Ride Out the Storm [PV : Arcanis] [RP Abandonné: Départ du joueur]

Juchée sur une moto jet volée à Mos Eisley, la Sith fusait à travers la mer de dune. Afin de se protéger des sables abrasifs elle s'était enroulée dans une cape noire au capuchon profond, qui claquait au grès des turbulences du véhicule autoporté. A l'horizon, par delà les lointains canyons de pierres rouges et de reflets de rouille c'était le crépuscule. Un a un les soleils rougeoyants de la planète désertique s'enfonçaient dans la nuit et le silence était parfait. Il y avait là, en ce décor minéral où la vie n'avait plus sa place, quelque chose de méditatif et d'un peu mélancolique qui convenait parfaitement à Démonia. La chasse, seulement la chasse, et autour d'elle ce vide immense, plein de rafales susurrantes et de poussières frottées, qui lui rappelait les étendues inhumaines et hostiles de Ziost.

Arrivée en vue de cette vieille ferme hydroponique que des années de tempêtes de sable avaient partiellement enterrée elle s'arrêta en faisant déraper sa motojet. L'endroit était discret, loin de toute civilisation. Le refuge idéal pour un scientifique majeur du Consortium désirant faire oublier qu'il avait fuit le front des guerres galactiques en emportant dans sa valise les plans topsecrets d'une forteresse stellaire en construction. Demonia coupa le moteur et d'une inspiration profonde, profita une dernière fois de ce silence parfait et de cette ambiance si sereine, presque onirique qui flottait sur le désert. Puis elle descendit du véhicule dans une envolée souple et gracieuse de sa cape qui retomba alors en pans flottant le long de sa silhouette intimidante.

Elle était arrivée au moment du repas. Quelle charmante vision que celle de cette famille attablée dont tout les membres levèrent les yeux vers la visiteuse encapuchonnée faisant son entrée. Il y avait là un homme, dont le vieil uniforme d'Hapès avait connu de meilleurs jours. Une femme qui tenait encore sa cuillère à hauteur de sa bouche sans oser y toucher. Et deux jeunes enfants, petites bouilles curieuses et souriantes, pour qui l'arrivée d'une créature rouge toute de noire encapée était une distraction bienvenue dans leur quotidien devenu si morne depuis que leur père leur avait imposé la fuite et l'exil. Personne ne parlait. La surprise était trop complète et le silence si dense que l'on entendait dehors le doux hululement de poussière charriée du désert.

D'un geste de la force Demonia referma la porte derrière elle. La verrouilla même. Puis elle dégrafa sa cape qui comme pour un spectacle, ruissela le long de sa silhouette pour s'effondrer au sol en un tas informe qu'elle enjamba du haut talon effilé de ses longues bottes de cuir de Leviathan. Elle était belle. Toute de rouge presque dénudée, avec ses tatouages de chasseresse Sith qui faisaient comme un pelage son épiderme glabre. Gracieux tels de longs serpents exotiques apprivoisés, ses tentacules alliens pendaient le long de son visage. Quand à ses yeux ils étaient d'une ambre fauve et perçante. Des yeux où couvaient la fureur luisante du côté obscur et qui perçaient la pénombre de cette ferme aux éclairages défaillant.

Ce qui se passa ensuite lorsque la lame de son sabre laser s'alluma en vrombissant fut d'une cruauté inouïe. Ni les suppliques de la mère, ni les sanglots des enfants ne firent faillir son bras. Elle était la mort incarnée, le bras armée de la vengeance de la Déesse Mère du Trône d'Or. Son sabre tranchait, découpait. Le monde baignait dans le halo rouge et électrique de la lame. Du sang en longues giclures pourpres s'étala sur les murs. Un à un les membres de la famille s'effondrèrent. Le dernier à partir fut le plus jeune fils qui s'était réfugié dans un angle de la cuisine et à qui elle imposa d'abord le silence en murmurant "chut" avant de le décapiter d'un souple fouetté qui envoya la petite tête aux boucles blondes rouler sur le sol.

Lorsque Demonia ruisselante de sang ressortit de la ferme, la nuit était pleinement tombée sur le désert. Au loin quelques chacals des sables sentant peut être déjà les cadavres, hurlaient de façon lugubre aux lunes. Le vent s'était levé. Ample, leste, il soufflait sous les étoiles et agitait comme une chevelure rubiconde les tentacules crâniens de l'Alien victorieuse. Délicatement elle porta un émetteur crypté à ses lèvres encore poisseuses du sang de ses proies et fit son rapport à ses commanditaire d'une voix calme, aux inflexions parfaitement maîtrisées en dépit de la violence du moment.

"-Le scientifique et sa famille sont morts Major. Par contre je n'ai pas retrouvé l'holo-disque contenant les plans de la forteresse stellaire. Il doit être caché ailleurs. Je vous transmet mes coordonnées. En attente d'extraction."

Mais...

Il était une chose que la pragmatique Major semblait oublier. Demonia n'était pas à son service, et ne le serrait jamais. En effet comme la plupart des Sith de haute tradition, la Chasseresse Rouge ne se reconnaissait de maîtres que le côté obscur et son incarnation divine : la Reine absolue d'Hapès. Pour tout le reste, à commencer par les alambiquées instances militaires du Consortium elle n'avait qu'un maigre dédain. Au mieux elle considérait le Consortium comme un faisceau d'alliances de circonstances, au pire comme un ramassis de nobles imbus de leurs personnes et trop occupées à ronronner aux oreilles de courtisans aux parfums de sucre, pour se rendre compte des réalités de cette guerre centenaire.

Laissant la Major parler, Demonia s'était mollement appuyée contre sa motojet. Elle ne disait rien, et ne faisait rien pour infirmer cet évident manque de tact dont faisait preuve son interlocutrice. Mais il y avait quelque chose de narquois dans sa posture. Elle avait croisé ses bras sous sa poitrine, et ses fins sourcils sombres s'étaient légèrement arqués en accents aigus de désapprobation. Autour de son cou, le long de ses épaules dénudées, ses longs pseudopodes rougeâtres ondulaient mollement, en rythme avec la brise du soir, comme une paire de serpents à sonnette. Juste le silence, ces très longs silences qu'elle laissait s'éterniser jusqu'à l'inconfort. Parce qu'elle était comme cela la Sith. Une créature de peu de mots mais dont les regards avaient cette acuité incendiaire, toute de souffre et de braise, qui vous perçait jusqu'à l'âme.

Mais...

Demonia ne laissa pas la Major poursuivre sa phrase. Délicatement elle lui plaqua son index sur les lèvres. Pour lui intimer le silence comme elle l'avait fait avec l'enfant du scientifique. Pour surtout l'inviter à écouter. Le désert qui crissait, les infimes déplacements de sable d'un scorpion qui trottait. Et plus loin, beaucoup plus loin dans la force. Là où les sens devenaient prescience, où le monde ressemblait à un étang que des turbulences faisaient parfois frissonner. Déjà dans le ciel on voyait poindre la navette de l'équipe technique d'Arcanis. L’aéronef volait au dessus des dunes, se balançant dans les turbulences de chaleur que le sable relâchait à la nuit tombée. Le bruit léger, brouillé, de ses propulseurs était quelque chose de rassurant aux oreilles de la Sith. Quelque chose de familier qu'elle avait entendue sur maints théâtres d'opération. Sauf que cette fois ci le vaisseau léger n'était pas seul.

« -Couchez vous Major. Nous avons été trahies ! »

La force. Comme ces animaux qui sentent l'orage arriver sans regarder le ciel, comme ces chauve souris se guident au rebond des ultrasons. Une fraction de seconde après l'avertissement de la Sith, deux chasseurs ultra rapide de la République émergèrent d'un nuage de sable, en faisant hurler leurs réacteurs atmosphériques. A l'unisson les pilotes firent feu sur la navette du Consortium. Lasers et torpilles crevèrent les boucliers du transporteur pris en défaut, qui explosa en une terrifiante boule de feu au dessus de la ferme. Comme un feu d'artifice, à la façon d'un gigantesque saule pleureur de flammes, le carburant embrasé, chuta lentement du ciel pour venir allumer de brefs mais ardents brasiers à la surface des dunes. Quand à l'épave calciné de l’aéronef, elle s'écrasa dans le sable en projetant des débris alentours, rebondit encore, puis termina sa course avec un affreux grincement métallique.

Lorsque le silence revint et que les chasseurs eurent disparus derrière l'horizon Demonia se releva en époussetant machinalement le sable qui avait giclé sur elle. Cette opération en terrain républicain avait pêché par son arrogance. Quelqu'un avait trop parlé et la planète et son orbite avaient été mises sous surveillance. Comme trop souvent les deux femmes se retrouvaient seules, isolées derrière les lignes ennemies avec à charge de remplir une mission impossible. De dépit et d'ironie mêlée la Sith court vêtue soupira. Puis elle se tourna vers la Major qui avait toujours été la tête pensante de leur paire dysfonctionnelle, pour faire observer avec ironie.

« -Que disiez vous au sujet des contretemps ? Je pense qu'il est temps de passer au plan B. »

B comme joyeux Bordel.

Conformément au plan prestement mis en place par Arcanis, Demonia était restée en retrait. Une de ses haute botte noire s'appuyait crânement contre le mur de la ferme et elle avait rabattu le capuchon de sa cape sur ses traits rouges. Dans le noir de cette belle nuit de Tatooine il était presque impossible de deviner sa présence. La faute au côté obscur, à cette fusion charnelle avec l'obscurité et tout ce qui touchait au manque de lumière qu'entretenait la Maitresse des Sith. Mais pour qui aurait été parfaitement attentif, il était quand même possible de discerner les éclats incandescents de ses yeux. Deux billes fauves à l'exotisme de chatte noctambule, qui dans la pénombre de la capuche jetaient sur l'univers un regard aussi perçant que cruel.

C'était dans ces moments là, d'urgence et d'adaptabilité que Demonia appréciait la Major. En effet, une fois Arcanis mise au pied du mur, sans possibilité de jouer avec ses ridicules gadgets ou bien de de faire appel à ses petits soldats dévoués, elle se révélait une puissante guerrière. Oui la Maitresse Sith lui trouvait même un certain talent. Des qualités de maîtrise de soi, et d'instinctive réactivité qui auraient fait un malheur chez les Sith. Peut être une fois cette mission résolue faudrait il proposer à Arcanis de venir en stage sur Ziost. Demonia avait dans sa tanière une magnifique collection de fouets et autres jouets qui permettaient de faire ressortir le meilleur d'un individu proprement ligoté et enchaîné. L'idée d'imaginer la Major débarrassée de son armure rutilante et de sa morgue, plaisait tant que à Demonia que cette dernière ne put retenir un sourire. Ou plutôt un rictus qui lui fit se pourlécher les lèvres.

Et puis il y eu la déflagration de l'arme sabotée de la Major qui prit tout le monde par surprise. Du beau travail. Cela en était presque trop facile songea la Sith en voyant les pauvres soldats de la république peiner à reprendre leurs esprits. C'était le signal qu'avait attendu Demonia. Une façon comme une autre d'indiquer que la saison de la chasse était ouverte. Alors elle s'élança à l'assaut pour se porter en renfort d'Arcanis et profiter de l'ébahissement des soldats. La Sith était une créature souple et musclée et lorsqu'elle faisait appel au côté obscur pour doper son adrénaline elle se déplaçait avec une célérité irréelle. Elle ne courrait pas, elle fusait sur le sable. Dans son dos, sa cape claquait et tourbillonnait. Ce n'est qu'au dernier moment alors que ses bottes trouvant un point d'appui sur la dune prenaient leur impulsion, qu'elle activa son sabre.

Rouge, vrombissante la lame se matérialisa dans l'obscurité de la nuit. Aux yeux des soldats dépassés, Demonia n'était qu'un éclair de foudre rougeoyante. Elle frappait vite, avec une violence exacerbée. Là où l'ombre de sa cape passait en tourbillonnant, des membres arrachés à leurs corps volaient de droite et de gauche. La Sith aimait à démembrer ses proies, à les laisser se rouler de douleur dans le sable, sans les achever tout de suite. Elle était une assassine. Elle était un instrument de terreur qui se vautrait dans la barbarie la plus abjecte en laissant derrière un sillage de corps inutilement massacrés. C'était sale, poisseux. Aux élans harmonieux du sabre fendant l'air, se mêlaient de paniquées giclées de sang pourpre. Parfois la Sith rigolait tant elle aimait ça et tant s'abandonner à la fureur la grisait.

La Sith s'était contentée de tuer la moitié des gardes républicains. Les autres elle les laissait à la Major. C'était sa façon à elle de reconnaître qu'au moins pour un temps la Major allait être sa compagne de chasse, et que donc elles partageraient leurs proies. Très vite le calme revint sur le désert. Parce qu'il avait été lacéré par les coups de sabre laser et les impacts des armes d'Arcanis, le transport de troupe ravagé se consumait doucement. Seules survivantes les silhouettes des deux femmes se détachaient avec victoire sur l'arrière plan du brasier. Tout autour d'elles ce n'était qu'une triste jonchée de cadavres. Aucun de ces soldats n'étaient préparés. La plupart étaient trop jeunes et mal équipés. Ils n'avaient eu aucune chance. Quand à Demonia comme de coutume elle ne disait rien. Simplement elle contemplait les flammes et elle regardait les panaches d'étincelles monter en spirales hypnotiques vers les étoiles.