaire là-dessus, et autant je ne peux pas la renier en tant qu’ancienne élève qu’elle peut difficilement nier que j’ai été son mentor pendant près d’une demi-décennie. Nous étions deux ferventes disciples de la doctrine du « risque calculé », au désespoir ponctuel de nos proches. Je ne lui ai sans doute pas donné un bon exemple à suivre là-dessus, mais je ne regrette pas.


- Et où se situe le projet du vaisseau-académie d’ailleurs ?


Je ne suis guère étonnée qu’elle m’interroge sur la question. Ma petite Banshee était aussi férue de vaisseaux, d’ingénierie et d’aéronautique que ne l’était sa mère ingénieure, qui lui avait transmis le virus. Je ne peux pas dire que je partage cette passion, me considérant piètre pilote en dehors de la conduite de mon propre cargo et étant plutôt frileuse avec tout ce qui a affaire à la technologie qui ne concerne pas les armes traditionnelles. En outre, ce n’est pas une nouveauté que nous nous penchons sur un projet de cet acabit, mon cher et tendre lui-même a, avec mon accord, parlé de la possibilité aux novices et aux maîtres intéressés. Si elle n’était pas déjà engagée dans une flotte et contente de son assignation actuelle, j’aurais pu impliquer ma nièce dans le personnel potentiellement intéressé. Néanmoins, à l’échelle de notre organisation dans sa globalité, la question n’est pas encore tout à fait statuée et reste encore en l’état d’un projet à l’étude. Bien que j’aimerais que les choses aillent un peu plus rapidement, je ne peux pas aller plus vite que la musique et je ne peux pas vraiment me prononcer avant la prochaine réunion du Haut-Conseil. Une chose est sûre, mes récentes fonctions d’ambassade m’apprennent malgré moi l’art difficile de la patience. J’essaye de lui donner de quoi moudre.


- Le sujet a été soulevé lors du 6e conclave, il y a bientôt un an et demi. Après de nombreuses discussions, tout le monde a l’air d’être partant sur le principe, mais il va falloir aussi qu’on s’accorde au niveau du grand conseil. Ça prend beaucoup de temps, surtout que ça ne dépend pas que de nous. Il y a beaucoup d’options niveau ingénierie, mais aussi d’éléments à débroussailler, techniques, organisationnels… comme politiques. Tout ce que je peux te dire, c’est qu’on est en train de constituer un dossier d’étude, de notre côté. Ça a pris du retard, notamment depuis l’assaut qu’on a subi de plein fouet. Je n’ai aucun doute sur le fait que ça reviendra sur la table, cela dit.


Je ne peux pas lui dire quand, ni sous quelle forme. Il y a des détails que je ne peux pas encore lui communiquer, parce qu’ils ne sont pas encore assez certains ou parce que des décisions restent à prendre. C’était le désavantage à devoir travailler de concert avec d’autres composantes, en effet. Personnellement, j’y suis favorable en considérant l’opportunité que pourraient représenter ces vaisseaux-école, pour faire découvrir la partie républicaine de la galaxie à nos jeunes pousses au-delà des merveilles que nos mondes peuvent leur offrir, tout en ayant la possibilité de retourner chez eux. Cela nous offre aussi un moyen d’évacuation complémentaire aux complexes souterrains tapissant notre principal temple et aux enclaves secondaires, si notre mère-patrie venait à être prise pour cible.


Son filet de rire, contagieux, suscite un franc éclat de rire de ma part, ainsi qu’un sourire fier et attendri. La relève est assurée, en effet, si on laisse à cette dernière le temps de s’épanouir un peu plus. Je ne commente pas immédiatement alors que je sirote une autre gorgée de chocolat chaud, sans rien dissimuler de ma bonne humeur. J’espère que ma chère nièce ne se laissera pas être happée dans la faction extrémiste revendiquant notre pure et simple indépendance, mais j’ai confiance en son jugement et en son engagement. Elle a le cœur à la bonne place, je suis bien placée pour le savoir. Mon devoir, et ma fierté, est de l’aiguiller de mon mieux et de la conseiller quand elle sollicitera mon avis.


- Ils ne sont pas nés, ceux qui nous dirons qui nous devons être et ce que nous devons faire. Sans se laisser être effacés, nous n’avons justement rien à perdre à réaffirmer notre présence. En étant présents, en étant représentés, nous affirmons notre identité et notre voix porte également plus loin. C’est en tout cas ce que le Cornu défendait, et que je porterai à mon tour. Les avantages que cette situation nous confère, vu l’état actuel de la galaxie, pèsent plus que les inconvénients. D’un certain point de vue, je trouve qu’on s’en sort avec le beurre, la crème et le sourire de la crémière ! Commentais-je d’abord avec un soupçon de sérieux, qui se meut peu à peu vers la légèreté.


- Et qui va te protéger si je ne suis pas là hein ? Et tu sais, imposer une supériorité aérienne est très important. On empêche l’ennemi à pouvoir utiliser ses propres chasseurs, bombardiers ou transporteurs et le meilleur escadron de toute la flotte pour faire ça, c’est la mienne !


Son aplomb, sa spontanéité et son entrain, qui rayonnent dans la Force de sa présence, me réchauffent le cœur dans une actualité bien sombre, à travers le lien de Force que j’ai laissé se tisser entre nous. Je ne suis pas une grande experte en bataille navale, très loin s’en faut, mais sa force de conviction est assez convaincante, je dois bien l’admettre. Il est sûr que nous avons manqué de moyens militaires sur ce front, et ce n’est pas du fait de l’amiral qui s’est débattu avec ce qu’il avait avec lui, sans que nous ne bénéficions de renforts républicains. J’espère que l’officier se porte bien depuis la grande réunion à distance, ainsi que nos confrères et consœurs qui sont restés sur place pour continuer la lutte au sol. J’écoute avec attention ses explications navales, puis ses interrogations concernant le dernier front.  

Autant de bonnes questions, auxquelles je n’ai, malheureusement, pas d’excellentes réponses pour l’heure. Je n’ai pas de réels contacts dans l’armée de l’air, et les quelques que j’ai attendent tout autant des précisions. Son dernier commentaire, sur la potentielle corruption et l’incompétence de notre régime politique galactique, m’arrache un pauvre sourire compréhensif, mais quelque peu résigné. De récentes mésaventures ne m’avaient que confortée dans un constat similaire, mais je crois que le combat mérite d’être mené et que si ce régime n’est pas parfait, il demeure le meilleur pour l’heure.


- Crois bien que j’ai souvent râlé sur ce point ! Les choses auraient peut-être été différentes si nous avions eu plus de soutien aérien et technologique, mais rien n’est sûr. Tout ce que je sais, c’est que nous étions insuffisamment préparés, malgré les efforts de ceux qui étaient sur place. Ils étaient trop peu nombreux, et les renforts bien trop lents à réagir. J’ai vraiment l’impression parfois que le pouvoir politique est aussi lent qu’un bantha boiteux qui mâchonnerait ses herbes. Et encore, le bantha aurait un instinct de survie, lui ! Néanmoins, il y a des personnes qui comptent sur nous pour les défendre, tout comme il y a des personnes qui se plient en quatre pour les défendre. Nous devons nous focaliser sur celles-là, plutôt que les canards boiteux infiltrés au sein de l’assemblée.  


Et si cela venait à ne pas suffire et que ces naïfs penseurs venaient à être trop corrompus pour être sauvés… je gage que le gouvernement  ferait le choix qui se défendrait alors. Nous serons rappelés alors à nos principes premiers : nos peuples et nos mondes passeraient en premiers. Je ferai ce qu’il faut auquel cas, même si cela me déplairait. Ce ne serait pas la première fois que je me salirais les mains pour protéger ce et surtout ceux qui me sont chers, et ce ne sera sans doute pas la dernière.

Notre discussion évolue vers des sujets plus réjouissants, et qui rendent le sourire à ma chère nièce. Le sourire jusqu’aux oreilles alors que je lui fournis quelques informations sur la petite pousse qui rejoindrait bientôt notre famille, ma chère ancienne élève ne dissimule pas son enthousiasme. Je me doutais que le prénom que nous avons retenu en premier lui plairait, elle connaissait sans doute aussi bien que moi la figure légendaire duquel il provenait… aussi parce que je lui en ai raconté quelques histoires au cours de son apprentissage. Á sa petite pique, j’éclate ouvertement de rire, nullement vexée par cette taquinerie si coutumière dans notre relation, surtout depuis qu’elle a pris son envol.


- Mara ? J’adore le prénom ! Mais ménage toi un peu pour elle. Il serait dommage qu’elle commence à prendre les mauvaises habitudes de sa mère à un si jeune âge !


- T’inquiète, son père veille au grain avec le soin qu’on lui connaît. Je crois que je lui ai donné assez de sueurs froides dernièrement, je suppose que c’est un retour de bâton. Ton père m’a d’ailleurs tympanisée les oreilles, il a un sacré coffre le bougre ! Il ferait un malheur en tant que chanteur de métal, tiens, si on arrivait à le traîner en karaoké ou à un concert. De toute manière, j’ai un congé maternité à prendre donc partant de là… je vais être assignée au temple un bout de temps.


Et elle sera bien loin de nous, à risquer sa vie parmi les étoiles pour défendre le prochain front. Dire que je suis confortable avec cette idée serait mentir. J’ai confiance en elle et en ses capacités, mais en tant qu’ancienne mentor et que tante, la perspective ne m’enchante guère. J’aurais aimé pouvoir me battre à ses côtés, enfin sur la terre ferme, mais je suppose qu’on ne peut pas avoir tout ce que l’on veut. Je connais mon jeune rapace. Ce n’est pas en l’enfermant dans une cage dorée qu’elle sera heureuse, maintenant qu’elle a pris son envol, goûté à la liberté et sillonne les cieux étoilés de ses propres ailes. Je dois lui laisser la possibilité de tracer sa route et de se faire son propre nom dans notre galaxie, comme le Cornu m’en a laissé l’opportunité à son âge, dès lors que j’avais gagné mon indépendance.

Une lueur espiègle scintille dans mon regard gris-bleu alors que mon ancienne apprentie se creuse les méninges à trouver la raison de ma question, fronce ses sourcils avant de me fixer avec un air expectatif, m’exhortant à cracher le morceau. Ah, cela faisait tellement longtemps que je n’avais pas vu cette tête ! Je prends en retour tout mon temps, dégustant quelques gorgées de mon chocolat chaud tout en l’observant avec attention. Après l’avoir assez titillée de la sorte, je finis par daigner lui répondre.


- Quelque chose qu’on n’attendait plus, à force de le faire traîner. Mon cher et tendre et moi allons nous marier, ma chère. Et nous allons faire la cérémonie ici, à bord de ce vaisseau, tant qu’on a encore à peu près tout le monde sous la main et qu’on peut faire venir les autres. Eh oui, non seulement ta vieille tante daigne enfin se marier, mais en plus elle ne va pas le faire sur la mère-patrie ! J’entends déjà les plus coincés du cul de chez nous avoir un malaise cardiaque à cette annonce. En vérité, je me goupillerai pour qu’on le fête aussi sur place, d’une façon ou d’une autre. Et dans tous les cas, tu es invitée, et je compte bien convier tes parents, ton oncle et ta grand-mère sur place.


Ses arrière-grands-parents, par contre, ils peuvent se brosser ! Vu tous les bâtons dans les roues qu’ils m’ont mise durant ma jeunesse, vu comment ils ont emmerdé le petit frère ensuite et vu comment ils désapprouvent mon couple, c’est hors de question ! Je vais me démerder pour contacter le plus jeune frangin pour qu’il ramène ses basques fissa ici, et qu’il embarque notre mère au vol. Il peut bien me faire cela ! Et mon frère aîné étant le chef de famille, je n’ai pas besoin de nos grands-parents, surtout qu’aucun de nous trois n’est vraiment partant pour qu’ils soient là. J’attends après mon annonce, curieuse de connaître sa réaction. Après tout, deux bonnes nouvelles ne sont pas de trop en ce moment.

Ah ça, c’est un euphémisme ! Cela va prendre trois mille plombes à aboutir, aussi déplaisant que cela soit pour moi de le constater. J’ai peur en effet qu’avec la situation actuelle de la République, puisqu’ils doivent aussi être impliqués selon Arsenicia, ils puissent reléguer le projet à des idées moins prioritaires. Je n’attendrais cependant pas que les cousins de Tython et la République se bougent le cul pour ne pas au moins lancer les études de faisabilité et les premières discussions selon les modalités et les pistes qui seront explorées. Je ne crois pas que nous devons interrompre totalement ce projet même si la guerre nous guette. C’est précisément parce que les tensions se réchauffent, les conflits se rapprochent et les menaces s’accroissent qu’il doit voir le jour, afin d’accroître le nombre de cartes dans notre jeu et dans notre manche. Nous ne pouvons pas compter que sur notre mètre-patrie et sur les souterrains du Temple principal de l’Ordre Vert, pas plus que sur nos enclaves disséminées dans le secteur. Les vaisseaux-académies représenteraient un atout précieux, une option très appréciable.

Derrière son rire quant aux malheurs encourus, par quelque puissance qui voudrait soumettre Corellia et les Quatre Frères à sa volonté, je ressens aussi par le Lien de Force qui nous lie le doute qui la ronge quand nous mentionnons l’implication – variable – des pouvoirs décisionnels républicains suite à la perte de Kashyyyk, suite à notre défaite sur le sol natal des Wookies. Je me voyais mal lui mentir, aussi n’ai-je pas essayé d’édulcorer ou d’enjoliver les faits, aussi je l’écoute avec attention quand elle reprit.


- Tu sais, je me demande si les seigneurs Jedi n’ont pas tort. Si la sauvegarde de la République ne viendrait pas d’eux ? De leur capacité à savoir monter des défenses dans des zones clés là où la République est incapable ? Finalement, peu importe si les gens sur le terrain sont prêts à tout pour gagner, s’ils sont compétents ou non… Si la politique n’apporte pas le soutien nécessaire, qu’est-ce que leur sacrifice vaut ? Pourquoi a-t-on perdu tant à Kashyyyk ? Parce que des idiots de bureaucrates étaient trop préoccupés par leurs soirées mondaines plutôt que de se préoccuper des défenses ? Enfin bon, ne laissons pas un revers se transformer un désespoir sans fin prêt à nous engloutir dans ses ténèbres.


Je l’observe avec compréhension de mes yeux gris-bleu, reconnaissant par là une situation que je n’ai que trop bien connu il y a un peu plus de vingt ans, peu avant et peu après la campagne de Lord_Over. J’aimerai bien avoir des réponses toutes fraîches, toutes prêtes à lui apporter, des éléments qui pourraient la rassurer et disperser ses craintes. Je sens, après son soupir, qu’elle est agacée et n’appréciait visiblement pas le doute qu’elle ressentait, et que je comprenais, pour l’avoir déjà ressenti plus jeune. Elle était devenue Chevalier Vert il y a peu, et la galaxie prenait une tournure à laquelle on ne pouvait jamais tout à fait se préparer. Il va falloir que je choisisse avec soin mes mots, pour rester honnête tout en veillant à lui apporter assez de pistes de réponse afin de lui procurer de l’apaisement.


- Je pense que c’est précisément dans ces moments-là que nous devons faire front commun, l’armée républicaine, l’Ordre de Tython, les Seigneurs Jedi, et nous. Nous devons faire preuve d’unité face aux menaces communes. Je ne sais pas si nous verrons « l’Armée de la Lumière » être rétablie après plus de deux mille ans, j’espère que nous n’en arriverons pas là mais si la République tarde encore à réagir… alors nous ferons ce qu’il faudra faire pour nous défendre. Je pense que le seul bon point de Kashyyyk, c’est que cela leur a mis un bon coup de pied au cul. Ils ont intérêt à être au rendez-vous pour Ruusan, ils ne pourront pas dire qu’ils ne l’auront pas vu venir, cette fois.


Je rapproche ma chaise pour me placer à ses côtés et pose délicatement une main sur l’une de ses épaules, tout en me penchant légèrement vers elle pour placer mes yeux bleus-gris dans les siens.


- Dans les moments de doute, souviens-toi de deux choses: « Ihn Corellisi nyeve min bhiq suman ehin nyiad », et « Kas tulisha abia al port » .


« Un Corellien ne tourne jamais le dos à quelqu’un dans le besoin », et « le Chaos ouvre la porte des opportunités ». Deux dictons qui font partie des maximes qui nous guident, nous autres Corelliens et nous autres Jedi Verts. Nous ne baissons jamais les bras face au danger, face au risque, face à l’adversité.


- Nous ferons ce qu’il faut, et nous nous adapterons en conséquence.


J’escompte bien maintenir pour l’heure notre coopération, mais la sauvegarde et la pérennité de Corellia restent nos priorités. La sécurité des Cinq Frères restera notre première priorité. Je ne l’ai pas oublié, et jamais je ne l’oublierai. Sentant qu’elle est déjà assez troublée, je décide de garder le silence sur l’enquête autour des meurtres opérés sur des Jedi, en particulier des Jedi respectés et haut-placés. La discussion heureusement s’allège alors que nous l’orientons sur des sujets bien plus joyeux. Je ris de bon cœur à sa plaisanterie concernant son père, ses capacités à la bonne gueulante bien ressentie. Nous en revenons bien vite aux sujets de mon actuelle grossesse, menant à celui du congé maternité.


- Ce n’est pas bon que je m’éloigne trop longtemps de nos pénates. Je ne tiens pas à retrouver le Temple Vert sans-dessus-dessous, ni à avoir trop de paperasse à parcourir. Au moins je pourrais reprendre un peu plus mon rôle d’instructrice au sabre-laser… et je pourrais me reposer, aussi. Je pense que la petite ne manquera pas de me rappeler à l’ordre si je me surmène trop.  


Je pose une main sur mon ventre pour clarifier clairement ce que j’entends par « la petite ». Cette petite flamme qui grandissait, jour après jour, dans mon ventre, encore entremêlée à ma présence et rappelant pourtant, équitablement, aussi celle de Dalek tout en s’affirmant petit à petit à son tour. Elle était curieuse aussi et, je le pressentais des quelques interactions que j’ai eu avec elle à travers la Force, dotée d’une sensibilité au moins équivalente aux nôtres. Elle est réactive, curieuse, réceptive.


- Dalek restera à mes côtés pendant le congé, en effet. Quand j’ai abordé le sujet avec lui, il m’a dit que ça a été conçu comme tel, ce n’est même pas une question pour lui.  


Protecteur comme il est envers les plus jeunes, et envers moi-même, on pouvait s’attendre à ce qu’il demande en effet à rester à mes côtés pendant cette période assez délicate pour moi, où je suis nettement plus vulnérable. Il tient à m’accompagner, à me soutenir et à se préparer lui-aussi à la parentalité, et ainsi nous limitons les risques que peut occasionner ma foutue Empathie de Force. Je suis ravie devoir un large sourire revenir sur les lèvres de Kayla, et de ressentir sa joie à travers la Force.


- Félicitations ! Je suis contente d’apprendre que vous allez vous marier ! L’avis des vieux cons importe peu ! L’important c’est que vous vous mariez et que vous soyez heureux ! Rolala je vais devoir réfléchir à ma tenue et et…


J’accueille volontiers son étreinte et la lui retourne avec bonne humeur et un bonheur similaire, portant mes yeux bleus-gris dans les siens, ouvertement enchantée par l’annonce et sa propre réaction. Attendant qu’elle reprenne sa place et percevant nettement une curiosité qu’elle ne dissimulait guère, sa question m’attendrit autant qu’elle ne m’amuse, si bien que je ne tarde pas du tout à lui répondre.


- Ni l’un ni l’autre. Il l’a faite… à la sauce Dalek, je dirais ! C’était peu après notre retour de Kashyyyk, sur Corellia, une fois que ma jambe a été assez traitée pour que je puisse crapahuter. Elle aurait pu guérir plus vite, même si ma grossesse retarde le tout, si je m’étais tenue tranquille, mais tu me connais, j’ai du mal avec la notion de repos. Enfin ! Je m’égare. Pour revenir à ta question initiale, on va dire que c’était très original et tout à fait lui. Je ne suis pas près de l’oublier, c’est sûr !


Notre démolisseur préféré y a mis les formes et a su faire preuve de son grand esprit créatif et de son originalité pour me demander ma main. Un sourire à la fois tendre et amusé erre sur mes lèvres à cette pensée. Ça a dû donner des sueurs froides à des passants, mais sa demande a été unique en son genre. Ce qui m’amène, par quelque lien obscur de réflexion, à lui poser à mon tour une question :


- Et toi, alors ? Tu as trouvé un beau pilote, un beau corellien ou un partenaire qui fasse chavirer ton cœur, ne serait-ce qu’une fois ? Tu peux tout raconter à ta tante, ça reste entre nous !  

L’Armée de la Lumière, un passage qui fait à la fois notre fierté, partie intégrante de notre histoire et qui constitue un potentiel lien de friction avec l’Ordre Jedi de Tython et la République Galactique. On en parle systématiquement dans notre cursus, car nous n’avons aucune raison d’avoir honte d’y avoir participé aux côtés des Seigneurs Jedi et des Dames Jedi. Cela nous avait valu un temps l’opprobre et le désaveu de nos cousins Jedi, mais nous l’avons assumé, nous l’assumons et l’assumerons toujours.  


- Mon avis ferait certainement polémique auprès de certains membres du Haut-Conseil, mais je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose. Je ne renierais pas notre passé. Je ne pense pas pour autant qu’il faille restaurer l’Armée de la Lumière en première intention, ce serait faire preuve d’un manque de confiance envers la République et une défiance envers Tython. Ce n’est pas vraiment le genre de message que l’on veut faire passer dans les temps qui courent. Néanmoins, comme je te disais et comme tu me connais, j’adapterai notre position à la réponse Républicaine et du reste de l’Ordre. L’Armée de la Lumière est bon un outil, quand il est utilisé à point nommé, ni trop tôt, ni trop tard. Voyons déjà comment vont se dérouler les discussions avec la République et les Seigneurs et Dames Jedi. J’ose espérer que la République sait que ce n’est pas dans son intérêt de faire sa difficile, si elle tient à sa légitimité et à son unité. Par République, j’entends ses arcanes politiques.


Je suis donc dans une posture plutôt neutre pour le moment, mais qui pourrait basculer dans un sens ou dans un autre selon le débouché des futures discussions. Je pense que mes pairs du Haut Conseil en sont bien conscients, l’Ordre Vert reste par nature une sorte d’électron libre et fidèle à ses valeurs. Nous ne laisserons pas nos peuples être exposés au danger, nous réagirons si eux refusent de le faire.

Je souris avec bienveillance quand je sens sa nervosité lorsqu’elle m’évoque avoir oublié les dictons. J’espère qu’elle a compris le message que j’essayais de lui faire passer, et d’y puiser des réponses.


- Tout ce qui peut diversifier mon arsenal est bon à prendre ! Je suis un aimant à ennuis par nature, ils me trouvent souvent même quand je ne les cherche pas. Mm, je vais voir avec Orfeo, enfin Maître d’Erep, pour connaître son avis. Si on m’écoutait, je refuserai net d’adapter mes exigences. Arsenicia m’a fait une très belle démonstration de Niman dernièrement, quand on s’est affrontées amicalement à domicile, ici. Ça a piqué ma curiosité, elle a su tenir le coup un bon petit moment face à mes assauts alors que je ne la ménageais pas. Tout le monde ne peut pas s’en targuer, les rares élus se comptent sur les doigts d’une main. Du coup, je suis bien tentée d’ajouter le Niman et de fait, l’Ataru, à mon répertoire de combat. Je vais aussi me pencher sur le cas du Katana Jedi. Vu ce qu’on a en face, ce n’est pas mal qu’on soit quelques-uns à savoir s’en servir à peu près décemment.


Á vrai dire, j’ai déjà commencé à m’initier à ces deux formes de mon côté, étant parfaitement consciente que mes pairs risquent d’être très occupés et que nous serons séparés un bon moment. J’ai trouvé quelques confrères et consœurs sur notre sol corellien qui connaissent bien ces formes, assez en tout cas pour m’en conférer une bonne maîtrise de base. Ils ont assez savouré par contre que je vienne demander leur aide, c’est assez rare, et que j’admette que la Force peut être utile au combat. Que ne faut-il pas que je fasse pour le bien et la sécurité de ma mère-patrie, marcher sur ma fierté !


Ah cette espièglerie, elle est bien de famille ! En quelque sorte oui, Kashyyyk a été révélateur. Pas dans le sens du projet de mariage en lui-même, mais de s’y mettre sérieusement. Cela faisait déjà quelques années qu’on caressait de loin la possibilité, tout en étant ralentis dans le projet par nos modes de vie et mon fichu caractère. Disons que se rendre encore plus compte qu’on pouvait casser notre pipe et passer l’arme à gauche du jour au lendemain, ça a le mérite de remettre de l’ordre dans nos priorités.


- Disons que ça nous a mis un bon coup de pied au cul à tous les deux ! Comme quoi, se faire botter les fesses par un cyborg colossal et la malchance n’ont pas eu que du mauvais.


On passera sur les détails, je ne suis jamais friande de parler exhaustivement de mes défaites, je reste quelqu’un de fier et je n’ai pas trop aimé de me faire botter le derrière par un parangon de la technologie cybernétique. Ça froisse vraiment ma dignité, pour la réfractaire comme je le suis. Non vraiment, je ne digère pas très bien mon manque de bol pathologique sur la trajectoire du tir-laser. Ça viendra avec le temps mais que voulez-vous, on ne se refait pas, je peux être mauvaise perdante. Mais assez parlé de moi, revenons plutôt à ma chère nièce dont je viens m’enquérir des nouvelles et que j’interroge, par ma curiosité de tante et d’ancien mentor, sur une éventuelle relation romantique.


- Ta mère commente que tu prends trop exemple sur ta tante, alors tu sais… tu demandes ça à la femme qui à bientôt quarante ans pense enfin à se marier. Puis bon, ce n’est pas comme si tes grands-parents ne se sont jamais mariés. Vaut mieux prendre son temps, expérimenter à sa manière et choisir le bon plutôt que de se presser pour passer la bague au doigt.  


Non, vraiment, il n’y a pas d’empressement à avoir sur ces choses-là. Je suis partisane du « prendre le temps de profiter de la vie, se faire son propre avis et ses expériences, avant de décider ». Tout le monde n’est pas fait pour le mariage précoce, voire pour le mariage tout court, aussi impopulaire que puisse être cette opinion. Á son âge, c’était le cadet de mes soucis, je mordais la vie à pleine dents et je butinais de fleur en fleur avant de trouver celui qui serait mon partenaire de vie. Jaylen a vraiment été cool avec moi là-dessus, contrairement à mes grands-parents d’ailleurs. Puis bon, ces histoires d’horloge biologique – vous n’aurez plus d’enfants après trente-cinq ans – c’est gentil deux minutes. Avec la technologie de maintenant et les caprices de la Force, c’est une notion archaïque. Puis droyt, faut bien profiter de la liberté du célibat pour pouvoir savourer la vie conjugale voire parentale ensuite. Laissez vos grands gamins respirer, crénom de Force ! Ils vous le rendront au centuple par la suite.


Je l’écoute avec attention, et approuve simplement à ses derniers propos. Je l’entends, elle n’a pas à s’en justifier auprès de moi. Je suis consciente des contraintes amenées par son service auprès de la flotte, et plus exactement de la Chasse. Je ne vais pas me vexer parce qu’elle me fait une infidélité avec Arsenicia, je ne suis pas hargneuse et possessive à ce point-là quand même. De toute manière, officiellement, elle n’est plus mon élève, elle a complété sa formation à mes côtés depuis que je lui ai remis le crédit corellien après avoir coupé sa tresse de Padawan Vert suite à sa cérémonie d’élévation. Et il y a des choses que je ne suis pas en capacité de lui apprendre. Ses arguments me semblent solides. Je balaye d’un revers de main ses inquiétudes, que je complète ensuite par un petit commentaire.


- Ne t’en fais pas, je ne vais pas me vexer parce que tu me fais une infidélité avec Nicia ! Plus sérieusement, je suis pragmatique : je pense que nous avons beaucoup à nous apprendre, les cousins et nous. Je ne vois pas le mal d’aller enrichir ses acquis en face, surtout dans les temps actuels où on cherche à travailler ensemble et où on est contraints par les exigences de la guerre. L’Aura de Force pourrait t’être bien utile, je t’y encourage. Je ne suis pas la mieux placée pour t’apprendre l’Ataru vu que je m’y initie aussi, et Arsenicia en est une utilisatrice accomplie, je peux te l’attester.


Il faut admettre ses limites et savoir quand il faut rediriger un élève vers un professeur plus adapté, y compris dans la formation continue d’un Jedi. Des Jedi que je connaisse, Arsenicia est celle qui maîtrise le mieux l’Ataru depuis le décès de ce cher Jaylen, qui aurait pu lui donner du grain à moudre. Il y a bien Karaar Flinn, l’un de nos Maîtres Verts représentants de l’ethnie des Iridoniens, mais il s’est porté volontaire pour retourner sur le front de Kashyyyk et donc ne pas être disponible pour enseigner. Et je suis exigeante sur la qualité du professeur à qui je vais confier ma nièce et mon ancienne Padawan Vert, il y va de ma fierté de mentor, de tante et d’épéiste émérite de l’Ordre des Jedi Verts.


- Enfin tu vois la lumière ! Par Corell, depuis le temps que je t’y encourage, je n’y croyais plus. Je ne rêve pas pourtant… comme quoi, tout arrive. Oui, c’est une très bonne idée de te spécialiser aussi dans une autre spécialité d’armes, tu seras bien plus versatile ainsi. C’est pourquoi je continue de bosser, en dehors du double-lame, ma maîtrise du sabre-laser simple également.


Ma joie n’est pas feinte, c’est une lutte de longue haleine. Je n’ai pas trouvé beaucoup d’élèves intéressés par la maîtrise du double-lame, c’est beaucoup trop connoté encore, et plus encore sur Tython, aux utilisateurs du côté obscur tels que Darth Maul. FoutreForce, on a pourtant eu aussi des pointures sur la question avec nulles autres que les légendaires Bastila Shan et Satele Shan ! Nan, beaucoup de Jedi se ruent sur le sabre-laser simple en maîtrise principale de spécialité, ça m’attriste. Imaginez ma peine de penser que j’ai peine à trouver un compatriote proche de mon expertise sur ce type d’arme, à l’instar de ce cher Dante. J’ai échoué sur ce point à la transmettre à mes deux anciens élèves, que ce soit Dalek ou bien Kayla. Bon d’accord j’arrête, Kayla a au moins accepté de s’y initier et songe à la renforcer. Cela sonnerait-il enfin pour moi le tintinnabulement de l’arrivée d’une héritière ? Je ne peux pas m’empêcher de ressentir un sentiment de fierté et de grand contentement.


- Évidemment ! Je suis toujours disponible pour toi, et puis j’aurais été piquée si tu ne me l’avais pas proposé. On parle de mes deux terrains de prédilection, et tu as l’immense chance d’avoir l’une des expertes de l’Ordre Vert et de l’Ordre de Tython, façon deux en un ! Je t’ai dit par le passé de ne pas hésiter à venir me voir et que je serais ravie de te partager ce que je sais, même après que tu sois devenue Chevalier Vert et que j’aurais des cheveux blancs et des rides. C’est la moindre des choses si tu veux un jour parvenir à me ravir mon titre de meilleure duelliste de l’Ordre Vert.


J’adore enseigner, je m’en rends compte avec le temps qui s’écoule. J’ai envie de former notre avenir et notre relève, justement encore plus dans les temps sombres que nous traversons. Je veux qu’ils soient prêts et armés pour survivre dans ces nuées, pour défendre ce qui nous est cher. Je ne lui dirai jamais à voix haute derrière mes airs bravaches, mais j’attends avec impatience ce jour où elle viendra me défier, où elle viendra m’éprouver sur mon talent et, je l’espère, sublimer l’art que je lui ai transmis, surpasser sa formatrice. Je crois qu’en tant que mentor, je n’aurai de plus grande fierté, en dehors de celle de la voir heureuse, épanouie dans sa vie, cheminant avec aplomb sa propre voie.

J’aurais très certainement eu une réponse plus tranchée, du temps que je n’étais pas encore à la tête de l’Ordre Vert, mais j’ai désormais un rôle de représentativité et de responsabilité auprès des Jedi Corelliens. C’est à mon tour maintenant de tempérer, quand il le faut, les ardeurs des plus jeunes et de rassurer de mon mieux leurs inquiétudes. Cela ne veut pour autant pas dire qu’il faut s’attendre à ce que j’obéisse aveuglément aux consignes de Tython. Pour le moment, la direction choisie par les cousins Jedi ne va pas à l’encontre des intérêts des peuples corelliens, aussi n’ai-je pas de raison de m’y opposer sans solide raison. En revanche, je compte bien garder un œil vigilant sur l’évolution de la situation. Comme le dit bien ma chère nièce, nous nous adapterons à la situation qui se présentera.

Et c’est aussi sans doute cela, ou en tout cas cela en fait partie, la raison pour laquelle certains de mes pairs estiment que l’on ne peut pas pleinement nous faire confiance. Parce que plutôt que d’adhérer sans questionner aux grandes philosophies des cousins de Tython, nous gardons notre identité corellienne bien vivante dans nos cœurs et nous ne nous sommes jamais cachés de la préséance que nous donnerons, si le dilemme venait à se présenter, à la sécurité des peuples des Cinq Frères. Nous sommes fiers de nos origines, fiers de notre identité, fiers de nos traditions, et nous n’allons pas laisser quelqu’un nous dicter ce que nous devons faire. Nous travaillons ensemble, mais ne nous soumettons pas. Un peu comme les Seigneurs et Dames Jedi, en quelque sorte. Nous sommes des collaborateurs.

Je vois très bien de qui elle parle. Le jeune Fenn, proche de son âge, a longtemps été – et demeure encore – un rival et un ami pour elle. Je me rappelle bien de la façon dont ils tendent à se défier dans le maniement du sabre-laser, vu que j’ai supervisé plusieurs leçons dans ces arts. Ah, que les jeunes grandissent vite ! Il me semble que c’était encore hier, parfois, qu’ils étaient encore de jeunes pousses.


- Je ne vais pas mentir, j’avais aussi mes idées préconçues concernant le Niman. C’est malheureusement un discours qu’on entend trop souvent, comme quoi c’est une forme réservée aux non-combattants, aux pacifistes ou aux seuls érudits. Des collègues verts ont fini par tordre le cou à mes idées reçues, mais je ne me suis vraiment intéressée à son usage que récemment. Je crois qu’il fallait vraiment que je me farcisse un maître d’armes ayant magnifié le Niman pour briser mes réticences. Comme quoi, il n’est jamais trop tard pour apprendre de ses erreurs et y remédier.


J’acquiesce, elle a bien compris pourquoi le Niman m’intéressait. Aussi efficaces et solides que soient mon Djem So et mon Soresu, ils n’en restent pas moins assez prévisibles pour un maître d’armes à l’œil aguerri, qui connaitrait suffisamment les postures d’assauts, les techniques propres à la forme et le rythme de ses enchaînements. Malgré le petit degré de surprise que peut procurer mon usage peu courant encore du double-lame chez les Jedi, cela ne suffira pas. Le Vaapad est un élément de surprise, certes, mais très épuisant et m’exposant beaucoup en terme de défense. Le Niman, ainsi, et les bases d’Ataru que son apprentissage va m’exiger, vont m’apporter plus d’imprévisibilité en croisant le fer.

Le Katana Jedi… encore une fois, une découverte tardive – concrète en tout cas – et une nouvelle lacune potentielle dont je n’ai pris pleinement conscience que ces dernières années, à agir sur le terrain. Voir Dante s’en servir très efficacement contre des émanations du côté sombre de la Force m’a mise face à mes propres limites sur la question. Je connais des pouvoirs de Force désormais qui peuvent m’aider, mais je gage qu’avoir dans nos rangs une épée supplémentaire capable de faire face ne serait pas de trop dans les temps qui courent. Quelle que soit la direction que suivra l’Ordre des Jedi Verts, je dois me renforcer et accroître autant mes compétences que mes connaissances pour veiller sur les miens et sur la petite vie qui va bientôt nous rejoindre. Les Sith ne nous attendront pas et se renforceront.


- Mm, en effet. Ce n’est pas une arme que je pourrais toujours porter avec moi, mais disons qu’elle ne sera pas loin de moi et que je l’embarquerai sur des missions ou des situations qui se profilent comme délicates. Dans tous les cas, va falloir que je forge ladite arme et que je me familiarise assez avec avant toute chose. Et je sais déjà à qui je vais demander s’il peut me former.


Pour une fois, ce n’est pas un Corellien ou une Corellienne. C’est l’un de mes pairs au Haut-Conseil Jedi, et l’un des quelques cousins de Tython que j’apprécie et avec qui j’ai déjà collaboré en mission. Parce qu’il y a eu rencontre imprévue en terrain hostile et collusion d’intérêts, de facto, mais quand même, ça s’est fini en mission en binôme au final, aussi officieuse qu’elle ait été et qu’elle soit demeurée. Une mission personnelle dans les deux cas, douloureuse aussi, mais qui fait partie de mes responsabilités. Je ne compte pas m’étendre là-dessus, c’est un sujet encore délicat de nos jours entre son père et moi. Et ça a été une expérience extrêmement douloureuse en ce qui me concerne, à cause de ma foutue Empathie de Force. Je n’aime pas gratter des plaies à peine pansées et cicatrisées, encore trop fraîches.


- Les cyborgs peuvent être vaincus, mais il ne faut pas les prendre à la légère. Je ne suis pas une experte là-dessus, loin s’en faut, mais de ce que j’ai entendu et constaté, ils ont différentes classes et différentes augmentations à prendre en considération. Comme tu ne vas pas avoir la même stratégie face à un assassin, à un soldat ou à un artilleur lourd, tu vas devoir adapter ton approche au type de cyborg que tu as en face. La complexité s’accroît plus encore, surtout avec des mercenaires de guerre ou des vétérans, par la qualité de leur équipement et l’imprévisibilité de leurs implants. Ce sont des ennemis qui me donnent du fil à retordre, surtout quand ils ne sont pas seuls comme c’est souvent le cas sur le champ de bataille. Je te dirais que c’est un problème à aborder en équipe, et qu’idéalement il faut confronter de concert avec l’infanterie et l’artillerie, voire un autre cyborg. Notre propre versatilité et imprévisibilité nous aident, bien sûr, mais les vétérans portent souvent de l’équipement qui résiste au sabre-laser, en armure et en arme. Tu ne pourras pas compter que sur ton arme, tout comme des cyborgs sont équipés d’un élément qui empêche la Force d’agir sur eux. Il va falloir que tu fasses face à leur force de frappe, mais aussi que tu sois imprévisible et rusée. Que tu observes la manière dont ils se battent, l’équipement qu’ils utilisent, pour adapter ton approche et trouver ton angle d’ouverture, ta faille. Les talents comme ceux de Dalek peuvent aider, tout comme certains pouvoirs de Force à l’instar de la Ballistékinésie, que j’apprends auprès d’Arsenicia. Les approches non-conventionnelles ont plus de chance de succès, ainsi qu’une solide tactique d’équipe. Je pense que recourir à l’environnement peut être une bonne approche. Je l’ai tentée sur Kashyyyk, même si cela n’a pas eu autant de succès que je l’escomptais. Il y a toujours des inconnues non prévisibles. Une bonne grenade EMP ou à ion peut être efficace aussi, mais il ne faut pas se reposer que sur ça. En somme, utilise tout ce que tu as dans ta manche et adapte-toi sur le terrain, adapte tes outils. Et j’ajouterai aussi de ne pas hésiter à prendre conseil auprès des soldats, ils y font face souvent et leur retour d’expérience est toujours bon à considérer. On peut travailler sur nos failles ainsi.


Je ris de bon cœur quand Kayla affirme qu’Ellen va me maudire pour avoir tant influencée sa fille, et que les espoirs de la première que ma nièce se range un jour et fonde sa propre famille risquent d’attendre un peu. Je n’ai pas encore eu d’enfant – même si ça va être bientôt le cas – mais quelque part, j’ai déjà transmis une partie de mon héritage à travers les Padawans que j’ai pris sous mon aile et les élèves que j’ai formé au sein du Temple Vert. Je ne prends pas la peine de masquer mon affection : ce n’est pas vraiment un secret d’état que j’ai aussi considéré Kayla comme une fille spirituelle, même si j’ai tâché de lui laisser assez d’espace pour qu’elle puisse se construire elle-même. Les années où j’ai été absente en raison de ma mission sur Dromund Kaas, on est parvenues à les rattraper, à ma joie.  


- J’espère bien, ne serait-ce que pour te présenter ta cousine quand elle sera parmi nous. Vu les temps qui courent, ce n’est pas un mal de prendre un peu de temps près des siens.


Un éclat de rire m’échappe en imaginant ma nièce et ancienne élève bondir dans les quatre coins de la pièce ou du terrain d’entraînement. Ah, cela ne va pas arranger le côté pile électrique de notre chère Banshee, c’est sûr ! Peu inquiète, je me contente de lui répondre avec un sourire confiant.


- Je ne doute pas des compétences de Maître Ombrelune en la matière.


Je note bien et son sourire et son amusement que je perçois à travers la Force, qui ne font que susciter un sourire franchement amusé de ma part. Je sais qu’elle n’a pas baissé les bras et compte bien me surpasser sur l’art de la lame, un jour, mais je ne compte pas pour autant lui faciliter la tâche. Si elle escompte me détrôner un jour, il va falloir que, comme pour tout candidat, qu’elle soit à la hauteur. Et accroître ses compétences en double-lame lui servira non seulement à perfectionner son maniement de cette arme mais aussi à mieux comprendre mon propre usage. Cela ne pourra que lui servir.


- Tu me dis et je m’organise. On pourra se faire quelques entraînements d’échauffement ici si tu veux, mais je pense qu’on sera mieux sur Corellia ou Tython pour pratiquer. Préviens-moi de tes prochains passages, veux-tu ? Je nous calerai des temps pour s’exercer.  


Un large sourire se glisse sur mes lèvres en retour. Comme je disais, je suis toujours ravie de passer du temps avec ma nièce et mes anciens élèves, et je prends vraiment goût dans le rôle de formatrice. Ça compensera sans doute mon impatience de retourner sur le terrain, chose qui va être retardée d’au moins quelques mois voire d’une année selon comment cela va se passer. Je m’éloigne des combats et du terrain, mais je me rapproche de mon Temple, de mes Jedi Verts et de ma famille.


- En effet, il faut que je vois où est-ce que tu en es depuis notre dernier entraînement. Je pourrais ajuster comme cela le programme de formation que je vais te concocter. Tu verras que je ne suis pas restée les bras croisés non plus, même si je me coltine plus de réunions qu’avant. Je ne pourrais pas me donner à pleine puissance, mais je peux encore me battre tu sais.


Et c’est extrêmement motivant pour moi, ça me pousse plus encore à ne pas me reposer sur mes lauriers et à progresser à mon tour. Il va falloir que je continue de relever la barre, après tout !