HNN News
Alerte HNN People: Bal huppé sur Coruscant ! Comme toujours, le Moff von Rosenhart a su s'entourer du gratin de la haute société impériale mais qui est la mystérieuse beauté au bras de l'amiral Reige ?
Le Deal du moment : -45%
PC Portable LG Gram 17″ Intel Evo Core i7 32 Go ...
Voir le deal
1099.99 €

Aller en bas
avatar
Invité
Invité

Maître Tamaab Nadon, "accoucheur de la Terre" [Work in progress] Empty Maître Tamaab Nadon, "accoucheur de la Terre" [Work in progress]

Ven 3 Jan - 4:39

 
 

Equipement :


Sabre laser vert, lame simple.
Petit droïde d'analyse  : capacités de base en informatique (infiltration dans systèmes très simples, stockage de données sur les écosystèmes, fait des relevés d'atmosphère, de climat, de relief, de composition des sols).
Ceinture multifonction Jedi + sacs de graines de plusieurs sortes. Plantes médicinales, nutritives ou dangereuses pouvant être utilisées en cas d'urgence.
Une graine de wroshyr qui lui a été donnée par les Wookiees.

             

Description physique :


Au premier abord, Tamaab Nadon n'a rien d'impressionnant. Certes, en culminant à un peu plus de deux mètres, il dépasse d'une ou deux bonnes têtes l'immense majorité des humanoïdes, mais sa bosse et la courbure de son cou le font paraître plus petit qu'il n'est. Somme toute, sa stature ne sort pas de la norme ithorienne. Au contraire, elle est tout à fait moyenne.
Si la pigmentation de certains de ses congénères peut tirer sur un vert presque bleu, signe, dans la tradition ithorienne, d'une naissance marquée par la Force et la fortune, Tamaab ne se distingue absolument pas non plus à cet égard : dans les tons beiges et bruns, sa peau gaufrée, repliée sur elle-même, ressemble à tous points de vue à l'idée que l'on se fait des Ithoriens sans en avoir jamais vus autrement qu'en holo.
Sa démarche, que certains humains pourraient juger comique, n'a rien du pas altier et conquérant d'un Chevalier Jedi d'holofilm. À chaque pas, ses genoux montent bien haut et sa tête oscille d'avant en arrière. Les plus observateurs peuvent néanmoins remarquer une certaine légèreté dans cette allure pataude, un je-ne-sais-quoi qui trahit l'entraînement physique de Maître Nadon, et son lien étroit et constant avec la Force, qui le rend moins pesant que ses semblables.
À part ce détail au demeurant fort peu remarquable, Tamaab Nadon est donc un Ithorien des plus classiques. Deux gros yeux noirs enchâssés au sommet d'un crâne plat, deux longues bouches sur les côtés d'un cou épais : une parfaite « tête de marteau ».

Maître Nadon n'ouvre que rarement ses deux bouches. Toujours très  attentif à ses interlocuteurs, il les regarde souvent longuement et prend son temps avant de répondre. En revanche, lorsqu'il prend la parole, l'Ithorien fait preuve de sagacité, d'un remarquable esprit de synthèse et d'une qualité rhétorique indéniable. Son accent guttural lorsqu'il s'exprime en Basic n'éclipse en rien la qualité de son langage, d'autant plus soigné qu'il a été appris et travaillé, puisque Tamaab ne parlait qu'Ithorien en arrivant sur Tython la première fois. Une langue simple, élégante, soignée et allant droit au but : voilà l'idéal de la parole que se fait Maître Nadon. Son naturel timide, en public, se manifeste par des signes d'humilité. Lorsqu'il prononce un discours devant un parterre d'investisseurs ou un groupe de chefs Wookiee, il n'essaie pas particulièrement de s'adapter à son auditoire, de haranguer la foule ou de se montrer flamboyant. Toujours égal à lui-même, il dégage une impression de sérénité et suscite des émotions douces, que ce soit la joie ou la tristesse selon les circonstances. L'entendre parler n'en est pas pour autant ennuyeux, au contraire : si Tamaab Nadon est si taciturne d'ordinaire, c'est parce qu'il considère que peu de choses sont suffisamment importantes pour mériter d'être dites.

Outre son éloquence discrète mais certaine, construite au cours de nombreuses années de service comme consulaire, on reconnaît à Nadon sa qualité de Jedi à ses vêtements, des bures colorées qui tranchent avec la tenue souvent terne et sombre de ses pairs. Du rouge au bleu en passant par l'ocre et le vert, la garde-robe de l'Ithorien n'a néanmoins rien de tapageur. Toutes ses robes ont des pigment chauds et doux, comme si la couleur avait été mélangée à de la crème avant d'imprégner le vêtement. Peu de gens se souviennent avoir vu Maître Nadon sans cet accoutrement. Par temps chaud, il se débarrasse éventuellement de la robe, mais il conserve toujours la tunique, le pantalon et la ceinture traditionnels de son Ordre. Enfin, à son côté pend souvent son sabre-laser, qui est à ses yeux davantage un symbole de sa fonction qu'une arme. Au contraire des « véritables » Chevaliers, les Gardiens, Maître Nadon n'accorde que peu d'importance à son outil, considérant qu'il s'agit certes d'un bel objet, d'une conception admirable, merveilleusement précise et fort efficace, mais qui n'est pas nécessaire, la vie pouvant être préservée et la mort donnée par bien d'autres moyens. Par conséquent, peu sont ceux qui ont vu la lame viridienne chuinter hors de sa garde simple et sans ornement, et plus rares encore sont ceux qui ont souffert sa brûlure.

               

Description mentale :


 « Il n'y a pas d'émotion, il y a la paix. »
« Réservé. » C'est sans doute le premier mot qui venait à l'esprit de ses professeurs lorsqu'on leur demandait ce qu'ils pensaient du Novice ithorien. Timide, Tamaab Nadon l'a été sans aucun doute, et l'est resté, même si toute angoisse liée à l'expression en public a disparu. En raison de sa mauvaise maîtrise du Basic à son arrivée au Temple et d'un certain perfectionnisme langagier, l'Ithorien a pris l'habitude de peu parler, et de mûrir longuement ce qu'il dit. Ce que certains pourraient prendre pour de la distraction est en fait tout l'inverse : lorsque Tamaab Nadon s'investit dans une tâche ou médite un problème, sa concentration est telle qu'il est difficile de le détourner de son objet. La tenue d'une conversation ne fait pas exception. Le Jedi fait attention à tout venant de son interlocuteur : termes employés, tournures de phrase, postures, expressions réflexes... et en retour cherche à peser ses propres mots. « Flegmatique » C'est sans doute le terme qu'utiliserait plutôt l'intéressé pour se décrire. Parfois doucement triste, parfois enthousiaste ou joyeux, très rarement en colère, Nadon demeure dans tous ces cas d'un grand calme, si bien qu'il est presque impossible de déceler ses changements d'humeur, si tant est qu'il en ait réellement. En outre, conscient du fait que sa vision particulière de la Force peut le rendre étrange aux yeux de ses pairs, il s'abstient souvent de partager ses expériences de communion avec les esprits.

« Il n'y a pas d'ignorance, il y a le savoir. »
Contrairement à beaucoup de Jedi qui ont développé des compétences dans de nombreux domaines sans éprouver de difficulté, par instinct, Tamaab Nadon n'a guère de don naturel, hormis son lien tout à fait exceptionnel avec les esprits de Naturae, et en particulier ceux de la terre et du vivant. Le reste, il ne l'a acquis que par une grande rigueur méthodique. Son manque d'autres talents notables l'a paradoxalement rendu extrêmement perfectionniste dans ce qu'il entreprend. Conscient qu'il n'a pas l'aisance de nombre de ses pairs pour le combat, le pilotage ou l'intrigue politique, ce Maître Jedi a développé des techniques d'apprentissage extrêmement  efficaces fondées sur la compréhension de l'erreur, son analyse et sa correction.

« Il n'y a pas de passion, il y a la sérénité. »
Cette fréquentation continue et rigoureuse de l'échec lui a permis de s'approprier pleinement la morale stoïcienne des Jedi. Pleinement conscient de ses facultés, Maître Nadon sait pertinent ce qui dépend de lui et ce qui lui échappe. Cette lucidité sur ses propres capacités d'action lui permet souvent de prendre des décisions judicieuses et de garder la tête froide lorsqu'une situation le dépasse. Son habitude de ce que beaucoup pourraient appeler le « surnaturel » a aussi beaucoup émoussé la capacité de l'Ithorien à être pris par surprise par une situation. Si Tamaab Nadon devait être égoïste, il s'isolerait pour méditer indéfiniment dans les jardins du Temple de Tython, immergé dans la Force, flottant dans l'air, en totale communion avec les esprits de la vie, en particulier Enill et Enklish. Toutefois, la conscience qu'il a de son pouvoir aiguillonne sans cesse son sens du sacrifice. Le don de Naturae, s'il ne le rend pas capable de tout, est une bénédiction bien trop rare pour ne pas être mise au service de la galaxie.

« Il n'y a pas de chaos, il y a l'harmonie. »
L'Ithorien a en effet une conscience aiguë et une haute idée de son devoir envers le reste de la galaxie, même s'il ne se voit pas en sauveur suprême ou en justicier. Il sait fort bien que son influence sur l'univers n'a pas de sens, ni de portée, à elle seule, mais uniquement combinée avec celles de milliers, de millions d'autres individus œuvrant de la même manière. Maître Nadon connaît sa place dans les rouages de l'univers. Son intelligence des systèmes, affinée par sa puissance, lui fait ressentir les courants dans le hasard de l'univers. Ce que certains appellent la chance n'est pour lui rien d'autre que l'ordre infiniment complexe de la Force et la forme que lui donnent les esprits qui l'habitent.

« Il n'y a pas de mort, il y a la Force. »
Parmi toutes les passions qui guettent le Jedi et risquent de le faire basculer du Côté Obscur, la peur est sans doute celle qui menace le moins l'Ithorien. Il a dès longtemps accepté sa finitude et celle des autres. Si certains trouvent la perspective déprimante et s'enferment dans le nihilisme, Tamaab Nadon a toujours considéré cette posture étrange. C'est à l'être conscient de décider de ce qui importe dans sa vie. S'il éprouve joie et sérénité, pourquoi sans cesse se dire « À quoi bon ? ».
La mort de son organisme, de sa conscience, n'effraie pas le moins du monde l'Ithorien, car elle ne signifie pas disparition de la vie. Son corps est remis au monde qui l'a créé et entretenu, rendu aux grands esprits qui le parcourent, et la Force continue d'en parcourir les cellules, les atomes. Les Jedi les plus habiles peuvent faire perdurer leur conscience elle-même par-delà le trépas, mais de cette technique non plus Tamaab n'a jamais compris l'intérêt. C'est la finitude qui fait le sel de la vie, et c'est la certitude rassurante que tout retourne en définitive à la Force qui permet de ne pas gâcher son temps à poursuivre l'immortalité. L'Ithorien a d'ailleurs toujours été fasciné par les individus à la longévité exceptionnelle, qu'il trouve à la fois majestueuse et malsaine. Comment ne pas perdre de vue ce qui importe quand les siècles défilent sans que l'âge ne passe ? Comment donner du sens aux autres quand ceux-ci s'évanouissent en un instant, comme des éphémères ? La mort, aux yeux de Tamaab Nadon, est une bénédiction, certitude bénie de se fondre, un jour, dans cette nature divine, de cesser d'être une partie pour devenir le tout.



           
           

Histoire :


Comme de l'aquarelle sur une vieille feuille, toute la petite enfance de Tamaab Nadon a perdu la vivacité de ses couleurs pour ne devenir qu'un portrait pâle, diaphane, dont les contours flous se sont estompés avec le passage des ans. Ne reste plus qu'une impression, une teinte tranquille qui colorera ce temps tant que Nadon vivra et se souviendra. Dans cette douceur diffuse – car la mémoire d'une enfance heureuse, chez ceux qui s'âgent mais ne grandissent plus, n'est jamais rien d'autre – une tache vive demeure, si précise qu'on la croirait taillée à la plume et à l'encre.

C'était sur Naboo, en 1454. Les grandes plaines des environs de Theed accueillaient dans leurs herbes grasses le Temps des Rencontres. Les Ithoriens étaient là par dizaines de milliers, ayant quitté leurs vaisseaux-troupeaux pour venir célébrer la fertilité de la galaxie, se retrouver et s'accoupler. Cette coutume, fort ancienne, se raréfiait en raison de la dispersion des Ithoriens dans la galaxie, de la destruction de la Jungle Mère d'Ithor par les Yuuzhan Vong plusieurs siècles auparavant, et d'un abandon progressif du nomadisme par de nombreuses communautés. Ses occurrences de plus en plus espacées rendaient le Temps des Rencontres d'autant plus festif et d'autant plus médiatisé. Outre les Ithoriens, ces jours de liesse de 1454 accueillaient donc de nombreux artistes, les Naboo dont la reine patronnait l'événement, et de nombreux représentants de systèmes républicains venus honorer cette vénérable tradition, née durant les débuts de l'Ancienne République. La tenue de ce qui devenait en fait un festival presque militant dans les paysages célèbres du monde capitale de la République (alors qu'Ithor faisait désormais, et depuis longtemps, partie de l'espace impérial) avait une indéniable portée politique, mais il convient de laisser là ces considérations dont Tamaab n'avait pas conscience.

Du haut de ses cinq ans, le petit ne voyait guère que le vert tendre des herbes et l'espoir merveilleux de son père, qui venait chercher parmi ses congénères une nouvelle compagne. Le passage de quarante-six ans ont délavé, dans l'esprit de Tamaab, le visage de son géniteur. Tout au plus se rappelle-t-il sa haute taille (mais tous les adultes n'étaient-ils pas hauts ?) et son teint semblable au sien, comme à tant d'autres Ithoriens. Le Maître Jedi ne se souvient vivement que du paisible chagrin qui tenaillait toujours son parent depuis le trépas de sa femme, peu après la naissance de leur seul fils.

Toujours est-il que Gillom Nadon vibrait ce jour-là d'une rayonnante espérance qui rendait son enfant euphorique. La musique, les mets délicieux, les odeurs d'humus, les rires et les vêtements bariolés qui dansaient dans la lumière du soleil enchantaient Tamaab, qui jouait avec les autres enfants dont c'était le premier Temps des Rencontres. Toute la première journée de célébration avait passé comme un rêve heureux, à courir, se baigner dans les lacs et chanter des chansons ithoriennes. La nuit venue, Tamaab s'était endormi, épuisé, avec un large sourire sur ses deux bouches, bercé par les vibrations de la terre agitée par les danseurs nocturnes.

L'homme aux bures, un petit humain blond et barbu, était arrivé le lendemain matin. Son père le connaissait manifestement, puisqu'il l'avait salué comme un ami et accueilli dans leur tente, posée au sol et lestée pour l'occasion. La conversation s'était immédiatement engagée sur un ton enjoué d'abord, même si Tamaab ne comprenait pas un traître mot de Basic. Il était donc parti rejoindre ses camarades pour aller regarder les insectes. Lorsqu'il était rentré à midi, l'homme aux bures quittait la tente. Il salua Tamaab d'un geste de la main et d'un sourire, puis partit. À l'ombre de la toile, Gillom, assis en tailleur, regardait dans le vide. Tamaab avait immédiatement ressenti une nouvelle inquiétude chez lui. Comme à chaque fois que son père éprouvait une émotion forte, elle s'était étendue à son fils par le sol, comme une eau soudaine retrouvant le lit de son ruisseau. Lorsqu'il y prêtait attention, Tamaab comprenait confusément ce que les gens proches de lui ressentaient, comme si leurs émotions se propageaient dans la terre ou dans la veine métallique du vaisseau-troupeau. Cela lui paraissait tout à fait normal, jusqu'à ce jour où il comprit que ça ne l'était pas.

- Papa, qu'est-ce qu'il y a ?

Son père manqua de sursauter au son de la voix de son petit. Ses yeux noirs se tournèrent vers lui et il sourit, puis tendit le bras en faisant signe d'approcher, sans un mot. Tamaab le rejoignit, laissant les bras l'étreindre, se blottissant sous le cou. La voix grave et douce, rassurante, ne trahissait pas la moindre tristesse.

- Tout va bien, fils. La discussion avec mon ami Jedi m'a rappelé des choses importantes que j'avais oubliées.

« Jedi. » Ce n'était pas la première fois que Tamaab entendait ce mot, et il lui attachait des valeurs très positives, mais il n'aurait pas bien su expliquer ce dont il s'agissait. Il allait demander mais Gillom le devança.

- C'est un homme bon, qui connaît la Force. Tu te souviens de ce qu'est la Force, Tamaab ?
- Oui papa.

Les traditions ithoriennes, très liées à la nature et aux merveilles de la vie, n'ignoraient pas cette énergie qui liait le cosmos en un tout unique. Quelques vaisseaux-troupeaux avaient même la chance d'avoir en leur sein un prêtre capable de ressentir, même si peu que ce fut, cette énergie. Les individus doués de cette faculté bénéficiaient d'un profond respect dans la société ithorienne, et on les consultait pour leur sagesse lorsqu'une décision importante était requise, si bien qu'ils avaient de fait une véritable autorité, similaire sinon supérieure à celles des chefs ithoriens « civils ».

- Les Jedi sont des gens qui ressentent tellement la Force qu'ils lui consacrent leur vie et qu'ils sont capable de l'influencer pour faire le bien autour d'eux. C'est très rare. C'est un don qu'ils ont à la naissance.

Le ton de Gillom avait une solennité qui étonna Tamaab. Son père était quelqu'un de patient, qui consacrait beaucoup de son intelligence à l'éducation de son fils, mais qui s'exprimait souvent avec plus de légèreté.

- Alors les parents des Jedi sont Jedi aussi ? Comme des chefs ?
- Ça arrive, mais pas toujours. C'est fréquent que des Jedi aient des enfants qui ne peuvent pas l'être, ou même des parents qui n'ont pas ce pouvoir.

La curiosité de Tamaab à l'endroit des Jedi s'épuisait déjà, mais il sentait que son père voulait en parler, qu'il attachait de l'importance à cette conversation. Le sol semblait palpiter sous les pieds du petit Ithorien. Alors il s'efforça de poser une nouvelle question.

- Et tu le connais comment le monsieur Jedi?
- C'était un ami de ta maman.

Tamaab releva la tête et vit, un peu plus haut, les yeux noirs de son père briller, comme s'il allait se mettre à pleurer.

- Papa ?

Le regard dans le vague, Gillom caressa le dos de son rejeton.

- Ta maman avait le don de la Force, mon trésor. Ce Jedi, Serdar, lui a demandé si elle voulait devenir une Jedi aussi, mais elle n'a pas voulu.

L'inquiétude de son père croissait à mesure qu'il parlait. Sa double voix se mit à trembloter légèrement.

- Pourquoi ?
- Parce que nous nous aimions. Elle voulait rester avec moi, et je voulais aussi qu'elle reste.

Il prit une profonde inspiration, comme pour faire redescendre les sentiments qui assaillaient son cœur dans son ventre, où ils seraient silencieux.

- Comme tu le sais, ta maman est... partie... à cause d'une maladie très grave. Si elle avait été Jedi, elle aurait pu guérir.
- Pourquoi les Jedi n'ont pas aidé ?

Le sol pulsait la souffrance de Gillom. Une sentiment d'immense tristesse, mélangé à autre chose, submergea Tamaab qui se mit à pleurer. Il découvrait la culpabilité. Son père le serra plus fort dans ses bras.

- J'étais bête. Je... j'avais peur qu'ils l'emmènent. Je... je les ai appelés à l'aide, mais trop tard. Serdar est arrivé pour l'empêcher de souffrir.

Il s'était mis à pleurer aussi, des larmes lourdes et silencieuses, plus douloureuses que les sanglots d'enfant de Tamaab, qui n'étaient d'ailleurs pas vraiment les siens. Les deux Ithoriens restèrent ainsi quelques instants, avant que Gillom ne prenne son fils par les épaules et ne le fixe dans les yeux.

- Tamaab. Tu es lié à la Force. Tu la ressens. Je le pensais déjà mais j'en suis sûr. Serdar l'a vu tout de suite.

Pour un petit de cinq ans, impossible de percevoir le poids de cette révélation, mais Tamaab avait rarement vu son père à la fois si triste et si sérieux.

- Mais, Papa...
- Laisse-moi parler, fils. J'ai dit à Serdar que tu partirais avec lui quand le Temps des Rencontres sera fini.

Cette fois, les larmes qui vinrent à Tamaab furent bien les siennes. La peur, celle de partir dans l'inconnu, celle de quitter son père, celle, tout simplement, profonde, primaire, d'être perdu, noya l'esprit de l'enfant. La raison le quitta un instant, et il hurla, poussa un cri puissant et sans inhibition dont l'écho sembla faire trembler le sol. Gillom, qui sembla d'abord désarçonné, reprit rapidement son fils dans ses bras. Le rugissement devint gémissement, puis de discrets sanglots qui durèrent une heure. Au bout de ce long moment, le père dit au fils :

- Je viendrai te voir dans un an, je te le promets. Si tu ne veux pas devenir Jedi, je t'emmènerai.

Mais Tamaab s'était muré dans le silence. Gillom prit alors un ton plus assuré, plus ferme aussi.

- Assez parlé du passé et de l'avenir. Tu ne dois pas vivre dans les regrets et les remords. C'est le Temps des Rencontres. Viens, allons manger.

*****

Les derniers jours du Temps des Rencontres passèrent fort vite. Tamaab, trop jeune encore pour être longtemps peiné d'événements à venir, s'y amusa comme peut-être il ne s'amusa plus jamais par la suite. Puis il partit avec le Jedi Serdar Bolgil pour Tython. Les séparations avec son père furent difficiles : les deux pleurèrent mais Gillom finit par lâcher son fils. « Pars, Tamaab, dit-il. Pars ou je ne te laisserai pas partir et je le regretterai toute ma vie. Attends-moi dans un an. Que la Force soit avec toi. »
Serdar fit de son mieux pour distraire l'enfant pendant le voyage. Le Chevalier était très bienveillant et parlait correctement la langue ithorienne, du moins pour un humain, mais il n'avait pas l'habitude de s'occuper d'un petit. Pour la première fois, il en enlevait un à sa famille. Il ne savait que dire, que faire, comment consoler ce bourgeon à peine éclos qu'il était déjà déraciné. Sa compassion sincère pour Tamaab l'empêcha de trouver des mots rassurants. Le Temple pouvait être un endroit austère et intimidant, a fortiori pour des enfants, et il ne pouvait se résoudre ni à lui mentir en lui donnant de faux espoirs, ni à le lui dire en risquant de l'effrayer davantage. Comment des générations entières de Jedi avaient-elles pu être constituées de la sorte ? Bien que tout soit parfaitement légal et consenti par la famille, Serdar Bolgil avait la sensation de commettre un crime. Certes, il permettait ainsi à ce garçon de canaliser son immense potentiel, qui avait immédiatement attiré son attention, et il rendait service à la galaxie en faisant de l'Ithorien l'un de ses futurs protecteurs. Que valaient toutefois ces beaux motifs, ces raisons supérieures, face aux pleurs sincères du petit ? Quelle cruauté il eût fallu pour ne pas s'émouvoir ! Arrivé sur Tython, le Jedi Bolgil fut renvoyé immédiatement en mission pendant des mois. Quelques semaines après le début de son noviciat à peine, Tamaab Nadon apprit le décès de son père tué, il l'apprit des années plus tard, par des terroristes suprémacistes humains lors d'un rassemblement de sympathisants cosmopolitains. Il se retrouva seul.

*****

Les premiers mois de son apprentissage comptent parmi les plus durs de la vie de Maître Nadon. Le décès de son père et l'austérité du Temple Jedi, en dépit de la bienveillance de certains de ses maîtres, rendirent tout d'abord profondément malheureux cet enfant jusqu'à peu si insouciant. Les leçons de morale de certains Jedi qui croyaient bien faire en disant à Tamaab qu'il fallait admettre que tous les êtres vivants retournaient un jour à la Force, par droïdes traducteurs interposés, ne produisirent pas les effets escomptés. Pour un petit qui faisait pour la première fois la véritable expérience de la mort, prenait en plein visage la finitude du monde et l'irréversibilité des choses, passer directement à la résignation et à l'acceptation sereine revenait à brûler toutes les étapes de la maturité. Aucun enfant n'en aurait été capable, et Tamaab pas davantage que les autres.
Depuis les temps de l'Ancienne République, les Jedi avaient perdu l'habitude d'accueillir des enfants aussi jeunes, si bien que le petit Nadon fut plusieurs années durant le benjamin du Temple de Tython. N'avoir que des gens plus âgés que lui, avec des préoccupations plus complexes et plus importantes – en tout cas c'était l'impression qu'ils donnaient – n'incita pas l'Ithorien à exprimer son chagrin. Il cessa donc de tenter d'en parler. Ses maîtres interprétèrent ce silence comme la preuve que le petit faisait son deuil. La plaie mit cependant des années à cicatriser complètement.
Outre son profond mal-être, Tamaab Nadon ne parlait pas le Basic. Ce fut la première chose qu'il apprit, et de manière intensive, à la fois par des cours particuliers et par la fréquentation des autres novices. Taciturne, presque mutique, l'Ithorien ne pratiqua cependant pas autant son expression orale qu'il l'aurait dû. Cela l'handicapa pendant des années, avant qu'il ne décide de se mettre une bonne fois pour toute au travail. Il ne demeure aujourd'hui de ses difficultés qu'un léger accent et une propension à choisir longuement le mot juste pour s'exprimer, mais elle l'empêchèrent de bien s'entendre avec ses camarades novices, qui le traitaient avec une indifférence bienveillante tant qu'ils n'avaient pas à interagir avec lui.
Car Tamaab n'excellait en rien. Bien que ses maîtres lui assurassent qu'il disposait d'un très grand potentiel dans la Force, ni les exercices de concentration, ni l'entraînement à l'escrime ne semblaient le faire progresser. Au bout de six mois, il parvenait à peine à se concentrer suffisamment pour soulever un petite pierre. À l'escrime, lorsqu'il devait affronter un camarade, il se faisait désarmer en quelques dizaines de secondes dans le meilleur des cas. Maître Nadon se souvient encore de l'humiliation que lui avait fait subir Nadaii, une Novice cathare de 3 ans de plus que lui, qui ne devint son amie que des années plus tard. Arrivée au Temple deux mois après Tamaab, elle s'entraînait souvent avec lui. À l'escrime, elle l'avait un jour désarmé en trois secondes et s'était agacée : - Maître ! Tamaab ne tient pas cinq secondes ! Je ne peux pas progresser comme ça ! Est-ce que je peux m'entraîner avec un droïde ?
Bien que leur formateur eût sermonné Nadaii sur les vertus de l'entraide et l'importance du respect d'autrui, l'Ithorien avait senti qu'au fond, le Jedi ne parvenait pas à donner tort à son impétueuse apprentie. De fait, Maître Nadon n'a finalement jamais maîtrisé les arts du sabre-laser au-delà du Shii-Cho, cachant à la longue son manque de talent derrière de bonnes raisons de ne pas se battre.

*****

Puis un jour, il découvrit les jardins du Temple. Tython était une planète très vivace, et les Jedi vivaient cernés par la nature. Perchée sur un promontoire, l'académie surplombait une grande vallée qui, les jours de grand soleil, offrait un saisissant spectacle face auquel de nombreux Jedi de passage appréciaient s'entraîner ou méditer. Cependant, une oasis de dense verdure, une forêt-jardin plantée par des Jedi morts depuis longtemps poussait presque librement au milieu du complexe. Elle ne se trouvait pas facilement : le Temple consistait en un gigantesque enchevêtrement de salles, de couloirs, de volées de marches, de portes dérobées et d'ailes très peu usitées, construites à plusieurs siècles d'écart. L'Ordre était né sur Tython il y avait des millénaires de cela, mais avait à de nombreuses reprises quitté la planète pour diverses raisons, en n'y revenant qu'à des moments d'impérieuse nécessité. Néanmoins, ces périodes de crise pouvaient durer des siècles, ce qui rendait nécessaire l'édification de bâtiments modernes. Force allait savoir pourquoi, on ne rénovait pas le Temple de Tython. Au mieux, on le restaurait ; mais les historiens Jedi goûtaient assez peu l'idée qu'on pût raser les ruines les plus anciennes pour rebâtir une académie plus cohérente, plus ergonomique. Aussi ajoutait-on du neuf jouxtant l'ancien.
Quoi qu'il en fût, Tamaab s'amusait parfois à prendre une direction inconnue de lui pour découvrir des parties insoupçonnées du Temple. Cet innocente distraction lui attirait parfois des ennuis, car certains morceaux de ruines étaient dangereux, parce que la Force y formait une puissante vergence, ou tout simplement parce que les murs érodés par les siècles menaçaient d'ensevelir le premier venu. Mais aller et venir sans permission constituait l'une des occupations préférées du petit garçon, l'une des seules qui pût le tirer aisément de sa morosité habituelle, si bien que peu de Jedi, parmi ceux qui le trouvaient à errer dans les vieilles pierres, avaient le cœur à le réprimander sérieusement.

C'est en flânant de la sorte que Tamaab trouva son sanctuaire, et rencontra sans le savoir pour la première fois les esprits.

Un jour, attiré par une brise fraîche et l'ombre de feuilles sur un mur couvert de mousse, il s'y aventura. En passant sous une arche en ogive, perdue dans les profondeurs du complexe Jedi, il changea pour ainsi dire de monde. Les piliers branlants devinrent de solides troncs, tordus par le vent et les décennies ; les arches aux pierres délogées, une canopée transpercée çà et là par les rayons du soleil ; le gris du roc vira au vert le plus vif, au jaune, au rouge, au bleu et au blanc, cette myriade de couleur soutenue par des branches de toutes les tailles. Quelle beauté ! Tamaab en resta bouches bées plusieurs minutes, admirant avec quelle finesse, quelle complexité, quelle audace, l'architecture naturelle surclassait sans souffrir l'artificielle.
Enfin il s'assit et ferma les yeux, sentant la Force converger vers lui. C'était la seule « compétence de Jedi » qu'il maîtrisait correctement : sentir le monde autour de lui sans avoir besoin ni de ses yeux, ni de ses oreilles, ni de sa peau, ni de son nez – si tant est qu'on puisse appeler les organes qui servent aux Ithoriens à entendre et à sentir des oreilles et un nez. Cependant jamais il ne se fondit dans son environnement aussi intensément qu'à cet instant. Son corps cessa brusquement d'être un organisme particulier et sembla s'évanouir dans la terre. Les perceptions de Tamaab filèrent dans les entrailles du jardin, trouvant les racines les plus enfouies, avant de remonter dans la fibre et la sève, suivant les faisceaux ligneux, les entrelacs de cellules, parcourant leurs innombrables ramifications jusqu'à la cime où il ne fit plus qu'un avec la canopée, sentant les oiseaux peser sur ses branches, les insectes gratter son écorce et butiner ses fleurs, les petits rongeurs s'abriter sous ses racines.
Il resta ainsi, dans un état de béatitude absolue, jusqu'à ce que le soleil décline. Il réintégra alors son corps, et avec lui le froid du soir tombant, la faim d'une journée sans manger et surtout l'épuisement, qui manqua d'abord de lui faire perdre connaissance. Il peina à se relever, puis à quitter les lieux et à retrouver son chemin dans le dédale. Il n'entendit presque pas le sermon que lui fit le Maître – lequel ? Impossible de se le rappeler – sur sa tenue maculée de terre et son absence prolongée.
Il n'en retourna pas moins au jardin dès qu'il le put : le lendemain. Puis le surlendemain. Il y trouva un sentiment qu'il n'avait jamais connu, une plénitude, une sérénité, une paix, tout simplement. Il comprit que le pouvoir de la Force, qui lui avait valu tant de malheurs, qui lui avait coûté son père, n'était pas la malédiction qu'il avait cru. Il revint au jardin presque quotidiennement, se familiarisant avec tous les arbres, toutes les plantes, toutes les mousses, tous les animaux, petits et grands.
Alors seulement il commença véritablement l'entraînement des Jedi. Grâce à la connexion à la Force qu'il découvrait et développait dans son jardin, il se mit à réussir les exercices imposés par les Maîtres, et sans difficultés particulières tant qu'on ne lui demandait pas de se mesurer à des camarades, qui tous l'intimidaient en lui paraissant complètement étrangers, bruyants, puants même. Le Jardin devint le cœur de sa vie, et le reste se déroulait comme dans une brume, sans qu'il y songe vraiment bien qu'il fît preuve de beaucoup plus d'application qu'auparavant. Ses tuteurs eurent du mal à comprendre cette attitude à la fois distraite et pourtant bien plus concentrée qu'auparavant. Ils sentirent le changement chez leur plus jeune élève – mais après tout comment ne pas s'attendre à des changements radicaux chez un garçon de six ans qui, arrivé dans un monde dont il ne comprenait même pas la langue, privé totalement de famille, se découvrait un immense pouvoir dont il ignorait tout ? Ils l'imputèrent donc aux circonstances difficiles de sa vie. Les Jedi ont beau être Jedi, ils n'en deviennent pas pour autant pédopsychiatres.

*****

Au cours de sa troisième année de noviciat, en franchissant l'arche en ogive, Tamaab tomba sur son père. Du moins le crut-il, jusqu'à ce que celui qui lévitait à l'ombre des arbres se retourne et regarde le nouveau venu. C'était en fait une Ithorienne.

*Approche, petit d'Ithor.*

Le novice Nadon faillit tourner les talons. Un goût d'amertume et de déception envahit ses bouches. Toutes ces années, il avait pensé être seul à connaître ce Jardin, son Jardin. Au fond de lui, il s'était souvent douté qu'il n'en était rien, mais voir une autre Jedi y méditer lui donnait douloureusement raison. Un ineffable souffle le retint sur le seuil, entre l'herbe et la pierre. Qui était cette Jedi ? Pourquoi ne lui parlait-elle pas de vive voix ? Les Maîtres les avaient mis en garde contre les manifestations du Côté Obscur, parfois trompeuses et très intimes, mais Tamaab ne ressentait aucun danger, au contraire. Aussi approcha-t-il sans mot dire.

*Tu viens ici souvent.*

Ce n'était pas une question. L'Ithorienne dressait un constat, rien de plus. Malgré tout, Tamaab se sentit obligé, par politesse peut-être, de bredouiller une réponse.

- Ou... oui madame.

L’œil de la femme sembla pétiller, comme si elle trouvait cette formalité amusante. Le petit garçon, intimidé, osa malgré tout une question. Il voulait comprendre : qui connaissait le Jardin ? À quel point s'était-il trompé depuis le début ? Pourtant, alors qu'il venait plusieurs fois par semaine, il n'avait jamais croisé personne. Sans doute d'autres Jedi connaissaient les lieux, mais leur venue ne pouvait être que rare.

- Vous êtes de passage ?
*Comme tout le monde.*

Tamaab ne tint pas vraiment compte de cette phrase, qui lui sembla faite du même bois énigmatique que les formules évasives que les Jedi donnaient comme réponses à toutes les grandes questions. Une véritable passion Jedi, que d'offrir des préceptes vagues à des apprentis en quête d'un savoir qui compte véritablement dans la compréhension du monde.

- Comment savez-vous que je viens souvent ici ?
*Je te sens à chaque fois que tu t'assois sur la terre, que tu poses tes mains sur les arbres, et que tu chantes avec les oiseaux, bourdonnes avec les insectes, que tu vogues dans le dôme de la forêt.*
- Mais comment ?
*Par le vent qui porte ta présence. Par l'eau de pluie qui ruisselle sur les branches. Par l'humus où plongent les racines. Par la Force.*

Quel charabia ! Tamaab était encore bien jeune, et il n'est pas certain qu'un âge plus avancé l'eût aidé à comprendre ces propos tout à fait sibyllins. Mais il n'est pas aisé de comprendre les esprits. Le novice Nadon n'en avait pas conscience, mais communier de la sorte avec Naturae comme on pourrait discuter avec un être conscient s'avérait particulièrement exceptionnel. Toutefois, il ne savait rien de Naturae, même s'il sentait sans se l'expliquer que des entités douées de volonté parcouraient la Force. Les enseignements des Novices n'expliquaient pas, et même ne mentionnaient pas ce don, ce qui n'était guère étonnant, dans une académie aux Maîtres conservateurs.

*La moindre de tes actions dans la Force produit un écho. Tu le sais. Tu le sens dans la terre, qui a toujours vibré pour toi.*
- Comment savez-vous tout cela ?

Tamaab n'aurait dû éprouver qu'une saine méfiance, mais sa question était pleine d'une sincère et candide curiosité. Dans la Force, l'esprit n'avait rien de menaçant, tout au contraire.

*Tu viens ici si souvent. Comment pourrais-je ignorer quoi que ce soit de toi ? Depuis ta naissance, je t'attendais sans le savoir.*
- Comment ça, vous m'attendiez ?
*Je sentais qu'il me manquait quelque chose et que cette chose viendrait avec le temps.*
- Mais comment savez-vous quand je suis né ?
*Je suis la Mère.*

Dans l'esprit du jeune Ithorien, cette phrase chamboula beaucoup de choses. Les connexions se firent rapidement. Il savait que sa mère avait eu le pouvoir de la Force. Il savait aussi que les Jedi les plus puissants étaient capables de perdurer après leur trépas sous forme de « fantômes » de Force afin de guider les Jedi vivants dans leurs moments de détresse. Et si sa mère avait connu ce pouvoir ? Face aux espoirs fous de ce gamin, les objections ne manquaient pas – mais il ne se les fit pas lui-même. Comment sa mère aurait-elle pu connaître cette technique extrêmement avancée sans jamais avoir reçu d'entraînement ? Pourquoi ne se manifesterait-elle que maintenant ? Pourquoi parlerait-elle de façon énigmatique ?

Toutefois, comment Tamaab aurait-il pu savoir qu'il avait affaire à une manifestation de la Force tout à fait exceptionnelle ? Comment aurait-il pu savoir qu'il avait déjà maintes fois communié avec cet esprit par d'autres biais ? Comment un petit novice Jedi eût-il pu connaître la mythologie des sorcières de Dathomir et le nom d'Enill, la Mère Universelle, l'allégorie de tous les esprits de la terre ? Comment aurait-il pu se rendre compte que c'était l'un de ces esprits, celui de la forêt-jardin, qui s'adressait à lui sous ce nom ? Non, évidemment, comme l'aurait fait n'importe quel enfant privé de figure parentale, Tamaab prit l'esprit à la lettre. Il demeura sans voix, une joie profonde déferlant en lui.

*Tu es particulier, petit d'Ithor. La Force ne coule pas en toi de la même manière que chez les autres Jedi qui sont venus ici. Il n'y a que toi qui m'ait jamais senti avec une telle intensité.*

Toujours en lévitation au-dessus du sol moussu, l'apparition invita d'un signe de tête Tamaab à la rejoindre.

*Immerge-toi dans la Force. Je vais t'apprendre à comprendre les signes qui te sont envoyés.*

*****

Pendant plusieurs années, Tamaab Nadon poursuivit son noviciat, passant son temps à s'entraîner parmi les Jedi mais aussi à explorer les arcanes de Naturae en communiant avec le Jardin. Son potentiel dans la Force s'affirmait rapidement, tout autant que son manque total de talent pour le sabre se ressentait. À onze ans, il eût été compliqué pour un observateur extérieur de percevoir que Tamaab s'exerçait au maniement de l'arme des Jedi depuis près de six ans. Lors des entraînements libres, il parvenait à tenir en respect ses adversaires à l'aide de poussées de Force et d'obstacles télékinétiques, mais il continuait de faire partie des débutants dès lors que seul l'escrime était autorisée. Malgré tout, le jeune Ithorien parvint finalement, peu avant ses douze ans, à maîtriser le Shii-Cho, la forme la plus basique, celle que les Maîtres attendaient de tous les Novices avant qu'ils puissent être sélectionnés comme Padawan.
Avant de devenir Padawan, Tamaab Nadon était donc très puissant dans la Force pour son âge, même si ses Maîtres avaient remarqué la singularité de ce garçon. Toujours très taciturne et réservé, malgré les sept ans passés au Temple, l'Ithorien leur demeurait assez mystérieux. Obéissant et appliqué, malgré ses escapades régulières dans les interminables méandres du Temple, il offrait de nombreuses satisfactions à ses enseignants et avait fait preuve de très grands progrès depuis son arrivée, mais les plus sagaces d'entre eux s'inquiétaient de ne pas le voir s'intégrer davantage au reste de ses camarades. Parmi les qualités d'un Jedi, la solidarité avec ses pairs constituait sans doute l'une des plus importantes.
Tamaab traitait ses camarades avec politesse et une certaine gentillesse, mais ne cherchait pas à s'en faire de véritables amis. Ces relations pacifiées mais réduites au strict minimum ne semblaient pas traduire un malaise chez le Novice. Il agissait en fait comme s'il n'avait pas besoin d'amis parce qu'il en avait déjà d'autres, comme si son besoin d'affection était, en quelque sorte, saturé et pleinement satisfait.
L'un des Maîtres des Novices s'en inquiéta suffisamment pour faire remonter l'affaire au Conseil Jedi. On choisit, pour enquêter sur le Novice, de mandater Serdar Bolgil, de passage au Temple après l'adoubement de son premier Padawan. Le nouveau Maître connaissait bien le jeune Ithorien et avait sa confiance. Malgré ses rares passages sur Tython, il ne manquait jamais d'aller saluer le petit de Gillom Nadon et de s'assurer que tout allait bien pour lui. Il lui apportait à chaque fois un petit objet d'une planète qu'il avait visité. Tamaab s'en était constitué une collection qu'il exposait sur les étagères de sa chambre, et les manipulait souvent, preuve qu'il tenait à ces petits bouts de galaxie.
Il ne fallut guère de temps avant que Maître Bolgil ne trouve le Novice dans son Jardin, ayant suivi sa trace dans les ruines des anciennes ailes. Alors qu'il approchait, il sentit une perturbation très singulière dans la Force, comme un lien tissé entre un Maître et son apprenti, mais entre Tamaab et l'étrange forêt-jardin dans laquelle il méditait. Jamais Serdar n'avait entendu parler de liens de Force entre un Jedi et son environnement. Le jeune Ithorien devait fréquenter ce lieu quotidiennement. L'énergie du jardin convergeait vers Tamaab et focalisait sa puissance. Si Maître Bolgil n'avait pas su qui se trouvait dans cet endroit, il n'aurait pas parié un crédit qu'il s'agissait d'un Novice. Pourtant, la nature même du lien lui semblait très inhabituelle, sans qu'il sût bien dire pourquoi.
Le garçon sortit de sa transe en sentant le Maître Jedi arriver. Lorsque Serdar franchit l'arche pour fouler le sol moussu, le jeune Nadon s'était remis sur ses deux pieds et le regardait fixement de ses deux yeux noirs.

- Qu'est-ce que vous faites là, Maître Serdar ?

La neutralité du ton de l'Ithorien, qui avait parlé dans sa langue natale, cachait mal sa méfiance. Son corps avait instinctivement adopté une posture de défense. L'apprentissage du combat avait tout de même porté quelques fruits, semblait-il. Serdar choisit de lui répondre dans le même idiome, comme il le faisait parfois.

- Je te cherchais, bien sûr. Quelle autre raison aurais-je eu de m'aventurer jusqu'ici ? Tu as trouvé cet endroit tout seul ?

La curiosité de Serdar Bolgil était absolument sincère, même si l'exprimer de cette manière devait apaiser Tamaab. Manifestement, il pénétrait dans son jardin secret au sens propre du terme. D'ailleurs, il ne s'avança pas de plus d'un pas après l'arche, comme en attente d'un signe du Novice pour s'avancer.

- Oui.

Une réponse lacunaire, tandis que le regard de Tamaab scrutait par-dessus l'épaule de son interlocuteur, guettant l'arrivée d'autres Maîtres.

- Vous êtes le seul à m'avoir suivi ?
- Absolument.
- Mais vous n'agissez pas de votre propre initiative...

Cela sonnait comme une accusation. Pris au dépourvu, Serdar eut pour premier réflexe de se disculper.

- Si, bien sûr !

Toutefois, voyant le plissement des paupières du jeune ithorien, il se reprit immédiatement, jugeant qu'il valait mieux faire preuve du plus de sincérité possible.

- En fait, non, pour tout dire. Le Conseil s'inquiète pour toi, Tamaab.
- S'inquiète pour moi ou s'inquiète de moi ?

Cette fois, il n'y avait pas d'amertume ou d'agressivité voilée dans la voix de l'Ithorien. Seulement une légère inquiétude qui poignait. Le Novice s'avérait plus sensible au jugement de ses Maîtres qu'il ne voulait bien le montrer.

- Pour toi évidemment. Tu n'as rien d'une menace pour les autres et aucun Jedi ne serait assez sot pour te voir de cette manière. Ils cherchent simplement à comprendre pourquoi tu t'isoles. Ils s'inquiètent que tu ne te mêles pas à des camarades.
- Je ne m'isole pas, Maître. Je viens retrouver l'esprit de ma mère et communier avec elle.

Serdar Bolgil ne s'attendait pas à cela. Il avait connu la mère de Tamaab. C'était même une amie, qu'il avait enjointe à devenir une Jedi. Elle avait un grand potentiel, mais devenir un esprit de Force ? Impossible. Beaucoup de Maîtres Jedi n'en étaient pas capables. Conserver sa conscience par-delà la mort nécessitait une technique lumineuse extrêmement exigeante. C'était une manipulation de Force très subtile et préparée des années à l'avance. Par acquis de conscience, Serdar sonda les alentours. La Force était indéniablement puissante dans les alentours, mais rien n'indiquait la présence d'un Jedi retourné à la Force. Comment Tamaab aurait-il pu percevoir quelque chose que lui-même, un Maître, ne pouvait ressentir ?

- Je regrette, Tamaab, mais ta mère ne peut pas avoir maintenu sa conscience par-delà la mort. Seul les Jedi les plus puissants et les plus sages en sont capables. Elle est retournée à la Force, et nous ne pouvons pas l'en plaindre.
- Je comprends, Maître. Et pourtant c'est elle que je vois et qui me conseille quand je viens ici.
- Elle te conseille ? Comment ?
- En me disant comment accroître mes perceptions, communier avec la Force. Souvent, je ne vois pas son fantôme. Elle murmure dans la canopée, elle pulse dans la terre, ses mots ruissellent sur la mousse.
- Je suis désolé, Tamaab, mais il n'y a aucun fantôme de Jedi ici.

Serdar avait pris un ton doux mais ferme. Le petit semblait se bercer d'illusion, rechercher un passé dont il avait été privé – dont lui, Serdar, l'avait en partie privé – et projeter sur des manifestations simples de la Force ses fantasmes. La puissance du lieu pouvait donner forme à ses désirs.

- Vous dites ça parce que vous ne le sentez pas, mais je le peux. Vous pensez que ma perception dans la Force est défaillante ?
- Bien sûr que non. Mais c'est curieux. Cet endroit est empreint de Force, et lié à toi d'une manière que j'ai du mal à expliquer, mais il n'y a ni esprit ni fantôme. Seulement un jardin très vivant.
- Vous ne me croyez pas.
- Si. Je te crois quand tu me dis que tu vois ta mère. Je ne suis simplement pas d'accord avec toi sur l'interprétation que tu fais de cette perception. Il y a ici quelque chose que nous ne comprenons pas. Ni moi, ni toi.

Maître Bolgil était encore un Jedi relativement peu expérimenté, et son affection pour le jeune ithorien lui fit immédiatement attribuer l'étrangeté au lieu, et non à cet enfant qu'il entendait protéger.

- Depuis combien de temps viens-tu ici voir ta mère ?

Tamaab se mit à réfléchir. *Cela fait certainement trop longtemps*, se dit Serdar.

- J'ai l'impression que j'ai trouvé le jardin juste après mon arrivée au Temple, mais je ne vois ma mère que depuis... quatre ans, peut-être. Je la ressentais déjà avant mais elle ne m'avait jamais vraiment... parlé.

Sept ans que les Maîtres n'avaient rien remarqué ?! Serdar avait bien conscience que la guerre et le maintien de la République requéraient de nombreux Jedi, et par conséquent que les Novices avaient du temps libre, mais tout de même, la réaction avait été longue. Certes, rien chez le jeune ithorien n'était particulièrement alarmant. Il ne subissait pas l'influence du Côté Obscur, même si la Lumière qui l'environnait avait quelque chose de... particulier.

- Qu'allez-vous dire au Conseil, Maître ?
- La vérité, rien d'autre.
- C'est-à-dire ?
- Que tu te recueilles seul dans ce jardin depuis des années, au point d'avoir tissé un lien avec lui. Que tu penses y ressentir la présence de ta mère alors que c'est théoriquement impossible et que je n'y parviens pas.
- Vous allez leur dire que je ne suis pas fou ?
- Je n'en ai pas besoin. Ils ne te croiront pas fou.
- Mais vous me protégerez ?
- De quoi, Tamaab ?
- D'eux. Ils voudront m'interroger, m'empêcher d'accéder au Jardin, ou m'étudier. Ils prendront ma singularité pour un danger lié au Côté Obscur, comme tout ce qu'ils ne peuvent pas contrôler.

La dureté des propos de Tamaab vis-à-vis des Maîtres était surprenante. Bien qu'ils fussent caricaturaux, ils rendaient assez bien compte de l'opinion que pourraient avoir les Maîtres les plus conservateurs, majoritaires à l'académie. Même s'il trouvait cette faculté critique tout à fait louable chez un si jeune garçon, Serdar ne pouvait pourtant pas encourager ce type de discours.

- Ne sous-estime pas la sagesse des Maîtres du Conseil, Tamaab. Ils ont suffisamment d'expérience pour savoir que tout dans la Force n'est pas obscur ou lumineux, mais que nous sommes tous un grand mélange de nuances de gris. Malgré tout, je leur transmettrai ton point de vue et tes inquiétudes.

Le Novice sembla réfléchir un instant, puis lança avec aplomb, simplement, sans s'embarrasser de formes ampoulées :

- Vous me prendrez comme Padawan ?

L'audace de la requête prit Maître Bolgil au dépourvu. Certes, il venait de mener son premier apprenti à l'adoubement avec succès, mais il n'avait pas considéré la possibilité de reprendre immédiatement un étudiant. Il y songea quelques instants, mais il en vint rapidement à approuver l'idée. Une confiance, et même une certaine affection le liait à Tamaab depuis des années, sans compter que Serdar n'avait pas su persuader la mère du petit de devenir Jedi, et avait arraché l'enfant à son père, une décision qui l'avait longtemps tourmenté, malgré tout le bien qui pourrait en découler. Ce n'était pas le désir qui le fit répondre, mais le devoir.

- Oui, je leur dirai que je veux te former.

Sans rien dire, Tamaab se détendit. Son inquiétude s'amenuisa. Il se fendit d'un sourire, une expression peu reconnaissable chez les Ithoriens pour qui ne les connaissait pas suffisamment, mais Serdar Bolgil savait reconnaissable les plis caractéristiques autour des yeux. Il n'attendait rien d'autre.

- Allez, viens, rentrons, dit-il d'un ton paternel.
- Je vais rester encore un peu. Quelques minutes.

Ce petit avait une relation addictive, presque obsessionnelle, avec ce carré luxuriant. Il s'en enrichissait, mais il ne semblait pas voir qu'il en devenait dépendant. Et pourtant, si le petit croyait sincèrement communier avec l'esprit de sa mère, comment lui en vouloir ? Plus d'un orphelin rêvait que ses parents vivaient encore. Néanmoins, Maître Bolgil ne voulait pas repartir sans le Novice.

- Puis-je rester avec toi ?

Tamaab Nadon ne put s'empêcher de laisser transparaître une certaine réticence, mais Serdar Bolgil l'avait écouté et promettait de l'aider. Il se contenta de hocher doucement la tête, puis retourna s'asseoir face à la végétation. Serdar l'imita, s'immergeant dans la Force en même temps que lui. Il sentit une grande puissance imprégner le sol et les courants de la Force tourbillonner autour du Novice, comme si toutes les vies du jardin se tournaient d'un coup vers Tamaab, leur vieil ami. Le Jedi fut à nouveau frappé par l'étrangeté du phénomène. Son propre lien avec la Force, ferme et contrôlé, ne produisait pas de pareils effets. Même les grands Maîtres ne polarisaient pas l'énergie du monde de cette manière. Ce n'était pas une question de pouvoir, car l'Ithorien ne maîtrisait pas sa puissance comme l'aurait fait un Maître, ni même un Chevalier, mais une question de nature, comme s'il s'adressait à la Force par des chemins détournés, inconnus du Jedi.

Il y avait en Tamaab quelque chose qu'il ne comprenait pas.


           

Derriere l'écran :



Prénom/pseudo : Théo. Je ne ferai pas la liste de tous mes persos, il y en a même que j'avais oubliés avant de me replonger dans mes dossiers, mais je peux quand même citer Qodu Iolan sur SWD, Nathaniel Delafoi (évidemment !) sur SWE, Loes de Walleron sur Imperial Wars...

Age : 24

Comment avez vous découvert le forum ? : En cherchant mes vieux camarades de RP sur les sites de référencement.

Petit Plus ? : Je vais jouer assez « casu » sur ce forum. Je n'ai pas RP depuis un moment, donc je compte reprendre doucement (et de toute façon j'ai un boulot qui me prend trop de temps pour faire du multi furieux comme jadis !).


           


Dernière édition par Tamaab Nadon le Lun 20 Jan - 3:37, édité 1 fois
avatar
Invité
Invité

Maître Tamaab Nadon, "accoucheur de la Terre" [Work in progress] Empty Re: Maître Tamaab Nadon, "accoucheur de la Terre" [Work in progress]

Lun 20 Jan - 3:17


Histoire :


*****

De retour auprès du Conseil, Serdar Bolgil raconta ce qu'il avait découvert et plaida, comme il l'avait promis, la cause de Tamaab.

- De toute évidence, Maîtres, Tamaab dispose d'une puissance dont il n'a qu'une connaissance très instinctive. Il cultive cette puissance dans un jardin au cœur des anciennes ailes de l'académie, et plaque sur les manifestations de la Force qui en découle des consolations à ses peines. Il dit que sa défunte mère – une sensitive puissante que j'ai eu l'honneur de connaître – lui apparaît et lui enseigne les voies de la Force. Il a confusément conscience du caractère singulier de ces visions, et il en devient méfiant vis-à-vis de nous, voire jaloux de son lien privilégié avec ce lieu de nature. Et pourtant, c'est sans le moindre doute dans ce jardin qu'il s'est épanoui et a fait l'apprentissage de la sérénité. Je ne sais trop que penser de tout cela.

Les membres du Conseil présents écoutaient Serdar avec attention, fronçant les sourcils. L'un d'eux prit rapidement la parole.

- Ce que tu nous rapportes est curieux, Maître Bolgil. Si j'ai bien compris, cette « singularité » que tu détectes chez l'enfant réside dans une manière inhabituelle de se lier à la Force ?
- Oui, Maître.
- Et pourtant, ses enseignants n'ont jamais ressenti cela chez lui...
- Vous suggérez que l'étrangeté ne viendrait donc pas de lui, mais du lieu ?

La Maîtresse des historiens Jedi s'immisça dans la conversation, sa voix sifflante s'imposant comme un coup de fouet.

- Oui. C'est même évident. Ou plus précisément elle vient de sa fréquentation assidue de ce lieu. Notre histoire ne manque pas d'exemples de Jedi et de Sith ayant développé une forme de symbiose avec certains endroits précis. C'est même l'une des formes les plus élémentaires de notre lien avec la Force, poussée à l'extrême. La grande présence dans la Force de ce Novice n'est un secret pour personne. Qu'il ait pu se lier à quelques centaines de mètres carrés de jardin n'est pas fondamentalement impressionnant, ni inquiétant d'ailleurs. Cet aspect n'est guère « singulier ».
- Tout à fait. En revanche, ce que tu nous as dit sur sa mère est bien plus préoccupant. S'il pense que le jardin est habité par l'esprit d'un être cher, il risque d'entretenir un rapport trop sentimental avec ce lieu. Nous ne pouvons pas le laisser s'isoler de la sorte avec les démons de son passé, et se servir de ses émotions pour infléchir les flux de la Force.

L'occasion permit à Serdar de faire part de la requête de l'Ithorien.

- J'ai promis au garçon de vous demander de me le confier comme Padawan. Je l'emmènerai loin d'ici.

Les Maîtres se regardèrent quelques instants, communiquant leurs intuitions par télépathie, avant de tourner à nouveau leur regard vers Serdar.

- L'attachement fort à ce jardin n'est pas une bonne chose. Le Novice doit apprendre à lâcher prise, à se voir privé de ce qu'il craint de perdre. En outre, un Jedi ne doit pas cultiver sa puissance seul. Le culte du secret et l'indifférence aux autres ont jadis considérablement nui à notre Ordre. Ce sont des chemins tortueux qui peuvent mener au Côté Obscur. Vous avez raison, Maître Bolgil, il faut l'envoyer loin de Tython et le sortir de ses habitudes, lui faire nouer un véritable contact avec les habitants de cette galaxie. Mais vous ne serez pas son Maître.
- Comment ? Je ne le laisserai pas tomber. Ce garçon n'a rien d'obscur ! C'est encore un enfant, qui a besoin d'une personne de confiance comme tuteur !

L'historienne leva une voix sèche et ferme qui ramena immédiatement Serdar au silence.

- Non, Maître Bolgil. Vous n'avez pas plus que nous-mêmes la sagesse suffisante pour déceler toutes les formes que peut prendre le Côté Obscur. Vous êtes compétent et votre dévouement envers le jeune Ithorien est louable, mais il lui faut pour son bien un Maître plus expérimenté, plus érudit et moins proche de lui. Votre affection pour Tamaab Nadon risquerait de vous aveugler sur son cas, ou de vous perdre.

La pilule était d'autant plus rude à avaler qu'elle était inattendue. Serdar Bolgil ne pensait pas se voir opposer un refus aussi net, qui contredisait frontalement la règle tacite qui voulait que chaque maître pût choisir librement son élève. Il ne parvint pas à masquer son amertume.

- Si telle est votre décision.
- Nous te décevons, Maître Serdar, et nous allons décevoir le petit, mais nous vous ferons ainsi subir un moindre risque à tous les deux. Nous te suggérerons un autre apprenti une fois le moment venu. Tu peux disposer.

*****

Tamaab devint Padawan au terme d'un traditionnel tournoi entre Novices. Confiant dans le fait d'être choisi par Maître Bolgil, il ne se démena pas pour surmonter son manque de talent au sabre. Rapidement désarmé, il tint ses adversaires en respect à l'aide de ses pouvoirs, mais sans l'ardeur qui animait d'autres de ses camarades. Nadaii, la brillante jeune Cathare, remporta tous ses duels et sortit victorieuse de la mêlée, accomplissant plusieurs passes d'armes parfaitement remarquables pour une Novice. Même le jeune Ithorien, qui avait depuis fort longtemps abandonné son ressentiment face à l'attitude fougueuse, voire arrogante, de sa camarade de noviciat, ne put s'empêcher d'admirer l'aisance avec laquelle la jeune femme-chat se mouvait, surprenant ses opposants par des feintes rapides, précises et gracieuses. Au fond de lui, Tamaab enviait cette agilité et cette assurance qui irradiait de la Cathare, bien qu'il se fût dès longtemps résigné à sa propre médiocrité physique.
Toute la journée, il attendit le verdict des Maîtres, qui venaient sélectionner leur Padawan parmi les Novices. Dans le public venu assister à ces affrontements rituels, ces démonstrations des néophytes de l'Ordre, il chercha longtemps Maître Bolgil, sans l'y trouver. Serdar n'apparut qu'à la toute fin du tournoi, et resta plusieurs minutes en retrait alors que plusieurs Maîtres appelaient les Novices qu'ils avaient remarqués. Les noms appelés se succédaient, prononcés par les voix des Jedi revenus au Temple pour l'occasion, en quête d'un apprenti. Tamaab ne les écoutait que très distraitement, attendant patiemment que son futur Maître ne vînt à son tour prononcer son nom : - Je choisis Tamaab Nadon comme Padawan. À cette perspective, les yeux du jeune Ithorien se plissèrent en un sourire.

- Tamaab Nadon, tu seras mon Padawan.

Ses paupières s'ouvrirent en grand avant même que son cerveau ne réalise ce qui se passait. Le Novice ithorien se tourna vers la personne qui venait de parler. C'était une vieille Twi'lek, ridée et rapetissée par le poids des ans, qu'il n'avait jamais vu. Ses longs lekkus d'un vert pâle descendaient bas sur sa poitrine, s'enroulant dans les replis de ses robes beiges. Ses yeux bruns semblaient légèrement voilés et pourtant, ils ne laissaient pas de doute quant au fait que l'ouïe de l'Ithorien ne lui avait pas joué de tour. Tourné vers lui, le regard étrange de la vieillarde ne cillait pas.
La mauvaise surprise avait paralysé Tamaab. Il chercha à tâtons à accrocher le regard de Serdar Bolgil. Quand allait-il intervenir pour démêler cet affreux malentendu et le prendre sous son aile, comme il avait dit qu'il le ferait ? Mais quand ses yeux croisèrent enfin celui du Jedi, celui-ci se contenta de hocher la tête en signe de dénégation, de serrer les paupières et d'affecter une mine résignée. Il ne l'aiderait pas. Tamaab Nadon sentit son cœur chuter dans son ventre et y peser comme une tumeur, vidant son esprit comme celui d'un élève ignorant sommé de montrer ce qu'il sait.

- Viens donc ici, jeune homme.

La voix de la Twi'lek, étonnamment forte au regard de sa carrure, retentit à nouveau. Tiré par les fils d'un destin qu'il ne contrôlait pas, Tamaab s'anima. Ses articulations se mirent en action pour le faire avancer de son pas lent et lourd vers celle qui devenait sa Maîtresse. L'Ithorien la dépassait déjà d'une dizaine de centimètres, alors qu'il était encore loin d'achever sa croissance, mais elle l'accueillit comme s'il n'en était rien, tendant un bras tâché de vieillesse pour le poser sur la bosse du nouveau Padawan, en un geste à la fois ferme et doux.

- Viens. Il te faut des réponses et je te les donnerai quand nous serons au calme.

Elle emmena un Tamaab presque catatonique jusqu'à l'aile où se trouvaient les appartements des Jedi de passage. Dans une chambre modeste, elle le fit asseoir sur une chaise toute simple et s'installa sur un vieux fauteuils, élimé par les nombreux hôtes du Temple.

- J'écoute tes questions.

Son ton était à la fois ouvert et sec, comme si elle avait conscience de l'importance de ce moment tout en ayant hâte de passer à autre chose. L'Ithorien peinait à retrouver ses esprits. Même si la Twi'lek était avenante, il avait l'impression d'être dans un de ces étranges cauchemars où la vie prenait un autre cours que celui qu'elle avait en réalité. L'esprit s'y livrait à des expériences dans lesquelles le dormeur perdait ce à quoi il tenait, lui permettant de comprendre, au réveil, ce qui comptait vraiment pour lui.
Pourtant tout était bien réel. La Twi'lek au regard voilé fixait Tamaab, la tête légèrement inclinée vers l'avant dans une posture interrogative. Avisant le temps de réaction de son nouvel étudiant, elle claqua la langue de mécontentement.

- Je t'offre l'occasion de dissiper les nombreux doutes que je ressens en toi, et tu restes là, abruti par la situation ? Ressaisis-toi, mon garçon !

Le reproche raviva un peu Tamaab, qui posa la question la plus simple.

- Qui êtes-vous ?

Les lèvres pincées de la Twi'lek se détendirent lorsqu'elle entendit enfin la voix de son nouveau Padawan.

- Eh bien ! Il t'aura fallu du temps pour la trouver. Je suis Zariis Tlaxcal'ta, Maîtresse Jedi.

Devant le silence de quelques instants qui suivit, Maîtresse Tlaxcal'ta reprit la parole.

- Tu veux peut-être savoir pourquoi je t'ai choisi, non ?

Tamaab hésita un instant, puis opina doucement du chef.

- Par la Force ! La nature t'a donné deux bouches, mon garçon. Sers t'en !

Face aux admonestations de la vieillarde, le jeune Ithorien commença à sentir l'irritation poindre.

- Oui. Pourquoi m'avez-vous choisi, Maîtresse ?
- Parce que le Conseil m'a dit que tu avais besoin de moi.

Le Conseil ? Besoin d'elle ? Mais Tamaab ne la connaissait même pas !

- Je n'ai pourtant rien demandé au Conseil, je vous assure.

Cette remarque fit froncer les sourcils de Maîtresse Tlaxcal'ta. Elle souffla légèrement du nez.

- Ah bon ? N'as-tu pas demandé, par l'entremise de Serdar Bolgil, à choisir ton Maître ? Aurais-je été mal informée ?

Tamaab se tint coi. Un autre aurait peut-être rué dans les brancards, mais il voyait bien que ces questions rhétoriques, impérieuses, n'appelaient aucune réponse. Il était évident que le Conseil avait directement mandaté Maîtresse Tlaxcal'ta.

- Et tes escapades dans ce jardin, ne penses-tu pas qu'elles constituent une exigence vis-à-vis de l'Ordre ? C'est un cri que tu lances aux Jedi. « Laissez-moi tranquille », voilà ce que tu nous dis à chaque fois que tu t'y rends. Tes Maîtres t'ont laissé faire pendant des années, par égard pour ta jeunesse et la découverte de ton talent.

Même si Tamaab n'avait jamais conçu son lien au Jardin comme un acte de rébellion, force lui était de reconnaître – en son for intérieur du moins – que la Twi'lek avait en partie raison. Sa communion avec le Jardin avait toujours été une manière d'échapper à la vie ennuyeuse et exigeante du Temple, de développer une partie de son identité à l'écart de la surveillance des Maîtres, si prompts à scruter tous les penchants moraux de leurs élèves pour y détecter les signaux d'une obscurité naissante.

- Il est de mon devoir de te l'annoncer en tant que Maîtresse, mon garçon. Le temps de l'enfance est révolu. Tu es désormais engagé sur la voie des Jedi. La Force coule en toi comme une source vive, mais cette source ne t'appartient pas.
- Mais pourquoi vous ? Pourquoi pas Maître Bolgil ?
- Ah ! Enfin de véritables questions. Le Conseil a jugé qu'il ne saurait pas te former. Sa tendresse pour toi aurait risqué d'obscurcir son jugement et de ne pas se résoudre à t'imposer l'enseignement qui t'est nécessaire.
- Il vous ont donc choisi pour votre dureté ?

Le ton de Tamaab semblait empli d'une curiosité sincère. L'accusation se tapissait dans le sens des mots, et absolument pas dans la manière de les prononcer. Amusée par la soudaine ironie mordante de son nouvel apprenti, pour la première fois, Maîtresse Tlaxcal'ta sourit largement, et ce sourire qui traça mille rides sur le visage vert ôta un instant le voile que la vieillesse avait jeté sur la beauté frappante de cette femme. Les Jedi vivaient longtemps, des décennies de plus que certains de leurs congénères. Zariis Tlaxcal'ta devait avoir près de quatre-vingts dix ans à l'époque, mais Tamaab vit dans cet étirement des lèvres, ce frémissement amusé des lekkus, quelle femme magnifique elle avait été jadis.
Non, le Conseil ne l'avait pas choisi pour sa dureté, malgré son ton sec et son impatience.

- Pour mon expérience, à vrai dire. Je forme des Padawans depuis plus de cinquante ans. Ils ont dû se dire que je saurais te mener là où tu dois être.
- C'est-à-dire ?
- Loin d'ici, là où ton potentiel servira pour de bon à la galaxie.
- Pourquoi loin d'ici ?
- Tython est un lieu formidable pour l'Ordre. C'est un abri naturel et un nœud dans la Force, qui nous permet de trouver toujours un endroit où le repos et la sûreté sont garantis. C'est un lieu parfait pour une académie, car il y a tant de vergences dans la Force ici que les occasions d'y découvrir sa puissance ne manquent pas. Tu en as fait l'expérience avec ton jardin. Une belle petite forêt, qui filtre la Force comme un tamis finement tissé. Tu y as laissé ta marque comme un habile jardinier.
- Vous y êtes allée ?!

À l'évocation du Jardin, Tamaab sentit son excitation monter.

- Calme-toi, mon garçon. Tout beau qu'il soit, ce jardin n'est qu'un jardin pour tout le reste du monde. On m'a dit que tu y voyais des esprits, mais personne d'autre que toi ne les y trouvera.
- Vous voulez que je vous montre comment je fais ?

L'Ithorien interprétait mal ce que lui disait la vieille Twi'lek, mais son désir de lui prouver qu'il ne mentait pas, ni n'était fou, était authentique. Néanmoins, Zariis n'avait pas besoin de cela. Elle avait déjà commencé à comprendre de quoi il retournait. Elle avait connu des sensitifs qui voyaient des esprits dans la Force et communiaient avec les éléments de la nature d'une manière intransmissible. C'était un don étrange qui les rendait capables de manifestations de Lumière à la fois puissantes et curieuses. Mais voir comment Tamaab interagissait avec son jardin ne l'éclairerait pas. On ne bâtissait pas de certitude sur une seule occurrence.

- Certainement pas, sans quoi je te l'aurais demandé. Les Jedi ne sont pas des reclus. Tython n'a plus rien à t'apprendre pour l'instant, et à moi non plus, alors nous devons la quitter. C'est par notre contact avec la galaxie que nous devenons meilleurs et que nous développons les talents qui nous permettent d'en aider les habitants. C'est pourquoi nous partons pour Thyferra dans une heure.

L'annonce de leur départ imminent provoqua chez Tamaab un bref vent de panique. D'ordinaire, les Maîtres passaient quelques jours avec leur nouveau Padawan avant de s'en aller courir la galaxie. Laisser Tython derrière lui revenait à tout quitter, à s'arracher à son enfance. Thyferra se trouvait à l'autre extrémité de la République. L'Ithorien connaissait le nom de cette planète, la principale productrice du bacta, cette substance aux merveilleuses vertus cicatrisantes dont la médecine dépendait largement. Toutefois, il n'en savait rien de plus.
L'esprit d'aventure ne faisait pas partie de la mentalité du garçon. Abandonner son foyer pour se rendre à l'autre bout de la galaxie sous la tutelle d'une femme sévère qu'il ne connaissait pas du tout lui donnait un vertige tel qu'il en avait la nausée. Il sentait avec plus de vigueur que d'ordinaire les palpitations du sol, comme si ses pieds cherchaient à s'y enraciner profondément.
Maîtresse Tlaxcal'ta sauta prestement sur ses pieds, indiquant à son apprenti que cette première conversation s'achevait.

- Je dois préparer mes affaires. Va chercher les tiennes et retrouve-moi dans une demi-heure au hangar 5. Notre vaisseau est un petit transport en demi-lune.
- Maîtresse, je...
- Non, garde tes questions pour plus tard. Les voyages en hyperespace sont longs, nous aurons l'occasion de discuter davantage. Allez, au travail !

Elle chassa le nouveau Padawan de ses appartements d'un petit geste de la main qui n'admettait pas de réplique. Aussi Tamaab fila-t-il vers sa propre chambre, pour jeter promptement ses quelques affaires et ses rares objets précieux dans un sac de voyage. Il devait aller vite pour pouvoir prévenir sa Mère, au jardin, de son départ. Mais alors qu'il s'apprêtait à sortir de sa chambre, on frappa à sa porte. C'était Serdar Bolgil. À la vue de l'homme, l'Ithorien se rembrunit.

- Bonjour Tamaab.
- Bonjour.

Le ton fermé de Tamaab sembla chagriner le Jedi, sans le surprendre le moins du monde cependant.

- Je sais que tu es pressé, mais je suis venu te présenter mes excuses.
- Ah, vous savez aussi que je pars ? Vous saviez beaucoup de choses et vous ne m'avez rien dit.

Maître Bolgil essuya l'accusation avec beaucoup de calme.

- C'est bien pour ça que je suis venu m'excuser. Quand le Conseil a refusé que je te prenne comme apprenti, j'ai voulu te le dire, mais je ne voulais pas que tu penses que je t'incitais à désobéir à nos Maîtres. Je suis tout autant déçu que toi, Tamaab, mais leur choix s'avérera plus judicieux qu'on ne le pense aujourd'hui, n'en doute pas. Maîtresse Tlaxcal'ta a une réputation de consulaire qui n'a rien à envier à celle de plusieurs Conseillers.
- Mais je ne la connais pas.
- Et tu ne connais rien du reste de la galaxie, ce qui ne t'empêchera pas d'y faire le bien comme tu le pourras. C'est ainsi que nous commençons tous.

Perplexe et en colère, Tamaab fit la moue.

- Le Conseil veut me déraciner, Maître. Je vous avais dit qu'ils auraient peur du lien que j'entretiens avec le Jardin, du fait que je ressens des choses qu'ils ne perçoivent pas.
- Non. Ce n'est pas la peur qui a motivé le choix du Conseil. C'est le devoir. On ne peut pas accepter qu'un pouvoir comme le tien demeure isolé et incompris, réduit à une exploration guère plus qu'instinctive. Te déraciner t'obligera à apprendre d'autres manières de te servir de ton pouvoir, de l'utiliser au service des autres.
- J'ai déjà vécu ça quand vous m'avez amené ici, et maintenant que c'est devenu mon foyer, vous me le retirez à nouveau.
- Je comprends que tu le prennes comme ça, mais garde ce que je t'ai dit en tête.

Pour toute réponse, Tamaab offrit un bref grognement, puis le silence, avant de poser sèchement une question.

- Vous avez pris un Padawan quand même ?
- Oui. Le Conseil m'a suggéré de former Nadaii, la jeune Cathare.
- Je vois. Elle au moins vous saurez la former, puisqu'elle n'a presque pas besoin de Maître.

La violence de la phrase toucha Serdar, bien qu'il sût qu'il n'était pas coupable de la situation. Que Tamaab suggère que la décision du Conseil avait pour seule raison sa propre incompétence l'attrista.

- Ta colère est légitime, Tamaab, mais ne la laisse pas noircir ton jugement.
- Je suis un être vivant, Maître. Pas encore un Jedi sans émotion comme les grands sages du Conseil.
- Moi non plus.

Cette phrase radoucit l'Ithorien. Les remords sincères de Maître Bolgil et son amertume vis-à-vis du Conseil infusaient le dallage sous ses pieds. Qu'il cesse de défendre mordicus la position des Maîtres de l'Ordre rasséréna Tamaab.

- Je te laisse.
- Bon courage avec Nadaii, Maître. Vous allez avoir du mal à la tenir.
- Merci, Tamaab. Que la Force soit avec toi.
- Et avec vous !

Une fois Serdar Bolgil parti, le jeune Nadon n'eut que le temps de se diriger vers le hangar 5. Il jeta un dernier regard à la chambre nue qu'il avait habitée pendant tant d'années, le lit de bois brut, son matelas usé, ses draps blancs, ses murs de pierre froids, les tubes du chauffage, le petit lavabo, avant de la quitter définitivement.
Alors que le vaisseau en demi-lune quittait le Temple, il regarda par le hublot le vaste complexe s'éloigner rapidement. Il discerna le Jardin, enserré dans les ailes de pierre, qui semblait se tendre vers lui en lui disant adieu. Les larmes, retenues depuis que Maîtresse Tlaxcal'ta l'avait choisi, ruisselèrent alors, inondant la manche avec laquelle il tenta de les essuyer.
La petite main ridée de la Twi'lek se posa sur sa bosse.

- Laisse-les couler.

Sans qu'il sût bien pourquoi, ces quelques mots réconfortèrent Tamaab.

*****

Cette première mission sur Thyferra, Maîtresse Tlaxcal'ta laissa Tamaab en observation. Le Padawan l'accompagnait partout, découvrant non sans intérêt une planète et une espèce dont il ne connaissait absolument rien. Manifestement, la Twi'lek connaissait bien les rouages administratifs de la planète, et mena rapidement l'enquête sur le détournement de stocks de bacta. De temps à autre, elle demandait à l'Ithorien quels étaient ses intuitions, acquiesçant d'un air approbateur lorsqu'il émettait des hypothèses intelligentes, lui posant davantage de questions pour l'aiguiller lorsqu'il manquait un élément important.
Chaque jour, malgré son grand âge, elle mettait un point d'honneur à faire de l'exercice physique, que ce soit du simple renforcement musculaire ou du combat avec des armes d'entraînement. Bien qu'elle ait eu au départ l'intention d'apprendre le Niman, forme de combat par excellence des consulaires Jedi, à Tamaab, Zariis renonça rapidement en constatant le piètre niveau de son apprenti en matière d'escrime. Parvenir à faire en sorte qu'il continue de maîtriser le Shii-Cho serait déjà une victoire. Au sabre-laser, elle l'entraîna surtout à parer des tirs, et lui enseigna une leçon importante, peut-être la plus importante de toutes : l'important n'était pas de savoir se servir de son sabre, mais de savoir faire en sorte de ne jamais avoir à l'allumer. Du reste, Tamaab se rendit rapidement compte que leur accoutrement Jedi et la garde pendant à la ceinture de sa Maîtresse ouvraient bien des portes.
Cette affaire de trafic de bacta par des contrebandiers corelliens fut rapidement résolue. Confrontant les fautifs alors qu'ils embarquaient la marchandise volée, Maîtresse Tlaxcal'ta engagea la discussion. Cette scène, si différente de ce qu'aurait produit un holofilm, qui aurait montré le Jedi usant de son sabre-laser pour soumettre ces voleurs à la justice, marqua Tamaab à vie. Jusqu'aujourd'hui, il en retient les moindre détails.
La Twi'lek entra dans le hangar comme si elle était chez elle et, négociant d'une main de maître avec les contrebandiers, maniant à la fois la menace, le bluff et la bienveillance, elle parvint en vingt minutes à cerner leurs motivations et à proposer un échappatoire à la situation. Les Corelliens volaient le bacta pour soigner des populations de l'espace Hutt n'ayant pas accès aux soins, faute d'un visa d'exportation républicain en bonne et due forme. Maîtresse Tlaxcal'ta leur fit restituer la cargaison en échange de son appui dans les démarches pour obtenir un contrat privé légal. Les volumes de bacta s'en trouveraient fortement amoindris, mais au moins le commerce pouvait-il continuer sans risque.
Tamaab ne comprit pas immédiatement pourquoi les contrebandiers n'avaient pas simplement été mis aux arrêts.

- L'action de ces gens est illégale, mais légitime. Dans l'espace Hutt, de nombreuses personnes sont trop pauvres pour quitter leur planète et pour accéder à des soins de qualité. Quel droit avions-nous de les condamner à plus de souffrances encore en les privant d'un de leurs ravitaillements vitaux ? Aucun. Retiens ceci, mon garçon : toutes tes actions provoquent des ondes de choc, et ces ondes ont des répercussions qui peuvent être cataclysmiques. Étant donné les quantités de bacta que ces contrebandiers dérobaient, ils aident des milliers de personnes à échapper à la douleur et à la mort.

Maîtresse Tlaxcal'ta associa à cette leçon diplomatique un grand principe dans l'utilisation de la Force. Elle commença à apprendre au jeune ithorien avec quelle finesse l'univers pouvait être manipulé, à partir de petites actions simples. Tamaab dut s'entraîner à envoyer des impulsions avec plus ou moins de vigueur dans la Force, pour constater que les manipulations les plus douces se diffusaient parfois mieux que les plus violentes. Comme un objet soumis à un choc, la Force absorbait une énergie faible en se déformant, en ondulant, mais une énergie forte pouvait y provoquer des déchirures très localisées. Exercer subtilement son influence sur un nœud de la Force pouvait permettre de la manipuler à des échelles beaucoup plus importantes que d'investir d'un seul coup toute son énergie dans le but de produire des effets puissants.
C'est ainsi que le Padawan commença à apprendre à guérir des blessures. Maîtresse Tlaxcal'ta lui piquait le doigt avec une aiguille, et il devait régénérer les cellules de sa peau pour faire tout à fait disparaître la trace. Plus tard, ils passèrent à des coupures plus profondes, la vieille Twi'lek se tenant toujours en alerte pour secourir son apprenti. Certains Jedi auraient trouvé la méthode assez radicale, voire franchement barbare, mais Zariis considérait qu'un Jedi devait savoir apprivoiser la douleur, ne pas se laisser surprendre par elle. Certes, la peine menait au Côté Obscur, mais un Jedi n'échappait pas aux souffrances du corps : autant les connaître pour mieux savoir les endurer et les faire disparaître.
Tandis qu'il s'ouvrait à la Force de manière plus subtile, Tamaab commença à percevoir de nouveaux esprits mineurs, dans les formes de vie les plus simples. En cherchant à communier avec eux, il s'exerça de sa propre initiative à des manipulations sur les végétaux. Il comprit rapidement qu'en plus d'être capable de réparer les lésions de certaines plantes en échangeant avec les esprits fragiles qui les habitaient, il pouvait favoriser leur croissance en les stimulant grâce à sa propre puissance. Bien que Tamaab demeurât discret sur le rôle des esprits dans son entraînement, Maîtresse Tlaxcal'ta ne cacha pas son admiration pour cette utilisation inventive de la Force, mais elle le mit aussi en garde.

- Le pouvoir a un coût. Si tu cherches à faire grandir une plante trop rapidement, tu risques de l'épuiser, de la faire vieillir trop vite. On ne joue pas avec la vie. Laisse-la pousser tranquillement quand elle n'a pas besoin de toi. Rappelle-toi toujours, mon garçon, que nous n'avons pas reçu ce pouvoir pour en jouir, mais pour servir. N'utilise jamais la Force quand ce n'est pas nécessaire, et apprends à mieux te servir de tes mains et de ta voix. J'ai bien compris que tu ne serais jamais un escrimeur, et alors ? La galaxie compte déjà suffisamment de guerriers. Ça ne t'empêche pas de savoir te servir de l'informatique, réparer de la plomberie ou de l'électronique, te faire à manger, parler correctement, avoir un minimum de culture générale et faire ta déclaration d'impôts. Vivre comme n'importe qui te permettra de ne pas perdre de vue qui tu es censé servir et comment y parvenir.

Les discours de Maîtresse Tlaxcal'ta incitant Tamaab à apprendre à se débrouiller sans la Force pour renforcer sa connexion avec Elle devinrent petit à petit une habitude, si bien qu'ils produisirent des effets. Le jeune Ithorien s'entraînait à réparer les fuites d'eau dans le vaisseau, à nettoyer correctement l'hyperpropulseur, à comprendre comment fonctionnaient les codes de programmation des droïdes, à cuisiner des légumes qu'il n'avait jamais vus sur Tython... Et même s'il ne comprit d'abord pas vraiment en quoi cela pouvait bien contribuer à faire de lui un véritable Jedi, il se prêta au jeu de surmonter ses difficultés courantes avec de plus en plus de rigueur. La langue fut sans doute son terrain d'apprentissage le plus fertile. À l'aide d'un manuel de rhétorique qu'il avait lu comme un roman, sans en retenir la moitié, il s'efforçait de décortiquer les images d'actualités de l'holonet et les discours politiques, notant sur un datapad les figures de style intéressantes et les effets qu'elles produisaient sur l'auditoire.
Après quelques mois de petites missions diverses, Tamaab commença à prendre de l'expérience, à apprendre à se comporter dans plusieurs niveaux de la société, à ne pas afficher ses émotions (une tâche relativement simple pour un Ithorien), à percevoir rapidement les enjeux d'une négociation, même s'il observait surtout sa Maîtresse faire. Si le souvenir de Tython éveillait en lui une certaine nostalgie, il se tint suffisamment occupé pour ne pas souffrir de ces incessants voyages interstellaires, loin du Jardin.
Il fit preuve d'un si grand sérieux que Maîtresse Tlaxcal'ta lui confia au bout de cinq mois un cristal de focalisation pour qu'il assemble son propre sabre-laser. L'Ithorien avait presque oublié alors que les Jedi pouvaient être amenés à se battre. Pendant tout ce temps, la vieille Twi'lek n'avait jamais utilisé son arme, même si elle veillait à s'exercer régulièrement avec des lames factices. Le premier réflexe de Tamaab fut donc de refuser ce don. L'idée d'avoir toujours à son côté un outil si mortel ne lui faisait aucune envie. Il avait, pour tout dire, les armes en horreur, et le sabre-laser en surclassait un bon nombre en termes de dangerosité. Maîtresse Tlaxcal'ta balaya ses réticences d'un revers de main impatient.

- Il y a de nombreuses manières de se servir d'un sabre-laser, et la plupart n'implique pas de l'allumer. Crois-tu que la garde à ma ceinture ne provoque aucun effet sur tous les gens que nous rencontrons ? Pour toi qui te bat comme un manche à balai, le sabre ne sera pas une arme mais un objet d'apparat, la marque indubitable que tu es un Jedi. C'est un insigne avant d'être une épée, mon garçon.

Aussi Tamaab reçut-il ce cristal viridien, d'une couleur verte aux reflets bleus, dans le creux de la main. Dès que la pierre toucha sa paume, il sentit la Force couler à travers elle et ressortir plus fine, tamisée. Laissé seul avec la mission de construire l'outil de sa fonction à partir de quelques composants, il les disposa devant lui, sur le sol de sa cabine. Alors qu'il s'apprêtait à méditer pour assembler les pièces, le cristal se mit à luire étrangement, comme si l'ombre des ondulations d'une eau calme s'était projetée à sa surface. Reprenant en main la pierre, le jeune Ithorien constata qu'il s'agissait de visages, déformés par la forme du minerai, qui défilait. Il sentait la gemme verte susurrer des histoires dans la Force, et il ferma les yeux pour mieux la sentir. Plusieurs absences se formèrent autour de lui, comme s'il ressentait des personnes disparues. Le cristal lui montrait son passé, les Jedi avec lesquels il s'étaient liés. L'Ithorien n'avait aucun nom, aucun visage, aucune espèce, simplement la trace laissés par les précédents propriétaires du joyau, comme le moulage figé dans les sédiments d'un fossile évanoui depuis longtemps. Ces traces, en multitude, enveloppaient le Padawan de souvenirs en négatif, d'indices obscurcis par les siècles.
Puis le Cristal, l'esprit millénaire qui animait cette petite pierre, sembla s'enrouler sur lui-même et retourner en sommeil, laissant Tamaab sortir, pantelant, de ce vertige auquel il ne s'était pas attendu. Il comprit combien Maîtresse Tlaxcal'ta ne lui avait pas menti en lui présentant le sabre comme un symbole chargé de l'héritage de l'Ordre.
Tamaab Nadon mit plusieurs années à comprendre qu'il pouvait reproduire ce genre d'expérience volontairement, entrer en communication avec le sol pour en obtenir des informations. Il demeura convaincu bien longtemps qu'il s'agissait là d'une pure expérience mystique sur laquelle il n'avait eu aucun contrôle, sans se rendre compte qu'une telle interaction avec un cristal de Force n'arrivait que très rarement aux autres Jedi.

*****

Tamaab Nadon n'eut pas l'occasion de se servir de son sabre-laser que deux ans plus tard, en 1464. Il venait d'entrer dans sa seizième année. Il ne fêta pas son quinzième anniversaire, car leurs hôtes sur Cato Neimoidia avaient bien d'autres cannoks à fouetter, et Maîtresse Tlaxcal'ta n'accordait personnellement aucune importance aux fêtes de ce genre.
Pour accompagner le mouvement de Détente entre la République et l'Empire initié par la Chancelière Lux Hinnose, le vice-roi de Cato Neimoidia, Sentepeth Rooy, avait organisé avec plusieurs mois d'avance un « 4e Grand Festival de la Culture Neimoidienne », auquel il convia de nombreuses figures de la diaspora. L'espèce neimoidienne était l'une des rares à avoir maintenu un enracinement dans des mondes sous l'autorité de plusieurs régimes, une identité forte et d'intenses échanges de toutes sortes en dépit des frontières entre la République et l'Empire. Le vice-roi Rooy, au pouvoir depuis plus de dix ans, avait lancé la première édition de ce grand festival en 1453, lors de sa première année de gouvernement, puis l'avait rendu régulier en le rassemblant à nouveau tous les trois ans. Il avait anticipé cette 4e occurrence pour démontrer, comme à chaque fois, son influence dans les réseaux neimoidiens et la prospérité de la planète qu'il dirigeait. Le Conseil Jedi avait envoyé Maîtresse Tlaxcal'ta et son élève dans le but affiché de représenter l'Ordre dans cet événement culturel de grande envergure, mais aussi et surtout pour surveiller les tensions politiques à l’œuvre.
Rooy, bien qu'élu par la population de Cato Neimoidia, gouvernait la planète d'une main de fer et ne semblait pas souhaiter quitter le pouvoir en cas de défaite aux élections, prévues pour le début de l'année 1465. Le Conseil Jedi soupçonnait le festival d'être non seulement une vaste opération de clientélisme, une action de campagne déguisée et une manière de s'associer aux succès politiques de la Chancelière, mais surtout une occasion pour Sentepeth Rooy de se rapprocher et de traiter avec les plus hauts représentants de la diplomatie neimoidienne dans le but d'obtenir leur soutien. Parmi les Maîtres Jedi, et Maîtresse Tlaxcal'ta la première, on craignait que l'ambition de Rooy ne le poussât à rechercher l'appui de l'Empire pour conserver sa position si les urnes le donnaient perdant. Après tout, les Neimoidiens n'étaient pas connus pour leur fidélité politique envers les grandes organisations galactiques. Or, la richesse de Cato Neimoidia et sa position frontalière, proche du Noyau, rendaient la planète particulièrement précieuse dans la stratégie républicaine. Les deux Jedi devaient donc s'assurer que les représentants de Neimoidia ne s'immisçaient pas dans les élections locales.
La mission démarrait bien, en apparence. Sentepeth Rooy avait accueilli les Jedi avec déférence et « toute l'obséquiosité qui nous est due » selon le commentaire que Maîtresse Tlaxcal'ta fit à son apprenti. En dépit de son hostilité à peine voilée pour l'Ordre Jedi, son principal opposant, Aito Dremon, avait consenti à échanger quelques politesses avec eux. Dremon, au contraire de Sentepeth Rooy, rechignait à considérer les Neimoidiens de l'Empire comme des pairs et amis. Bien plus réticent à soutenir la politique de Détente prônée par la Chancelière que le vice-roi, il faisait partie de la frange la plus belliqueuse la Ligue Démos, prônant une union plus étroite des mondes républicains autour du pouvoir fédéral et une opposition idéologique radicale à l'Empire. À ses yeux, l'Ordre Jedi représentait une caste élitiste et trop insoumise au peuple républicain. Méritocrate absolu, il dédaignait ceux qui tiraient leur pouvoir de leur naissance, en dépit de son appartenance à une prestigieuse famille de Cato Neimoidia.
Se mêlant au gratin neimoidien, Tamaab comprit, avec l'aide des éclaircissements de sa Maîtresse, les subtils enjeux de pouvoirs qui travaillaient cette société de cour en pleine fête. Il se rendit vite compte également que les festivités, censées célébrer la société neimoidienne dans son entier, se déroulaient dans des lieux auxquels seul accédait un public trié sur le volet. Au fil des jours, il sentit au fond de ses entrailles un malaise croissant. Plusieurs fois, les mots de ses interlocuteurs, badins et sans intérêt, sonnaient inexplicablement comme de sinistres présages. Les sols, tous artificiels, le coupaient des oscillations un tant fût peu subtiles qu'il ressentait habituellement. Il fit part de son trouble à Maîtresse Tlaxcal'ta, lui disant que ses sens s'émoussaient, déformés par une inquiétude irrationnelle.

- Je l'ai senti aussi. Le Côté Obscur est à l’œuvre, mon garçon. C'est à cet endormissement des sens qu'on le repère le mieux, comme s'il jetait un voile ouaté sur nous pour nous faire voir flou et étouffer les sons. Garde ton sang froid, Tamaab, et reste vigilant. Nous allons sûrement devoir faire face à un danger plus grand que ce que nous imaginions.

La mise en garde ressurgit dans l'esprit de Tamaab lorsque, deux jours plus tard, la navette d'Aito Dremon explosa au décollage, pulvérisant le potentiel futur vice-roi et ses proches. La sécurité planétaire boucla le palais, à la fois pour mener l'enquête et protéger le vice-roi Rooy et les envoyés impériaux de la vindicte populaire. L'inspection du site de l'attentat ne permit aucune révélation, mais l'opinion publique se rangea rapidement à l'avis que Rooy, connu pour ses penchants autoritaires, s'était débarrassé de son rival gênant qui dénonçait ses magouilles avec l'Empire. Les deux Jedi cherchèrent à découvrir la vérité eux-mêmes, mais le soulèvement les empêchèrent d'aller bien loin dans leur enquête.
Les émeutiers pénétrèrent dans le palais en grand nombre et lourdement armés. Nul doute qu'ils avaient préparé l'opération bien plus en avance qu'ils ne l'affirmèrent ensuite dans les médias neimoidiens. On exfiltra rapidement les dignitaires de Neimoidia afin de ne pas provoquer plus de remous avec l'Empire, mais Sentepeth Rooy n'eut pas la même chance. Grièvement blessé par un tir de blaster alors qu'il fuyait dans les couloirs du palais, il ne dut sa survie qu'à Maîtresse Tlaxcal'ta, qui repoussa les assaillants en scellant des portes de sécurité, puis à Tamaab Nadon qui se servit activement de la Force pour le maintenir dans un état stable. Toutefois, alors que les deux Jedi cherchaient à rejoindre les hangars, traînant avec eux le vice-roi, ils furent interceptés par un Neimoidien encapuchonné de noir.
Le sabre rouge qu'il tenait ne laissait aucun doute sur son allégeance. Le Padawan ithorien croisait la route d'un Sith pour la première fois. Sans frémir, Maîtresse Tlaxcal'ta ordonna à son apprenti de continuer tandis qu'elle tenait l'ennemi en respect, et l'Ithorien s'exécuta, menant leur protégé neimoidien à leur vaisseau. Alors qu'il montait sur la rampe d'embarquement à la suite du vice-roi, des rebelles surgirent dans le hangar et ouvrir le feu. À cet instant, le Cristal s'éveilla brusquement et, sans que Tamaab sût se l'expliquer, il se retrouva sabre en main en train de parer les tirs qui le visaient. Rapidement dépassé par l'afflux d'ennemis, il dut battre en retraite à l'intérieur du vaisseau et décoller sans attendre Maîtresse Tlaxcal'ta. Après être parvenu à programmer le voyage vers Naboo, il passa le temps en hyperespace à soigner le vice-roi et à chercher à contacter la vieille Twi'lek.
Le Sith avait rapidement eu raison des compétences martiales limitées de cette dernière, mais elle était parvenue à s'enfuir et à se cacher à l'aide de la Force avant de voler un astronef pour rallier Naboo. La sécurité planétaire avait finalement réprimé les insurgés à l'intérieur du palais, mais la situation sur Cato Neimoidia demeurait explosive. À leur arrivée à Theed, on transféra Sentepeth Rooy à l'hôpital royal pour y guérir totalement et y rester en convalescence, même si le personnel médical félicita Tamaab pour les soins prodigués.
Le Sénat convoqua en même temps les deux Jedi pour décider des mesures à prendre. Bien que Maîtresse Tlaxcal'ta cherchât à en dissuader les parlementaires, ceux-ci votèrent pour une intervention militaire, jugeant clair que les rebelles avaient été manipulés par des agents du Consortium Éternel pour isoler politiquement Cato Neimoidia dans la République et ruiner les relations diplomatiques avec l'Empire. La Twi'lek chercha à expliquer que les motifs d'une rébellion se trouvaient déjà en germe dans la population neimoidienne, et que les Sith n'avaient eu qu'à donner un coup de pouce en débloquant des financements et en formant quelques cadres révolutionnaires. Elle leur démontra, en vain, qu'une expédition punitive n'arrangerait vraisemblablement pas l'image de la République dans la société neimoidienne. Elle se prononça pour une résolution démocratique du conflit sous arbitrage républicain et Jedi, mais le Sénat jugea la proposition inappropriée à la situation. Aussi l'insurrection fut-elle matée dans le sang et Rooy revint-il sur son trône au bout de quelques semaines. Toutefois, Cato Neimoidia en souffrit les conséquences durant des années, puisque des guerilleros défendant des causes fort diverses continuèrent d'arpenter la planète en y promouvant violemment leurs opinions, soutenus par une partie de la population.
Cette première expérience du feu conforta Tamaab dans sa conviction qu'il n'avait rien d'un guerrier, mais aussi éroda sa confiance dans l'attentisme que Maîtresse Tlaxcal'ta défendait parfois. Il avait senti le Côté Obscur bien avant que le Sith ne passe vraiment à l'acte, et il demeurait convaincu qu'une action préventive aurait pu éviter de nombreuses morts. À l'avenir, il devrait faire davantage confiance aux signes que lui laissaient les esprits.

*****

L'entraînement du Padawan ithorien dura encore six ans, durant lesquels il gagna de plus en plus en autonomie vis-à-vis de sa Maîtresse. De plus en plus confiant dans ses capacités, dans sa maîtrise de la Force et du verbe, Tamaab Nadon devenait un véritable Jedi consulaire et un guérisseur compétent, à ceci près que la plupart de ses interlocuteurs le percevaient encore comme un jeune homme naïf, l'apprenti inepte de Zariis Tlaxcal'ta. Plus d'une fois, ces préjugés sur l'âge et l'espèce de Tamaab lui servirent pour soutirer des informations alors que la vieille Twi'lek, sa verve et sa réputation de sagacité suscitaient souvent la méfiance de ceux qui avaient quelque chose à cacher. Les deux Jedi se divisaient donc bien souvent le travail : pendant que la Twi'lek se chargeait de la partie la plus officielle de leur mission, son Padawan enquêtait sur les enjeux souterrains, explorait les lieux plus librement et parlait aux personnalités que le protocole écartait du parcours diplomatique très encadré de sa Maîtresse. Il affectait souvent une candeur distraite, comme un poisson gourmand qui foncerait vers un hameçon en ne voyant que le ver juteux qui s'y tortille. Ce faisant, il devenait lui-même un appât pour les malintentionnés, qui voyaient en lui la faiblesse majeure de la vieille Twi'lek rusée, un moyen d'en apprendre davantage sur elle voire, dans les pires cas, un moyen de pression.
Cette combine marchait de mieux en mieux, à mesure que la confiance de Maîtresse Tlaxcal'ta dans les prises d'initiative de son Padawan grandissait. Elle lui dispensait de moins en moins de leçons sur les grands principes de la Force et le laissait s'entraîner de manière autonome. Régulièrement, les deux s'exerçaient ensemble à perfectionner leurs pouvoirs de la Force, ou à cuisiner une nouvelle recette. Les rapports assez conflictuels qui avaient initié leur relation, devenus rapidement un respect plutôt distant, se muèrent durant ces dernières années d'apprentissage et, pour Tamaab, de maturation, en une complicité discrète. Chacun comprenait beaucoup de choses de l'autre, savait anticiper ses réactions et appréciait les moments qu'il passait tous les deux. Zariis Tlaxcal'ta n'avait pas cessé pour autant de lancer des piques ironiques à son apprenti, mais celui-ci s'était mis à y répondre avec une tranquillité sereine, jouant au benêt. En somme, ils s'entendaient très bien.
Dans la Force, la vieille Twi'lek reconnut la singularité de son apprenti, et finit même par faire un lien entre la manière dont Tamaab l'appréhendait et les arts des Sorcières de Dathomir. Elle avait mis l'Ithorien en rapport avec quelques historiens Jedi qui lui avaient expliqué comment les Dathomiriennes agissaient à travers la Force par des mots, des gestes, des rituels que la plupart des Jedi ignoraient absolument. Leur « magie », car c'était bien d'un genre de magie qu'il s'agissait, reposait sur une croyance mystique en des esprits qu'elles invoquaient et vénéraient. Même si les Historiens Jedi avaient expliqué cela à Tamaab avec beaucoup de scepticisme, comme si les Dathomiriennes avaient été une secte superstitieuse, l'Ithorien ne pouvait s'empêcher de penser qu'elles avaient des intuitions tout à fait valables, qu'il partageait. D'ailleurs, la vision Jedi de la Force et cette communion avec les esprits ne lui paraissaient pas incompatibles. Toute sa vie, il s'était accommodé des deux modèles dans son esprit.
Les Historiens Jedi lui avaient aussi raconté, à demi-mots, que les Sorcières de Dathomir pouvaient utiliser certains pouvoirs avec beaucoup plus d'efficacité que les Jedi, voire des pouvoirs qui étaient inconnus de l'Ordre. Les spécialistes dont Tamaab avaient pu lire les ouvrages pensaient que ces facultés s'expliquaient par leur lien unique avec Dathomir, monde jungle où la nature enveloppait tout. Le Padawan se rendit compte, non sans amusement, que tous ces doctes Maîtres Jedi (la plupart des écrits étaient fort anciens) avaient bien du mal à considérer que la pratique des Sorcières pouvait nécessiter des capacités innés qu'ils n'avaient pas. Non qu'ils fissent preuve de mauvaise foi, mais l'idée ne leur était vraisemblablement même pas venue à l'esprit. Pourtant, à mesure que Tamaab lisait et mesurait la singularité de son rapport à la Force, ce point aveugle de la pensée des Historiens Jedi prenait la clarté de l'évidence.
Maintenant qu'il comprenait ce qu'il avait toujours ressenti, il se mit à prêter une véritable attention aux signes, en particulier aux manifestations telluriques. Les pierres des montagnes, le sable des plages, la poussière des pistes, les parois des galeries... les esprits y gardaient des échos, qui s'atténuaient au fil du temps sans jamais disparaître, mais qu'il était possible de ressentir et de comprendre pour peu que Tamaab s'y attarde. Depuis toujours, il sentait le sol vibrer lorsqu'une situation anormale ou intense se produisait, mais il n'avait jamais cherché jusqu'alors à se plonger dans ces vibrations, ces ondes qui se répercutaient à l'infini dans la Force, et à tenter de déceler les plus infimes, les plus anciennes. Avec la pratique, Tamaab parvint à percevoir l'histoire récente de certaines pierres, à dater le passage d'individus sur un sol, à percevoir des sons sur de très longues distances... Pour un observateur extérieur, son pouvoir ressemblait fort à de la psychométrie, comme celle des Kiffars, mais il n'avait en fait rien à voir. Un psychomètre revivait certains événements des objets qu'il touchait, avec une intensité variable en fonction de l'importance de cet objet, de l'investissement émotionnel dont il avait été chargé. Un simple caillou n'aurait pas révélé grand-chose à un Kiffar. Tamaab, lui, procédait plutôt à une déduction intuitive, qui court-circuitait la raison. Il sentait les vibrations dans la Force avec finesse, et savait immédiatement à quoi elles correspondaient, comme si quelqu'un lui soufflait la réponse. Bien sûr, à la différence de la psychométrie, une telle technique ne lui permettait pas de reconstituer des indices visuels. S'il pouvait estimer avec précision la taille d'un groupe étant passé sur un chemin plusieurs semaines auparavant, il se trouvait absolument incapable de reconstituer des visages, par exemple. Malgré tout, cet atout s'avéra d'une très grande utilité dans la prise d'autonomie de Tamaab.

*****









Dernière édition par Tamaab Nadon le Mer 12 Fév - 23:28, édité 5 fois
avatar
Invité
Invité

Maître Tamaab Nadon, "accoucheur de la Terre" [Work in progress] Empty Re: Maître Tamaab Nadon, "accoucheur de la Terre" [Work in progress]

Lun 20 Jan - 3:37
Troisième post parce qu'on ne sait jamais.
Contenu sponsorisé

Maître Tamaab Nadon, "accoucheur de la Terre" [Work in progress] Empty Re: Maître Tamaab Nadon, "accoucheur de la Terre" [Work in progress]

Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum