Come As You Are [Zarseen Raynar] [Terminé]

C'était un soir comme tous les soirs, du moins, il avait commencé ainsi. Après avoir achevé la maintenance d'un cargo pour un vieil ami, épuisé par la journée bien remplie, je décidai qu'il était temps de me ressourcer. Mon choix naturel m'orienta vers le Nebula-Bar, le bar ainsi nommé qui se trouvait à proximité de mon hangar. C'était devenu ma seconde demeure depuis mon arrivée sur Nar Shaddaa. Avant de quitter mon bastion, je pris le temps de me rafraîchir. Même si je suis méticuleux, les travaux mécaniques peuvent laisser des traces. Une fois la toilette terminée, les cheveux soigneusement recoiffés et revêtu de ce qui semblait être ma seule tenue, je quittai mon hangar en direction de mon repaire de tous les soirs.

Les bruits de la vie nocturne urbaine résonnaient dans les ruelles tandis que je me dirigeais vers l'entrée du Nebula. Les lumières tamisées et la musique qui s'échappait de l'intérieur créaient une ambiance familière et réconfortante. Les portes s'ouvrirent avec le murmure distinctif, révélant l'intérieur bien trop familier. Le Nebula se révélait comme un joyau modeste au cœur du quartier. À l'ouverture, des lourds rideaux, les visiteurs découvraient une pièce rectangulaire, résolument unique dans son humilité. L'atmosphère tamisée provenait d'un éclairage subtil qui mettait en valeur des vestiges de l'ère des Hutts, créant un contraste intéressant avec des souvenirs collectés au fil des voyages du propriétaire à travers la galaxie. Les murs, bien que modestement décorés, évoquaient la passionnante histoire de la planète. Les aquariums exotiques abritaient des créatures visiblement dangereuses. Le bar, centré dans la pièce, proposait des breuvages de tous genres, des plus traditionnels, aux saveurs exotiques. Des bouteilles témoignaient des voyages passés du propriétaire, chacune portant une histoire à partager pour les plus curieux.

En tant qu'habitué, je pris le temps d'échanger avec la propriétaire avant de choisir une bouteille, un verre, et de me diriger vers ma table de prédilection. La table ronde, soigneusement positionnée au fond de l'établissement par rapport à l'entrée, était adossée au mur, entourée par quatre chaises relativement confortables. En prenant place contre le mur, j'obtenais une vue panoramique sur l'ensemble du bar, sa population hétéroclite, ainsi que sur tout ce qui pouvait s'y dérouler. Il m'arrivait parfois de m'installer directement au comptoir, surtout les soirs où je cherchais à attirer la clientèle et à recueillir des informations. Être au cœur de l'action était souvent plus efficace que de se dissimuler dans l'ombre d'un coin.

Les pieds négligemment posés sur la table, la jambe gauche croisée sur la droite, je détachai le holster de ma ceinture et le déposai sur la table avec mon blaster, la sûreté activée pour plus de prudence. Même dans un coin aussi amical que celui-ci, la règle d'or de la ville était de toujours avoir son arme à portée de main. Je sortis mon datapad de l'intérieur de ma veste et l'allumai pour commencer le processus de finalisation du check-up de ma journée de travail. L'atmosphère dense était propice à la concentration, la lueur des néons et le bourdonnement des conversations en arrière-plan se mêlaient à la musique d'ambiance, créant une toile sonore qui accompagnait mes efforts de travail. Mon regard se perdait par moments dans le va-et-vient des clients, mais le datapad restait l'objet principal de mon attention. Bien sûr, je n'oubliai pas de savourer ma boisson, un alcool relativement fort.

Une heure s'était écoulée depuis mon arrivée au Nebula-Bar. La soirée se déroulait sans accroc. Ma présence faisait souvent office de vigile, assis dans un coin à observer patiemment la clientèle vaquer à leurs discussions. Mes notes sur la journée étaient déjà finalisées depuis un moment, et je profitais de l'ambiance pour déguster mon breuvage, parcourir sans but les dernières actualités sur mon pad, et de temps à autre, jeter un œil sur les écrans du Nebula qui diffusaient en direct les jeux d'argent que tout le monde semblait adorer.

C'est alors qu'une tête familière fit son apparition à l'entrée. Une silhouette imposante que tout Apexien reconnaîtrait sans hésiter. La grande Patronne, Zarseen en personne, pénétra dans le Nebula. Même depuis l'autre bout de la pièce, la Boss était aisément identifiable, non pas grâce à mes implants oculaires, il faut le reconnaître. Sa présence, ici, me semblait particulièrement étrange. Je la savais proche de son peuple, beaucoup l'appréciaient pour cela, mais de là à tomber par hasard sur une membre du Triumvirat !

Sans lever la tête du datapad, l'air naturellement sérieux et calme, mes yeux suivaient la Boss. Mon visage ne montrait guère de réaction apparente, mais une lueur de curiosité animait mes yeux tandis que Zarseen avançait dans le Nebula. Les clients de l'établissement semblaient réagir de manière diverse à la présence de la Patronne. Certains échangeaient des murmures, d'autres détournaient le regard, et les derniers la saluaient, conscients du respect dû à la figure éminente qu'était Zarseen. L'atmosphère du bar vibrait d'une énergie particulière. Tandis que je me redressais légèrement sur ma chaise, je décidai de briser l'inertie en agissant. Après avoir observé ma supérieure, je tendis le bras gauche en l'air et tournai la tête vers le comptoir.


Mon geste, bien que subtil, était un signe reconnu par la propriétaire du lieu. C'était un indice d'un client habitué, capable d'agir ainsi sans créer de tension avec la gérante du lieu. Avec Zarseen toujours à l'horizon, je me tournai vers cette personne qui était devenue une amie au fil des années. D'une voix calme mais audible dans l'ambiance du bar, je m'adressai à elle.


Un sourire complice accompagna mon geste, une expression silencieuse qui voulait dire "Je prends les choses en main, tout ira bien." Il faut admettre que c'était probablement la première fois qu'une personne d'une telle importance franchissait le seuil de son humble établissement. Nous étions davantage habitués aux individus louches du coin, pas à ce genre de visite.

Je posai délicatement mon pad sur la table, à côté du blaster, puis pris en main mon verre, à moitié plein. Le levant haut en direction de Zarseen pour la saluer, je bus l'intégralité de son contenu après ce geste. Faisant brièvement une grimace, la boisson n'étant pas destinée à être bue de la sorte, je reposai délicatement le verre sur la table avant de saisir la bouteille à côté pour remplir ce que je venais de vider. Parallèlement, sans détourner mon regard de mes mains, je m'adressai directement, pour la première fois, à Raynar.


Face à la situation, je discernais seulement deux scénarios possibles. Soit je me retrouvais remis à ma place par une Géante Mandallienne, et je devais m'attendre à quelques jours difficiles. Soit ma patronne se montrait d'humeur excentrique, et mon coup du destin captait un peu de son attention. Évidemment, je penchais pour le scénario du coup du destin. Zarseen éveillait ma curiosité, et une intuition intérieure me suggérait qu'à ce moment précis, quelques années de ma vie pouvaient prendre une certaine tournure.

Zarseen répondit à mon appel en se dirigeant vers ma table. Je connaissais sa stature imposante, mais je n'avais pas anticipé à quel point elle me surplomberait même en étant assise. L'ensemble de la salle était captivé par la situation, et il était facile de deviner que les premiers chuchotements et commérages étaient déjà en cours. Heureusement, pour la suite de mes jours, la grande cheffe prit place, visiblement intriguée par ma personne, et exposa la raison de sa présence. Il était évident qu'elle était bien informée à mon sujet, connaissant suffisamment mes habitudes, renforçant ainsi l'idée que personne ne souhaitait ma disparition, sinon cela aurait déjà été le cas. J'aperçus mon amie approcher de la table avec la boisson réclamée par Zarseen. Sans bouger la tête, je suivis du regard la propriétaire servir la patronne. D'un sourire, je la remerciai, suggérant poliment que la suite de la conversation attendait qu'elle s'éloigne pour nous laisser tranquilles. Elle était habituée à ce genre de situations, du temps où je passais en revue les nouveaux contrats à cette même table. Tout en continuant de fixer la barwoman, observant son retrait progressif, je répondis à Raynar.


Le coup du destin, une opportunité qui s'offrait à moi, du moins en apparence. Ce n’est clairement pas tous les jours que l’on peut échanger avec sa grande patronne. En temps normal, n’importe qui prendrait des pincettes, cherchant à faire bonne impression. Cependant, avec Raynar, j’avais le sentiment de pouvoir m'exprimer librement. Peut-être serai-je un peu prolixe, mais je savais qu'elle aurait une compréhension approfondie de mes pensées. Je me redressai cette fois-ci correctement, le verre posé à ma gauche, les avant-bras en équilibre sur le bord de la table et les mains l’une dans l’autre. Une fois certain que personne n'était à portée d'oreille, je jetai un regard rapide autour du bar, assurant ainsi que tout ce qui serait désormais dit resterait privé. Je commençai alors à partager mes pensées, fixant désormais les yeux de ma supérieure.


Je pris quelques instants pour dégager ma main gauche de la droite et la positionner au-dessus de mon blaster. L'index pointait vers l'arme, le tout sans détourner le regard de Zarseen.


Mon monologue se coupa lorsque, au loin sur le comptoir, je vis un ensemble d’apéritifs soigneusement préparés. J'anticipai que la table à servir était la nôtre. Prenant conscience que j'avais le temps de poursuivre avant que Zarseen puisse réagir à la vague suggestion de mon passé de tueur, je repris en posant le bras sur la table, près de mon verre. Mon regard se baladait entre la Boss et le décompte que je faisais, conscient du temps qui nous restait avant que notre échange ne devienne plus privé, poursuivant ma tirade.


Je fis une pause opportune, détournant mon regard vers l'arrivée du service. Un échange de regards avec Raynar traduisait clairement mon désir de préserver notre discussion de toute oreille indiscrète. Peu m'importait si la Patronne y prêtait attention ou non, mais ma vie passée et peut-être future ne devait en aucun cas interférer avec la sûreté des lieux. Ma présence ici depuis toutes ces années constituait déjà un acte risqué pour la propriétaire du Nebula. De nouveau, mes yeux fixèrent intensément mon amie, un sourire exprimant plus que des mots, signifiant clairement que je désirais désormais la tranquillité pour la suite de notre conversation. Assuré qu'aucune oreille indiscrète ne pouvait nous écouter, je repris en fixant de nouveau Raynar.


Ma confiance dans mes paroles et la situation grandissait progressivement, se reflétant dans ma posture qui se détendait peu à peu. La salle retrouvait peu à peu son ambiance d'avant l'arrivée de la Géante, camouflant ainsi davantage notre conversation. Cela tombait à pic pour la suite de mes idées.


Je fis une pause brève, plongé dans la réflexion que je souhaitais partager. J'aspirais à clore mon exposé en délivrant un message puissant. Conscient que je devais encore faire mes preuves, j'étais convaincu de ma capacité à y parvenir. Il était temps que le sang versé au fil de mes années et les compétences acquises trouvent enfin une utilité concrète. En baissant mon regard vers l'une de mes mains cybernétiques, douloureux rappels du passé, les mots appropriés me vinrent enfin à l'esprit. Je relevai une dernière fois les yeux vers ma cheffe et conclus mon discours.


Après avoir exprimé ce que j'avais à dire, je me rapprochai de la table, attrapant mon verre au passage. Pour la seconde fois, je saluai ma cheffe avant de déguster une nouvelle gorgée de mon breuvage, déterminé à savourer chaque instant que cet échange pouvait m’offrir.

La Boss prit son temps avant de me répondre, instaurant un silence interminable au cours duquel je demeurai impassible, la fixant pour anticiper son jugement. Il semblait qu'elle testait ma réaction face à une situation où je n'avais pas un contrôle total, tirant profit de ce qui lui avait été servi auparavant. J'avais le sentiment que la Patronne trouvait un certain plaisir dans cette situation. Pour briser mon immobilité, je me laissai finalement tenter par les apéritifs tout en observant Zarseen boire son verre. Je ne pouvais que supposer ce qui se passait dans sa tête, sachant que j'avais dévoilé quelque chose que j'avais mûrement réfléchi. Cependant, avec un verre à la main, il était évident que l'impact de mes paroles perdait en crédibilité.

Sa réponse arriva, parsemée de remarques percutantes. Je ne pouvais qu'écouter sans froncer les sourcils, chaque mot semblant être plus ciblé que le précédent. On percevait l'habitude des conversations d'un monde dépassant le mien. Bien que j'aie particulièrement envie de réagir à son positionnement concernant la prise d'armes massive qu’elle pouvait appeler, la Géante avait respecté mon temps de parole, et je me devais de faire de même. Pour autant, son positionnement, cette transparence vis-à-vis de ce qu'elle attendait de son peuple, ne pouvait qu'accentuer mon respect à son égard. Elle n'était pas simplement une grande Cheffe, mais plutôt une leader. Car être un chef, c'est occuper un statut social, hiérarchique, une position de pouvoir. En revanche, être un leader, c'est avoir la capacité de diriger tout en se tenant devant sa troupe, prêt à encaisser les coups en premier. C'est du moins ma définition, et Raynar l'incarnait pleinement. Bien que je reçoive quelques piques soigneusement dissimulées dans ses propos, cela n'avait guère d'importance, après tout, c'était un débat annexe sur lequel je n'avais aucune légitimité à répondre, simplement le droit d'avoir un avis. Au moins, nous partagions l’honnêteté.

Le prix pour gagner un peu de sa considération fut enfin clairement énoncé. Raynar allait me tester par une extraction en terre hostile, une histoire mêlant une Hapienne et une Sith. Contrairement aux récits de vengeance ou de jalousie entendus à d'autres occasions, il s'agissait d'un vol. L'esclavage étant monnaie courante et banale chez nous, cette utilisatrice de la Force avait pris un bien appartenant à Raynar et cette dernière ne pouvait faire tomber le déluge de feu sans déclencher une guerre.

J'admets que l'espace du Consortium n'a jamais été mon terrain de jeu favori, et bien sûr, le hasard faisant bien les choses, mon ticket d'entrée dans les premiers paliers de l'estime de la Patronne se trouvait là. Tuer une sensitive était déjà une tâche ardue, mais la faire sortir de son territoire vivante et sans attirer l’attention l'était d’autant plus complexe. Sur le moment, je ne savais pas du tout comment j’allais procéder. D'une part, mon interlocutrice était restée vague sur le sujet, et d'autre part, je devais rarement gérer de tels personnages, surtout vivants. Mais je ne devais pas gâcher la seule opportunité que me donnait Zarseen, encore moins tarder à donner une réponse.

Sans rentrer dans son jeu consistant à laisser le silence s'imposer, ayant déjà pris trop de son temps avec ma précédente intervention, je pris à mon tour la parole sur un ton calme et déterminé.


Cela ressemblait déjà à une mission suicide, en parfait accord avec l'audace de mon discours. Il ne me restait plus qu'à en apprendre davantage pour confirmer que j'entamais un nouveau chapitre de mon histoire, peut-être le dernier. En fonction des éléments que Zarseen me fournirait, je pourrais éclaircir mes perspectives et options. J'avais déjà conscience que je devrais acquérir un vaisseau rapide, ou du moins suffisamment modifiable pour le devenir, et la furtivité était un paramètre majeur à prendre en compte. Mais, toutes ces considérations devraient être réfléchies plus tard.

La Patronne s'était montrée d'une générosité surprenante en fournissant des informations bien au-delà de mes attentes. Je m'attendais à une simple désignation de cibles, mais elle avait pris le temps de partager des détails pratiques, dénués de tout superflu. Ces informations avaient esquissé le portrait de mes futures proies, soulignant un trait d'arrogance, que je trouvai commun parmi les membres du Consortium. Leur penchant pour l'opulence, préférant exhiber ostensiblement leurs titres plutôt que de maintenir leur réelle puissance, offrait une perspective intéressante de leur psyché que je prévoyais d'exploiter à mon avantage.

Il était crucial de ne pas sous-estimer le fait qu'ils disposaient d'un contingent, peut-être limité, mais loyalement dévoué. La création d'une stratégie pour neutraliser cette force sans avoir une équipe de choc ou être une armée d'un seul homme nécessitait une réflexion approfondie. Les groupes de fidèles pouvaient souvent se révéler plus redoutables que des sensitifs, et leur élimination sans attirer l'attention demandait une planification minutieuse.

Le choix du Geheb du Consortium pour mener à bien cette opération semblait évident. Doté de son système de camouflage, ce vaisseau offrait la possibilité d'une entrée et d'une sortie discrètes, du moins en théorie. Une alternative envisageable était de trouver un moyen d'accéder au territoire ennemi sans dépendre d'une dotation matérielle, prouvant ainsi ma capacité à agir en solitaire. Infiltrer leur repaire sans éveiller le moindre soupçon, peut-être en adoptant l'apparence de l'un d'entre eux, semblait être une option viable mais risquée. Cependant, je doutais d'avoir le profil adéquat pour passer inaperçu. Malgré cela, cette possibilité demeurait une piste envisageable, car à cet instant, toutes les options semblaient encore ouvertes dans mon esprit.

L'examen approfondi des plans du vaisseau où se déroulerait l'opération de capture était impératif. Les vaisseaux distinctifs du Consortium offraient potentiellement des cibles vulnérables, avec des failles à exploiter à chaque étape. Cette analyse détaillée contribuerait à l'élaboration d'une stratégie globale, renforçant ainsi mes chances de succès.

Dans l'ensemble, bien que la mission restait un défi de taille, elle semblait désormais moins suicidaire qu'à son annonce initiale. Tracer les grandes lignes du plan, concevoir l'infiltration, assurer une sortie sécurisée et maîtriser l'improvisation étaient autant de facettes cruciales à prendre en compte. Mon expérience passée constituait indéniablement un atout, mais je demeurais conscient des éventuelles rouilles qui avaient pu s'accumuler pendant ma période d'inactivité. La prudence était de mise, car l'écart potentiel entre mes compétences actuelles et celles que je détenais autrefois ne devait pas être sous-estimé. La mission serait un test approfondi de mes capacités, et ma détermination restait inébranlable, prêt à honorer la confiance que la Patronne avait placée en moi.


Il me restait à établir les conditions minimales dans lesquelles Raynar souhaitait récupérer les cibles. J'avais déjà connaissance de la nécessité qu'ils soient en vie, au moins respirants, mais l'endroit précis où je devais les ramener demeurait encore inconnu. Cette information cruciale jouerait un rôle dans la définition de ma stratégie d'exfiltration, qui se devait de demeurer discrète.

Zarseen est assurément une femme aux multiples facettes, riche en surprises. Alors que je m'apprêtais à partir, elle lança un dernier défi, sur le point de se dérouler immédiatement. Intrigué et curieux, j'attendais ce nouveau défi en me demandant dans quelle situation particulière je me trouverais, surtout dans un lieu que je m'étais juré de préserver.

La vision de la Manticore suscita en moi une certaine nervosité, je l'admets volontiers. C'était la première fois que j'en rencontrais une, et ces créatures avaient une réputation redoutable, avec leur silhouette imposante. Un réflexe s'empara de moi presque instinctivement : ma main gauche se posa sur la table, à proximité de mon arme. C'était à la fois inutile et quelque peu stupide, car il était évident qu'un simple blaster ne suffirait pas à intimider une créature telle que celle-ci. Avec précaution, je me retirai de cette posture, conscient qu'irriter l'animal ne serait d'aucune utilité. Il aurait été fort désagréable de finir en cure-dent, car c'était probablement tout ce qu'elle aurait fait de mon corps, en grande partie cybernétique.

Loktar, tel était son nom, s'approchait lentement de moi, et je pouvais sentir sa respiration rôder près de mon visage. Ses yeux semblaient scrutateurs, comme s'ils cherchaient à percer mon âme afin de déterminer si je méritais l'attention que Raynar m'avait accordée. Je le fixai en retour, à la fois impressionné et curieux de découvrir si j'allais finir en en-cas pour la créature.

De toute évidence, on peut aisément comprendre pourquoi elles entretenaient une telle complicité. J'avais le sentiment qu'elles étaient deux brutes excentriques au grand cœur, chacune à sa manière. Qui aurait pu imaginer qu'une Manticore réclamerait des gratouilles ? C'était une expérience à vivre pour le croire. Mon regard se posa un instant sur Boss, dénué de tout sentiment, toujours surpris par la tournure que prenaient ces dernières minutes. Cependant, je m'exécutai car, après tout, j'avais plus d'affinités avec la faune qu'avec les "espèces intelligentes". Il n'était visiblement pas question de décliner l'invitation de Loktar au risque de m'attirer les foudres de ces deux personnages hauts en couleur.

Je me levai de ma chaise et m'approchai délicatement du ventre de la bête, posant doucement ma main sur un pelage étonnamment doux. Sans susciter de refus apparent, je débutai les caresses, suivant le sens du poil de la Manticore. À vrai dire, c'était plutôt agréable. Cela me fit brièvement réfléchir à l'idée d'adopter un compagnon de route, dressé pour être d'une efficacité létale. Cependant, une Manticore ne serait certainement pas mon choix, plutôt quelque chose au gabarit plus adapté à ma taille.

Poursuivant ma tâche, je tournai la tête vers la propriétaire du bar, derrière son comptoir à fixer d’un air choqué le dernier invité de taille rentré dans son établissement. Voulant une fois de plus la rassurer, je lui souris sommairement et lui lança d’un air détendu;


Un éclat de rire m'échappa à ma propre question, car je ne décelais aucune once d'hostilité chez Loktar. Peut-être était-ce parce que malgré ses airs de princesse, elle imposait naturellement le respect, et je le lui accordais d'une certaine manière. Cependant, il ne fallait pas perdre de vue qu'un geste, que ce soit de la part de Zarseen ou de moi-même, pouvait mettre fin à ma carrière en un claquement de doigts. On dit souvent que parler aux animaux permet de gagner leur confiance. Peut-être agissais-je ainsi sous l'effet de la surprise qui se dissipait peu à peu, ou peut-être étais-je simplement déterminé à conquérir le cœur de cette créature.


En effet, je comptais revenir de cette mission suicide avec les deux sensitifs capturés. La tâche serait ardue, mais peu importe, c'était mon billet d'entrée vers une nouvelle vie pleine de sens. Continuant mes caresses à Loktar, mon regard se tourna enfin vers la Patronne. Il était grand temps pour moi de me concentrer sur la tâche à accomplir. Avant de me plonger dans l'action, je m'assurai d'avoir recueilli toutes les informations que la Boss souhaitait me transmettre, lançant un dernier mot à Raynar.

Alors que je terminais à contrecœur de caresser Loktar, je rassemblais mes affaires éparpillées sur la table. J'écoutais attentivement les dernières instructions de Boss, concernant un éventuel repli en cas de problème. Sachant que je serais seul en cas de pépin, et sachant également qu'APEX nierait toute implication. Il était malgré tout réconfortant de connaître mes options en cas de problème, une assurance supplémentaire que le plan n'était peut-être pas aussi suicidaire que je l'avais d'abord craint. Mais cela justifiait mon besoin accru de vigilance tout au long de l'opération car l'échec restait une possibilité. Malgré cela, je percevais une lueur de confiance dans les paroles de Boss, une confiance que je devais également adopter envers moi-même. Après tout, Zarseen ne m'aurait pas sollicité pour cette mission risquée si elle ne me jugeait pas apte. La clé résidait dans ma propre confiance en mes capacités.


C'était un sentiment étrange que de quitter mon coin habituel au bar, une nouvelle affaire en main. Ça faisait un moment que cela ne m'était pas arrivé, et pourtant, cette sensation de retour aux affaires était plaisante. En quittant l'établissement, je pris un bref instant pour régler l'ensemble des consommations de la soirée, comme convenu précédemment. Le regard inquisiteur de mon amie laissait transparaître son besoin d'explications sur les événements survenus en si peu de temps. D'abord Raynar, puis une Manticore, il y avait de quoi susciter des interrogations dans un lieu habituellement calme. Et visiblement, elle n'était pas la seule à se poser ce genre de questions ; en observant brièvement la clientèle, je remarquai que beaucoup portaient une attention particulière à mon départ. Cette situation me fit sourire ; les commérages étaient monnaie courante, mais c'était le jeu dans ce genre d'endroit, et après tout, ces rumeurs m'avaient souvent été utiles au fil des années. Cependant, je décidai de remettre les explications à plus tard. Une fois ma note réglée, la propriétaire rassurée et ma mission claire, je quittai le Nebula en direction de mon domicile.

Mon appartement se trouvait à l’étage du garage, on y accédait par un escalier métallique. En franchissant ce qui faisait office de porte d'entrée, j’étais accueilli par un hall minimaliste, agrémenté de crochets où je pouvais suspendre mes vestes. Des fenêtres donnaient sur le hangar. Le salon s’ouvrait devant moi, un vaste espace baigné par une lumière douce provenant d'éclairages indirects. Un canapé en cuir noir trônait au centre, encadré par une table basse moderne où reposaient souvent quelques gadgets, une bouteille entamée et un verre vide. Un écran holographique accroché au mur surplombait toute la pièce face au canapé et d’autres fenêtres, face à l’entrée, donnaient sur l’extérieur, sur Nar Shaddaa, un panorama modeste que j’appréciai toutefois.

Déposant ma veste sur le canapé et mon holster sur la table basse à côté d'une bouteille et d'un verre, je m'empressai de le remplir, savourant chaque gorgée alors que je me dirigeais vers l'une des fenêtres proches. Le verre dans une main, je contemplai l'extérieur, laissant l'ambiance nocturne de Nar Shaddaa envahir mes sens. Pour cette cité, la nuit était calme, offrant un moment propice à la réflexion que je m'étais résolu à exploiter pleinement. Cette soirée imprévue avait déjà commencé à bouleverser mon quotidien, et il n'y avait plus de retour en arrière possible, même si j'en avais eu l'envie. Les opportunités de cette envergure ne se présentaient qu'une fois dans une vie.

Après quelques instants passés à contempler la vue nocturne, je me dirigeai vers une pièce adjacente, qui faisait office de bureau. C'était là que je passais des heures à préparer mes missions et à bricoler diverses pièces mécaniques et électroniques sur l'établi adjacent. Au fond de la pièce, un bureau imposant accueillait un datapad, plus grand que celui que j'avais habituellement sur moi. Le reste de la pièce était encombré de caisses renfermant toutes sortes de ferrailles et d'équipements.

M'installant dans mon fauteuil de bureau, je me préparai mentalement pour les heures à venir. Adoptant la même posture que lorsque j'étais arrivé au Nebula, j'étendis mes jambes sur le bureau et saisis le datapad à portée de main. Ouvrant un nouveau dossier, je me préparai à élaborer ma stratégie. Sachant que j'aurais quelques jours pour réfléchir à mes prochaines manœuvres, je gardai à l'esprit l'attente de résultats rapides de la part de Raynar. Mes yeux ne se fermèrent pas de toute la nuit, absorbés par le défi qui m'attendait.