[Koratas] - A la Croisée des Mondes [PV Meetra]

Ce ne devait être qu’une simple mission. Koratas, l’une des lunes Dathomiriennes, avait vu un nouveau cycle s’initier. Et tandis que le satellite poursuivait son cours sur l’orbite planétaire, une banale étape pour avarie préalable à un voyage stellaire se transforma en exploration. Une exploration motivée autant par l’inconscience que par la curiosité. Quelques Sœurs en partance pour l’Amas Régent s’étaient vues forcées d’atterrir sur l’astre en catastrophe après que leurs réacteurs ne décident de débuter une grève à durée indéterminée. Les quelques droïdes astromécano à bord tentèrent bien de réparer la navette, mais le regard ‘conscient’ du mécanicien s’avoua vite vaincu : il fallait des pièces de rechange, qui mettraient un moment à arriver, la planète la plus proche étant beaucoup trop sauvage pour stocker ou produire la moindre pièce détachée.

Et puisque les passagères n’avaient pas emmenées de mâles pour ce voyage, elles décidèrent de fureter aux alentours, l’une d’elles remarquant rapidement un édifice qui dénotait clairement avec le paysage environnant. Un sanctuaire a l’architecture Sith d’un âge sans doute supérieur à la Reine Éternelle elle-même. Un ancien temple qui semble inexploré depuis des lustres. Ceci constitue l’essentiel des informations que les Sœurs ont pu transmettre avant de ne plus donner le moindre signe de vie. Les filles d’Allya ne sont pas connues pour leur affinité avec la technologie, mais ce silence, qui commençait à peser depuis quelques jours, ne passa pas inaperçu.

Les disparues ne sont pas issues du clan de la Forêt Brumeuse, mais d’un de leurs clans alliés. Ainsi, l’information parvint tout de même jusqu’aux oreilles de la Grande Matriarche. Autant dire que pour elle, qui considère la culture Sith comme inférieure à la discipline des Esprits, la présence d’un tel édifice si près du Monde-Mère relève quasiment du blasphème. Et puisque quelques unes de ses vassales y ont déjà supposément laissé leur peau, la Reine fut peu disposée à risquer de voir une des rares Matriarches dont elle a le soutien subir le même sort. Entreprendre elle-même de fouiller ce vestige Sith en orbite de leur planète lui permettrait au moins d’en avoir le cœur net directement. Ainsi que de décider de ce qui devrait ou non être rapporté sur Dathomir. Et ultimement, d’avoir le droit exclusif de juger du sort de l’ancien temple. Car Koratas reste une des annexes de son royaume, celui que les Esprits ont jugé bon de lui confier.

Néanmoins, un détail dans ce que les Sœurs ont pu remarquer à poussé la Grande Matriarche à ne pas entreprendre cette investigation seule. L’endroit était poussiéreux, mais outre les matériaux composant la structure, celle-ci reposait sur quantité de livres dont les sujets restaient inconnus. Ce qui était plus intéressant que la pièce faisant office de bibliothèque, en revanche, était l’énergie provenant du cœur de l’édifice. Esprits ou Côté Obscur, peu importe le nom que l’on utilise, mais cela rayonnait définitivement au point ou ce serait capable de plonger un Jedi non initié dans un coma mortel. L’intérieur du lieu sentait en tout cas la Magie Sith à plein nez, ce qui avait motivé encore davantage les Dathomiriennes à le passer au peigne fin. Morgana a donc choisi de faire appel à une des personnalités siégeant en sa compagnie au Conseil Noir, dans l’éventualité ou des Holocrons se trouveraient sur place. Tout ce qui concerne Dathomir de près ou de loin, elle s’en veut garante. Ce qui touche au monde Sith en revanche… pas sur sa planète. Et encore moins sur ses lunes. Alors si une présence tierce peut trouver son compte à emporter en dehors de Koratas ce qui n’a rien à y faire… une purification par les flammes sera évitée.

Darth Meetra est toutefois une personnalité… singulière, a sa manière. La Gardienne du Savoir et la Grande Matriarche ont cette considération en commun de ne voir la Galaxie que sous le prisme de leur propre petit monde. Se sont-elles au moins croisées plus d’une fois lors d’une réunion du Conseil Noir ? La Dathomirienne l’a oublié. Néanmoins, elle fût satisfaite de recevoir une réponse positive à sa demande. Pour une fois que deux des Conseillères d’Alianka collaboreraient au lieu de chercher à se mettre des bâtons dans les roues. Peut-être que le fruit de leurs efforts bénéficierait à la Dame Noire, qui recherchait de l’innovation dans la Magie Sith pour sortir la Guerre de l’impasse actuelle ?

Morgana le découvrirait bien assez vite. Le jour convenu pour le rendez-vous, elle avait fait en sorte d’être la première sur place, accompagnée de quelques Sœurs de confiance, de guerriers triés sur le volet et d’une part de sa ménagerie pour être certaine qu’on ne les dérangeraient pas pendant leur investigation. Le secret ayant une définition relative au sein du Consortium, la régente de Dathomir avait jugé bon de sécuriser un minimum cette rencontre de son propre fait. La présence simultanée de deux assistantes de la Reine Éternelle sur une planète suffit en temps normal à ce que tout le système ne tâche de se tenir à carreau. Mais dans ce système précisément, Morgana possédait le pouvoir décisionnel. Et bien des Siths ne voyant pas cela d’un bon œil pouvaient décider d’être plus déraisonnables encore qu’à l’accoutumée. C’est que la Grande Matriarche ne se privait pas d’exprimer sa pensée sur la présence de Seigneurs Siths masculins, si puissants soient-ils, sur la Terre-Mère.

Ainsi, à l’écart de sa force locale, étudiait-elle l’architecture externe du Temple en corrélation avec ses souvenirs. Les occasions de se cultiver sur le monde Sith n’avaient pas manquées dans la vie de la Dathomirienne. Celle-ci les avaient pourtant bien souvent négligées, jusqu’à sa nomination de Matriarche. Evam, le père de ses enfants, avait de toute façon la réponse à ses questions, dans l’immense majorité des cas. Depuis un moment déjà, l’assemblée s’était étonnée de l’arrivée en orbite d’un Cuirassé Adas, signe que la Gardienne du Savoir ne tarderait plus à se montrer sur place.  Les circonstances n’avaient pas permises à la Grande Matriarche de faire préparer quelconque festin à son invitée, mais elle doutait de toute façon que cela puisse intéresser Meetra. Pas quand de potentiels holocrons échappant à sa possession sont en jeu. Ainsi, lorsqu’elle remarqua enfin une navette approcher de leur position, Morgana la rejoignit accompagnée de deux des Sœurs présentes. Les plus belles, les plus présentables, là ou, pour un regard Hapien… la Reine de Dathomir n’est donc pas la plus remarquable. Sa présence dans ce qui est appelé le Côté Obscur au-delà de sa planète, en revanche, en atteste clairement. Assez loin d’égaler celle de Darth Ankh, mais tout de même. Lorsque la Conseillère daignerait se présenter à elle, la Magicienne tâcherait de l’accueillir de ces mots :


La navette de la Gardienne ne s’était pas posée très loin de l’endroit ou reposait celle abandonnée des Sœurs portées disparues.


Les deux spirituelles s’acquittèrent d’une salutation respectueuse envers la Conseillère Noire. La navette de cette dernière pouvait probablement  se gérer elle-même. Et la poignée de femmes amenée par Morgana pouvait paraître bien insignifiante pour une femme arrivée jusqu’ici dans un Cuirassé Stellaire. Mais puisque l’on se trouvait sur une des lunes de Dathomir, la responsabilité de tout incident lui retomberait sur les épaules. Et il serait bien malvenu de considérer que les vassales de la Reine Sauvage ne sont pas capables de surclasser une force armée plus conventionnelle.


Elles allaient maintenant pouvoir passer à une observation plus directe de l’édifice cible. Le temps de la Conseillère étant précieux, la Reine ne la retiendrait pas de débuter l’investigation immédiatement si elle le souhaitait.

Visuel du temple:

Un mot sur l’architecture de ce lieu profane. Les deux piliers semblant en délimiter l’entrée furent source de questionnement pour l’Élue des Esprits. Le simple fait que la Gardienne du Savoir et elle aient pu passer au-delà sans encombre excluait de nouveau l’hypothèse d’un champ de force quelconque. Le bref regard de l’auburn en direction du firmament lui évoqua somme toute un début de réponse. Cela devait avoir quelconque rapport avec la position de l’astre-mère au sein du ciel de Koratas, puisque l’un des piliers semblait culminer vers le point ou siège le satellite lors de son zénith, dans le panorama céleste Dathomirien.

L’édifice principal, quant à lui, allait à l’encontre de ce que laissait supposer son architecture. Toute la dimension de laquelle il s’élevait jusqu’aux cieux ne semblait pas être l’intérêt principal qu’il revêtait. Cet appel, sombre et insistant, capable d’éveiller l’instinct de deux Conseillères Noires, venait du cœur même du temple. D’un lieu qui devait se trouver enfoui a même la montagne. Bien sûr, l’exploration des étages supérieurs ne serait pas à négliger. Mais avant tout cela, un rapide examen de la bibliothèque s’imposait.

Naturellement, Darth Meetra fut surprise de découvrir une bibliothèque assaillie par la poussière. La curiosité étant un vilain défaut, l’érudite entreprit d’inspecter quelques ouvrages. Morgana, si elle ne pouvait compter sur l’intuition des Esprits ici, en fit de même avec son propre instinct pour guide. Comme attendu, les premiers livres sélectionnés par la Dathomirienne la laissèrent penser que l’intégralité des écrits ici furent rédigés en Noir Parler. Avec une traduction en Basique pour ceux qui en auraient besoin. Une inclusivité qui gâchait, aux yeux de la Grande Matriarche, l’intérêt même de la langue sacrée. Au moins pouvait-elle se satisfaire de trouver un écrit mentionnant le nom d’Allya en termes peu élogieux.

Cela prouvait deux choses. Que l’auteur était un mâle arriéré incapable de cerner la beauté et la noblesse de la toute première Sœur de la Nuit, certes. Mais surtout, que le livre était peut-être plus ancien encore que ce temple, puisque son auteur mentionnait Allya comme une de ses contemporaines. L’espace d’un instant, l’actuelle Grande Matriarche songea à tous ces siècles écoulé la séparant de la première Sœur. Comment un tel ouvrage avait-il pu échouer ici ? Pire, si le lieu qu’elles exploraient était si âgé, quelle quantité de trésors pourrait venir enrichir son Savoir, et donc son Pouvoir ? Elle fut interrompue dans ces considérations par la Gardienne l’accompagnant, visiblement encore plus enjouée que ne l’est la Dathomirienne, incapable de se rappeler avoir déjà vu sa comparse sourire lors de réunions.


L’expression de Morgana demeurait neutre, mais l’on devinait à son timbre qu’elle partageait maintenant l’excitation de sa comparse. Clairement que cette bibliothèque mériterait un examen détaillé par les érudites, Sœurs comme Siths, afin que le savoir recelé ici soit dûment réparti. Tout n’était peut-être pas à jeter dans cette bibliothèque, mais il s’agissait toujours d’une préoccupation mineure dans l’esprit de la Reine Sauvage, qui se tourna vers les profondeurs du lieu de culte. En l’occurrence, vers la prochaine salle.


La pièce suivante n’aurait comme seul mérite, de les rapprocher du cœur de l’endroit. L’attrait de cette force obscure s’était fait plus pressant,  signe qu’elles se rapprochaient bien de son origine. Aucun mécanisme ne semblait cacher de piège, l’architecte semblant souhaiter que l’on découvre tout ce qu’il y a jusqu’ici sans encombre. Est-ce bien le cas dans l’entièreté de l’édifice ? Morgana eut tout juste le temps de lorgner sur l’autel se dressant au centre de cette seconde salle avant de remarquer l’inscription gravée sur la stèle.




La Grande Matriarche observa un instant l’inscription, remarquant que la porte de l’autre côté était de toute façon déjà ouverte. S’il s’agit d’une vieille ouverture, ou si ce sont les Sœurs portées disparues qui en sont responsables, en revanche, elle l’ignore. Mais cela pourrait bien être un indice expliquant leur silence… après tout, le sang tâchant la stèle est frais. Morgana n’a que peu de doutes sur la façon dont il a fini ici, mais ne fera aucun commentaire puisque cela ne doit pas intéresser sa collègue. Après s’être assurée que la voie soit bel et bien dégagée en jetant un œil à la pièce suivante, la Dathomirienne se tourne de nouveau vers Darth Meetra.



L’odeur latente de mort s’échappant de l’ossuaire pouvait d’ailleurs laisser entendre qu’il avait été alimenté il n’y a pas si longtemps. Les occupants du lieu se faisaient d’ailleurs discrets, tapis dans l’ombre du haut plafond si bien qu’il était difficile de les repérer, même pour un œil averti. Des créatures clairement issus d’expériences mélangeant l’humain avec une créature serpentine, dans un résultat capable de se mouvoir en rampant sur ses bras articulés. L’ossuaire étant l’une des plus grandes pièces de l’édifice, c’est toute une bande de ces rampants Altérés qui festoyait il n’y a pas si longtemps sur l’un des leurs. L’alpha de la meute, que les Sœurs ont tué afin de se faire dégager le passage vers la salle suivante. Sa dépouille encore fraîche trône sur les ossements de tous les individus faibles qui se sont trouvés ici au gré des millénaires. Tout comme celles des guerriers de Sœur Caelia. Tout ceci, Morgana n’a que le temps de le supposer, puis de le réaliser, alors que les créatures se révèlent au binôme.

La Dathomirienne prend un instant pour admirer l’apparence des carnassiers. En effet, riche de son esthétique douteuse, ce genre de bêtes aurait tout à fait sa place dans son zoo personnel. Ici, en revanche, leur sort ne fait aucun doute. La seconde Conseillère est sans doute du même avis que la spirituelle.

Sur Dathomir, l’inimitié entre espèces conscientes et semi-conscientes était pour ainsi dire aussi vieille que la planète. Un camp était motivé par une simple question de territorialité. L’autre jouait pour ainsi dire sa survie. Dans le cas présent, force était de constater que cette loi prévalait aussi sur le satellite de la planète des Esprits. Néanmoins, une autre des lois régissant l’ordre naturel était celle du plus fort. Il était évident que les deux Conseillères Noires surclassaient sur ce plan de simples bêtes, si élaborées puissent-elles être. A l’instar de ses subalternes, Morgana aurait pu régler tout cela d’un simple tour de force. Contrairement aux Sœurs cependant, elle n’aurait qu’à convaincre la hiérarchie de ces rampants que la retraite valait mieux que l’extermination. Or, la Gardienne du Savoir, que la Grande Matriarche aurait supposé la plus diplomate du Conseil, opta directement pour la deuxième solution.

Et quelle façon spectaculaire de l’exprimer. Arracher la colonne vertébrale d’une des créatures de la sorte, avant de le jeter en pâture à ses pairs. La Dathomirienne n’avait définitivement pas la constitution nécessaire à cela. Néanmoins, Darth Meetra ne paraissait pas être particulièrement musclée non plus. Et il fallait reconnaître que ce comportement ne collait absolument pas à son tempérament habituel. L’armure de la régente d’Ossus avait toujours intrigué la spirituelle, qui en sentait émaner une énergie particulière. Ce n’était que supposition, mais peut-être s’agissait-il d’un quelconque artefact Sith transmettant à son porteur une soif de sang insatiable. Ce serait tout à fait le genre de possession pour quelqu’un de ce rang, vivant dans la société d’Hapès. La Grande Matriarche idolâtrait la simplicité matérielle de sa planète natale, mais le sourire qu’elle affichait devant ce massacre était tout ce qu’il y avait de plus Sith pour un regard extérieur.

Elle aurait pu laisser la Gardienne gérer cela seule. Darth Meetra n’avait aucunement besoin de son aide, vu l’aisance avec laquelle les créatures étaient déchiquetées l’une après l’autre. Néanmoins, Koratas demeurait une lune périphérique de son Royaume. Son inaction serait mal vue, quand bien même sa comparse semblait prendre du bon temps. Heureusement, les créatures ne seront pas toutes attirées par cette menace évidente qui les tue à tour de bras. Certaines choisiront avec sagesse de se rabattre sur la silhouette qui n’a pas bronché depuis le début de l’embuscade, profitant du spectacle macabre. Ces rampants-là auraient peut-être mieux faits de choisir la mort rapide. Morgana observa froidement un trio de bêtes tentant en vain de la prendre par surprise. La Dathomirienne écarta ensuite les bras comme pour les accueillir chaleureusement, ne récoltant qu’un mélange de sifflements et de hurlements en réponse.


S’il est une chose que la Reine Sauvage a en commun avec les Seigneurs Siths qu’elle abhorre, c’est bien cet égo surdimensionné qui motive cette tirade. Pour appuyer son propos, la Grande Matriarche incante rapidement en Noir Parler, faisant apparaître dans le dos des rampants un portail dont des tentacules s’échappent pour se saisir d’eux, ayant toutefois la miséricorde d’en laisser un seul vivant. Car en observant ce groupe, Morgana a deviné qu’il s’agissait du Bêta, la femelle de l’Alpha décédé, que d’autres mâles tentaient de courtiser en faisant preuve de courage. Ou dans le cas présent, d’une témérité suicidaire. La femelle avait compris que sa meute courait à l’anéantissement pur et simple, et ne souhaitait que protéger ses œufs. La spirituelle fit usage de sa capacité à se faire comprendre de la faune pour apprendre que le nid comportant la progéniture de la rampante se trouvait par delà les ossements.


Commenta-t-elle en Paecien, à l’attention de la pondeuse qui n’avait sans doute pas compris un traître mot de ceux-ci. Ce qu’elle avait parfaitement compris, en revanche, était que Morgana lui laissait la vie sauve temporairement, puisqu’elle comptait bien la ramener dans son zoo personnel sans omettre de rapporter les œufs sur Dathomir. La sorcière demeurait une être vivante empreinte d’un intérêt sincère pour le Vivant dans sa globalité. Particulièrement quand leur esthétique avait de quoi rebuter le commun des mortels, ce qui était le cas ici. La Dathomirienne, même parmi ses congénères, avait après tout une définition de la beauté bien à elle, comme le prouvait sa propre apparence non soignée.


Confia-elle à Darth Meetra au sujet de la rampante qui disparut de nouveau dans l’obscurité. La bataille aux allures de génocide avait au moins laissé le temps à Morgana d’observer plusieurs corps humanoïdes consommés à divers degrés. Autant de mauvaises nouvelles à annoncer à Sœur Caelia. Ses subordonnées, elles, s’étaient enfoncées plus profondément dans l’antre Sith, probablement aussi captivées par cette sombre émission que ne le sont les deux Conseillères.


La surprise quant au tempérament de l’érudite digérée, Morgana gagna le fond de l’ossuaire pour découvrir… de simples escaliers. En colimaçon. Elle se retourna alors sans masquer sa surprise. Une bibliothèque, un autel, un ossuaire, voilà donc tout ce que le lieu avait à offrir ? La piste des Dathomiriennes continuait pourtant ici, attestée par quelques gouttes de sang éparses et par des traces de mains ensanglantées. La régente de la Planète-Mère ouvrit de nouveau la marche, scrutant le sol jusqu’à se figer soudainement. Un détail l’intriguait. Les traces sanguines suivaient un schéma régulier, correspondant à l’écoulement d’une plaie lors d’une marche lent, depuis les premières marches. Or, au beau milieu de leur descente, les effluves avaient disparues sans crier gare.

Perplexe, la Grande Matriarche observa le mur à sa droite. A première vue, rien ne laissait supposer le moindre passage secret. Mais elle eut tout de même l’idée de poser la main à l’exact endroit ou la dernière trace de main sanglante reposait. Un sinistre grincement se fit entendre, tandis qu’un des murs coulissait pour révéler un passage dérobé, découvert par un énorme coup du hasard. Visiblement, les Esprits avaient autorité sur Koratas également. Malheureusement pour le binôme, la source de leur attrait premier semblait se trouver plus profondément encore, au bas de ces escaliers. Les prérogatives de Morgana l’obligeant en quelque sorte à emprunter le passage secret, elle décida de faire appel à la sagesse de sa collaboratrice :


Quelque soit la réponse de la Gardienne du Savoir, le sort des Sœurs demeurait la principale préoccupation de la spirituelle.

La Gardienne du Savoir avait mérité son titre. Effectivement, la Dathomirienne avait négligé jusque-là un détail pourtant capital. Celui de savoir si elle ramènerait bien ses fidèles dans leur état conscient… ou bien si elles étaient déjà altérées par un environnement assez puissant pour subjuguer deux Conseillères Noires. En  vérité,  la question de trouver les Sœurs en vie ou bien mortes ne lui avait pas traversé l’esprit, pour la simple raison qu’elle devrait au mieux les ramener à la raison, au pire ramener leurs dépouilles sur Dathomir afin qu’elles bénéficient d’un rite funéraire et d’une sépulture décente. Au vu des découvertes effectuées jusqu’ici, cependant, se posait à raison la question de l’état exact de leur corps, avant celui de leur âme ou de leur esprit.

Par-delà le passage secret, les ténèbres régnaient. Davantage encore que dans les autres recoins du temple, l’obscurité semblait mordante. Le genre de morsure accueillante, déversant dans vos veines un poison à la chaleur réconfortante. Celui-là même qui vous paralyse dans un doux rêve éveillé. Morgana ne connaissait que trop bien de tels effets, plus d’une forme de vie de sa planète l’utilisant sur ses proies. Afin que la mort soit douce… et la viande plus exquise, puisque moins stressée. Que l’une des disparues ait actionné le mécanisme par un coup du sort, c’est plausible. Mais ce n’est certainement pas un hasard qu’elles aient choisi de s’aventurer ici alors que l’objet agissant sur elles comme un aimant se trouve dans l’autre direction. Lorsque l’on est perdu, on se dirige naturellement vers ce que l’on reconnaît. Le danger étant la norme sur Dathomir, la route la plus sûre n’est pas toujours la meilleure.


A bien y regarder, cette pénombre ne s’éternisait pas. La dépendance directe du passage secret était bien plongée dans le noir. Une obscurité factice, une illusion maintenue en place par un dispositif qui se cachait dans ce manteau d’ébène. Qui devinerait qu’un encens aux fumerolles imperceptibles est responsable de cette perception altérée ? Le sort en lui-même était enfermé dans une amulette Sith, conférant ses effets au liquide ou reposait le bijou, lentement consumé par une flammèche. Morgana ne prêta cependant aucune attention au mécanisme illusoire, puisqu’elle percevait déjà l’endroit ou cessait d’agir ce subterfuge. Un long couloir, éclairé par des torches, dans une grossière mise en scène. Cela venait prouver, si c’était encore nécessaire, que le lieu n’était pas aussi désert qu’il voulait le faire croire.


Du coin de l’œil, la Grande Matriarche observa les quelques flèches enduites d’une étrange substance fichées ça et là dans les murs. Intriguée, elle en décrocha une, examina la pointe de la flèche avant d’être certaine de pouvoir le respirer sans danger. Elle était certaine de pouvoir identifier la fragrance, mais ne s’attendait pas à ce que celle-ci lui soit si familière. D’un soin insoupçonné, elle replaça le projectile exactement là ou elle l’avait pris, avant de se tourner vers sa comparse.


Voilà une chose qu’elle aimait beaucoup moins. La plante n’était pas endémique de Dathomir, mais c’était bien la première que toute Aspirante apprenait à craindre. Ses jolis pétales violets. Sa longue tige exposant son organe reproducteur au ciel, presque avec indécence. Mère-Nature avait tout fait pour que cette fleur soit remarquée parmi ses pairs. Et la sève était concentrée, au sein d’une tige fragile. Les racines étaient bien ancrées, ainsi la cueillir sans précaution suffisait à ce que la sève ne se répande sur la peau. Et puisqu’elle pouvait traverser l’épiderme avant de circuler dans le sang, l’on dit que nombre d’Aspirantes zélées ont échappé à la surveillance des Sœurs en ayant la charge pour aller en cueillir. Au moins ont-elles retrouvé une utilité pour Mère-Nature. Ce petit exposé de la spirituelle ferait sans doute bailler sa consœur, mais il dissiperait au moins la question de savoir si l’une des disparues avait succombé à ce piège. Les traces de sang qui reprenaient servaient de toute façon de preuve de leur survie autant que de piste.

La décoration du passage était une nouvelle fois criante de vétusté. Ainsi que de mauvais goût. Les statues d’ornement, tantôt des aliens empaillés, tantôt des armures Sith d’une esthétique révolue depuis l’union du culte avec Hapès. A mesure qu’elles s’enfonçaient dans les profondeurs lunaires, cependant, l’action souterraine se dévoila à elles. Un rugissement sourd se fit d’abord entendre, auquel la Grande Matriarche n’afficha qu’un prudent intérêt qui ne la ralentit pas. Puis, des hurlements féminins  résonnèrent, empreints d’une douleur palpable. Cette fois, le regard mordoré de la spirituelle se fit plus acéré. Aucun doute n’était permis sur l’identité des femmes torturées. Seule restait l’interrogation quant au sort du tortionnaire. Et sur l’origine du hurlement bestial. Inutile de préciser que Morgana accéléra le pas, mise en confiance par le fait qu’elles n’aient plus trouvées le moindre piège lors de leur descente. Ainsi, son impression d’arriver à bon port se confirmera lorsqu’une grande salle se dévoilera à elles. Une salle ou deux Sœurs sont enchaînées et  suppliciées par un être… difforme. Lorsqu’elle pose les yeux sur lui, il s’agit du mot le plus raffiné qu’elle puisse utiliser pour le décrire. Un être plus blafard qu’elle ne l’est déjà, dont les jambes squelettiques semblent peiner à le porter et dont la colonne semble s’être arquée sous le poids des années.

Mais ce qui capte son attention plus rapidement encore est la cage occupant la majorité de cette nouvelle pièce. Une cage renfermant une créature que tout Mage érudit connaît forcément : un Dragon de Krayt, en pleine force de l’âge. En sa compagnie, les quatre autres Sœurs manquant à l’appel. Quatre Sœurs de la Nuit qui ne sont bientôt plus que trois lorsque l’une d’elles se fait avaler par la créature sous le regard de sa Reine et de la Gardienne du Savoir. Le temps nécessaire à ce que Morgana ne comprenne le tableau peint devant ses yeux est déjà de trop. Les trois captives tentent de se ressaisir et de survivre à cette proximité avec la bête,  alors que l’inconnu bossu s’en donne à cœur joie sur deux des disparues qui sont en bien piteux état. Le sang de la spirituelle n’a fait qu’un tour avant qu’elle décide de se mêler à ce spectacle macabre.


Dans un excès de rage, le pauvre n’a même pas le temps de rétorquer qu’il voit déjà la spirituelle fondre sur lui et l’empoigner comme l’on empoigne un sac de féculents. La haine est palpable dans son regard, mais elle ne serait pas une Reine si elle ne savait pas empêcher ses émotions de la contrôler. Pire, elle ne serait pas une Reine si elle ne choisissait pas le châtiment le plus marquant pour que soient punis ceux lui causant du tort.


Une manière détournée d’inviter Darth Meetra à laisser libre court à sa bestialité cachée autant qu’elle le voulait sur ce serviteur.Ainsi que d’honorer sa parole de Reine de Dathomir quant à la contrepartie qu’y trouverait l’érudite. Qu’elle l’interroge ou non, ce n’était plus le problème de Morgana. Sa préoccupation actuelle était de libérer les deux Sœurs captives des instruments de torture, avant d’aller s’interposer entre le dragon et ses sujets pour rappeler à la créature qui est au sommet de la chaîne alimentaire dans ce système.

C’est avec une composition retrouvée que la Régente de Dathomir gagna le chevet macabre des deux spirituelles torturées. Ces dernières ne masquèrent ni leur confusion, mue en reconnaissance, ni leur inquiétude de voir la Reine Sauvage en personne se déplacer pour leur compte. De nombreuses expressions que Morgana balaya d’un simple geste, invitant les deux femmes au silence tant que cette affaire n’était pas réglée. Elle avait déjà failli à conserver sa neutralité émotionnelle devant une de ses consœurs, ce n’était pas le moment d’offrir une de ces scènes de retrouvailles à la guimauve ou l’héroïne sauve les victimes de la mort. Ce n’était absolument pas le genre de Morgana. Puis, Darth Meetra valait tout de même mieux que ça.

En effet, même pour elles, le dragon présent demeurait un ennemi à ne pas prendre à la légère. La Conseillère plaça donc les deux rescapées en sécurité relative, tandis qu’elle gagnait la cage tout en réfléchissant à la manière de procéder. La créature semblait d’un coup beaucoup plus calme, tandis que les trois prisonnières, elles, étaient toujours aussi tétanisées. Il parut étrange à la Matriarche qu’un être façonné par le Côté Obscur s’apaise aussi rapidement. Ce n’est qu’ensuite que Morgana remarque une silhouette jumelle de la Gardienne restée en dehors de la cage. Cette présence, que la Dathomirienne devina factice, semblait à elle seule apaiser le dragon. Intriguée par la manœuvre, l’auburn se dépêcha pourtant d’entrer dans la cage et de laisser sa vision rassurer les captives avant de les inviter à rejoindre les autres Soeurs. Avant que la panique qui les fige sur place ne réveille l’instinct de prédateur de ce dragon.

Morgana aurait eu le loisir de le tuer de mille et une façons, tant l’illusion réalisée par la Gardienne du Savoir paraissait le subjuguer jusqu’à le couper du monde alentour. Elle qui ne vivait que pour les Arts Noirs, dont l’altération spirituelle demeurait son talon d’Achille, était tout bonnement fascinée de cette démonstration.  Toute animosité semblait avoir disparue dans les pensées du dragon, qui semblait en quelque sorte s’être soumis à sa nouvelle maîtresse. C’est alors que la souveraine de Dathomir observa son homologue d’Ossus, l’originelle, remarquant que le difforme s’était vu briser la nuque avant de chuter lourdement au sol. Un traitement face auquel la lointaine descendante d’Allya ne réprima pas son sourire de satisfaction. Une vision qui lui donna de plus une idée concrétisée par la Persuasion Animale.


Une nouvelle incantation de Noir Parler fit apparaître dans la main de la Matriarche sa faucille Sith, qu’elle utilisa pour découper un passage assez grand dans la geôle pour permettre au dragon d’en sortir. L’auburn sortira ensuite de l’enceinte la première, rapidement suivie par la créature qui s’est désintéressé de l’illusion dès qu’on lui a fait comprendre que la véritable était par-delà les barreaux. Sur recommandation télépathique de leur Matriarche, les cinq Soeurs encore en vie avaient décidé de respecter un périmètre de sécurité de plusieurs kilomètres avec la bête, puisqu’elles se jugèrent aptes à regagner la surface par leurs propres moyens. Si toutefois aucune embûche ne s’était ré-établie sur le chemin qu’avaient emprunté les deux Conseillères.


Il serait mentir que de prétendre que Morgana n’a pas songé à le récupérer pour elle-même. Certainement que l’idée lui a traversé l’esprit. Mais elle serait une bien mauvaise Sœur de la Nuit si elle décidait d’aller contre la volonté d’une créature vivante issue des Arts Noirs ne lui appartenant pas. D’autant qu’elle va déjà introduire une nouvelle espèce sur Dathomir et potentiellement en intégrer plusieurs spécimens à sa ménagerie personnelle. Ultimement… elle doit bien s’avouer qu’elle n’a pas envie de gérer l’inévitable guerre de territoire qui opposera ce dragon de Krayt à son propre chef-d’œuvre. Reste cependant à savoir si une érudite souhaite s’encombrer d’un compagnon si..volumineux. Morgana ne le voit définitivement pas au sein d’une bibliothèque sans qu’un chaos innommable s’ensuive.


Pour autant, nombre de leçons pouvaient être tirées de cette mésaventure, qui n’était sans doute pas tout à fait terminée. En effet, la pièce étant plus sûre, Morgana se permit de l’examiner, prêtant de nouveau attention à cette source d’énergie qui était devenue étouffante. Si proche. Son regard mordoré se posa sur sa comparse, puis sur l’unique porte par laquelle elles n’étaient pas parvenues jusqu’ici. Le cœur de la spirituelle se mit à battre la chamade, tandis qu’elle daignait braver la distance la séparant de cette ultime porte. L’attrait du Côté Obscur dans toute sa splendeur. La Dathomirienne était pourtant loin d’y succomber, étant simplement curieuse de vérifier sa théorie. En effet, les pièces de ce puzzle pas si complexe s’imbriquaient à merveille dans son esprit, si la seule qui lui manquait était bien ce qu’elle pensait trouver de l’autre côté de la porte. Un holocron, miracle d’alchimie Sith, dans lequel Darth Atrius, mage de renom, a enfermé son âme afin d’atteindre l’immortalité. Le serviteur blafard ne faisait que perpétrer la volonté de son Maître en recherchant une nouvelle enveloppe à même de le satisfaire. Toute cette entreprise millénaire avait pris fin lorsque le Seigneur d’un temps révolu avait croisé la route d’une Sith et d’une Sœur. Cette dernière se figea dans son élan, avant de révéler la vérité. Étais-ce bien à elle de le faire ? Elle était certes une des meilleures historiennes de Dathomir...mais pas de la Galaxie. Aussi jugea-t-elle préférable de s’écarter, afin de laisser sa consœur découvrir cet holocron, ainsi que les potentiels autres trésors entreposés aux côtés de Darth Atrius. Naturellement, elle garderait un œil sur sa collaboratrice, afin que rien de fâcheux ne lui arrive dans sa juridiction.


Souffla-t-elle d’un air aussi bienveillant que ne le permettait ses traits marqués par le Côté Obscur.

L’ultime barrière les séparant de leur destination s’effondra, à l’initiative de la Gardienne du Savoir.  En réalité, quand bien même leur trouvaille soit millénaire, aucune des deux femmes ne fut surprise.  L’objet dont la signature avait appâté les Conseillères depuis la surface reposait presque négligemment sur une table. Pourtant, la disposition des lieux, couplée à l’atmosphère, rendait tout cela  presque cérémoniel. L’esprit reposant dans cet holocron à la conception et la finition soignées était après tout plus ancien encore que la Divinité que servaient les deux sensitives. Était-il alors plus puissant ?

De nouveau, la régente d’Ossus prendra l’initiative de cette vérification. Morgana l’avait stipulé, elle ne voulait pas voir d’artefact Sith sur sa planète, ni sur les lunes de cette dernière. Néanmoins, la souveraine de Dathomir fut tout aussi émerveillée que sa collaboratrice par le chef-d’œuvre d’alchimie posé ici, au cœur du sanctuaire. L’auburn le fut cependant plus encore par le légendaire dragon qui attendait patiemment que sa maîtresse légitime ne l’emmène vers son nouveau foyer. Il lui fut d’ailleurs regrettable que la créature ne soit pas du fait d’Allya ou d’une autre de ses ancêtres. Ramener le fruit de Dathomir sur sa terre natale, elle s’en serait portée garante. S’approprier une création Sith, quelle qu’elle soit, allait en revanche contre ses principes.

L’heure n’était cependant plus aux considérations. Car l’artefact, activé par Darth Meetra, baignait maintenant la petite pièce de son éclat carmin. Puis, ce fut au tour de l’âme contenue dans l’holocron de se manifester. Pour Morgana, cette présence s’avéra d’autant plus déstabilisante qu’elle trahissait une affinité avec l’Obscur dépassant celle de la Grande Matriarche. C’était encore loin de la sensation éprouvée face à la Reine Éternelle, mais.. cet esprit était définitivement surpuissant. L’homme, s’il revêtait une apparence assez spectrale, semblait toutefois encore en pleine force de l’âge. Particulièrement, il était suffisamment conscient de son environnement pour remarquer d’emblée ses deux interlocutrices, loin d’être le serviteur qu’il s’attendait à voir.


Le Seigneur, constatant l’échec de l’homme défiguré par sa propre nécromancie, soupira en examinant les possessions reposant auprès de lui. Non, il n’allait pas se démonter. Il pouvait le sentir, après tout. Il avait en sa compagnie deux réceptacles potentielles, dotées d’un potentiel tout à fait prometteur. L’apparence de l’une d’elles laissait quelque peu à désirer, mais ce n’était rien d’insurmontable. Ainsi renforça-t-il encore sa présence auprès des deux Conseillères, tentant subrepticement de les corrompre de sa propre aura. Naturellement, il souhaitait également savoir à qui il s’adressait.


Malgré la formulation, cela ressemblait plus à un ordre qu’à une phrase. Même à cheval entre la vie et la mort, l’orgueil du Sith restait palpable. Celui-ci avait vu son sanctuaire profané et ses plans contrecarrés. Il lui paraissait évident que réparation doive être obtenue.

Morgana pouvait le sentir. Tout comme Darth Meetra, se dit-elle. Le propriétaire des lieux tentait d’altérer leur conscience à l’aide d’une arcane illusoire. Les mots prononcés auparavant par Meetra  se vérifiaient. En leurs qualités respectives de Grande Matriarche et de Gardienne du Savoir, ce genre de subterfuge pouvait à minima être décelé. Et la plupart du temps, être inefficace. Mais de simples Sœurs de la Nuit ? De banals Guerriers Siths ? Celles et ceux s’aventurant ici auraient alimenté bien malgré eux ce charnier qui avait dû être alimenté des siècles durant, à défaut de réussir à répondre aux attentes du propriétaire de la sépulture.

La Dathomirienne avait tâché de ne pas exprimer ouvertement ce qu’elle pensait de la tentative du Seigneur. Son lien avec les Esprits, inébranlable sur la Planète-Mère comme sur ses satellites, la préservait de l’influence de Darth Atrius. Néanmoins, elle ressentait tout de même cette volonté de la voir se plier aux moindres désirs de l’âme émanant de l’holocron. Si ce dernier ne représentait pas une part de la rétribution de sa consœur, la spirituelle l’aurait englouti dans le néant sans plus de réflexion, afin que Koratas ne soit débarrassée de cette présence indésirable. Néanmoins, elle était aussi convaincue que la relique pouvait être récupérée, vierge ou non de l’âme qu’elle recèle si cette dernière devenait trop encombrante. Morgana sera donc la première à s’exprimer face à l’ancien Seigneur.


Son discours était à double tranchant. Elle y avait intégré une certaine révérence, due à un être aussi puissant dans ce que la Galaxie nommait le Côté Obscur. Pour autant, elle s’était présentée de manière à laisser percevoir sa culture au-delà du prisme de ses paroles. La Grande Matriarche se souvient des propos peu élogieux tenus à l’égard de la Première Sœur. dans certains des ouvrages qu’elle a consulté à l’entrée du sanctuaire. Que leur auteur soit le cadavre blafard ou bien le puissant Seigneur devant elle, l’auburn n’entends donc aucunement cacher ses origines. Qu’elle puisse en jouer est d’ailleurs un plus.

Et comme elle s’y attendait, Darth Atrius fut intrigué par cette révélation. Il comprenait maintenant pourquoi l’aura de l’encapuchonnée différait de celle de la femme en armure. Pour autant, voire une descendante de cette vipère d’Allya profaner son sanctuaire était loin de le réjouir. Combien de fois à-t-il échappé à la mort certaine promise par les venins et autres toxines de cette sorcière ? Bien plus qu’il ne s’embarrassa de compter en vérité. Peut-être tenait-il là un moyen de se venger ? Son serviteur n’était plus, mais le dragon jadis crée par sa maîtrise en Altération semblait avoir survécu. Avant de lui ordonner de passer à table, cependant, le créateur de l’holocron s’interrogeait toujours sur la femme en armure lui faisant face.

La suite s’est jouée en un instant. La Gardienne du Savoir s’est présentée succinctement au fragment spectral émanant de l’holocron. Beaucoup plus sommairement que ne l’a fait sa consœur Dathomirienne, pour qui irriter un homme de sa simple présence constituait un plaisir coupable. Seulement voilà. La Conseillère en armure aura à peine le temps de décliner sa fonction que le Seigneur se jette en sa direction. Évidemment. Bien sûr qu’entre une des descendantes de celle que vous ne pouviez voir en peinture de votre temps, et un véritable puits de savoir interdit, la question du corps réceptacle ne se posait même pas. La Grande Matriarche l’avait en quelque sorte pressenti, mais avait tâché de ne pas se mêler outre-mesure de la propre sécurité de son invitée d’Ossus. Parce que cette dernière n’avait certainement pas besoin qu’on lui tienne la main.

Or, Morgana aurait eu le temps de lui éviter cette agression vécue sur son propre sol. Elle aurait de plus offert à ce Darth Atrius un double châtiment. Celui de regretter lentement son orgueil tandis que sa vie le quittait bien entendu. Mais également, celui de voir peu à peu ses pouvoirs durement acquis s’effacer dans le Filet d’une descendante de la « vipère » de Dathomir. Ce n’est qu’une fois son énergie entièrement ponctionné que le Sith aurait vu la clémence de l’auburn lui permettre de mourir. Ce plan, néanmoins, ne fut pas mis en action. La régente d’Ossus jugea préférable d’écarter avec Force sa collaboratrice du créateur de l’holocron. Et puisqu’elle avait fait l’erreur de baisser sa garde face à une autre des élues de Darth Ankh, la Dathomirienne ne put que tenter de se rattraper dignement.

Meetra se retrouve rapidement prisonnière de l’esprit Sith. De retour sur ses appuis, Morgana prépara instinctivement un second Filet Spirituel afin d’empêcher ce mâle inférieur de nuire plus longtemps. Une nouvelle fois cependant, sa tentative sera avortée… par elle-même. Il ne serait pas utile, puisque l’érudite parvint rapidement à inverser la vapeur. Darth Atrius fut renvoyé à sa position initiale plus rapidement encore qu’il ne l’avait quittée. Le Seigneur serait alors invité par l’érudite à répondre aux questions de la spirituelle. Une invitation soulignée par une démonstration de puissance, qui fut cependant ce qui attira réellement l’intérêt de Morgana.

Cette dernière ne pipera cependant aucun mot face aux excuses de sa comparse. Son regard mordoré, s’il ne montrait ni haine ni colère, laissait cependant émaner à lui seul un message équivoque pour l’érudite : prière de ne pas recommencer. Un regard bref adressé à sa collaboratrice, puisque l’heure n’était pas au crêpage puéril de chignon. Pas avant que leur hôte et ennemi n’aie réactualisé une part de son savoir ancestral. Hélas, l’homme ne l’entendait pas de cette oreille et ordonna à sa créature de se nourrir des deux intruses. Le dragon n’avait jusque-là rien raté de la scène. Il avait témoigné du réveil de son Créateur et Maître. Mais il avait aussi constaté que Darth Atrius se révèle incapable d’assimiler la femme en armure l’ayant apaisé. Il était un être issu du Côté Obscur, alors en dépits de touts charmes ou artifices… il était naturellement sensible à la loi du Pouvoir. Particulièrement quand celle-ci pouvait lui éviter des souffrances passées infligées par une âme dont il n’avait pas ressenti la noirceur chez cette nouvelle propriétaire.


Fustigea-elle le spectre, ainsi que le bossu par-delà la mort. En vérité, la Dathomirienne se moquait bien de ce que pouvait lui apprendre le Sith. Elle s’imaginait déjà savoir tout ce dont elle avait besoin ici, le reste étant compilé dans les bibliothèques du rez-de-chaussée. Cependant, torturer un inconnu violant son territoire et mettant ses invités en danger constituait pour elle un plaisir palpable. Et la spirituelle tâchait toujours de lier l’utile et l’agréable.


La haine dans son regard était cette fois palpable. La Matriarche en avait assez entendu, maintenant que son Filet s’était emparé du Sith dont il drainait lentement les pouvoirs. Son existence spectrale ne lui permit même pas de se défendre. Ce tableau dépeignant la fin du meurtrier d’Allya était parfait pour la spirituelle qui regardait tout cela d’un sourire carnassier, enserrant la pauvre âme condamnée dans une étreinte qui paraîtrait, sans son contexte, presque chaleureuse. Ni les cris ni les suppliques du malheureux n’y changeront rien.


Commenta-t-elle à l’attention de Darth Atrius qui avait préféré, face à deux femmes visiblement en mesure de le tuer, regagner la sécurité relative de son holocron. Cela ne faisait en vérité que lui conférer un léger sursis, puisque Darth Meetra était certainement en mesure de l’en extirper séance tenante. Morgana avait au moins obtenu une raison de s’érudir sur le contenu des fameux ouvrages. Une raison plus personnelle que sa simple condition d’ambassadrice de Dathomir. Pour l’heure, le comportement de sa collaboratrice lui restant encore en travers de la gorge, elle devait tout de même faire bonne figure.


La question des armures resterait volontairement en suspens. La Grande Matriarche ne voyait en l’intégralité du contenu du tombeau une montagne d’ordures abandonnée ici. Bien sûr, certaines pouvaient se révéler précieuses. Mais cela restait un encombrement inutile du sol de Koratas. Et puisque Morgana s’attendait à ce que sa collaboratrice ne s’attarde pas plus ici que dans la salle de réunion du Conseil Noir, elle préférait envers et contre tout voir la question du partage réglée tacitement ici-même. Il ne manquerait plus que la Gardienne du Savoir décide de se retourner contre elle à l’avenir.

Par tous les Esprits de sa Planète-Mère, avait-elle bien entendu ? La régente d’Ossus, si mystérieuse dans l’exercice de ses fonctions auprès de leur Reine, témoignait ouvertement d’une volonté de sonder la bibliothèque en sa compagnie. En un sens, cela relevait de l’exercice de ses fonctions plus personnel. Et la compagnie de la Grande Matriarche, compte tenu de l’emplacement de ce savoir, relevait du protocole. Il n’y avait pas vraiment de quoi perturber l’équilibre Galactique. Pourtant, s’imaginer bouquiner avec sa collaboratrice d’Ossus lui paraissait presque illusoire. Meetra était-elle réellement sortie indemne de sa victoire sur Atrius ? De la façon dont Morgana voyait les choses… un vulgaire mâle ne saurait avoir causé le moindre tort à l’une de ses homologues.

Or, les Esprits étaient omniscients, contrairement à elle. Consulter ceux-ci, brièvement, lui aura permis de percevoir un fragment de l’âme de l’érudite. Un tesson spirituel empreint d’une certaine honnêteté et d’une pointe de déplaisance. Les exactes mêmes émotions ressenties par la Sauvage auparavant. Au-delà de pouvoir prétendre qu’elles étaient désormais quittes, l’auburn chercha à comprendre l’origine de cette contrariété chez son homologue. N’avait-elle pas été particulièrement généreuse à l’instant ? S’il est vrai qu’elle n’a pu considérer Darth Meetra que comme une éboueuse en charge du lieu.. elle a tout de même plus de respect que cela pour ses collaboratrices féminines. En ce qui concerne l’autre sexe..bien..

Le sort réservé à Darth Atrius parle de lui-même. Car s’il n’était pas convenu qu’il rejoigne les richesses d’Ossus, cet holocron reposerait à présent dans le néant invoqué par la souveraine en voyage aux frontières de son royaume. L’égo de la Grande Matriarche avait certes été bousculé par une manœuvre précédente, mais elle n’avait aucune raison, personnelle comme objective, de se mettre la Gardienne à dos. Pire, basculer dans ce genre de considérations indélébiles l’abaisserait au niveau des Siths dont elle abhorre la façon d’être.


Même en choisissant soigneusement ses mots, elle risquait fort d’être indélicate. Autant ne pas y aller par quatre chemins.


En ce qui concernait ses propres obligations, Morgana avait effectivement bien des choses à arbitrer. Sur sa demande, la plupart des tensions animant les relations interclaniques remontaient à sa connaissance. Certains de ces conflits se résolvaient à l’amiable avant que l’information ne lui parvienne. D’autres parvenaient à être résolus dans le calme, ou avec un tribut de sang négligeable, par leurs protagonistes. Les derniers, plus alarmants, étaient ceux qui mettaient en péril l’existence d’un clan au profit d’un autre. Quand bien même elle convoquerait un Conseil de Matriarches, la situation de sa planète ne lui permettait de taper du poing sur la table qu’avec celles lui ayant prêté allégeance. Les autres, ses rivales en tête, profiteraient de cette autorité exagérée pour se liguer contre elle. L’actuelle Reine Sauvage n’était pas idéaliste, mais lasse de voir ses Sœurs s’entredéchirer, cherchait encore un moyen de provoquer le destin afin de les rassembler définitivement.


Ponctua-elle d’un rictus destiné à adoucir l’atmosphère sinistre d’un tombeau désormais désaffecté. Ses pupilles d’ambre dérivèrent ensuite vers l’escalier d’où émanait auparavant une présence aussi attirante que menaçante. Cette dernière s’était amoindrie, considérablement affaiblie par cette confrontation avec deux souveraines planétaires. L’encapuchonnée n’aura alors aucun mal à s’en détourner afin de gravir ces fameuses escaliers contournés un peu plus tôt. Si leur but était de mener les intrus directement à Darth Atrius, ils ne devaient pas être piégés. Néanmoins, Morgana préféra ouvrir la marche, s’estimant plus rompue à leur détection que sa collaboratrice. Leur chemin, cette fois dépourvu d’embûches, les mènerait à une section de la bibliothèque qu’elles n’avaient pas examiné la première fois. Une étagère remplie de quantité d’ouvrages recensant tous les artefacts dont le Seigneur scellé avait connaissance. Leur utilité, leur dernière position connue, ainsi que l’éventuel dernier propriétaire. Ainsi que des informations sur leur procédé de fabrication. La Dathomirienne, fidèle à elle-même, retournerait naturellement vers le rayon semblant concerner sa planète natale. Et après s’être constitué un stock temporaire, elle décidera de déplacer le bureau de la pièce voisine par télékinésie afin que toutes deux n’aient une assise confortable à disposition. L’auburn s’y installera la première, à une extrémité afin de laisser l’autre à son homologue, de façon bien informelle pour une Reine. Pour une fois qu’une âme externe à Dathomir revendiquait l’obtention de sa compagnie, elle pouvait bien faire un écart.

La liberté de son homologue était surprenante. S’éloigner de ses terres des mois entiers, confiant la conduite des évènements à des personnes de confiance ? Cela sans retrouver une situation chaotique, ou même une nouvelle régence ? Appliquer cela à Hapès, ou à Dathomir, paraissait bien illusoire. Riche de son expérience, même Darth Ânkh n’affichait pas une telle liberté d’agissement. Morgana, elle, se situait quelque part entre ces deux situations opposées. A son grand dam, son peuple agissait partiellement comme les Siths. Aussi, faire montre de son pouvoir était parfois une nécessité. Ce afin que l’étendue de sa puissance, auprès des Esprits comme d’autres Matriarches, demeure fraîche dans toutes les mémoires. C’était toutefois insuffisant, puisqu’elle devait également s’accorder du temps afin de renforcer son affinité avec le monde spirituel.

Bien sûr, Morgana se suffit à elle-même. Comme toute personne de pouvoir, elle instrumentalise certaines personnes à ses fins, Avem en tête de liste. Cependant, les domaines les plus sensiblement concrets de sa position ne doivent être entrevus et magnifiés par nulle main autre que la sienne. Alors, en un sens, elle enviait cette vague insouciance que Darth Meetra pouvait s’autoriser sans en craindre les retombées. Était-ce de là que provenait, au moins partiellement, sa grande érudition ? L’on dit bien que la sagesse n’est pas immobile, mais mouvante. Peut-être l’auburn s’imprégnerait-elle d’une part de la Connaissance en étant au contact de l’administratrice d’Ossus.

Cette dernière justement, tarda à venir encombrer sa part du bureau d’un choix de lecture. Et quel bouquet de livres conséquent que l’entièreté d’une étagère ! En ce qui concernait la spirituelle, sa sélection reflétait parfaitement sa position : Dathomir, encore et toujours. Sa propre excitation était palpable, quoique plus modérée que celle de la Gardienne. Là ou cette dernière semblait ne pas savoir par quel ouvrage débuter, la Dathomirienne avait eu le loisir d’assimiler la moitié d’un livre durant sa promenade et son marché. Des pages relatant l’entièreté des poisons connus de Dathomir, à une époque bien obscure pour la Grande Matriarche. Ce livre en particulier témoignait du nombre de tentatives d’empoisonnement auxquelles Darth Atrius a survécu. Sincèrement, Allya ne faisait-elle pas que jouer avec ce mâle, à l’époque ?


La réalité de la première Sœur est passée à l’état de mythe depuis bien longtemps. Sans doute une part plus fidèle de la vérité se trouve quelque part entre ces nombreuses couvertures usées.


Le sourire qui prenait forme sur ses lèvres laissa déjà présager de la suite.


Le soin d'imaginer les répercussions de ce fait serait laissé à la discrétion de Meetra. A cet instant, tout le sérieux que pouvait inspirer Morgana se dissipa. Son image devint celle d’une tortionnaire sachant apprécier tout mal infligé au sexe inférieur. Particulièrement quand cela touchait à cet attribut dont certains se vantent avec outrance. Darth Meetra serait peut-être moins puérile que la spirituelle sur ce point, mais cela devait être souligné.


Souffla-t-elle avant d’ouvrir un autre livre. Son regard avait dérivé malgré-elle sur une couverture faisant mention d’une invasion de Dathomir. Les premières lignes présentèrent en détails les raisons  motivant un certain Darth Atrius à assembler ses légions à destination de la Planète-Mère. Cette simple formulation aurait pu porter le sang de Morgana a ébullition. Or, la lecture de la description du Narcurin, laissée en évidence au dessus du récit de guerre, aidait son esprit à demeurer paisible. Après tout, ce genre d’histoire était de celles dont la spirituelle était déjà impatiente de connaître le vainqueur. Pour le meilleur, comme pour le pire. Cependant, elle avait aussi une compagnie à sa disposition pour tenter de penser à autre chose. La Grande Matriarche avait encore du mal à intégrer ce fait.

Comme une surface attendant d’être troublée par l’éruption partie des tréfonds, la spirituelle paraissait encore maîtresse de ses émotions. Et elle le resterait, si les évènements présents dans cet ouvrage le permettaient. Car le livre ne mentionnait pas qu’un simple récit de bataille, non. Il mentionnait l’érection de ce sanctuaire morbide que le binôme de conseillères s’était attribué. Précision étant fait qu’il ne s’agissait pas là du rôle premier de l’édifice. Ce ne devait être qu’un banal travail d’architecte destiné à honorer son Seigneur par la propension qu’aurait le bâtiment à défier les cieux. Naturellement, les matériaux le composant provenaient de la planète ou bien de filières Siths. La main-d’œuvre également fut déportée sans questionnement afin d’ériger le temple. Néanmoins, les conditions de travail âpres amenèrent avec elles leur lot de mortalité. Ainsi, pour des questions de coût, il fut décidé d’utiliser d’un vivier inhabituel, différent de cette masse grouillante de population sous le joug du Seigneur Noir.

Pourquoi s’embêter à transporter des gens sur des années-lumières, quand des âmes sont présentes sur la planète voisine ? Si aujourd’hui, Dathomir n’est toujours pas gratifiée d’une structure de gouvernement inamovible, ce fut encore moins le cas à l’époque, lorsque la Jedi Noire y étant exilée peinait encore à fédérer les tribus primitives autour de sa personne. Autant dire qu’Allya était bien la seule à remarquer les rapts qui ne laissaient aux yeux des intéressées que des territoires vacants. Nombre d’années seront nécessaires afin qu’elle ne réussisse cependant à contrecarrer cette exploitation. Cela avait commencé par des points d’attaches sabotés et des patrouilles qui ne revenaient jamais. Ensuite, ce fut au tour des avants-postes et des bases de légionnaires de disparaître des radars. Puis, enfin, l’instigatrice du culte des Sœurs se montrerait au grand jour en ayant renvoyé un vaisseau sur Koratas par pilote automatique. A l’intérieur se trouvait le corps d’un général empoisonné, tel un message d’avertissement.

Fut-il bien reçu ? Sans aucun doute. Compris également ? Pas de la manière dont l’espérait Allya à l’époque. Le Sith, hors de lui, ne fit qu’ordonner qu’on assemble davantage de forces à destination de cette maudite planète qui représentait un clou grandissant dans sa botte. Ainsi l’ombre planant sur la Planète-Mère se fit grandissante. Tel que le relate l’ouvrage, cette ombre fut interprétée comme prophétie par l’ancienne Jedi Noire qui parvint à unir une part croissante de son peuple d’alors contre un ennemi commun. Même des êtres aussi déraisonnés que ceux succombant au Côté Obscur savaient préférer l’union à l’annihilation. Bien sûr, les défenses Dathomiriennes de l’époque étaient inexistantes, au sol comme dans l’espace. Initialement, les fidèles d’Allya ne constituèrent que de la chair à canon piétinée par une armée supérieure en nombre, en matériel et en entraînement. Or, les troupes Siths ne sont pas célébrées pour leur retenue et celles de Darth Atrius ne feraient pas exception dans un environnement aussi hostile.

Issus d’un monde « civilisé », les soldats se trouvaient ici confronté à la plus pure des primautés naturelles. Certains éclaireurs disparaissaient, emportés par la faune. D’autres succombaient a la flore. Pour palier à ces pertes inutiles, la politique de la terre brûlée serait décrétée. Un effet supplémentaire attendu serait l’impact sur le moral des combattantes de la sauvage, selon l’envahisseur. Si ce dernier eut raison, il se trompa en revanche sur la nature de ce même impact. Les flammes rendant l’atmosphère opaque ne feraient qu’augmenter les effectifs convaincus de rallier Allya. Au plus fort du conflit, l’on disait que chaque Sœur tombée en voyait quatre émerger de sa dépouille. Or, la population consciente de Dathomir n’était pas infinie. Un conflit d’attrition épuiserait les fidèles d’Allya bien avant les fanatiques d’Atriums. Alors, une certaine force jusque-là spectatrice décida de faire savoir à l’intrus qu’elle était la seule et unique puissance munie du pouvoir de décision quant à l’avenir de cette planète.

D’une source de pertes négligeables, la faune locale devint une véritable moissonneuse, comme si deux fronts devaient être tenus simultanément. D’une épine dans le pied, la faune se transforma en véritable plante carnivore capable de digérer les soldats vivants. Aidée d’autres Sœurs,  Allya avait décidé de concrétiser une vision que les Esprits lui ont soufflée. Puisqu’elle ne gagnerait selon eux qu’en utilisant toutes les armes à disposition, elle mit jadis en œuvre sa maîtrise inégalée de l’animal comme du végétal. Ce revirement permit de connaître une issue plus favorable aux Sœurs après que les légions Siths furent traquées et tuées pendant trois jours et trois nuits. Quant au Seigneur coupable de cette tentative d’annexion, les ultimes lignes de la page prétendent qu’il a fait face à l’instigatrice de la révolte en essayant de s’enfuir. Et les pages suivantes, arrachées, aspirent un profond râle de déception des poumons de la Grande Matriarche. Elle qui espérait tenir là la vérité sur le devenir de sa toute première ancêtre, ne bénéficiait que d’un récit aussi captivant qu’inachevé. Darth Meetra lui fera alors montre d’une vague capacité de prescience puisqu’elle interviendra à l’exact bon moment afin de distraire son esprit. Morgana chassa alors ce conte de sa tête et adressera un franc sourire à sa collaboratrice tout en reprenant la parole.


Puis, d’un geste négligé, elle enverra balader le livre qu’elle venait de dévorer et s’en saisira d’un autre sans vérifier de quoi il parlait. Son intuition l’avait déçue, alors Morgana jugea préférable de ne pas s’y fier pour cette fois.

Pour peu que ce nouvel ouvrage fut captivant, cela aurait presque pu passer inaperçu.  A vrai dire, un ouvrage traitant de l’expérience d’un parfait étranger, mâle de surcroit, avec les Esprits de Dathomir, cela avait de quoi interloquer la Grande Matriarche. Mais puisque Darth Atrius restait un banal reproducteur, que Morgana savait à présent incapable de s’acquitter de ce simple devoir… elle négligea simplement son expérience de la Planète-Mère un temps. Pour l’unique et bonne raison qu’il aurait fallu être inconscient de son environnement pour ne pas remarquer la légère perturbation émanant de sa consœur érudite à l’évocation de compagnon passés. La réaction de la régente d’Ossus était en soi suffisante pour persuader la spirituelle de passer à autre chose.


Néanmoins, munie d’un rictus compassionnel, viendra-t-elle se risquer à être moins formelle encore qu’en étant accroupie sur une chaise. Ce en posant une main réconfortante sur l’épaule de sa collaboratrice.


Après cette morale qu’on avait probablement déjà inculqué à la Gardienne des dizaines, des centaines de fois, la spirituelle retrouvera sa composition et sa distance d’auparavant, consciente qu’elle incommodait sans doute davantage sa consœur qu’autre chose. Et ce livre attendait toujours que son contenu soit découvert ! Néanmoins, la régente locale ne le consulterait toujours que d’un œil distrait. Plus occupée à se remémorer ses effectifs d’altérés qu’à lire.


La vision de sa consœur avec un bras entièrement dans la gueule d’un rancor pouvait parfaitement traverser l’esprit de Darth Meetra. Bien qu’un peu exagérée, elle n’aurait pas été si éloignée de la réalité pour autant. Malgré son désamour public pour les reproducteurs conscients, l’on pouvait souvent témoigner chez la Reine de Dathomir d’un comportement à la limite de l’obsessionnel quant à sa propre ménagerie. Imaginez une grand-mère gaga en train de gratter le ventre d’un chat qui ronronne. Remplacez la grand-mère par Morgana et le chat par un kwi, un rancor, un rampant, ou toute autre créature synonyme de mort immédiate pour les allochtones.


Et dans un soupir, sans cesser de tendre l’oreille envers sa collaboratrice, la nécromancienne sombra enfin dans sa lecture. Profondément inquiète du nombre d’énormités qu’elle allait y lire.