[Tsyk] La bonne parole Apexienne [Occultus]

Quelques jours s'étaient écoulés depuis ma première mission pour le Triumvirat. Ma performance sur Sneeve avait réussi à convaincre les trois dirigeants apexiens et j'étais désormais considéré comme un investissement, selon leur terminologie. La route semblait encore longue et il aurait été insensé de songer à arrêter sur cette lancée. C'est pourquoi je me suis adressé à Zarseen afin de continuer à servir les intérêts d'Apex autant que possible. Naturellement, la Grande Verte avait également des plans pour moi et me proposait d'intégrer un programme visant à rendre mes capacités bien plus efficaces et à faire de moi un réel atout. Voyant cela comme une opportunité de prouver mes compétences et de me forger progressivement une réputation dans les hauts rangs, j'acceptais sans hésiter.

Chez nous, même si la grande majorité de la population était issue de la criminalité, il existait quelques règles, quelques lois, qui se comptaient sur les doigts d'une main, voire deux selon votre espèce. L'idée n'était pas d'instaurer un régime érigé par une charte plus longue que la distance entre Bastion et Utapau, mais plutôt de s'accorder sur quelques points afin de maintenir une certaine cohérence dans tout ce qui pouvait être fait ou non dans l'ancien espace Hutt. Un hors-la-loi restant une crapule, il arrivait régulièrement que certains s'estiment pouvoir dépasser le cadre minimal qu'Apex exigeait de nous et, pire encore, s'imaginaient ne pas être vus. C'était ce qui semblait agacer sur le moment Raynar, suffisamment pour qu'elle me missionne sur le cas d'un groupe outrepassant les limites tolérables et érigeant sa propre manière de faire les choses dans un coin du territoire.

Ainsi, la Boss m'envoyait à la rencontre d'une cheffe de guerre apexienne que beaucoup connaissaient, moi compris, sous le surnom de K.O. Une droïde, si ce n'était LA droïde, que tout fanatique de transhumanisme, d'augmentations et de belles femmes, voyait comme la perfection incarnée, vivante, si l'on peut considérer que les Replica ont une âme. Oneida s'était forgée une réputation solide, aussi bien auprès de ses troupes que des contractuels, et je me réjouissais de pouvoir travailler avec une telle figure. Les coordonnées me dirigeaient vers Tsyk, proche de la frontière Républicaine et très loin d'être une destination paradisiaque. Mais les ordres étant les ordres, j'embarquai pour le premier transport en direction de la planète, prenant soin de réétudier les lieux et le cas de Kylie. Je disposais de quelques heures devant moi et je comptais bien m'assurer de connaître le coin où j'allais poser les pieds et avec qui j'allais travailler.

Arrivé sur le monde sur-pollué, je ne perdais pas de temps à visiter le peu qu'avait à offrir les environs et je prenais la route de l'entrepôt que me pointaient plus finement les coordonnées fournies. En chemin à bord d'un taxi loué pour l'occasion, je ne pouvais que constater les moyens lourds que mettait en œuvre Apex quant à la régénération de Tsyk pour en faire une planète plus accueillante, un effort plus que louable. Je me félicitais de faire partie, quelque part, de ce grand projet et je comprenais aussi pourquoi certains s'imaginaient pouvoir créer leur petit royaume ici. Après tout, qui aurait bien pu s'intéresser à Tsyk dans cet état ? Le transport me déposait non loin de mon point de mire et je terminais donc à pied, un coin calme, trop calme pour être normal. Les lieux étaient peuplés par des entrepôts, de toutes tailles, qui semblaient, de l'extérieur, abandonnés. Je m'approchais de l'un d'eux tout en vérifiant l'adresse qui semblait le pointer particulièrement, lorsque l’un de ses murs, celui en face de moi en l'occurrence, se brisait en plusieurs morceaux. La déflagration me fit reculer et me sonna brièvement.

Par réflexe, j'activai mes visières intégrées, le bouclier cinétique et brandis Zenith devant moi à deux mains, prêt à repousser toute menace potentielle. Un nuage de fumée s'échappait du trou, accompagné d'un cri ; quelqu'un vivait un très mauvais moment à l'intérieur de l'entrepôt, augmentant la tension. La voix se faisant de plus en plus forte, ma surprise fut grande lorsqu'un individu en armure surgit du nuage de fumée, non pas en marchant, mais en étant projeté à l'extérieur, à mes pieds. L'évitant de justesse en faisant deux pas vers ma gauche, l'homme était dans un état pitoyable, assez pour ne pas représenter une menace pour moi. Mon attention se porta alors sur ce qu'il restait du mur tandis que le nuage se dissipait peu à peu.

C'est ainsi que je fis la rencontre de Kylie Oneida, se tenant devant moi dans les décombres du mur, bien plus impressionnante en chair et en os, si j’ose dire, que dans tout ce que j’avais pu voir. Je conclus que ma nouvelle patronne venait de s'occuper du pauvre fou étendu à mes pieds, diffusant la bonne parole apexienne, et je baissai ma garde en la saluant. Je supposai qu'il était inutile de me présenter ; elle devait déjà savoir qui j'étais et pourquoi je me trouvais dans ce coin perdu en sa présence.

Je dois le reconnaître, la vue des caméras, même si je ne suis pas le principal protagoniste, m'a toujours mis mal à l'aise. Je restais de marbre pendant que la belle cheffe de guerre réalisait son petit film, incapable d'agir autrement, car il s'agissait d'un exercice loin, très loin, de mes habitudes. Je savais que cela allait arriver, mais je n'avais pas pour autant réfléchi à comment m'y confronter. J'ai toujours été un homme de l'ombre, loin de ce genre de mise en scène, et cela me convenait parfaitement. Cela faisant partie du personnage, je devais apprendre à anticiper, à gérer ce genre de moments avec Kylie, pour les prochaines fois, car des instants de... mise en lumière entremêlés au chaos tout juste généré, j'allais très certainement en vivre d'autres avec la Replica.

K.O. avait ce don particulier de mettre à l'aise tout en déstabilisant, son accueil était précisément dosé. J'étais là pour évoluer vers une meilleure version de moi-même, et certainement pas pour simplement éliminer quelques imbéciles pour satisfaire mes supérieurs, même si c'était un bon prétexte. D'ailleurs, Oneida allait droit au but tout en faisant preuve de pédagogie et, au fond, de bienveillance. Sans attendre, voilà que je me retrouvais confronté à un premier test, plus intellectuel que les précédents. Ses questions étaient d'une pertinence telle qu'il m'était difficile d'y répondre sur-le-champ, et cela s'était sûrement reflété sur mon visage. Malgré mes années passées ici, ce genre de discussions n'était pas mon quotidien ; c'était une première, en réalité. C'est souvent ainsi : lorsque quelque chose devient si naturel que vous ne vous posez plus de questions. Je supposais qu'il y avait plusieurs bonnes réponses, toutes dépendant du vécu de chacun.

J'aurais pu instinctivement répondre qu'une longue liste de contacts, quelques crédits et un flingue fiable étaient les meilleurs atouts dont quelqu'un pouvait disposer, probablement parce que j'avais plus l'habitude d'utiliser mon arme que mon éloquence. Cependant, la dernière opération aurait pu me faire dire le contraire, puisque mon blaster était resté au chaud dans son holster et que je n'avais pu compter que sur un groupe d'inconnus plus que compétents. Était-ce la réponse qu'elle attendait ? Être entouré par une équipe qualifiée et soudée ? Peut-être. Après tout, Oneida était une cheffe de guerre. En revanche, j'étais assez confiant sur ce qu'il fallait impérativement éviter dans notre milieu.


Au pire, j'étais ici pour tout réapprendre, un sentiment à la fois étrange, surprenant et intéressant, que représentait ce début de mentorat. Malgré mon expérience passée, j'avais l'impression de perdre quelques années et de redevenir un apprenti. Certains auraient pu voir cela comme une perte de temps, surtout un mercenaire aguerri comme moi ! Pourtant, je réalisais que j'avais encore beaucoup à apprendre. Si je devais passer par une phase de réinitialisation, passer pour un idiot ayant eu une sacrée chance de survivre jusqu'ici pour devenir quelque chose de mieux... Très bien. Parfois, il est nécessaire de mettre son ego de côté, d'accepter d'avoir en face quelqu'un de plus intelligent, expérimenté, fort que soi, et de profiter de cette présence pour évoluer. Cela peut être difficile à accepter, mais seuls les idiots restent figés dans leurs certitudes. Et si je peux être beaucoup de choses, un imbécile, ça, non.

Il semblait que j'avais partiellement répondu correctement, et j'étais attentif à tout ce qu'elle partageait. Certaines notions m'étaient familières, et elles semblaient en effet assez simples, comme K.O. l'avait précisé. Des années à travailler en solitaire ne se guérissent pas en une simple excursion dans le territoire du Consortium ni en quelques conseils donnés par quelqu'un d'expérience. Il me faudrait du temps pour assimiler le fait que je peux compter sur notre "famille dysfonctionnelle". Cependant, j'acquiesçais de la tête, car tout ce qu'elle disait faisait totalement sens, notamment la différence entre un leader et un chef. Le premier mène son groupe en allant à l'avant des siens, tandis que le second ordonne en restant en retrait, observant de loin et de haut. À cela, je laissais transparaître un léger sourire, identifiant parfaitement certains hauts placés de la galaxie dans les deux catégories.

Mes pensées allaient être poursuivies plus tard, car voilà qu'à mes pieds se réveillait l'individu qui avait traversé le mur quelques temps auparavant. Et dans une certaine jubilation, la cheffe de guerre le prit par une jambe pour le traîner auprès des siens à l'intérieur. Le moment était digne d'un de ces films avec un personnage quelque peu déjanté, et je ne pouvais m'empêcher de me demander ce qui avait motivé le triumvirat à insuffler ce genre de caractère à leur Replica. Non pas que cela me dérangeât, au contraire, cela aidait à prendre avec légèreté une situation autrement sérieuse, un cynisme que j'appréciais. Mais connaissant, que ce soit personnellement ou par réputation, les trois dirigeants apexiens, on pouvait se demander d'où venait une telle humeur.

Je suivis Oneida à l'intérieur de l'entrepôt, où j'assistai à un spectacle particulier : son passage, pour être honnête. Des corps à perte de vue, certains encore animés, d'autres moins chanceux... Sa réputation ne mentait pas sur ses capacités. D'ailleurs, chez nous, on ne devient pas chef de guerre à la légère, pas comme dans certaines factions de la galaxie où il suffit d'être un lèche-bottes ou un fils de pour gravir les échelons sans mérite. C'était une scène sanglante que j'avais déjà eu l'occasion de voir à de rares occasions, mais jamais orchestrée par une seule personne, à part peut-être un Sith il y a quelques années. Pourtant, rien de tout cela ne parvenait à me dégoûter, pas même les fouilles que Kylie entreprenait. Beaucoup pratiquaient la récupération, moi-même dans ma jeunesse lorsque je faisais partie du groupe qui m'avait recueilli. Parfois, il faut faire des choses singulières pour survivre et protéger les siens. Mais je n’eu guère le temps de davantage contempler la situation.

Sécuriser et maintenir en vie les rescapés était quelque chose que je savais faire convenablement. Je commençais toujours par éloigner tout ce qui pouvait servir d'armes, puis à ligoter jambes et bras, pour ceux qui avaient la chance d'être toujours attachés à leur corps respectif, afin d'éviter qu'un malin encore capable de nous agresser ne nous tende un piège. Dans cet entrepôt, cumulé aux restes du matériel qu'ils avaient dans leur équipement, je trouvais amplement d'adhésifs, de menottes et autres accessoires pour restreindre les blessés. Ensuite se posait la question de les faire taire, que ce soit parce que certains souffraient énormément ou parce que d'autres manifestaient leur haine envers nous, et surtout envers Kylie. Là encore, j'utilisais de l'adhésif sur leur bouche ou tout ce que je trouvais capable de leur couper la parole. Moins nous les entendions, plus nous étions sûrs de pouvoir percevoir tout ce qui se passait autour de nous. Ensuite seulement, je commençais les premiers soins, qui restaient sommaires : garrots, cautérisation de certaines blessures avec tout ce qui pouvait être utile à cet effet, principalement de l’équipement industriel récupéré par-ci par-là. Il n'était pas question pour autant de trop les chouchouter. S'ils en demandaient davantage, leur prix à payer serait des informations fiables. Sinon, à quoi bon gaspiller nos ressources ? Ils n'étaient pas des prisonniers de guerre, donc nous n'avions aucune obligation de traitement. En tant que civils sur le territoire apexien, à ma connaissance, je ne voyais qu'une seule autorité dans les parages : la Replica. Et qui viendrait prendre leur défense, après tout ?

Il était peut-être inutile de préciser la nature de ma présence ici, à savoir en utilisant le terme "apprenti". Je n'étais pas pour autant un novice dans le métier, mais admettons-le, il fallait laisser planer le doute quant à mes capacités à les faire parler, et cela concordait avec ce que la Replica souhaitait montrer à l'écran. Je m'approchai donc des ligotés et me baissai à leur niveau, adoptant un ton calme et bas, un changement drastique par rapport au mode opératoire jusqu'alors utilisé. Cela ne signifiait pas pour autant que j'étais incapable d'utiliser la force si nécessaire ; abattre d'un tir dans la tête était chose courante dans notre milieu, et je sentais que mon blaster commençait à me démanger. Avant de m'adresser au groupe, je rétractai mes visières, car regarder quelqu'un dans les yeux faisait partie intégrante du processus d'intimidation.


En finalisant ce premier point, je sortis d'une poche intérieure de mon manteau un datapad sur lequel j'affichai la carte des environs avant de la leur présenter. C'était une tactique que j'avais observée quelque part et que je trouvais efficace. Il était utile de connaître les intentions et leur nombre, savoir où frapper pour couper la tête était bien plus efficace pour mettre un terme à leur agissements.


Je tournai brièvement la tête vers Kylie avant de me tourner à nouveau vers les prisonniers. Ici, chaque instant n'était qu'un rappel brutal de leur dure réalité. Nous voulions des renseignements, et les bons. Leur vie ne nous intéressait guère, et j'utilisai la scène qui venait de se dérouler sous leurs yeux pour les mettre dans de bonnes dispositions.


Voyant que j'avais l'approbation, si besoin était, de chacun, je commençai à éloigner mon premier sujet, lui retirant tout moyen l’empêchant de s'exprimer. Le laissant déballer ce qu'il savait ou prétendait être la vérité, je pris soigneusement note de toutes les informations divulguées. Ensuite, je passai au test de la carte, insérant dans sa bouche une petite tige métallique avec laquelle je lui demandai de marquer l'emplacement de leur camp sur le pad que je plaçai près de lui. Satisfait du premier interrogatoire, je pris les mesures nécessaires pour le rendre à nouveau silencieux, craignant qu'il ne profite de l'occasion pour orienter ses comparses, puis je le replaçai parmi les autres prisonniers. Je répétai ensuite la même stratégie avec deux autres individus sélectionnés au hasard dans le groupe. Je ne rencontrai aucune résistance pendant le processus ; Oneida les avait clairement marqués. Il restait maintenant à déterminer si leurs indications semblaient correctes et surtout cohérentes les unes avec les autres.

Regroupant mon dernier sujet, je m'éloignai pour rejoindre la cheffe de guerre, datapad en main, afin de lui communiquer les informations qu'ils m'avaient fournies. L'objectif était double : obtenir son avis sur la convergence des renseignements et intimider les interrogés en cas d'erreurs dans leurs déclarations. Car si, et seulement si, tout était cohérent, peut-être que Kylie déciderait d'être clémente. En revanche, en cas de contradictions, elle pourrait décider d'exécuter sommairement les interrogés avant de me laisser interroger de nouvelles personnes, afin de les inciter à dire la vérité. C'était un rappel clair : même si j'avais le bon rôle dans cette affaire, je n'étais pas de leur côté.

Une correction de coordonnées et un décès, ça commençait plutôt mal pour eux, au moins la technique d’interrogatoire avait prouvé son intérêt pour au moins la localisation de leur planque et filtrer les éléments non coopératifs. L'interrogatoire prenait une tournure différente lorsque l'un des questionnés mentionnait l'existence d'un deuxième groupe dans les environs, semant le doute quant à la viabilité de leur opposition à Apex. C'était intéressant. Ce type était-il donc une taupe ? Dans ce cas, pourquoi cette cellule n'avait-elle pas encore contacté le Triumvirat ? Je jetais un regard dubitatif à Kylie. Je souhaitais clairement interroger davantage cet individu avant de m'occuper des autres. Soit il bluffait pour se garantir une sorte d'assurance, soit l'opération prenait un léger changement de cap. Mais s'il disait vrai et qu'il était un bon espion, il avait bien plus à révéler que ses compagnons. À quoi bon être infiltré si on ne fait pas correctement son travail, après tout ?

Je m’approchai alors de la présumée taupe et me baissai à son niveau. À présent que sa couverture était clairement grillée, du moins aux yeux des personnes présentes, il avait sans doute compris que son seul moyen de rester en vie était de dévoiler davantage d’informations. Il devait fournir suffisamment de renseignements pour susciter l'intérêt de Oneida et ainsi éviter de se retrouver dans la même situation que ses camarades ici présents. Les espions démasqués étaient rarement traités avec clémence. Je repris le même ton que précédemment et je le regardai droit dans les yeux.


Je commençai à puiser dans nos maigres ressources médicales pour remettre cet homme sur pied de manière un peu plus décente. En commençant par lui administrer un peu d'antidouleur, car K.O. ne l'avait pas épargné celui-là. Si nous voulions qu'il parle davantage, il était judicieux de lui montrer que nos promesses étaient crédibles. En lui offrant des soins, nous lui indiquions que ceux qui coopéraient seraient pris en considération. Cela pourrait, par extension, encourager d'autres prisonniers à se montrer coopératifs pour la suite.En parallèle, je continuais sur ma lancée, conscient qu'il ne fallait pas perdre de temps.


Je dosais minutieusement les soins que j'apportais à ses blessures, conscient de la nécessité de le motiver à partager ses connaissances, même si je doutais de la valeur d'un tel repentir. J'étais convaincu qu'une personne ayant déjà trahi serait susceptible de le refaire. Par conséquent, une fois qu'il aurait épuisé son utilité, je le laisserais à la merci de la cheffe de guerre. C’était tout ce que je comptais pour lui, sauf ordre contraire naturellement. Nous disposions au moins de deux adresses à visiter. Il restait à déterminer leurs nombres et leurs équipements mais rien d’irréalisable non plus. Je gardais en tête qu’il avait cité la République dans ses propos et j’étais plus que curieux d’en apprendre davantage sur l’intérêt qu’elle pouvait avoir à venir sur notre sol. Rien qui ne pouvait nous être profitable, pour sûr.

La taupe continuait à nous livrer ce qu'il savait, l'appât semblait fonctionner. J'écoutais attentivement ses propos, me mettant à sa hauteur et prenant note des points clés. Ainsi donc, l'effort de dépollution était perçu comme de l'oppression, un moyen de rendre docile la population ? J'avais du mal à le croire, mais je gardais mon calme, évitant d'influencer sa manière de s'exprimer. Parfois, je détournais le regard pour croiser celui de Kylie, cherchant à saisir sa réaction à ce que l'espion avançait, mais je me recentrais vite sur le prisonnier. Lorsqu'il eut terminé de nous exposer toutes ses informations, je pris quelques instants pour réfléchir, laissant un silence s'installer. La Replica demeurait étonnamment calme, me permettant d'exprimer ma pensée sur la situation, toujours avec mesure dans mes propos. J'essayai alors de fournir une analyse, peut-être superflue, mais je ressentais que ces individus étaient plus désorientés qu'autre chose. Même s'il était trop tard pour eux, je voulais leur montrer qu'ils avaient un bon fond, mais que la forme de leur action était mauvaise.


Je laissai échapper un soupir avant de me redresser. Des personnes comme lui, comme eux, auraient pu nous être plus utiles que comme esclaves ; leur mauvaise idée partait d'un bon sentiment, celui de faire progresser leur monde. J'étais curieux de savoir ce qu'ils avaient tant à reprocher aux méthodes d'Apex, mais nous avions déjà perdu suffisamment de temps. En revanche, je ne parvenais décidément pas à comprendre en quoi la République pourrait arranger les choses ici. Je me dirigeai donc vers le groupe et m'adressai à eux, debout, sur un ton peut-être calme, mais légèrement moralisateur.


Peut-être avais-je durci mes propos, peut-être avais-je dramatisé les choses, mais j'étais convaincu qu'il n'y avait rien de bon à ce qu'une autre faction vienne marcher sur notre terrain. Nous devions défendre notre mode de vie et montrer qu'il constituait une alternative envisageable pour l'avenir, bien plus que des gouvernements centraux noyés sous des tonnes de lois qu'ils étaient incapables de faire respecter, ce qui rendait parallèlement une partie de leur population hors-la-loi. Bien sûr, Apex avait ses défauts, mais au moins nous ne risquions pas de finir emprisonnés ou tués pour peu. Maintenant, j'étais curieux de savoir quel sort Oneida envisageait pour ces deux cellules. Les exécuter risquerait de les ériger en martyrs si cela venait à se savoir, ce qui pourrait être préjudiciable pour Apex. Cependant, il était crucial de mettre fin à leurs agissements. Je laissai donc le choix de la marche à suivre entre les mains de ma supérieure. En m'approchant de K.O., j'essayai de déchiffrer dans ses yeux sa réflexion sur la situation et ce qui allait advenir ensuite. Mon interrogatoire était terminé, nous avions désormais connaissance des plans des révolutionnaires.

C'était donc là le problème, les principes fondamentaux d'Apex. Après mon intervention, beaucoup commencèrent à exprimer leur mécontentement, et je sentais que Kylie était quelque peu déçue. Désolé pour elle, mais il était hors de question de renier mon point de vue sur la situation et encore moins mes convictions. Leurs remarques avaient de quoi me mettre hors de moi. N'avais-je pas un peu de sympathie pour ces habitants qui voyaient notre présence comme une occupation ? Bien sûr que si, Ord Mantell était toujours sous la juridiction de l'Empire et je désirais, comme eux, voir mon monde se libérer.

Forcé de reconnaître qu'à certains moments, le combat semblait perdu d'avance et que je devrais attendre encore un moment avant de retourner sur mon monde natal, sans risquer la prison ou pire. En revanche, j'avais découvert un nouveau foyer sur Nar Shaddaa qui m'avait conquis, un coin de la galaxie où j'avais fait mon nid. Alors, oui, partir de chez soi pouvait sembler être un acte de lâcheté, recommencer à zéro pouvait faire peur, mais on s'y habituait et avec le temps, on ne regrettait rien, soyez-en sûrs.

S'ils étaient autant contre le système apexien, que le vent les emporte s'ils voulaient rejoindre la République, comme s'ils la considéraient comme une terre promise. Ils auraient vite déchanté en découvrant les limites d'un gouvernement de cette envergure et les fissures dans ses fondations. La méritocratie pouvait sembler dure, mais elle participait à rendre la population plus forte, du moins de mon point de vue. Pour moi, ce système servait à trier ceux qui étaient capables de suivre le rythme et de mériter leur place, au détriment des autres. Je n'avais donc aucun problème avec les reproches qu'ils pouvaient nous adresser. Ainsi, je restais impassible face à toutes leurs accusations.

Cela étant dit, j'aurais pu trouver une meilleure façon de m'exprimer, je le reconnais. Personne n'est parfait, que voulez-vous, et je n'étais pas réputé pour mon éloquence irréprochable ni même mon empathie ; je ne suis qu'un organique, imparfait par définition. C’est donc après avoir créé un peu de chaos et avoir, malgré moi, ruiné le plan de ma supérieure, que j’écoutais cette dernière exposer la suite des évènements. Descendre les plus extrémistes, réduire à l’esclavage les moins violents et laisser repartir les revendicateurs. Pour les deux premiers cas, je voyais parfaitement l’intérêt, et il s’agissait là de ce que nous avions convenu dans notre "contrat" envers eux. Les derniers en revanche, je ne comprenais pas le but recherché. Pourquoi les laisser retourner à leurs cellules ? Ils pourraient avertir de notre venue, avoir le temps de propager des informations contre-productives et finiraient éventuellement morts pour avoir parlé.

Oneida se retourna vers moi, offrant deux possibilités : proposer une autre approche ou suivre son plan. Le mien était clair : puisque raisonner manifestement les dissidents était impossible, il ne restait qu'à les faire partir discrètement pour éviter de propager une révolte à l’échelle planétaire. Ou bien les réduire au silence et propager nous-mêmes de fausses informations sur leurs intentions. Ayant compris ma première erreur et étant ici pour apprendre de toute manière, je décidai de hocher la tête et de suivre le plan de K.O., pour observer comment elle gérerait cette situation. Elle avait visiblement plus l’habitude de traiter avec des dissidents que moi ; je n’étais qu’un mercenaire habitué à détruire des groupes, abattre des individus pour les ramener quelque part, peu importaient les effets collatéraux. Attirer les foudres d’une cheffe de guerre et, par extension, du Triumvirat était clairement la dernière de mes mauvaises idées.

Il était temps de partir, l’interrogatoire étant terminé et les prisonniers pris en charge ou libérés. K.O. m’invita à la suivre dans ce qu’elle avait appelé un speeder. Curieux de constater qu’il s’agissait d’un char, elle était décidément pleine de surprises. Un engin de guerre qui disposait tout de même d’un minimum de confort, dont un minibar dans lequel se servit Oneida après m’avoir offert un verre. En grand consommateur de boisson, j’acceptai naturellement le breuvage, assis au fond de mon siège.

Commencèrent alors de longues explications sur ce qu’il venait de se passer. L’avantage, ou l’inconvénient à vous de décider, de travailler avec une droïde est sa capacité à vite assimiler ce que peuvent penser les personnes. À mon interrogation quant au sort de certains prisonniers, elle répondit en dévoilant son idée. Et je dois dire qu’il faisait sens, en espérant que tout se passe comme elle le prévoyait. Je comprenais l’intention mais j’aurais éliminé tout le monde sur place pour ne pas prendre de risque.

Vint ensuite ce qu’elle nommait comme mon prochain exercice : élaborer une stratégie pour s’occuper du repaire signalé en tenant compte de nos moyens à disposition et en souhaitant préserver la surprise. Donc profiter du fait que nous étions en territoire apexien, comme Kylie me l’avait rappelé.


Une autre possibilité, bien plus subtile, aurait été que je débarque devant l’entrée en me présentant comme une nouvelle recrue envoyée ici, ayant eu vent de leur projet. Ainsi, je pourrais pénétrer dans le lieu et commencer à semer quelques problèmes internes avant que la cheffe de guerre ne fît son entrée, comme elle savait parfaitement le faire. Quant à ce qu’elle me suivît incognito, vu sa renommée, il était improbable que cela fonctionne. Mais pour le coup, je ne me voyais pas rejouer les infiltrateurs d’aussi tôt et pas sans un support comme j’en avais eu et il y avait aussi le souci de rendre crédible ma venue donc, à moins de ne pas être au courant de quelque chose, mauvais plan. Voici donc ce que je lui proposais, premièrement, sans doute moins subtil que dans son esprit, mais il me manquait quelques détails pour concevoir quelque chose de plus fin, en plus de ma méconnaissance concernant les ressources apexiennes utiles dans les environs.

Si un jour quelqu'un m'avait prédit que je dirigerais une force militaire d'une telle envergure, j'aurais éclaté de rire. Moi, ce mercenaire autrefois obsédé par l'exploration des recoins les plus reculés de la galaxie, aux commandes d'une telle puissance ? Une étrange cocktail d'émotions m'envahissait : un sentiment d'invincibilité, de puissance destructrice, mais aussi une anxiété palpable car tout cela avait un prix et une visibilité. Un faux pas lors de mon premier jour de formation, qui jusque-là se déroulait sans encombre, pourrait conduire à une conclusion bien moins glorieuse. C'était un de ces moments rares, un tournant décisif dans une existence, qu'il ne fallait en aucun cas gaspiller.

Il me fallait assimiler une quantité impressionnante d'informations, surtout pour une première expérience avec autant de ressources à ma disposition. Je commençais donc par dresser un inventaire : un transport de troupes complet, des gunships, des commandos, un groupe de guerre électronique, des satellites et bien sûr, K.O.. Pas mal pour un premier assaut. Maintenant, il était temps de mettre en place ma stratégie en tenant compte de tous ces éléments, en m'assurant de les utiliser de manière efficace tout en évitant d'en perdre. Il était grand temps d'analyser les données collectées par nos forces de reconnaissance.

Le site en question se nichait au cœur d'une petite zone industrielle abandonnée, parsemée de quelques entrepôts, une aire d'atterrissage, et surtout, le bâtiment central où nos radars avaient détecté des activités. Il était facile de supposer que le centre névralgique de l'organisation se trouvait là, avec probablement des équipements disséminés dans les entrepôts, prêts à être utilisés à leurs fins. Et bien entendu, quelques points de défense statiques étaient présents. Pas mal pour une force de guérilla ; le marché noir devait sûrement prospérer dans les parages pour leur fournir autant de ressources, ou alors, ils étaient accompagnés de talentueux ingénieurs.

En somme, rien d'insurmontable avec l'arsenal dont nous disposions, mais suffisamment de potentiel pour nous faire perdre des ressources. Mes yeux s'activaient dans toutes les directions, absorbant la complexité de la situation. Il me fallait du temps pour digérer toutes les informations. Un plan, plus réaliste, commençait à prendre forme.

Phase A : La guerre électronique devrait se charger de couper les systèmes de communication et les radars, les rendant inertes de sorte à ne pas alerter dans un premier temps les locaux. En parallèle, les commandos assureraient la sécurisation des entrepôts aux alentours, des droïdes plus évolués que les B1 seraient capables de ce genre d’actions. Je serais présent avec un des groupes de commandos afin d’être utile, déjà, et superviserais depuis le terrain les choses.

Phase B : Nous encerclerions le bâtiment principal, neutraliserions les défenses externes et nous préparerions à pénétrer dans l’enceinte. Ici, j'envisagerais une fois de plus les commandos pour tout cela, en arrivant de toute part, les rebelles seraient incapables de gérer autant d’angles si l’alerte était donnée. En parallèle, le MTT déploierait un contingent de B1 qui viendraient se positionner sur les toits des entrepôts afin de disposer de bonnes positions de soutien à l’assaut. Si nous nous faisions repérer, un HMP réaliserait des passes de sorte à aider par voie aérienne à la neutralisation des défenses. Je pouvais compter trois issues au bâtiment, une principale donnant directement sur la piste d’atterrissage et deux autres plus petites.

Enfin, la phase C : Nous ouvririons les voies en piratant les entrées ou en les détruisant. Des B1 s’occuperaient de la voie principale, en prenant massivement d’assaut ce coin, nous pourrions supposer amasser une partie des insurgés de ce côté, tandis que les commandos et moi-même nous chargerions de passer par les deux autres entrées. Enfin, si des individus parvenaient à fuir les lieux, les HMP s’en chargeraient.

Tout équipement trouvé sur place pouvant être utilisé à des fins de sabotage devait être préservé, de manière à justifier le déploiement auprès de la population locale, gagner le cœur des citoyens en leur montrant la barbarie que prévoyait ce groupe. Et encore une fois, le centre de commande ou toute autre zone susceptible de contenir des informations était maintenu fonctionnel. Quid de Kylie dans tout cela ? Eh bien, je l'envisageais où bon elle se serait sentie la plus utile, sincèrement. J'imaginais que tout ceci pouvait être enregistré en direct donc je ne me voyais pas la contraindre à une fonction en particulier. Qui plus est, elle restait la patronne dans ce plan et avait naturellement son mot à dire sur quoique ce soit. Mais dans l'idée, voici comment je dessinais l'assaut de ce premier repaire sur Tsyk et quoiqu'on en dise, je me sentais satisfait pour un stratège novice. Des années à observer des commandants de loin lors de missions, sans oublier de nombreux films, allaient peut être aider finalement.

Kylie semblait approuver le plan, s'intégrant à celui-ci sans émettre de remarques. Elle choisissait d'assister les droïdes B1 à l’entrée principale. Il était évident que ses actions là-bas réduiraient nos pertes, et cela me réjouissait. Il n'était pas question de la laisser en retrait ou de lui confier une tâche indigne de ses compétences. On me fit également remarquer qu'il fallait réévaluer la priorité des défenses du lieu, car effectivement, je n'avais pas spécifié quand les neutraliser dans le plan. J'acquiesçai de ce retour et l'approuvai. Les postes fixes deviendraient donc la première cible des commandos durant la phase A, avant de sécuriser les différents entrepôts. Il était surprenant de se faire rappeler à l'ordre par un droïde, moi qui avais l'habitude de les voir obéir sans poser de questions mais il n’était pas de n’importe quel type non plus, cela témoignait de leur qualité ainsi que de leur réputation, et je n'avais aucun doute ni aucune crainte à mettre ma vie entre leurs mains.

Un autre point, que j'entendais, pointait une éventuelle menace qui aurait pu surgir derrière nos positions. Celle-là, effectivement je ne m’y attendais pas, probablement parce que je ne voyais que des civils révolutionnaires et non pas une orchestration à plus grande échelle comme certains le supposaient. Ils étaient bien plus experts que moi pour identifier la provenance du matériel sur le repaire, et je croyais improbable que la République puisse ouvertement venir défier notre opération. Toujours est-il que nous réalisions nous-mêmes ce genre de missions sous couverture sur des territoires extérieurs à notre espace, alors pourquoi pas l’inverse ? Mais nous avions toujours les HMP prêts à intervenir ainsi que le reste des troupes du MTT si besoin. Nous devions rester vigilants, oui, mais aussi rester concentrés sur la cible principale.

J'avais le sentiment de ne rien avoir oublié et ne recevais aucune autre remarque pour l'instant, ce qui me laissait penser que tout avait été validé par la chaîne de commandement, ce qui me rassurait d'une certaine manière. Car il est toujours bon de recevoir des suggestions, mais si une seule idée en reçoit trop, c'est souvent le signe soit d'énormes erreurs, soit d'un manque de reconnaissance général. Si le deuxième scénario ne me faisait guère peur, puisque je restais sous la tutelle de K.O., j'aurais très bien pu être submergé par un flot de remarques. Cependant, un plan validé à quatre-vingt-dix pour cent ne garantit pas pour autant son succès. Il restait donc à l'appliquer méthodiquement et à rester à l'affût de toute adaptation nécessaire.

Je n'avais rien d'autre à ajouter, si ce n'était que j'étais prêt et que j'attendais désormais d'être déposé en amont avec le groupe de commandos auquel je m'étais greffé pour déclencher la première phase de l'assaut. Naturellement, il restait encore du trajet à parcourir et je profitais de ce temps pour mémoriser les informations dont nous disposions : les positions des bâtiments, des postes de défense, des entrées, etc. Si je voulais être utile à la fois sur le terrain et dans une quelconque forme de coordination, c'était le minimum requis, du moins à mes yeux.

Le signal pour lancer l'assaut fut donné quelques instants plus tard, marquant ainsi le début de la phase A : neutraliser les défenses et sécuriser les bâtiments environnants avant de converger vers le repaire lui-même. C'était impressionnant de voir, sur nos écrans à bord du speeder, tous ces points représentant nos unités alliées se déployer méthodiquement avant de se jeter sur leurs objectifs comme de véritables prédateurs. C'était comme un orchestre jouant ensemble une mélodie à la fois envoûtante, précise et surtout incisive.

Le tank de Kylie me déposa enfin près d'un groupe de commandos qui devaient partir plus tard que les autres. C'était un peu comme si j'avais ma propre garde personnelle, sauf que cette escouade avait un objectif précis. Leur rôle était à la fois de servir de renfort en cas d'alerte suite à la première vague et d'être parmi les premiers à pénétrer dans les bâtiments si la phase initiale se déroulait sans encombre. En comparaison avec les droïdes, mon équipement paraissait dérisoire : je n'avais que mon fidèle blaster comme arme, même pas une vibrolame. Il était clair que je devais allouer plus de budget pour renforcer mon équipement, car même si je ne me sentais pas nécessairement en danger vu les moyens déployés, je ne pourrais pas toujours compter sur autant d'armes à ma disposition, et encore moins sur autant d'alliés. Cependant, j'aimais voyager léger et je n'avais pas encore accès à autant d'augmentations de pointe.

Certains affirment qu'il est facile pour un militaire de devenir mercenaire, et vice versa. Si je pouvais concéder la véracité de la première affirmation, la seconde me faisait clairement sourire. Un militaire possède des réflexes et des intuitions que même un mercenaire expérimenté ne pourrait égaler. Ainsi, lorsque je me retrouvais à suivre les commandos, la manœuvre me semblait extrêmement difficile. Ce sont des machines à tuer méthodiques et efficaces, où chaque mouvement s'inscrit dans une fluidité parfaite, sans le moindre défaut. Lorsque vous essayez de les suivre pour la première fois, sans appartenir à leur milieu, il est clairement ardu de comprendre, d'anticiper et de se sentir ne serait-ce qu'un peu utile dans cette scène.

Les postes fixes furent rapidement sécurisés par nos troupes, sans que la cellule ne s’en rende compte. En réalité, tout se déroulait dans un silence absolu, seuls les bruits industriels lointains se faisaient entendre, un grondement qui masquait quelque peu nos déplacements pour des oreilles non averties. Cela suffisait amplement, car les informations en direct étaient claires : personne à l'intérieur ne se doutait de ce qui se tramait, mais je savais que la guerre électronique avait joué un rôle majeur dans ce succès.

Pour ma part, je ne fus guère utile lors de cette manœuvre. J'étais trop souvent désynchronisé avec l'efficacité des commandos pour accomplir quoi que ce soit, si ce n'était les suivre et rester informé par l'Intel. Cette lenteur avait au moins pour avantage de me permettre d'observer ces droïdes en action, de comprendre leurs méthodes et leurs manœuvres, et je dois dire une fois de plus qu'ils étaient impressionnants.

Je commençai à recevoir différents rapports des droïdes. Les défenses étaient sécurisées, les B1 étaient prêts à passer à l'action, les commandos étaient en positions, les aéronefs étaient en attente et la guerre électronique nous assurait que tout restait calme à l'intérieur. Nous concernant, nous nous trouvions autour d’une porte secondaire d’un bâtiment et le chef commando avec lequel j’étais me faisait signe que nous étions prêts à entrer. De mon point de vue, les conditions étaient optimales pour poursuivre le plan sans avoir besoin de l'adapter. Tout ce qu'il me restait à dire tenait en un seul mot : Go.

La suite commença par un enchaînement de bruits familiers : une armée de B1 en marche et des tirs de blaster paralysants, qui firent tomber l'entrée principale en un temps record. C'était exactement ce que nous avions prévu, de quoi réveiller les résidents des lieux et les attirer. Jusque-là, l'opération était sans faute. Il avait été convenu que si l'appât fonctionnait, les équipes de commandos devaient rester en retrait pendant quelques instants, laissant le groupe des occupants tomber dans le piège et nous permettre de pénétrer dans les bâtiments inaperçus. Pour nous aider dans cette tâche, l'équipe de guerre électronique de Kylie nous tenait informés des mouvements à l'intérieur.

Sans grande surprise, la majorité des rebelles se dirigèrent vers K.O. et sa troupe. Cependant, quelques signatures thermiques semblaient rester en retrait. Nous n'avions pas plus d'informations à ce sujet, mais il était plausible de les considérer comme des opérateurs cherchant à appeler de l'aide, à informer d'autres cellules de notre attaque surprise ou à comprendre pourquoi les défenses n'avaient pas fonctionné. Peut-être étaient-ils même des hauts-placés au sein de la rébellion. Quoi qu'il en soit, cela ne devait pas affecter notre vigilance ni changer nos plans. Les instructions étaient claires : capturer le maximum d'individus, recourir à la force létale en dernier recours.

Un signal était émis par l'Intel, ce qui me permettait de pénétrer dans le bâtiment en deuxième position, juste derrière un commando. Je suivais en temps réel les renseignements fournis pour neutraliser les cibles les plus proches et avancer en sécurité. L'avantage d'avoir un implant neural militaire était qu'il permettait d'afficher une multitude de données sur un ATH. Pour l'occasion, j'utilisais cette fonctionnalité pour avoir une visibilité sur les positions alliées et ennemies via une sorte de boussole en bas à droite de mon champ de vision. C'était plutôt utile, surtout qu'elle était synchronisée avec la guerre électronique. Cela me permettait de gérer quelques cibles sans trop de difficulté. Vous pouviez imaginer qu'un individu connaissant en temps réel la position de son adversaire était nettement avantagé, surtout combiné à l'inexpérience des civils présents. Les neutraliser était presque un jeu d'enfant.

Il y avait une certaine fierté dans cette action, de voir le plan se dérouler sans accroc pour l'instant. Certes, ce n'était pas ma première opération, j'en avais déjà orchestré plusieurs auparavant : des vols, des enlèvements, des assassinats, mais jamais avec autant de ressources ni un risque aussi élevé de faire passer Apex non seulement pour des oppresseurs mais aussi pour des incompétents incapables de gérer des civils. Ma réputation n'était pas en jeu, du moins pas pour le moment. Mais si les choses tournaient mal, qui serais-je aux yeux de la galaxie ? Personne. Je perdrais sans doute la confiance du Triumvirat et mon statut. Au pire, je finirais esclave ; au mieux, un simple citoyen remercié par Raynar elle-même.

Cette pensée me maintenait en état de vigilance constante, je n'étais pas là pour faire échouer ma propre idée, sponsorisée par Oneida en personne. Je commençais donc à me sentir chez moi, nettoyant méticuleusement les pièces, parfois en binôme, parfois seul. La proximité avec les cibles rendait parfois Zenith peu efficace, donc je me tournais vers des attaques au corps à corps. Là aussi, j'agissais avec une facilité déconcertante. Soit les civils connaissaient quelques techniques de défense, vues dans des films ou des cours, soit ils imaginaient pouvoir faire face à des bras cybernétiques avec de simples tiges métalliques, un armement bien modeste comparé à l'arsenal déployé à l'extérieur.

Malgré tout, je ne pouvais pas me plaindre. Mon parcours jusqu'à présent avait été sans difficulté particulière. Je me demandais si c'était encore ma chance soudaine depuis mon arrivée sous les ordres de Zarseen ou simplement la vérité de la situation. M'arrêtant dans une pièce fraîchement conquise, je laissai mes compagnons de route passer devant moi, afin de demander des informations sur le déroulement global de l'opération.

Les derniers rapports de situation étaient extrêmement positifs : toutes les équipes avançaient sans difficultés, sécurisant les bâtiments un par un et procédant à quelques captures. Un franc succès ! À cette allure, nous aurions terminé l’opération dans quelques temps seulement, et nos efforts de réhabilitation de Tsyk seraient sécurisés dans les environs. Cependant, en exprimant ma surprise quant à la facilité avec laquelle tout se déroulait, j'avais forcément attiré le karma à moi. Une prise d’otage dans le bâtiment voisin allait inévitablement pimenter l’opération, du moins c'est ce que je pensais.

Personne n’apprécie les prises d’otage, surtout lorsqu'on se trouve de mon côté de la scène. En arriver là, c'est être soit déterminé, soit désespéré, et pour l'instant, il était difficile de catégoriser correctement la situation. Ma principale interrogation était le pourquoi ? À ma connaissance, nous n'avions pas de taupe dissimulée chez eux, alors à moins que l’assaillant l'ait imaginé, je ne comprenais pas pourquoi il prenait pour cible son propre camp… Jusqu'à ce que les informations supplémentaires me parviennent : un couple. Peut-être se disaient-ils que s'ils devaient partir aujourd'hui, autant le faire en beauté, ou bien en martyrs d’une cause présumée juste. Évidemment, cela serait exploité dans les médias, nous présentant comme des monstres, même si dans cette affaire, il était tout à fait admissible qu’un duo abattu, faisant partie d’un groupuscule désirant réduire à néant tous les efforts de reconstruction sur une planète sur-polluée, ne suscite pas vraiment la sympathie. Les cœurs et les esprits de nos vrais citoyens apexiens pourraient certainement en rire. Les criminels n’étaient pas réputés pour leur sensibilité, après tout. Mais admettons !

Je pris la situation au sérieux et décidai de me rendre sur les lieux pour désamorcer la situation. Toutefois, j' insistai sur le fait que je souhaitais qu'un tireur d'élite soit positionné, au cas où cette prise d’otage ne serait pas ce qu'elle semblait être à première vue. Il était crucial de rester vigilant, car il ne manquerait plus qu'à créer des martyrs, alimentant ainsi les idées révolutionnaires sur Tsyk et éventuellement sur d’autres planètes. Je visais à désarmer l'assaillant en ciblant son arme ou une partie non vitale de son corps, tout en restant attentif à l'otage, qui pourrait représenter une menace potentielle. De plus, je demandai à ce que la pièce soit minutieusement analysée, car il était possible qu'elle soit enregistrée par vidéo ou audio, indépendamment du système de communication que nous avions bloqué. Appelez cela de la paranoïa, mais je préférais considérer cela comme de la vigilance. Je ne craignais pas pour ma vie, disposant d'un bouclier cinétique, mais la situation pouvait réserver des surprises en raison du manque d'expérience des assaillants.

Profitant de la sécurisation des couloirs menant à la situation, je me rendis rapidement à l'entrée de la pièce. Un commando était posté là pour empêcher toute sortie. Après l'avoir salué, je me présentai comme celui qui prendrait en charge la situation. Je lui remis Zenith et me préparai à user une nouvelle fois de mon éloquence, considérant cela comme un exercice compte tenu de la situation. Je m'appuyai contre le mur de la pièce, tournant la tête vers la porte ouverte pour être parfaitement entendu. Bien que des tirs sporadiques se fassent entendre, je maintins un ton calme et posé. Mon objectif était de calmer la situation, pas de l'envenimer davantage.


Je pris la situation au sérieux, m'efforçant de ne pas paraître amusé ou trop détendu. Il était crucial de jouer le jeu qu'ils attendaient de moi et de considérer que l’homme avait réellement l’intention de nuire à sa compagne. Je devais également rester conscient du danger que cela représentait, malgré toutes nos précautions. Attendant sa réponse avec fermeté, je fixais le vide, anticipant déjà le déroulement possible des événements. Peut-être que ces révolutionnaires allaient finalement nous surprendre. La mission était loin d'être terminée.

Je reçus rapidement une réponse catégorique : le ravisseur refusait catégoriquement que j'entre pour parler en face à face. Je restai donc de l'autre côté du mur, écoutant ses revendications et ses menaces. Ses références cinématographiques étaient amusantes, et si j'avais eu d'autres personnes autour de moi, nous aurions peut-être même ri en les reconnaissant. C'était un flagrant délit d'amateurisme, confirmant ce que nous savions déjà, mais je jouai le jeu pour tenter de comprendre son point de vue et le calmer.

En même temps, deux informations plus sérieuses me parvinrent : le tireur d'élite était en place et avait une vue dégagée pour gérer l'assaillant. De plus, la pièce était dépourvue de tout dispositif de capture vidéo ou audio, ce qui était un petit soulagement car je n'avais aucune envie que nos échanges soient diffusés. Je pouvais donc commencer les "négociations".

L'assaillant avait une longue liste de demandes, toutes destinées à lui permettre de quitter le territoire sans être inquiété par nos forces. Il semblait probable qu'ils envisageaient de rejoindre la République, attirés par les promesses qu'elle leur avait faites. Évidemment, il était inconcevable de leur permettre de quitter notre espace, étant donné les accusations portées contre eux, mais nous pouvions leur offrir un espoir de ne pas être exécutés sommairement comme seule sentence. L'homme changea rapidement de ton et de discours lorsqu'il comprit que ses termes ne seraient pas acceptés, et j'eus finalement l'autorisation de pénétrer dans la pièce.

Les mains en l'air et désarmé, je franchis la porte et me retrouvai dans une sorte de remise remplie de vieux systèmes électroniques et de pièces de rechange. Au centre de la pièce se trouvaient les deux individus : l'un à genoux, des traces de larmes sur le visage, et l'autre debout, tenant une arme pointée sur la tête de sa complice. Ils étaient plutôt convaincants dans leur mise en scène de terreur, et je restai à une distance prudente, jouant le jeu pour éviter tout geste de panique qui aurait pu mal tourner. La peur était palpable dans leurs yeux.

Une fois de plus, l'homme tenta de donner de l'importance à l'otage en la désignant comme la cheffe des opérations de cette cellule, mais cela fut rapidement contredit par le service de guerre électronique de Kylie. Il s'agissait en réalité de personnel chargé du maintien en fonctionnement des locaux, un rôle important mais insignifiant à nos yeux.

Ils firent alors une dernière tentative pour obtenir leur liberté. Ils méritaient au moins le mérite d'essayer. Sans les informations préalables, j'aurais peut-être été trompé avant que l'interrogatoire ne me fasse changer d'avis. Déjà dix longues minutes s'étaient écoulées depuis le début de cette situation. J'avais mis de côté le reste de l'opération pour gérer personnellement cette fausse prise d'otage. Certains pourraient considérer cela comme un manque de pragmatisme, un défaut dans la gestion des priorités en tant que chef de mission. Mais je ne pouvais simplement pas laisser ces pauvres âmes être capturées ou tuées de la sorte. Je n'étais pas encore assez façonné par ma nouvelle vie pour cela.


La dernière fois que j'avais adopté un ton moralisateur, les choses avaient mal tourné, et il est probable que je n'avais pas tiré les bonnes leçons de cette expérience. Mais cette fois-ci, j'osais espérer pouvoir raisonner le couple, car oui, je considérais qu'ils n'avaient encore rien fait de répréhensible. Certes, ils étaient accusés d'avoir enfreint la loi d'Apex, cela ne faisait aucun doute. Mais à ma connaissance, ils n'avaient pas encore commis d'acte plus grave que de rejoindre un groupuscule ayant des objectifs contestables. Même si cela ne se déroulait pas ici même, j'étais curieux d'entendre leur version des faits. Je n'avais pas le sentiment qu'ils étaient à leur place ici. Ils étaient certainement motivés à protester contre nous, mais de là à les considérer comme de dangereux terroristes, j'avais des doutes.

Il était hors de question d'ouvrir le feu, même en guise d'avertissement envers deux individus ouverts au dialogue. Je pouvais admettre que cela puisse sembler être une perte de temps ou une méconnaissance des méthodes habituelles de K.O., mais je m'opposais fermement à rendre la situation inutilement tendue. La première étape pour convaincre que Apex n'était pas un successeur digne des Hutts était d'engager le dialogue avec son peuple. Tout comme un enfant commet des erreurs qui contribuent à son apprentissage, la solution des parents n'est pas toujours de lui rappeler de force ce qu'il ne peut pas faire. Ainsi, je fis signe au tireur d'élite que non, je n'autorisais pas sa proposition, même si je comprenais son idée. Si Venom ou Kylie intervenait pour me contredire à ce sujet, je n'avais aucune raison de rester ici, encore moins sous les ordres du Triumvirat.

Je baissai également légèrement mes bras, non pas que la fatigue commençait à se faire sentir, mais pour indiquer à l'homme que j'étais là pour dialoguer et qu'il n'avait pas besoin de se sentir menacé. De plus, son arme, selon ses dires, était désarmée et ne représentait plus aucune menace. Alors, à quoi bon rester aussi prudent ? Je pris un bref instant pour réfléchir à ce qu'il voulait, à ce que nous voulions, et pour tenter de trouver une solution acceptable, à la fois sévère et juste. Partir de Tsyk, recommencer leur vie : il y avait du bon dans leurs demandes, mais je voulais aussi leur faire comprendre que nous n'étions pas les héritiers des Hutts.


Je connaissais bel et bien un gars sur Ylesia, tout était vrai mais je n’avais pas vraiment de mot à dire sur leur sentence, à moins qu’être le dernier investissement en date de Zarseen puisse me le permettre. Très franchement, ces deux personnes me touchaient. Elles étaient au mauvais endroit au mauvais moment et certainement qu’elles auraient été inconscientes ou mortes si je n’étais pas venu m’occuper personnellement d’elles. Appelez-moi faible d’esprit, mais aider les âmes perdues dans ce bas-monde était une qualité que je trouvais requise, notamment pour des positions de pouvoir. Ne jamais oublier que vous avez obtenu cette position parce que des personnes, comme ces deux-là, ont un jour cru en vous. Ou bien vous l’avez prise de force et vous n’êtes rien de plus qu’un oppresseur aussi digne que les Siths. Et compte-tenu de mon point de vue sur eux, ce serait très hypocrite de me comporter comme tels.

En tout cas, c’était ma seule offre avant de laisser les commandos les arrêter car, si ici tout se passait “bien”, je n’avais plus nécessairement d’informations sur le déroulement du reste de l’opération, cela commençait à m’inquiéter et probablement que cela finirait par m’être reproché si je prenais davantage de temps pour deux révolutionnaires sans valeur stratégique pour le reste de la campagne anti-terroriste sur Tsyk.

La situation se désamorçait rapidement : le couple devenait coopératif et le reste de la cellule avait été capturé sans qu'un seul coup de feu ne soit tiré. Je me félicitais de ce premier résultat, tout autant que d'avoir pu récupérer du matériel et des informations dans ce repaire sans subir de lourdes pertes dans nos rangs. Certains auraient pu penser le contraire étant donné les moyens dont disposaient les rebelles, mais il ne faut jamais sous-estimer un adversaire, même sous-équipé, car la détermination peut générer de véritables fléaux...

Les premières informations récupérées étaient intéressantes, notamment les différentes positions des révolutionnaires sur Tsyk. Il y avait matière à réaliser la même opération qu'ici dans de nombreux endroits, un renseignement capital qui faciliterait la suite pour Apex. Cependant, une bonne nouvelle ne vient jamais sans son lot de problèmes, et naturellement, lorsque les choses s'enchaînent trop facilement, survient inévitablement le grain de sable, celui qui engendre un début de chaos. On me fit savoir que nos actions avaient été signalées et qu'un grand groupe de révolutionnaires avait décidé de frapper fort, tous ensemble, contre nos installations de réhabilitation planétaire, à cet instant même.

Qu'avaient en tête ces pauvres fous ? Ils se précipiteraient vers leur perte avant même de pouvoir approcher les équipements. Tout ce qu'ils allaient accomplir, c'était un suicide collectif. Peut-être était-ce là leur objectif ? Enregistrer la vidéo de ce massacre, la manipuler, la diffuser sur les réseaux pour transformer ces personnes en martyrs et nous faire passer pour des monstres ? Une tactique qui pourrait fonctionner, mais pourquoi ? Et qui serait prêt à orchestrer une telle chose ? Ce sont des questions auxquelles je devais temporairement mettre de côté pour gérer le problème avant qu'il ne devienne incontrôlable. Je venais d'éviter de recourir à la violence inutile, et je comptais bien reproduire cela ailleurs, mais je devais aussi prendre en considération que l'approche pacifique ne serait pas forcément la plus optimale. Prendre le risque de subir de lourdes pertes dans nos rangs serait imprudent, voire inutile. Il est facile de négocier avec quelques individus, mais pas avec tout un groupe de cette ampleur.

Quoi qu'il en soit, je me suis dirigé vers Kylie et son blindé tout en demandant aux services de renseignement de se concentrer sur ce nouveau problème, récupérer le maximum de données, entre autres s'il était encore possible d’intercepter les révolutionnaires avant qu'ils ne se précipitent vers leur mort, et en combien de temps nous pourrions y parvenir. C'était une course contre la montre pour éviter que nos efforts ici ne soient finalement réduits à néant, et cela était hors de question. J'étais déterminé à découvrir qui se cachait derrière ces ordres absurdes et à les stopper avant que la situation ne devienne vraiment incontrôlable.

Nous avions toujours à notre disposition l'ensemble de notre arsenal. Bien qu'il fût naturel de laisser quelques troupes ici pour rassembler d'autres renseignements, je pouvais certainement envisager la suite des événements avec la grande majorité de nos forces. Cependant, beaucoup dépendait du temps dont nous disposions pour intercepter les rebelles et du niveau de danger auquel il était acceptable de confronter les droïdes sans attirer les foudres de K.O. et du Triumvirat. Néanmoins, je pouvais déjà concevoir une tactique d’encerclement avec les HMP, en exploitant leur capacité de transport de troupes pour déployer rapidement des BX sur les lieux. Même si les révolutionnaires étaient armés, nos aéronefs étaient suffisamment équipés pour encaisser quelques tirs et riposter, ce qui constituerait une légitime défense. Quant au MTT, il serait trop lent pour être nécessairement utile, et en ce qui concerne le fameux speeder de la cheffe de guerre… difficile à dire. Avec les maigres détails dont je disposais à ce stade, il m'était difficile de me projeter davantage. Toutefois, je demandai en urgence l'embarquement d'un maximum de commandos disponibles à bord des gunships afin de commencer à nous rendre à la rencontre des cellules.

Ainsi, le premier jet du plan était resté sans retour, ni de la part de Kylie, ni des tacticiens… Le silence pouvait être interprété comme un acquiescement. Je venais d’arriver sur la piste d’atterrissage où était stationné un gunship, commençant à faire embarquer des commandos pour la suite. Pas de répit pour les braves, je devais m’adapter au rythme des droïdes, éviter les mouvements inutiles, sans même prendre le temps de saluer Oneida. Pour l'occasion, j'étais un engrenage supplémentaire dans une machine parfaitement huilée. Pour un organique, s'aligner sur les robots était un défi, mais aussi une opportunité d'intégration et d'acceptation. Je n'étais pas simplement là parce que Raynar l’avait décidé, mais parce que je voulais être partie prenante de quelque chose de grand.

Sans perdre de temps, nous prîmes la direction d’une zone urbaine abandonnée, identifiée comme un excellent point d’embuscade. Les révolutionnaires semblaient avoir formé un convoi. À ce stade, nous avions peu de détails sur les types de véhicules utilisés, mais il était plausible de penser qu’il s’agissait de speeders civils, peut-être modifiés pour offrir un minimum de protection ou même armés. Rien qui ne puisse résister bien longtemps face à notre arsenal et à notre expertise.

Je profitai du voyage pour scruter attentivement la destination, cherchant le coin idéal pour nous retrancher et attendre patiemment nos adversaires. Les anciens bâtiments délabrés semblaient parfaits pour se dissimuler de l’extérieur et prendre une hauteur stratégique. Parallèlement, je m'efforçai de trouver une issue diplomatique, pacifique, bien que cela me paraisse difficile à concevoir. Cette fois-ci, les rebelles avaient franchi une ligne que nous pouvions considérer comme impardonnable en prenant véritablement les armes. S'ils en étaient arrivés là, c'était parce qu'ils percevaient Apex comme l'ennemi, et nous ne pouvions désormais les traiter qu'en répondant par la force. Le défi était de déterminer le degré de force à employer pour mater leur mouvement. C'était le même dilemme depuis mes débuts sur Tsyk : être juste et gagner le cœur des citoyens, ou être brutal et rapide. Mais je devais remettre cette réflexion à plus tard, car nous arrivions sur les lieux et les commandos attendaient la suite du plan.

Comme je l'avais dit, une zone urbaine était un excellent point d’embuscade, probablement le meilleur pour s’attaquer à un convoi. Il était bien connu que de nombreux mercenaires adoptaient des tactiques militaires, souvent en les adaptant pour correspondre à leurs ressources ou pour rendre l'approche plus guérilla. Pour cette occasion, je proposai aux commandos de se diviser en trois groupes, bien espacés le long d'une longue rue avec un seul point d’entrée et de sortie. L'idée était simple : pour empêcher un convoi de se défendre, il suffisait d'immobiliser les deux véhicules, celui de tête et celui de queue, simultanément, lorsque tous les speeders s’engageraient dans une voie unique. Ainsi, nous bloquerions littéralement toute la file et pourrions gérer le reste sans être perturbés par d'éventuelles manœuvres. Un effet de surprise capable de provoquer une désorganisation particulièrement efficace.

Bien sûr, les militaires ont des tactiques pour contrer ce type d’embuscade, mais je ne m'attendais pas à ce qu'elles soient employées par des civils peu expérimentés. Ainsi, je demandai à un groupe de gérer l’avant, un autre l’arrière, et enfin le dernier le "milieu", auquel je m'intégrerai pour avoir un œil sur l’ensemble de l’opération et intervenir en cas de nécessité. Les HMP se positionneraient en retrait, afin de ne pas alerter les opposants de notre présence, et se tiendraient prêts à réaliser des tirs de sommation si des rebelles tentaient de fuir l'embuscade. De plus, nous devions garder à l’esprit que nous allions seulement intercepter l’avant-garde, et que tout devait être géré rapidement sous peine de devoir affronter des renforts. Une fois de plus, capturer la majorité des individus était à privilégier, mais il fallait reconnaître que cette fois-ci, ils savaient que nous étions dans les parages et qu'une riposte ne tarderait pas à suivre.

J'avais confiance dans les compétences des BX, mais je ne voulais pas prendre le risque que ma volonté d’éviter un bain de sang nous desserve. J'insistai donc auprès de mes compagnons sur le fait que si les opposants se montraient difficilement gérables, l'usage de la force létale serait autorisé.

Lorsque les véhicules étaient arrivés à notre niveau, l'embuscade avait été méthodiquement menée à bien. Pour ma part, j'avais réussi à me fondre de mieux en mieux dans l'équipe, à être utile, et j'avais neutralisé quelques opposants, même si en nombre moindre que mes alliés. Je me félicitais d'avoir fait plus que simplement donner des ordres. Je trouvais cela important d'être au contact de la troupe, de me projeter dans leur condition et de pouvoir réagir en conséquence. Non seulement j'étais persuadé que cela me permettait de gérer la situation de manière plus intelligente, mais j'avais aussi le sentiment d'être davantage accepté, même si en réalité, ils étaient simplement programmés pour suivre mes ordres, tant que Kylie ou Venom ne les contredisaient pas.

J'appréciais les efforts fournis par mes soldats-malgré-eux pour rendre nos actions ici les moins meurtrières possibles. Je ne savais pas si saluer ces comportements leur était d'une quelconque utilité morale, mais je ne pouvais m'en empêcher. Je les considérais comme des organiques, avec tous leurs défauts en moins.

Le plan nous avait permis de capturer bon nombre d'éléments de l’avant-garde, des individus sans réelle importance, de la chair à canon... Décidément, soit nous avions affaire à de vrais amateurs et cette opération n'était qu'un amuse-bouche sans enjeu pour tester mes capacités, soit la tête derrière tout cela utilisait de la main-d'œuvre jetable pour nous pousser à l’erreur. Pour l'instant, c'était lui qui semblait commettre erreur sur erreur.

La présence d'équipement lourd républicain ne laissait plus vraiment de place au doute quant à son implication dans cette rébellion. Trouver des armes sur le marché noir était une chose, j'en savais quelque chose, mais des blindés ? Certainement pas, du moins pas sans un compte en banque bien garni ou une aide extérieure significative. Je commençais sérieusement à remettre en question les motivations profondes de cette insurrection. Et si, parmi ces troupes, se cachaient tout simplement des commandos de la République, missionnés pour galvaniser les locaux, les plus susceptibles de se laisser influencer par des idéaux ? Quoi qu'il en soit, la ou les personnes derrière tout cela devraient payer pour leurs actes tôt ou tard.

On me rappelait légitimement que dès que les assaillants seraient à portée d'engagement, les systèmes de défense entreraient en action et que je ne pourrais en aucun cas annuler cet ordre. Et de toute manière, je n'aurais pas cherché à le faire. Bien sûr, je tenais à préserver des vies, mais une fois de plus, ils avaient franchi une ligne, celle de trop cette fois-ci, et mes priorités demeuraient centrées sur Apex. En cas de massacre, ma réputation pourrait être ternie, mais j'aurais la conscience tranquille, sachant que de nombreuses vies avaient déjà été épargnées.

Afin de légitimer une éventuelle riposte aux yeux de l'opinion publique, je demandais à ce que des photos et des vidéos soient prises de l'équipement républicain en territoire apexien. Avec les experts en guerre électronique que nous avions dans nos rangs, il serait facile de faire passer tout cela pour un acte de défense justifié. La République nierait probablement toute implication dans cette révolte, mais le mal serait fait. Nous pourrions regagner le cœur des citoyens de Tsyk en leur montrant la "véritable" nature de leur voisin, qui utilise la population locale pour conquérir un territoire. C'était du moins ce que j'espérais, mais je me contentais d'avoir demandé des preuves de l'utilisation de l'équipement de la République, laissant le reste aux diplomates et aux décideurs d'Apex.

En dehors de couvrir mes arrières, que me restait-il à jouer ? Je n’étais qu’un mercenaire et je m’estimais déjà content des résultats de cette journée. La solution simple face aux restes de l’opposition était l’usage de la force brute, les laisser arriver à portée de l’artillerie, profiter du spectacle et user des gunships pour traquer les survivants. De concert avec les preuves d’une présence républicaine, j’avais une justification quant à l’emploi d’armes sur notre sol. Mais si j’avais bel et bien raison, que des commandos se cachaient bien parmi ces insurgés, je perdais une occasion en or de capturer l’ennemi et de lui faire passer l’interrogatoire de sa vie tout en gagnant quelques points auprès de ma hiérarchie. Il me fallait quelque chose de plus subtil et forcément, plus dangereux…

Je me souvenais de leçons apprises plus tôt : prendre soin de proposer ses idées et demander conseils, après tout je n’étais pas le seul cerveau dans les parages et si j’avais surtout affaire à des circuits logiques, les BX avaient une bien meilleure capacité de réflexion que moi. J’exposais donc mes deux idées, en complément de l’alternative létale où il était question de simplement laisser les blindés s’écraser sur notre artillerie.

La première stratégie décrivait l’utilisation des vêtements et véhicules tout juste capturés et encore en bon état afin de nous faire passer de loin comme les rescapés de l’avant-garde. Il fallait gagner du temps, arriver au contact des tanks et frapper à ce moment-là, profiter de la surprise pour désarmer un maximum d’individus et utiliser la force létale pour le reste, en complément d’un support aérien. Une tactique très risquée mais qui pourrait s’avérer payante. La principale problématique, de mon point de vue, était de dissimuler des droïdes sous des tenues souples, loin des armures robustes dans lesquelles il suffirait d’user de leur capacité d’imiter des voix…

La seconde consistait à déplacer les véhicules dans des ruines, les endommager de sorte à attirer l’attention des rebelles et miser sur leur camaraderie pour porter secours à d'éventuels “rescapés” de ce faux massacre. Là aussi, j’anticipais qu’une partie de la force ennemie bifurquerait vers nous pour que nous puissions les prendre en embuscade et laisser le reste s’écraser sur la défense apexienne. Beaucoup plus de suppositions que le premier plan mais nous avions l’avantage d’une couverture aérienne si les choses venaient à mal se passer.

Dans tous les cas, je ne voyais pas comment il nous serait possible de gérer pacifiquement l’ensemble de la manœuvre, mes plans étaient déjà suffisamment risqués et pour le moins curieux… Mais j’avais foi en l’ingéniosité des droïdes que j’accompagnais, certes je sortais très clairement des stratégies conventionnelles, toujours qu’un plan inattendu pour nous l’était tout autant pour l’ennemi et s’il y avait bien des forces spéciales républicaines dans leur rang, utiliser des tactiques standards serait peu efficace… Au pire, je passerais pour un idiot, au mieux un amateur, chose certaine, j’avais le mérite de demander des avis au lieu de lancer bêtement nos effectifs au suicide.

Les commandos semblaient satisfaits de mes propositions et échangeaient même sur la viabilité de leurs scénarios. Je ne pouvais qu’imaginer l’effort que cela leur demandait, eux qui avaient l’habitude de tactiques bien différentes de celles de Oneida. Je me réjouissais qu’ils accordent autant de crédit à mes idées. La stratégie de la diversion était celle préconisée, plus viable que tenter de déguiser des droïdes en organiques, naturellement. Ma seule crainte était qu’ils ne tombent pas dans le piège une seconde fois. Mais qu’importe, j’allais bientôt mettre de côté cette idée, non pas parce que j’avais trouvé mieux, mais bien parce qu’un de mes collègues mettait en évidence une autre approche, peut-être plus brutale, mais intéressante. Puisqu’ils avaient écouté mes suggestions, il était à mon tour d’être attentif.

L’idée était pourtant simple, tellement que je ne l’avais pas imaginée, trop concentré à me focaliser sur la défense des installations : couper la tête. Stratégiquement parlant, la meilleure option était de traquer le cerveau de l’ennemi tant qu’il était encore dans les parages. Sa capture pourrait mettre fin à d’autres situations similaires et nous éclairer sur l’éventuel réseau que nous affrontions. Il était évident que tout ceci faisait partie de quelque chose de plus grand que Tsyk. Ce choix pourrait sauver des millions de vies à travers le territoire et protéger des installations de premier ordre, mais il sacrifierait les âmes que je désirais tant protéger d’une fin tragique. Le risque ici était de ne pas réussir à capturer le commandement, ce qui signifierait n'avoir ni protégé la population locale ni réalisé un coup de maître. De plus, j'avais peu d’informations sur l’individu en question. D’un autre côté, arrêter l’insurrection sauverait des vies aujourd’hui, mais ne garantirait ni la fin de la révolte sur cette planète, ni que ce mouvement ne se propagerait pas à d’autres mondes.

On ne peut pas toujours sauver tout le monde, et j’allais apprendre cela dès ma seconde opération, même avec toute la bonne volonté possible. La guerre, qu’elle soit locale ou globale, est pleine de dommages collatéraux avec lesquels il faut composer et surtout avancer. Avoir entre les mains le sort de civils est une sensation bien différente que de simplement avoir la vie de personnes, ou de droïdes, sous son commandement. Les deux génèrent une certaine pression, mais déterminer que pour un bien commun il faut sacrifier des vies non préparées à la mort est quelque chose auquel on peut difficilement être préparé. Dans mon cas, je n’avais jamais été confronté à une telle situation. Dans le mercenariat, tout ce qui compte, c’est notre tête, notre survie, ou celle du groupe naturellement.

Mais je comprenais que faire ce choix aujourd’hui nous conduirait vers une conclusion plus favorable à la fin de cette conspiration et, par extension, rendrait mon territoire plus sûr. Après avoir réfléchi à la proposition du commando, j'approuvai d'un signe de tête l'idée de capturer le chef de cette opération. J’informai le reste de la troupe de cette décision et réclamai un nouveau déploiement, en prenant soin de marquer la position des opposants fraîchement capturés pour qu’ils soient récupérés ultérieurement. Je demandai également à l’équipe de guerre électronique de nous fournir un maximum d’informations sur le responsable, si possible, et de ralentir autant que possible la colonne de rebelles.

J’avais accepté le sort des opposants, mais j’espérais, quelque part, pouvoir gagner du temps et éviter ce massacre. Si nous parvenions à capturer à temps le chef des insurgés, peut-être pourrions-nous stopper cette attaque. Ma priorité était désormais la capture de cet individu et, par extension, la sécurisation de la planète. Mais si je pouvais en bonus gagner le cœur des habitants de Tsyk, je ne m’en priverais pas. Toutefois, le compte à rebours initié par le commandement des défenses des installations apexiennes continuait à s’approcher de sa limite basse. Quoi que nous fassions, il fallait agir vite et surtout efficacement.