For Mand'alor - Acte II [PV Ruusaan Skirata]

Ruusaan commençait à peine à concevoir, au bout de presqu’un an, que son service militaire auprès de la République Galactique était complété et qu’elle n’aurait plus à y remettre les pieds et à se faire exploiter comme de la chair à canon et de bouclier humain dont le sort indifférait royalement ceux et celles qu’ils étaient supposés protéger de leur vie. Elle se trouvait désormais sur Mandalore, au clan Skirata, à Kyrimorut, auprès des siens, à la maison…

La maison. Encore une fois, un concept avec lequel elle devait se familiariser, qu’elle devait s’approprier. Elle avait un chez elle où elle pouvait rentrer, qui n’était pas une base impersonnelle où ils n’étaient qu’en transit, ou qui n’était pas une cuve de clonage translucide remplie de liquide. La maison était un lieu où elle pouvait revenir, un lieu où trouver sa famille, un lieu où elle avait sa place. S’il lui avait été aisé de considérer Jaster comme son partenaire de vie – aucun doute sur les sentiments qui les liaient, elle le savait intrinsèquement, sans le savoir – Kreizen et Fenn comme des frères, le rôle parental dont s’était saisi Mirta Skirata à son encontre avait été un peu plus délicat à appréhender. L’Alor’ad et Cuy'Val Dar était indubitablement la personne la plus proche de ce qu’elle avait eu comme figure maternelle, mais le contexte militaire de son instruction complexifiait sa perception.  Ruusaan avait donc été étonnée par la proposition de son ancienne tutrice de faire de l’ancienne soldate, qui plus est amnésique, sa fille adoptive, et de rejoindre officiellement ainsi la grande famille recomposée qu’ils formaient avec Jaster, Kreizen et Fenn. Rien ne l’obligeait à lui tendre ainsi sa main, mais l’officiers des commandos mandalorienne d’une cinquantaine d’années avait insisté sur le fait que ce n’était pas par obligation, mais parce qu’elle le voulait vraiment. Elle y tenait vraiment, visiblement. Il lui avait fallu du temps pour s’acclimater, mais elle avait accepté Mirta comme sa mère adoptive bien que la clone et sa donneuse génétique se disputaient encore de temps à autres, comme par le passé.

La famille. C’était cette fois une notion qu’elle connaissait, l’ayant appliquée du temps de son service chez les commandos clones républicains pour définir le lien qui l’unissait à Jaster, Fenn et Kreizen. Ce lien indestructible entre les quatre unités « Null » et qui les avait aidés à traverser bien des casse-pipes. C’était une esquisse de lien qui la rattachait à Mirta Skirata, qui se renforçait jour après jour, pas à pas. C’était aussi le lien fort, instinctif et indéniable, qui la reliait à Jaster et à leur tout jeune fils Bardan. Ruusaan se l’était appropriée plus vite qu’elle ne s’en était crue capable, de ce concept de famille proche. Elle s’appliquait désormais à l’étendre de la notion d’Aliit à celle de membres d’un même clan. L’accueil chaleureux d’une majorité des mando’ade qui composaient le clan Skirata fût d’une grande aide sur ce point, le clan étant fidèle à sa réputation d’esprit ouvert envers les nouveaux arrivants. La notion de maternité, qui était tout à fait nouvelle et étrangère à Ruusaan, lui vint relativement aisément alors qu’elle avait eu le temps de s’y préparer lors de la deuxième moitié de sa grossesse, l’aide de Jaster n’étant d’ailleurs pas négligeable sur ce sujet, de même que celles d’autres mando’ade qui étaient également devenues mères avant elle. Elle s’était sentie soutenue, et donc plus sereine. Ses doutes s’étaient envolés dès lors qu’elle avait pris pour la première fois le petit Bard’ika dans ses bras, malgré les nuits encore difficiles qu’il leur faisait parfois traverser par ses réveils nocturnes. Il n’y avait aucun doute dans son cœur : ils le protègeraient des menaces, ils l’aimeraient, ils le guideraient.

L’armure. Respecter le port de l’armure n’incommodait nullement Ruusaan, loin s’en faut. Elle avait dû s’habituer et se muscler davantage pour endosser quotidiennement la « Peau de Fer » mandalorienne qui avait été forgée personnellement pour elle, mais ce n’était guère différent de la combinaison cybernétique qu’elle devait porter quotidiennement depuis sa quasi-mort à Lord_Over. La Beskar’gam était devenue, depuis un an, littéralement une deuxième peau maintenant qu’elle y était habituée, et chassait toute incertitude qu’elle pouvait avoir sur le fait d’être revenue à la vie civile. Elle était un marqueur net de son appartenance aux Protectorats, et non plus à la République. Elle était un signe de sa liberté acquise, en payant pour tribut une amnésie qu’elle ne s’expliquait aucunement. Cette armure de beskar ornait les valeurs qu’elle voulait défendre désormais : la loyauté, le renouveau, l’hommage rendu à un parent. Elle serait loyale aux siens, à ses proches et à son clan. Elle avait eu le droit à une seconde chance, elle avait eu le droit à une deuxième vie, elle s’en montrerait digne. Elle se montrerait digne de la confiance et de la main qu’on lui avait tendue alors qu’elle se trouvait perdue, arrachée à près de vingt ans de souvenirs dans des locaux froids, impersonnels, tout à fait inconnus. Loin de lui paraître oppressante, l’armure lui inspirait un sentiment de fierté mêlé à celui de liberté.

Récemment intégrée au sein des rangs des commandos mandaloriens, les Ori’ramikade en tant que Verd’ika – nouvelle recrue – sa (re)formation, ses responsabilités de mère et sa remise à niveau ne lui avaient pas encore donné d’occasion d’observer un sixième commandement du Resol’nare, à savoir « Répondre à l’appel du Mandalore ». Elle avait désormais trouvé une raison de se battre, une raison de vivre, et elle comptait bien ne pas les laisser lui échapper. Si Mirta était retournée pour le moment au sein de la République Galactique pour remplir ses responsabilités de Cuy’Val Dar – formateur de clones – ce n’était pas pour autant que Ruusaan avait relâché ses entraînements et délaissé sa routine. Á ses yeux, même la meilleure des armes pouvait rouiller avec le temps, faute d’entretien suffisant.  C’est la raison pour laquelle Ruusaan avait rejoint le groupe d’entraînement au corps à corps, qui prenait place juste après les exercices au tir à distance, ce matin-là. Au cours de sa formation, il avait été vite apparu que ses deux spécialités se trouvaient au corps-à-corps et au tir à distance. Du temps de l’Escouade Omicron, elle occupait d’ailleurs ces deux rôles au sein de leur groupe. L’ancienne ARC ne voulait cependant pas reposer sur ses acquis, et toujours s’améliorer. C’était aussi une bonne occasion de continuer de s’approprier concrètement le fusil sniper verpine qui avait rejoint son inventaire, et d’en parfaire sa maîtrise autant que son usage avant toute opération. Ce matin-là cependant, elle avait gardé le petit Bard’ika les premières heures avant de pouvoir en confier la garde à Kreizen, le jugeant bien plus responsable pour ce faire que Fenn, étant lui-même père d’un enfant. Si elle ne pouvait pas arriver à temps pour les exercices de tir, elle serait bien à l’heure pour l’entraînement au combat rapproché. Rien ne l’empêcherait d’observer la précédente leçon, cela dit.

Revêtue de sa Beskar’gam majoritairement blanche et bleue, liserée de rouge sur sa partie supérieure, Ruusaan s’était également équipée de ses gantelets de force mandaloriens, d’un kad et de ses blasters verpine. Elle n’en aurait sans doute pas besoin, mais l’habitude voulait qu’elle reste armée au cas où. Son casque retiré et maintenu contre sa hanche laissait voir ses longs cheveux blonds réunis une queue-de-cheval haute, qui ne laissait échapper que quelques mèches encadrant son visage plutôt fin. Ses yeux bleus, artificiels, observaient avec attention son environnement au sein du clan Skirata. Sans mot dire, une fois arrivée au stand de tir, elle prit le temps d’observer la nature de l’entraînement. Elle repéra les quatre cibles à toucher à l’horizon, et les élèves du jour placés selon leur niveau. Entre mille mètres et quatre cent mètres de distance, échelonnant ainsi la difficulté selon l’aptitude du tireur.

Le tir à distance était plus difficile qu’il ne le laissait entendre. La précision de tir ne suffisait pas, d’autres facteurs rentraient en compte comme la posture du tireur, l’influence du vent, les conditions visuelles (brouillard, ensoleillement, pluie, neige, jour, nuit) … et les éléments extérieurs telles que des explosions à proximité. Ils n’étaient pas dans un jeu-vidéo ou une simulation en réalité virtuelle. Sur le terrain, il fallait aussi à la fois rester attentif et savoir comment réagir car l’assaut impliquait souvent que plusieurs attaques et plusieurs types d’assaut pouvaient avoir lieu tout autour de sa position. Une légère grimace échappa à Ruusaan en remarquant que l’entièreté du groupe d’élève s’étaient redressés. En conditions réelles, ils auraient révélé leur position et auraient été des cibles faciles à abattre, en combat rapproché ou même à distance. Le temps de se ressaisir, ils auraient perdu de précieuses secondes et n’auraient probablement pas eu le temps de se remettre à couvert à temps.


- Je ne vous avez pas dit de rester concentrés ? Lenteur égal précision, précision égal vitesse. Réessayez. Ici vous vous entrainez. Pensez qu'un jour vous serez sur le terrain. Votre position sera possiblement compromise ou vous devrez agir dans l'urgence. Rester concentré et attentif seront vos seuls atouts. Fin du cours.


Un léger sourire se tissa au coin des lèvres de Ruusaan. Elle connaissait bien la formatrice du jour, qui était l’une des rares personnes qu’elle considérait comme amies. Al’verde de son état, Leucinia T’Soni était aussi la seule Miraluka de sa connaissance qui était une Mandalorienne. Elle en avait croisé peu, sur le front, et seulement au sein des rares Jetiise avec lesquels elle avait été contrainte de collaborer. Elle était aussi l’une des premières personnes, en dehors de son Aliit, avec lesquelles elle avait accepté de baisser juste assez sa vigilance pour commencer à discuter. Elle observa avec ce même sourire la mandalorienne qui faisait une démonstration de tir à deux spectateurs, dont un petit garçon. Deux kilomètres… c’était la distance qu’elle évaluait, c’était un beau tir, suivis de plusieurs autres tirs.


- Bien tiré. La marge d’erreur n’était pas négligeable, qui plus est.


Tournant ses yeux artificiels vers eux et après avoir salué le garçon, Ruusaan s’adressa à la Miraluka.


- Bonjour, Leucinia. Bard’ika avait besoin de moi, d’où mon absence aux exercices de tir. Kreizen m’a relayée. Tu superviseras l’entraînement de combat rapproché ?

Ruusaan accueillit de bonne grâce les salutations et l’accolade de l’une des rares personnes qu’elle considérait comme une amie. S’il lui était encore parfois difficile de refléter et d’exprimer clairement ce qu’elle ressentait, en raison d’une réserve innée particulièrement enracinée, le jeune commando s’efforçait d’en faire davantage montre, avec modération. Elle était clairement plus détendue en présence de ses proches ou de ses rares amis. La Miraluka avait l’air de bien se porter, de ce qu’elle pouvait constater en l’auscultant succinctement du regard. Elle lui retourna l’accolade de bon gré, se sentant plutôt en confiance avec sa comparse.


- Je suis très contente de te voir, ça fait un moment. Excuses acceptées. De toute façon je n'ai pas lu le nom des personnes présentes et qui devaient venir.


Cela faisait en effet un moment depuis leur dernière discussion, Leucinia étant un commando mandalorien expérimenté, elle était souvent appelée à agir en dehors des terres claniques des Skirata. Cette dernière précision ne manqua pas de susciter chez elle un embrun d’amusement. Elle se rattraperait au prochain entraînement au tir. Bien qu’elle fasse désormais partie elle-même des Ori’ramikade, cela ne voulait pas dire pour autant qu’elle devait négliger son entraînement quotidien, loin s’en fallait. Elle n’en n’avait aucune intention, de toute manière. Il lui tardait de retrouver ses performances et son efficacité d’avant leur dernière mission lors de la campagne de Lord_Over, et de se familiariser tout à fait avec ce corps partiellement cybernétisé qui était le sien, qu’elle devait s’approprier de nouveau. Elle y travaillait désormais depuis bientôt un an, afin de se préparer.


- Et oui, allons-y. J'ai récemment été promu Al'verde. Après la mission sur Anaxes. Donc j'ai l'immense joie de former la bleusaille et de botter des p’tits culs...

- J’ai entendu ça, oui ! Félicitations à toi. Tu me raconteras un de ces quatre, cette fameuse mission sur Anaxes ? J’en ai eu des échos, mais rien ne vaut un retour d’expérience de quelqu’un qui y a participé. Dis-toi qu’à côté de la formation des cadets, tu auras aussi un panel de missions plus intéressantes et mieux rémunérées à te mettre sous la dent, en bonus.


Ruusaan n’avait pas ces considérations à l’heure actuelle. Elle voulait déjà bien s’approprier son rôle de mère et ses nouvelles fonctions de Verd’ika, ce qui impliquait de retrouver ses aptitudes passées, et de les surpasser. Cela ne se cantonnait pas aux performances physiques et à la maîtrise de l’armement, d’ailleurs. Elle avait tenu à s’entraînement d’arrache-pied en matière informatique, afin de ne pas se reposer que sur ses implants et de ne pas perdre la main sur ce domaine qu’elle affectionnait, au point d’accepter de recevoir un implant prototype de cybernétique avancée. Ce fût naturellement qu’elle emboîta le pas à l’Al’verde et veilla à ajuster ses foulées sur les siennes, afin tant de ne pas rester en arrière que de ne pas trop la devancer. Rester à sa hauteur facilitait aussi la conversation, que leur cheminement vers le gymnase d’entraînement n’avait nullement interrompu.


- Tu as le plus grand des devoirs à ce que j'entends. C'est une noble tâche. Je te souhaite de profiter de tous les moments de bonheur et d'échange qui t'attendent avec lui... Et des nuits blanches.


Ruusaan laissa échapper un éclat de rire, bref mais spontané à la mention des nuits blanches. Une contrainte que tous les parents avaient connue, plus ou moins longtemps selon leurs bambins. Bard’ika avait moins d’un an, aussi n’était-il pas surprenant qu’il ne fasse pas encore ses nuits et les réveille à des heures perdues. Ces nuitées fort courtes ne pesaient rien face aux sourires, aux rires et aux câlins de leur petit garçon, et face aux petits progrès qu’ils observaient chaque jour en le voyant grandir.


- Ce n’est pas tous les jours facile, mais Bard’ika est comme un petit soleil pour nous. Même si j’espère, quand même, qu’il ne tardera pas trop à faire ses nuits. Au moins, je ne suis pas seule dans l’effort, Jaster m’aide, et au besoin, on s’arrange avec Kreizen et sa compagne. N’hésite pas à venir à la maison, à l’occasion. Tu sais que tu es la bienvenue.


Sans le dire à voix haute, elle était contente que le petit Bardan puisse bénéficier d’une enfance normale, contrairement à Jaster, Kreizen, Fenn, Duran et elle. Il pourrait prendre le temps de grandir dans un environnement sain et aimant, s’émerveiller de ce qui l’entoure, s’approprier la culture mandalorienne et s’intégrer dans la grande famille – parfois très animée – qu’était le clan Skirata. Il y avait certes les bons et les mauvais jours dans les relations entre membres du clan mais dans l’ensemble, la philosophie des Skirata était l’ouverture d’esprit et un tempérament plutôt solidaire.  Chacun faisait sa part avec ses moyens et ses aptitudes, mais ils pouvaient se faire assez confiance.


- Et toi, comment-vas-tu ? Tu continues tes visites médicales ? Tu as pu avancer ?

- Dans l’ensemble je me porte bien. Je commence à m’habituer aux prothèses cybernétiques, et j’ai réussi à les ajuster pour qu’elles ne me gênent pas au combat et pour adapter mes mouvements à leurs performances. Comme tu le sais, Mirta a supervisé ma « remise à niveau ». Elle a beau être plus âgée, elle reste redoutable et assez exigeante à l’entraînement. En ce qui concerne ma mémoire… malheureusement, aucune avancée de ce côté-là. Mes visites médicales se sont bien espacées, mais je suis tenue à un contrôle tous les six mois un an tant que ça ne bouge pas. Cela étant dit, je suis contente de reprendre les armes. La vie de civile ne me convient guère, je crains.  Et toi, tu es libérée des visites médicales ou tu dois encore en suivre de temps à autres ? Que t’est-il arrivé de beau, récemment ? Quelque chose d’intéressant à me raconter, dernièrement ?


Ruusaan était de bonne humeur, malgré les nuits courtes, et en bonne compagnie. La routine pouvait parfois sembler ennuyeuse, mais son caractère prévisible pouvait par moment se montrer rassurant. La commando mandalorienne comptait bien participer aux missions qui lui seraient accessibles, mais instinctivement, elle profitait aussi de la passagère tranquillité pour se former et se remettre en selle.

Ruusaan ne pût s’empêcher de relever la légère omission de Leucinia quant à son offre de passer à la maison, ne serait-ce qu’autour d’un kaff ou d’une pinte de Tyar, ou pour un repas. Bien que cela l’intriguait, elle décida pour l’heure de ranger ce constat dans un coin de son esprit et de réserver ses questions pour plus tard. Elle presserait, si la situation le demandait, le point quand les circonstances s’y prêteraient mieux. Leucinia devait avoir ses raisons et tant que celles-ci ne mettraient pas en danger son amie, leurs proches et leur clan, elle n’avait elle-même aucune raison de mettre son nez dans ce qui restait de l’ordre du privé et ne la regardait pas.

Skirata écouta avec attention l’exposé de son amie Miraluka. Que la mission ait été un succès ou non, il y avait nécessairement des leçons et des enseignements qui pouvaient en être tirés. On apprenait autant, si ce n’est plus, de ses erreurs, de ses échecs que de ses réussites et de ses succès. Il fallait en effet, en tant que dirigeant de groupe, prendre en considération autant l’équipement, l’état de santé, les talents, l’armement que les personnalités de chaque membre de l’équipe. Autant Jaster était d’un naturel sociable et relativement extraverti, coopératif – en tant que son ancien adjoint et désormais chef de groupe – autant elle ne pouvait pas en dire de même pour Kreizen et surtout Fenn. Pour qui ne les connaissait pas bien et qu’ils ne connaissaient pas bien, les deux mando’ade n’étaient pas commodes d’approche. L’un était extrêmement bourru et le second préférait agir de soin et en solo quand il le pouvait. Ruusaan pour sa part n’était pas forcément la plus chaleureuse en mission, se révélait assez peu loquace voire froide parfois, mais ses acquis de commando-clone ARC et son esprit de coopération aidaient à la rendre encline à travailler en groupe tout comme à agir en indépendante. Les améliorations cybernétiques qu’elle avait choisies reflétait aussi cette deuxième part de ses talents.

De mémoire, de ce qu’elle avait pu glaner, l’équipe envoyée pour Anaxes avait été composée de Leucinia, d’un Al’verde nommé Talus Skirata – qu’elle connaissait assez peu mais qu’elle avait déjà rencontré au clan Skirata – d’un troisième mando’ad dont le nom lui échappait et d’une dernière Verd’ika plus expérimentée qu’elle, Vhell Kanata. Autant de personnes qu’elle devrait apprendre à mieux connaître, personnellement et militairement, pour les futures missions qu’on leur confierait. L’équipe était supervisée par une cheffe de clan dont elle n’avait pas le souvenir d’avoir rencontré un jour, Natacha Souvorov, mais que la réputation et les faits militaires précédaient déjà par son nom. Ruusaan entendait bien le dilemme qui s’était présenté à eux entre deux options diamétralement opposées : « foncer dans le tas », comme diraient certains, ou miser davantage sur la discrétion. Il manquait de nombreux facteurs et paramètres sur cette opération pour que Ruusaan puisse se prononcer sur l’option qu’elle aurait retenu, ou la troisième éventuelle possibilité qu’elle aurait appuyée. Par sa nature et ses acquis, elle aurait sans doute opté tout ou en partie pour la discrétion. Sans doute ils auraient pu alterner aussi entre diversion d’un côté et agissements discrets de l’autre ? Elle se nota de se renseigner plus tard et de voir si elle pourrait étudier les tactiques employées.

Au moins, l’Empire s’était quand même pris une claque et l’honneur mandalorien était sauf, malgré cet insuccès. Cette pensée avait une bonne résonnance dans son esprit, quelque part. Un sourire amusé se tissa sur les lèvres de la cyborg face à l’enthousiasme de sa comparse à l’idée de faire exploser quelque chose d’aussi spectaculaire. Nul doute qu’elle s’entendrait à merveille avec Kreizen là-dessus.


- J’imagine oui, mais dis-toi que vu comment les choses tournent, il y aura d’autres occasions de faire de « très jolis feux d’artifice », comme se plaît à dire Kreizen.


Cela aurait représenté sans nul doute un défi intéressant pour les anciens ARC qu’ils étaient, mais ils n’avaient pas pu se positionner sur la mission. Mirta estimait que Ruusaan n’était pas encore prête et n’avait pas terminé sa formation de remise à niveau, Bard’ika était encore trop petit et avait besoin de Jaster et elle pour s’occuper de lui, tandis que Kreizen et Fenn était assignés à une autre mission.

Le problème avec les prothèses venait surtout de l’esprit… cette phrase trouvait un lointain écho dans la mémoire éclatée de Ruusaan, qui serra par réflexe les doigts mécaniques de son bras artificiel. Cela lui rappelait quelque chose, sans qu’elle ne parvienne à le saisir pour autant. Cela n’avait pas été évident les premiers temps, le temps qu’elle apprenne à maîtriser sa propre force pour ne pas écrabouiller ce qu’elle tenait ou, au contraire, laisser échapper le moindre élément qu’elle tenait. Ruusaan s’était inquiétée les premiers temps que cette adaptation lui prenne du temps, mais étrangement, la sensation et le contrôle lui étaient revenus très rapidement, presque naturellement. Si elle était dotée d’une assez bonne capacité d’adaptabilité, la performance l’étonnait quand même. Elle avait voulu être absolument certaine d’avoir un contrôle absolu avant de songer à tenir dans ses bras leur enfant, terrorisée par la perspective de le blesser malencontreusement les premiers jours. Cela avait été, aussi, une puissante motivation supplémentaire à y mettre les efforts qu’il fallait, tout comme celle de pouvoir profiter de moments plus affectueux et plus intimes, aussi, avec Jaster.


- J’ai eu le déclic assez rapidement, étrangement. Plus vite que je ne l’aurai pensé. Ce n’est pas pour me déplaire cependant, c’était très handicapant les premiers temps. Toi qui sais à quel point je tiens à mon indépendance, tu imagines à quel point je déteste me sentir « assistée ». Il me tarde quand même d’expérimenter, en conditions réelles, ce qu’il me reste comme acquis et ce que j’ai appris depuis que je suis arrivée ici. Les simulations ne remplacent pas les vraies opérations.


Elle marqua une courte pause, sans cesser de cheminer aux côtés de Leucinia, en adaptant ses foulées.


- Je ne me mêlerai pas de ce qui ne me regarde pas, aussi je me contenterai de ceci ; si tu as besoin d’un coup de main, tu peux venir m’en parler. Je t’écouterai.


Et si c’était dans ses possibilités, elle l’aiderait bien volontiers tant que cela n’allait pas à l’encontre de ses valeurs, de la sécurité de sa famille et de la sécurité du clan en général. Elle n’insista pas davantage et préféra changer de sujet, décelant dans l’attitude de son amie que le sujet paraissait délicat.


- Avant que nous ne rejoignons les autres, une dernière chose : j’ai entendu dire que tu avais ouvert une boutique, récemment. De… lingerie, si j’ai bien compris. J’étais curieuse, alors je me suis renseignée de mon côté. Félicitations pour ton commerce. Peut-être que je viendrais t’y rendre visite, à l’occasion. Je ne suis pas très douée sur ces choses-là, je t’avoue que ce n’est pas le genre de chose qu’on nous apprenait, là-bas, mais je ne suis pas fermée à l’idée d’apprendre le minimum. Ce ne serait pas un mal que je diversifie un peu ma garde-robe, et y aller avec une connaisseuse que je connais bien est plus rassurant pour la novice que je suis. Tu me diras quand tu auras du temps.


Ruusaan n’était pas féminine, loin s’en faut et malgré sa silhouette qui paraissait délicate aux yeux de plusieurs de leurs pairs masculins. Elle n’avait, pour ainsi dire et à sa connaissance, aucune réelle information sur la lingerie et les habits civils plus habillés en dehors des territoires mandaloriens. Peut-être pourrait-elle surprendre son conjoint ainsi, et apprendre à apprécier son corps en bonne partie cybernétisé des suites de la campagne de Lord_Over plutôt que de ne le voir que comme un outil.

Elles eurent bientôt rejoint avant qu’elles ne puissent poursuivre la conversation. En présence des autres mando’ade qu’elle connaissait moins, l’attitude de Ruusaan se fit sensiblement différente, plus maîtrisée, plus distante et plus alerte. C’était essentiellement des hommes, constata Ruusaan avec indifférence. Une petite dizaine, cela faciliterait sans doute le cours et les éventuelles rectifications individuelles dans l’accompagnement. Écoutant les consignes de l’Al’verde, Ruusaan ne les discuta pas et retira son armure, élément après élément, à commencer par son casque. Ignorant superbement les remarques de certaines recrues quant à son état de femme et sa forte ressemblance avec Mirta, trahissant son état de clone et donc d’ancien soldat de la République Galactique, Ruusaan se retrouva bientôt simplement vêtue de sa combinaison cybernétique azurée, très près du corps, qui garantissait la stabilité de son état sur le long terme. Elle n’avait aucune timidité ni affect particulier envers son corps, habituée depuis de nombreuses années à ne guère prêter attention aux attributs de son genre et à combattre auprès de soldats très majoritairement masculins. Rares étaient les clones féminins. Retirant toutes ses armes, incluant ses gantelets de force, elle régla aussi ses prothèses pour limiter leurs performances pour le moment en les paramétrant sur une force qu’elle jugeait « naturelle ». Elle s’y œuvra tant pour son bras artificiel que pour ses jambes cybernétiques, afin d’être au même niveau de performance de « base » que ceux attendus pour des mando’ade. Elle ne voulait pas tricher, et cela ne serait nullement formateur pour elle qu’elle repose excessivement sur ses aptitudes augmentées. Mirta lui en avait fait la douloureuse démonstration, lui fichant une sacrée raclée sans être une cyborg.

Ruusaan observa avec attention les mouvements démontrés par Leucinia, qui lui évoquaient effectivement des actions que lui avaient enseignées Mirta. Sans perdre de temps en mots inutiles, elle se tourna vers son binôme. L’humain était plus charpenté, plus trapu mais aussi plus petit qu’elle, ce qui n’empêchait pas l’homme de la prendre de haut si elle en croyait son attitude. Il était visiblement ennuyé d’être celui « coltiné » à devoir faire équipe avec une femme. Avec une indifférence marquée – qui dissimulait habilement un embrun de lassitude face à leur attitude – Ruusaan ne commenta pas et se mit en position, observant avec attention la posture de son adversaire. Reculant un pied, ses propres jambes étaient tendues et légèrement fléchies, pour ajuster l’amplitude de ses déplacements. Elle se tenait droite, sans verser dans la raideur. Elle adoptait une posture de garde pour l’heure, ses poings placés au niveau de sa poitrine, prêts à réagir pour se défendre ou pour partir à l’assaut. Froidement, quand le signal fût donné, elle fît face à la réaction très prévisible de son opposant moins expérimenté aux situations réelles ; il se précipitait sur elle, dans l’intention de lui délivrer ouvertement un coup vers sa taille. Il voulait sans doute lui couper le souffle ainsi, la déstabiliser pour rompre sa défense et l’abattre rapidement, en l’humiliant. Sans s’en émouvoir, Ruusaan se contenta de lui opposer un mouvement de jambe que l’on appelait un « chassé », destiné à repousser et à faire reculer son opposant en le frappant à courte portée via le talon sur la cuisse adverse. Comme ils étaient en entraînement, elle n’enchaîna pas immédiatement sur un assaut et lui laissa la possibilité de se rééquilibrer. Étudiant son style d’assaut avec quelques enchaînements, elle finit par le comprendre et parvint sans grande difficulté à briser sa garde par un coup de pied bas, puis d’un solide crochet de son bras naturel, le faisant tomber à terre, avant que sa main droite ne se place sur son cou et signe sa défaite. Il n’avait guère apprécié d’être vaincu par une femme, mais était contraint d’admettre sa défaite de mauvais grès. Ils changèrent ensuite de partenaire, à plusieurs reprises. Pour l’heure, Ruusaan était rassurée de voir qu’elle n’avait pas trop perdu et que son corps retrouvait vite ses réflexes, qui plus est aiguisés par les cours renforcés avec Mirta. Elle était certes moins véloce, moins souple et moins puissante qu’avec ses prothèses vraiment activées, mais c’était un bon exercice aussi pour retrouver ses sensations plus « naturelles ». Il y avait aussi de bons élèves dans le lot, comme celui qu’elle affrontait actuellement en termes de force ou de technique, mais elle s’en sortait bien. Ruusaan n’était cependant pas femme à reposer sur ses lauriers, aussi ne baissait-elle pas sa garde et respectait-elle son adversaire. Elle restait consciente de ses limites, notamment bridée, en force pure.

Cet adversaire était plus intéressant et instructif pour Ruusaan alors qu’elle se confrontait à un autre mandalorien après un changement d’équipiers. Plus respectueux, il était aussi bien plus malin que son premier adversaire et lui donnait plus de piquant, plus de challenge dans l’affrontement. Il réagissait mieux à ses assauts et, sans se contenter de les subir, cherchait à percer sa défense. Elle estima que son profil de combattant était proche de celui de Jaster, très bien équilibré et polyvalent, sans verser dans la force pure tel que Kreizen.

Parades, esquives, déplacements, postures, jeux de jambes, attention tant visuelle, sonore que sensorielle en général, réflexes, assauts, retraites, contre-attaques… les mouvements revenaient vite. Se prendre quelques coups aussi, afin de mieux pouvoir les retourner contre son opposant. Le but n’était pas nécessairement d’humilier l’autre, mais de comprendre comment il ou elle se battait, et, partant de là, comment ils pouvaient respectivement s’améliorer et apprendre de l’autre, pour à l’avenir être capable autant d’opérer seul que de travailler en groupe. D’une façon assez similaire à l’infanterie républicaine qu’avait connu Ruusaan en tant que Commando clone de Reconnaissance Avancée – ou ARC plus familièrement – et a contrario du cliché du Mandalorien solitaire, les opérations groupées étaient fréquentes et ils devaient souvent agir en équipe, grandes ou en petites escouades.

On lui avait appris, sur Kamino, à ne pas penser comme une personne individuelle mais comme un groupe. Ils avaient appris, Kreizen, Fenn, Jaster et elle à si bien se connaître qu’ils pouvaient presque penser « comme une même personne », dans le sens qu’ils se connaissaient si bien qu’ils pouvaient anticiper les réactions de ses pairs et optimiser leur temps de réactions et l’efficacité de leurs actions.

Si ce comportement leur avait été inculqué dès leur plus tendre enfance et encouragé aux prémisses de leur formation de soldat clone, certains diraient à la limite de l’endoctrinement, il leur avait servi sur le terrain et avait sans doute favorisé leur survie sur le terrain, en particulier lors de Lord_Over. Les connaissances martiales de Ruusaan étaient surtout basées sur la manière de combattre de la République, bien qu’elle eût de bons acquis transmis par Mirta. Sa mère adoptive les avait bien formés, certes, mais la façon de penser d’un soldat républicain pouvait différer de celle d’un guerrier Mandalorien. Ruusaan devait acquérir cette souplesse d’esprit, en l’acquérant par les expériences. Elle devait, et elle voulait, embrasser pleinement cette philosophie et cet esprit de corps des Mandaloriens. Ce serait au contact de ces derniers et de ces dernières qu’elle parviendrait à se l’approprier à son tour.

De temps à autre, Leucinia passait superviser les affrontements de mêlée, et commentait voire corrigeait leurs postures, leurs assauts et leurs déplacements, leur partageant de nombreux conseils, quand elle ne s’exerçait pas avec un autre élève, changeant elle aussi régulièrement de binôme. Ruusaan accueillit de bonne grâce les conseils du Mandalorien qui, bien que vaincu, lui pointa des écueils qui pourraient se retourner contre elle, et comment elle pourrait tâcher de les amoindrir. En retour, elle lui partagea ses propres impressions et quelques suggestions, qu’il suivrait ou non ensuite.


- Soit tu te calmes seul, soit je te calme. La seconde option se fera dans la joie et la douleur.


Une altercation avait attiré l’attention des deux Mando’ade, parmi les autres élèves, et leurs yeux se tournèrent vers le centre de l’attention. Leur professeure du jour, au gré du roulement des groupes, s’était retrouvée face au Mando’ad que Ruusaan avait affronté un peu plus tôt au début du cours. Il n’avait pas su ravaler sa fierté, utiliser ses neurones et arrêter de penser avec son service-trois-pièces. L’élément problématique se trouvait au sol, plaqué par la Miraluka qui l’y maintenait fermement.

Alors qu’elle le relâchait, Ruusaan doutait qu’il avait dit son dernier mot, si elle en croyait l’attitude qu’elle observait et qu’instinctivement elle analysait chez l’élève. Sa physionomie trahissait toute la colère qu’il ressentait, au point qu’il n’y avait guère de doute qu’elle eût atteinte le pallier de haine. La Mandalorienne respecta la décision de son aînée quand la deuxième ignora l’élément perturbateur, sans doute pour ne pas nourrir excessivement son ressentiment et pour continuer la formation, bien qu’elle estimât pour sa part qu’il y avait de fortes probabilités qu’il fasse encore parler de lui sous peu.

De fil en aiguille, et de combat en combat, Ruusaan se retrouva confrontée cette fois à Leucinia.

Et cette dernière ajouta une clause supplémentaire pour leur mêlée ; qu’elle donne tout ce qu’elle avait. Sans doute avait-elle noté que Ruusaan s’était retenue, tant dans l’intérêt des autres apprenants que dans le sien. Après quelques secondes d’étonnement, Skirata obtempéra en voyant que leur instructrice ne revenait pas dessus. Sans faire cas des commentaires autour d’elles, guidée par une habitude et une dextérité qu’elle s’expliquait assez mal elle-même, la Verd’ika fraîchement intégrée aux Oriramikade modifia ses paramètres de prothèses en s’aidant aussi des systèmes de son armure. Elle les réajusta aux valeurs maximales qu’elle était capable d’utiliser à ce jour, déjà très élevées. Ruusaan pressentait qu’elle pouvait les pousser plus loin encore, mais qu’elle aurait besoin d’entraînement et d’ajuster son esprit – ses réactions – aux performances de son corps cybernétisé. Néanmoins, Leucinia lui avait demandé un combat sérieux, Ruu prendrait ses directives au sérieux.

Derrière son calme méthodique, elle devait reconnaître qu’une pointe non négligeable d’adrénaline la parcourait, avec l’expectative de la mêlée d’entraînement face à l’Al’verde et amie qui lui faisait face. Derrière le sérieux qu’elle maintenant, elle était absolument ravie de pouvoir s’exercer sérieusement, au plus proche d’une véritable confrontation en dépit de la dimension « amicale » qui serait observée.

Sans sombrer dans l’erreur des débutants de foncer dans le tas, si elle accepta l’invitation de Leucinia à prendre l’initiative, Skirata opta pour un assaut plus technique que puissant, proche d’une feinte. La Verd’ika chercha à tester les réactions, les réflexes et l’attitude de son opposante afin de se faire une meilleure idée de la manière de se battre de l’expérimentée guerrière. Ruusaan prit le temps d’étudier la posture et les déplacements de son opposante, alternant de manière irrégulière entre retraite, assaut et parade. Il lui apparut très vite qu’elle n’avait nullement besoin de faire preuve d’une ombre de retenue, aussi se donna-t-elle à cœur joie dans l’effort. Suivant un premier coup à la force concentrée – et renforcée par la cybernétique – Ruusaan enchaîna sur une frappe de jambe, qui cherchait à déséquilibrer son adversaire ou à le faire reculer. Naturellement, Leucinia ne tomba pas dans le panneau et lui opposa un contre parfaitement mesuré. Elles ne se retenaient pas, éprouvant la technicité, la force, la vitesse, la précision, la réactivité et l’endurance de l’une et de l’autre. Un sourire satisfait se glissa sur les lèvres austères de Ruusaan, qui prenait un réel plaisir à la joute alors que la Miraluka la mettait de temps à autres en difficulté, la poussant dans ses retranchements et la défiant de redoubler d’ingéniosité, de créativité et de réactivité. La technicité ne suffisant pas seule, Ruusaan se permit de plus en plus de quitter le strict respect des formes pour glisser dans des assauts d’apparence plus chaotiques, imprévisibles, violents. Son cœur de guerrière vibrait de plaisir à faire face et à apprendre d’une combattante clairement aussi experte et amatrice du combat qu’elle-même.

Ruusaan se prit des coups ressentis, mais elle fût exaltée de parvenir à en asséner en retour. Dès qu’elle se déséquilibrait ou tombait, poussée par un instinct de survie rôdé par son service militaire en tant que commando clone – supposait-elle, bien que son intensité la surprenne parfois – elle se relevait et se repositionnait promptement en posture de garde ou de retraite, arrière ou latérale, afin d’être en mesure de contre-attaquer dès que possible. Elle y prenait ouvertement un malin plaisir, elle aussi…


- Regardez, un combat de Laandur !


Et un effronté eut le culot de gâcher son plaisir.

Au même moment où Leucinia bloquait l’un de ses crochets, Ruusaan avait arrêté net son assaut. Les deux Mandaloriennes s’étaient figées à l’ouïe de ce mot cordialement honni, cette injure suprême.


Les yeux d’un bleu de glace cybernétisés de Ruusaan se posèrent froidement sur l’imbécile et son sous-fifre qui avaient eu l’incongruité de faire preuve d’un tel degré de débilité. Sa posture se fit bien plus hostile, agressive, belliciste que celle qu’elle avait démontré en exercice, hormis face à Leucinia, bien que maîtrisée. La soldate autant que la Mandalorienne en elle s’étaient senties notoirement insultées.


- Permission d’opérer « dans la joie et la douleur », Al’verde ?


La voix de Ruusaan, inconsciemment, s’était faite bien plus froide et tranchante que ce qu’elle avait laissé entendre depuis son réveil. Elle était prodigieusement agacée, derrière son masque de glace. Quelqu’un avait visiblement besoin qu’on lui remette les idées en place, au prix de quelques neurones.

Accordée… très bien. Elle pourrait donc laver son honneur d’individu de genre féminin et celui de son amie et supérieure. Elles étaient toutes deux clairement outrées, et allait faire comprendre à l’infortuné les malheurs que lui apporterait son affront. L’effronté continuait de rire, comme s’il pensait qu’il était à l’abri de tout reproche et de toute sanction. C’était le genre d’attitude que Ruusaan ne pouvait pas supporter, ce manque de respect notoire.

Elle avait besoin de déverser sa colère envers cet insolent, aussi inhabituelle que soit cette pulsion.

Il était un Mandalorien, un guerrier en devenir. Il pourrait supporter une correction de cette envergure, comme elles en avaient subies et s’étaient relevées, plus fortes qu’après leur défaite. Ruu n’était pas du genre à cautionner la violence et la perte de sang-froid, mais elle avait aussi ses cordes sensibles, et celle-ci en était l’une des plus vibrantes. La permission donnée, elle frappa, encore et encore. Froidement, méthodiquement, sans colère explosive, mais avec une colère à peine maîtrisée. Elle se bridait, n’ayant pas l’intention de tuer un compatriote, juste de lui faire rentrer la leçon dans le crâne.

Seulement, Leucinia ne s’arrêtait pas. Elle ne faisait pas preuve de sa retenue habituelle.

Ce n’était pas normal. C’était trop. Il était inconscient, le message devait déjà être passé. Ruusaan prit sur elle de prendre les devants, et utilisa toute la force de l’une de ses prothèses de bras pour retenir de force le poing de la Miraluka. Elle entendait sa colère, mais abattre sa cible ne servirait à rien, cela la desservirait plus qu’autre chose. Ce n’était plus une juste correction, cela allait virer en une tuerie. Elle maintint entre ses doigts cybernétiques le poing refermé et crispé de sa supérieure, ensanglanté.

Ses yeux bleus cybernétiques semblaient l’interroger en silence : qu’est-ce qu’il se passait ?

Elle n’eut pas de réponse, mais au moins Leucinia parût sortir de sa transe meurtrière et se ressaisir. Elle désigna le partenaire de l’insolent pour ce premier l’emmène à l’infirmerie, qu’il était banni de ses cours et qu’elle aurait une discussion avec le supérieur de l’impétueux. Elle leur donna la permission de disposer et signala la fin de la leçon… si les autres élèves obtempérèrent, Ruusaan resta sur place. Ses yeux célestes ne quittaient pas du regard la Miraluka, ayant le sentiment qu’elle ne devrait pas la laisser seule dans cet état. En tant que Commando clone, elle n’aurait pas laissé un camarade dans cet état, elle n’allait pas le faire aujourd’hui. Elle la laissa se défouler sur le mannequin d’entraînement, afin qu’elle puisse finir d’évacuer sa colère et qu’elle soit en mesure de tenir un semblant de discussion.


- J'ai perdu mon sang froid. En tant qu'instructrice je suis ridicule. Désolée de t'avoir infligée ça. Vraiment.

La Miraluka avait posé son front contre le mannequin d’exercice alors qu’elle soufflait ces quelques mots, mais la colère ne semblait pas s’être tout à fait estompée si Ruusaan en croyait son attitude, et pourtant, la culpabilité qui se percevait dans ses propos sonnait sincère aux oreilles de Skirata. Elle n’avait pas l’air encline à s’exprimer et pourtant, toute son attitude criait qu’elle voulait parler, inconsciemment. Ruusaan devait donc bien choisir ses mots, aussi peu aisé que cela puisse lui être.


- Cela arrive à tout le monde, au moins il est encore en vie et avec un peu de soins et de repos, il s’en remettra. Son ego, je ne saurais le dire, mais son intégrité physique oui.


Ruusaan s’approcha de son amie, tout en restant debout, et les mains croisées sur son torse, reprit.


- J’ai aussi ma part de responsabilité, tu n’es pas la seule qui l’a frappée. Il aurait été plus raisonnable que je t’arrête plus tôt… mais nous sommes humaines, donc aussi faillibles. Tant que l’on apprend de ses erreurs. Frapper, ça défoule, mais parfois, en parler fait plus de bien. Si tu as besoin, je te prête une épaule et des oreilles attentives. Tes secrets seront les miens, tu as ma parole.


Elle voulait sincèrement aider son amie, comme celle-ci l’avait aidée au cours de sa propre convalescence. Il n’y avait aucune autre intention derrière sa proposition. D’expérience, quelques fois, mettre des mots sur ce que l’on ressentait et ce qui nous faisait sentir ainsi pouvait s’avérer bénéfique.

Il n’y avait là aucun ordre, juste une proposition, une suggestion. L’Al’verde en ferait ce qu’elle voudrait bien en faire, ce serait son propre choix. Elle la contempla sans mot dire de plus finir de frapper le mannequin d’entraînement afin d’évacuer encore de la frustration. Ruusaan ne se vexerait pas dans le cas où la Miraluka déclinerait son offre ; elle n’en reparlerait pas jusqu’à ce que Leucinia décide d’elle-même de le faire et ne se mêlerait pas davantage de ses affaires, à l’exception que cela ne mette pas l’une de ses rares amies en danger.

Sa propre expression ne devait pas être très amène, sans être tendue pour autant. Une habitude qu’elle s’expliquait mal revenait parfois lorsqu’elle était d’humeur sérieuse, que d’affecter une expression très neutre, et parfois détachée au point qu’elle puisse sembler inexpressive, insondable. Ses yeux artificiels d’un bleu vif devaient aussi entretenir cette impression de froideur, par leur nature cybernétisée qui, malgré ses exploits pour reproduire les yeux manquants, restaient froids. Ils étaient simplement attentifs, pourtant, et le reste de sa posture ne trahissait aucune tension notoire. Elle n’eut aucune réaction notoire en entendant sa comparse jurer en Mando’a, habituée depuis de nombreuses années aux injures dans leur langue maternelle et ce depuis la genèse de sa création.

Ce fût avec le même mutisme qu’elle emboîta le pas de la Miraluka, suivant l’invitation de celle-ci jusqu’à l’entrepôt où étaient stockées leurs armures séparément. Bien que le naturel aurait dicté qu’elle restât debout, Ruusaan concéda à la demande silencieuse de Leucinia et s’assit à son tour, à ses côtés. Peut-être donnerait-il moins l’impression involontaire de vouloir la confronter sur ce sujet.  


- Merci Ruusaan. Sans ton intervention... J'aurai tué ce sale bâtard!


Ruusaan ne commenta pas, même si ses traits se muèrent dans une expression à la sérieuse, amicale et attentive. Son silence dissimulait une certaine adhésion aux propos de sa comparse, mais son esprit rationnel gageait que cela n’arrangerait pas le retour au calme de sa supérieure, et recommandait plutôt d’éviter de mettre de l’huile sur des cendres encore crépitantes de colère, à en juger le ton encore furieux et enragé de la Miraluka. Il y avait des fois où il valait mieux s’abstenir de tout commentaire et demeurer une présence, certes silencieuse, mais tout à fait à son écoute. Peut-être que si l’ancienne commando clone observait une attitude calme, cela aiderait son amie à retrouver son propre calme et son plein sang-froid. En outre, il semblait que cette altercation n’était pas la seule étincelle à la colère de Leucinia, aussi voulait-elle savoir ce qui la travaillait à ce point-là. Et pour se faire, il lui semblait préférable de favoriser les bonnes conditions pour atteindre ce but.


- Bien... Par où commencer... Assis toi, ça risque d'être long... Comme tu le sais, il y a plus de six mois, j'ai perdu ma mère. Je n'arrive toujours pas à tourner la page. J'y ai perdu Leska, cette petite boule adorable et innocente! J'ai perdu Lena à nouveau et j'ai failli y rester! J'ai l'impression de devenir folle à cause de ça. De chercher des réponses. Je tourne en rond. Le clan n'a pas l'air de réagir à cette perte et ça me rend malade. Ho ils ont enquêté mais ils ne trouvent rien. Ou ne veulent rien me dire. Je sais qu'elle avait des ennemis mais aucun ne l'aurait tué de cette manière. Surtout sur Mandalore. Ils ont été interrogés et tous ont été écartés.


Ruusaan nota intérieurement toutes les informations qui lui parvenaient, et tentait de les classer pour, par la suite, les hiérarchiser et mieux les traiter. Les faits avaient eu lieu très peu de temps avant son propre retour sur Mandalore, à une période où elle était en grande partie du temps hospitalisée. C’était d’ailleurs dans ce cadre qu’elle avait fait la connaissance de Leucinia, blessée. Elle identifia naturellement les membres de la famille de son amie, concernés dans cette histoire par leur statut de victimes d’un attentat qui n’avait pas encore été élucidé, à son propre étonnement. Etain Skirata, Leska, Lena Eldar et son amie avaient été blessées, et la première vraisemblablement prise pour cible des rares éléments qui étaient venus à sa connaissance. L’inconvénient était qu’on n’entrait pas sur le sol du clan comme on pénétrait dans un moulin. Ils avaient dû être bien préparés… et bien déterminés à accomplir leur mission, qu’elle que fût cette dernière, à élucider. Il faudrait qu’elle demande plus d’informations sur Etain, à Leucinia et à Mirta, afin d’en savoir plus et ainsi de pouvoir mieux axer potentiellement ses recherches. Qui étaient ces ennemis déjà identifiés, quelles étaient les missions auxquelles la mère de Leucinia avait été directement ou indirectement associée, … tant de questions qui demeuraient, pour l’instant, sans réponse… pour le moment.


- Par moment je n'aimerai être qu'une dessinatrice qui dessine des courbes et qui s'occupe de sa lingerie. Tout se fait simplement. C'est tellement plus simple... Elles me manquent...


Ruusaan ne savait pas trop comment réagir, sur l’instant, face au chagrin ouvertement exprimé de son amie. Sans qu’elle ne sache bien pourquoi, ses propos trouvaient un écho diffus dans son cœur… encore un de ces échos qui résonnaient dans son être mais qu’elle n’arrivait jamais à élucider. Alors l’ancienne commando clone fit le geste qui lui apparût comme le plus approprié au cas de figure sans lui être trop étranger ou forcé. La trentenaire se tourna juste assez afin que son bras le plus proche puisse se poser, et reposer, délicatement sur l’épaule de sa comparse, en signe silencieux de soutien.

Ruu l’écouta, sans juger. Elle écouta la mention de la mission sur Anaxes, et les wagons de l’aérotrain que raccrochaient la Miraluka avec ce qui la hantait et la taraudait sans doute véritablement. Un message de sa mère, Etain… et de mystérieuses coordonnées à rejoindre. Un retour sur les terres du clan, chez son ancien foyer, une planque souterraine et des données sur lesquelles elle était tombée… Ruusaan absorbait en silence toutes ces informations, songeuse et concentrée. Même incomplètes, la mention des données piquait naturellement la curiosité et l’intérêt de la grande amatrice d’informatique, tant dans son matériel que surtout ses volets de sécurité et de piratage, qui aiguisaient son esprit analytique. Se faire attaquer par des Mandaloriens ? La chose était peu commune à sa connaissance, en dépit des désaccords qui pouvaient exister entre certains clans. Surtout des Mandaloriens qui ne portaient aucun insigne pour indiquer leur appartenance à un clan… très étrange. Tout comme les données, cela méritait d’être recherché, analysé et décortiqué. Leucinia s’était ensuite rendue sur une ancienne station, dont le rôle semblait être l’espionnage. Le « Chiffre » ? Peut-être avait-elle déjà entendu ce terme, mais elle n’en avait aucune assurance. Le clan Souvorov était mêlé à l’enquête, leur cheffe de clan apportait son aide à l’Al’verde. La Guerre contre les Hutts… Ruusaan se nota mentalement de rafraîchir sa mémoire sur cet évènement. La Miraluka pouvait aussi compter sur une mystérieuse Chiss, ancien contact de sa mère, et un énigmatique assassin, tous deux ayant une dette envers feu Etain Skirata. Leucinia n’était pas seule, mais sa compagnie n’était pas très étoffée à ses yeux, en dépit de la discrétion que cela apportait.

Les traits de Ruusaan semblèrent se durcir quelque peu à la mention que la tête de Leucinia était mise à prix par quelqu’un, et elle prit sur elle de contenir sa force pour ne pas meurtrir sa comparse. Elle disait ne plus faire confiance à qui que ce soit, ni au clan… et pourtant, elle s’ouvrait à elle. Ruusaan avait le sentiment que les informations qu’elle lui avait communiquées, bien qu’éparses et incomplètes, semblaient sensibles. Son instinct le lui soufflait sans la moindre once d’hésitation.


- Donc voilà. Actuellement quelqu'un semble vouloir ma tête. Je ne fais plus confiance à personne. Ni même au clan. Je ne sais pas en qui je peux encore avoir confiance et j'ai l'impression de devenir folle avec tout ça. Juste en te racontant tout ça, je mets toute ta famille en danger. C'est possible. Je n’en sais rien. Oui on est Mandaloriens mais je refuse de mettre les autres en danger. J'ai l'impression de ne plus savoir sur quel pied danser par moment. Je suis un jeu de piste toute en étant une proie. Sans aucun indice. Je ne pense qu'à ça jour et nuit. Toi et Natasha êtes les seules au courant de tout ça.


Lui tapotant légèrement l’épaule, Ruusaan préféra ôter sa main de celle-ci de peur de la blesser par inadvertance. Elle avait désormais une bonne maîtrise de ses prothèses, mais la marge d’erreur n’était pas nulle pour autant. Elle laissa ensuite la Mandalorienne lui saisir ses mains et les tapoter avec légèreté. Il lui fallut une paire de secondes pour identifier le geste comme un remerciement.



- Sinon tu veux porter de la lingerie ? C'est nouveau ça...


Leucinia voulait ainsi changer de sujet. Ruusaan respecterait sa volonté, après lui avoir partagé calmement quelques mots à propos de l’important et épineux sujet que son amie lui avait indiqué.


- Je vois. Cela me semble être une enquête complexe, et pourtant, j’ai l’impression qu’elle est encore plus délicate qu’elle ne le paraît de prime abord. Accomplir un tel forfait sans se faire attraper exige une expertise remarquable, et des informations solides récupérées en amont. Il n’y aurait pas eu, je pense, un tel degré de précision dans leur acte sinon. Je suis honorée de ta confiance, d’autant plus considérant ta position sur ce sujet concernant le clan et les autres.


Ruusaan marqua une courte pause, cherchant à mettre des mots sur quelque chose de complexe encore à appréhender pour elle, une notion à laquelle elle se familiarisait encore un peu aujourd’hui.

- C’est difficile de perdre des proches, et j’imagine que c’est pire quand ce sont des membres de ta famille. Je n’ai pas connu cela directement, enfin pas des membres de la famille, mais j’ai constaté les répercussions que cela a eu sur Jaster, Fenn et Kreizen quand nous avons pu discuter un peu, à mon retour ici. Ils ont été très marqués d’avoir appris ma « mort » lors de l’opération « Lord_Over », et visiblement de n’avoir appris ma survie que très tardivement. Même maintenant, alors que je suis rentrée, le sentiment de culpabilité ne les quitte jamais tout à fait. Je ne les blâme pas : si les rôles avaient été inversés, je m’en serais voulu jusqu’à ma mort. Je n’ai pas eu vraiment de famille en dehors d’eux et de Mirta à l’époque, ils étaient ce que j’en avais de plus proche.


Il va sans dire qu’ils l’étaient désormais, une grande famille recomposée autour de la figure de Mirta Skirata, ancienne formatrice lors de leur service de commandos clones… et le modèle génétique de Ruusaan. D’autant plus après la naissance de leur fils, Bardan, et des enfants de Kreizen. Quiconque voudrait s’en prendre à eux engagerait sa vie dans la tentative, et ne s’en tirerait pas indemne.


- Les choses seront plus claires quand tu y verras plus clair dans ce brouillard.  Tu as des pièces du puzzle, mais celui-ci semble comporter de nombreuses pièces à trouver encore. On est Mandaloriens, certes, tu es une amie surtout. On se serre les coudes. Si quelqu’un en a après ta tête, je ne peux pas l’ignorer. Et ne t’inquiète pas. Vu tous les casse-pipes que nous avons affrontées pour la République, Lord_Over en tête, je pense qu’il en faut plus pour nous effrayer.


Et quelque part, dans les méandres de son esprit encore fragmenté et parcellaire, sa récente discussion avec le « Secret Bleu » - énigmatique espionne qui avait voulu discuter avec elle et ses plus récents souvenirs de ses derniers jours auprès des Républicains nourrissaient le sentiment qu’elle-même, par sa propre présence et existence, sa survivance, les mettait aussi en danger. Elle n’avait cependant aucun élément qui puisse invalider ou confirmer ses hypothèses sur ce point nébuleux. Elle présumait en tout cas que son propre calme pouvait être expliqué par l’après Lord_Over.


- Quand tu ne sais plus sur quel pied danser, ça peut être bien parfois d’interrompre ta danse pour observer ce qui t’entoure. Ce que tu sais, ce que tu as appris, avec du recul. Ou de voir un autre point de vue, un autre angle d’approche pour choisir les mouvements que tu feras ensuite. Je ne t’imposerai pas ma présence, mais je te propose mon aide. Je sais que je ne suis pas arrivée depuis très longtemps au clan, alors je comprendrais ta méfiance. Cependant, j’ai envie d’éclaircir ce mystère, qui hante aussi ma mère, et de t’aider. Je peux te prêter main-forte, et pas uniquement au combat : tu sais qu’il y a un tout autre champ de bataille sur lequel je suis habile.


Ruusaan commençait à se faire un petit nom au sein du clan en tant qu’experte informatique, pirate informatique éprouvé et experte en sécurité et en décryptage. C’était un talent qu’elle avait naturellement cherché à développer au sein de l’Escouade Omicron, dont elle était l’experte informatique et l’éclaireuse, et qu’elle avait eu la plaisante surprise de retrouver ciselé à son « retour » suite à son amnésie, qui ne lui permettait bien de bien en expliquer les raisons. C’était une des raisons qui lui avait valu d’avoir l’honneur d’intégrer un implant prototype très particulier : le Plongeon Synaptique. Cela ne lui valait pas l’appréciation de tous, mais Ruusaan n’en avait cure. Elle n’insista pas, laissant à Leucinia le temps d’étudier ses propos, et consentit à davantage de légèreté.


- Quant à la lingerie… je ne m’y connais pas beaucoup, mais en privé cela ne me rebute pas nécessairement. C’est comme un domaine inconnu pour moi, et donc que je peux explorer. Tu sais, si j’ai des connaissances très pointues sur certains domaines, je me suis rendue compte à quel point je suis ignorante sur bien d’autres. Je ne suis pas fermée à la découverte, surtout en compagnie de quelqu’un en qui j’ai confiance pour ne serait-ce que m’y initier. Et puis qui sait, ça pourrait surprendre un peu Jaster. Cela ne lui ferait pas de mal de temps à autres.