Aventure zeltronienne

Pour une fois qu'on se rend dans un coin sympa, pour une mission. Plus de réception pompeuse comme lors de ma dernière mission, à devoir supporter les minauderies et les jérémiades, les manières faussées et le mépris des puissants des mondes corelliens, que l'on devait se coltiner afin de les escorter. Franchement, c'est vraiment pas ma tasse de thé. Jaylen dit pourtant que cela me permet de travailler ma diplomatie mais crénom de Corell, c'est vraiment pas mon monde ! Je préfère largement les milieux criminels et les sphères plus basses de la société, ce sont mes opérations préférées en association avec nos amis de la CorSec. Zeltros, hein... la planète de la débauche, de la luxure et de l'oubli dans les mille et un plaisirs que la planète avait à offrir à ses visiteurs. Y avait pas à dire, ils savaient comment recevoir !

J'avais préparé tous les cas de figure dans les sacs que j'avais emmenés avec moi. Mon armure bien entendu, cela peut toujours servir, une tenue de soirée au décolleté généreux également, une tenue un peu plus osée, une tenue contrebandière... on ne sait jamais comment peut évoluer ce genre de missions qu'on m'a collée donc je préfère anticiper un maximum. J'ai peut-être pas le Don de Prophétie moi, mais moi, je connais bien mon facteur chance très changeant et très aléatoire. L'expérience qui cause, c'est moi qui vous le dit !

Dalek n'a pas pu m'accompagner pour cette danse, mais cela ne veut pas dire pour autant que je vais valser toute seule ! J'ai ramené de la compagnie, et pas n'importe laquelle. Comme je vous disais, j'ai voulu prévoir un maximum de dérapages potentiels.

Qu'est-ce que je viens foutre dans le coin, vous allez me demander ? J'm'en vais vous le dire sans plus attendre, c'est pas pour le sexe !

Pas que j'aurai été contre, mais c'est pas sans mon comparse de longue date. Je traîne peut-être pas mal de casseroles derrière moi, quelques râteaux, certaines déceptions et de nombreuses aventures, mais j'ai mes principes ! Jamais plus d'un partenaire à la fois. Et comme je suis bien contente d'être avec ce cher hapien qui met un peu - beaucoup - de piment et de répondant dans ma vie, je ne vais pas chercher ailleurs. Ouais, je suis peut-être une amatrice des plaisirs de la vie, mais que voulez-vous... pour pas en perdre le goût, faut savourer avec modération.

Comment ça je me suis totalement écartée du sujet principal ? Mais pas du tout ! Ce n'était qu'une parenthèse pour mieux y revenir.

M'sieur le "Grand" Maître des Jedi Verts m'a dépêchée personnellement sur place. Il m'a dit que la mission m'irait comme un gant, ce petit malin d'ancien mentor qui adore me charrier de temps à autres. Bref, le Conseil Vert travaille de près avec la CorSec, je vous apprend rien. Pour le coup, c'est affaire de trafic intergalactique qu'ils m'ont refourgué. Mes aînés ont eu vent en effet qu'une nouvelle drogue a été mise sur le marché, et est particulièrement dangereuse pour la santé. Fabriquée illégalement bien sûr, elle sévit particulièrement dans les couches basses de la société mais pas que. Cette petite saleté agit dans les deux minutes après l'injection et procure tant de la décontraction, du "bonheur" qu'un soulagement du corps, en jouant avec les souvenirs du drogué ou de la droguée pour lui rappeler les meilleurs moments de sa vie. Plus tu en prends, plus tu es accroc, moins tu en as assez. Un bon cercle vicieux des familles, en quelque sorte.

Parce qu'après, tu douilles sur le court comme sur le long terme !

Déconnexion avec la réalité, introversion, perte de sociabilité et dommages cognitifs font partie du pack-cadeau de ce petit poison. Ca peut aller de l'amnésie, de la mémoire altérée en passant par le mutisme, les migraines... jusqu'à devenir un légume voire avoir le cerveau qui lâche.

Ils ont réussi à retracer l'un des plus gros réseaux depuis le Quartier Bleu de Corellia, jusqu'à plusieurs clients hauts placés qui aiment se terrer dans ce soin là. Ces enfoirés, c'est mon devoir de les repérer, de les coffrer et de les ramener, manu militari si besoin est, jusqu'au bercail pour qu'ils se prennent de belles prunes, un beau procès en règle au cul et un beau séjour en prison. Le menu spécial, en quelque sorte.

Le truc, c'est que c'est pas demain que je pourrais leur mettre la main au collet. Nope, va d'abord falloir que je m'intègre sur place, que je m'immisce dans le décor et dans l'environnement. C'est une des raisons pour lesquelles j'ai teint mes cheveux en brun et j'ai changé drastiquement ma coupe habituelle. Et vu que c'est la planète de la luxure, je pense qu'un coup de main sera pas de refus.


- On devrait posé dans une dizaine de minutes au plus. La piste d’atterrissage n'est pas très loin de la demeure de ma grand-mère. Alors, ça nous fera un endroit où nous reposer, selon la durée de ce que l'on a à faire ici. Alors, pourquoi avais-tu absolument besoin de venir sur Zeltros ? Des artefacts jedis ou siths ? Des padawans potentiels ?


La prise de parole de Talus me sort de mes pensées et je porte mon regard bleus-gris sur lui. Encore un ami peu habituel que je me suis fait au fil de mes aventures, assez incongru dans le sens que le mandalorien et moi, à la base, on cherchait plutôt à s'étriper mutuellement. Oh rien de grave, juste qu'on était pas dans le même camp et qu'on a eu un quiproquo absolument sublime. Maintenant, on est plutôt bons potes.


- Tant mieux, je commençai à avoir des fourmis dans les jambes ! C'est mieux qu'on se pose un peu en effet, avant de mettre les mains dans le cambouis. J'aime bien l'improvisation, mais pour le coup un peu de planification s'impose.


Lui répliquai-je avec un certain enthousiasme et un clin d’œil. Aussi sérieuse que fût la mission et aussi sérieuse que je sois dans ma relation avec Dalek, nous sommes quand même sur Zeltros. Si je ne tromperai pas mon compagnon - j'ai mes défauts, mais je suis loyale et ce sur plus d'un point - il me faudra quand même m'intégrer à cet écosystème social et moral si particulier au monde-père des Zeltrons. Debout derrière le fauteuil de copilote, je prends appui dessus, avec l'air débonnaire qui m'est si propre. Avec un sourire, je secoue la tête horizontalement.


- Rien d'aussi glamour, mais je peux te promettre une chose. On ne risque pas de s'ennuyer ! Que dirais-tu d'une petite chasse à l'homme au beau milieu du temple de la luxure et des plaisirs ? J'ai des cibles à ramener à bon port. Intéressé ?


Un mauvais sourire se tisse sur mes lèvres, tandis que mes yeux bleus-gris brillent d'impatience. Cela faisait longtemps que je souhaitais avoir un peu d'action, après le repos qu'on s'octroiera en arrivant et pour la soirée. Mes yeux restent posés dans les siens, attendant sa réponse.

C’est vrai que mon entrain peut surprendre de la part d’une Jedi, mais comprenez-moi Foutreforce ! On s’emmerde tellement lors d’une mission diplomatique qui se passe bien que je ne suis pas du tout contre un peu d’action, d’adrénaline. Les opérations qui touchent de près ou de loin au crime sont très souvent riches en rebondissement et imprévisibles, ce n’est jamais exactement la même chose. J’ai pris goût à servir l’armée, mais de temps en temps revenir sur ses bons vieux classiques fait du bien.

Donc ouais, j’ai un joli quatuor de criminels à coffrer. Deux mecs et deux filles, qui sont dans une espèce de plan à trois. L’une des filles est originaire de Zeltros, elle est plutôt bien placée dans la hiérarchie du réseau criminel et se rend peu sur les mondes corelliens. C’est donc l’occasion en aurodium pour tenter de la coffrer en profitant de l’opportunité. Ça serait un beau cadeau pour la CorSec, pour sûr !


- Je vois. Ça promet en effet d'être intéressant. De plus, ceux que tu cherches ne risquent pas de se douter que quelqu'un va venir les traquer jusqu'ici. Par contre, je préfère te prévenir tout de suite, les autorités locales risquent peu de nous aider.

- Ca, Corell nous le dira ! Disons qu’ils pensent pouvoir passer sous le radar en filant jusqu’ici. Ce n’est pas con d’ailleurs, un monde neutre. Zeltros en particulier, comme tu dis c’est le coin parfait pour se faire oublier et pour limiter la filature. Ce n’est pas un mauvais coup en soi mais clairement, il en faut quand même plus pour empêcher la CorSec de faire son taf.  

- Les Zeltrons restent neutre dans le conflit en cours, alors ils évitent de se mêler de choses trop risqués. Sans parler de leur tempérament dirigés vers l'amusement plutôt que les trucs sérieux. Attends-toi d'ailleurs à ce que des locaux te proposent tout de sorte de trucs, un très vaste éventail. Également, il vaudrait que tu... ah, je vois le hangar.  


C’est un challenge, pour sûr mais sur mon sang corellien, une Fern ne tourne jamais le dos à un défi ! Je me doute bien que les locaux ne seront pas très coopératifs, surtout envers une étrangère, mais j’espère que l’appui de Talus m’aidera à contourner un peu cette difficulté initiale. Oh, je ne suis pas naïve hein. Je suis petite certes, mais j’ai des formes et je sais que ça risque de m’attirer des regards. Je ne suis clairement pas aussi plantureuse qu’une Twi’lek ou qu’une Zeltrone, mais je me défends en tant qu’humaine. Après, le point de vigilance à avoir ça reste mon foutu Don de Force que je n’ai pas demandé ni désiré. L’Empathie de Force pourrait me mettre des bâtons dans les roues, si je me laisse submerger par les émotions lubriques et débridées qui m’entourent dans ce monde luxurieux.

L’atterrissage se passe sans anicroche et j’attrape sans plus de cérémonie le baluchon qui va m’accompagner et qui contient l’essentiel de mes affaires les plus importantes. Comme je n’ai pas envie d’avoir une étiquette marquée « Jedi » ou « CorSec » sur le front, j’ai choisi pour ma part une tenue de pilote avec un pantalon et une veste sans manches multipoches, assez passe-partout pour ne pas attirer l’attention et me faire passer pour une contrebandière ou une baroudeuse, mais assez parfaitement moulée sur ma silhouette et ma carrure. Le manteau que je porte est assez simple et s’il n’est pas pourvu d’une doublure parant les tirs-laser en partie, il est discret et ne m’encombre pas dans mes mouvements. Ajoutez à ça des bottes de voyageuse, ma paire de blasters corelliens à la ceinture et mon sabre-laser double-lame dissimulé dans la doublure de mon manteau et vous aurez la panoplie complète. Le reste demeurera sur le vaisseau de mon ami, dans la cabine qu’il m’a prêtée.

Visiblement, je ne suis pas la seule à vouloir passer plus inaperçue puisque ce cher Talus troque son armure mandalorienne pour des vêtements plus civils. C’est rare de voir un mandalorien sans sa Beskar’gam, sa « Peau de Fer ». Comme je vois par contre, il a aussi gardé quelques armes sur lui. Je le vois passer à côté de moi et me passer un petit objet, avant qu’il ne reprenne bien vite la parole.


- Je te conseille d'en prendre un. J'ignore si tu le sais, mais les zeltrons peuvent dégager des phéromones. Des phéromones pouvant altérer le comportement des gens. En soit, ils ne s'en servent pas pour faire du mal à autrui. Cependant, cela peut monter à la tête et amener à faire des choses plus osée que tu ne le ferais normalement. Disons que ce n'est pas pour rien que ce monde se prête autant au plaisir, même chez les espèces les plus réservées. Alors, garde ce truc à proximité, n'hésite pas à t'en servir si tu en ressens le besoin.

- Mon mentor m’avait mise en garde oui, il y a longtemps mais ce n’est pas tombé dans l’oreille d’une sourde ! Merci Talus. Je garde ça à portée de main, on ne sait jamais.


Surtout avec le Don que je me trimballe mais ça, il n’a pas besoin de le savoir et je ne compte pas en parler à qui que ce soit d’autre que Dalek. Je lui fais confiance certes, mais j’ai le droit à mes secrets. Je n’ai pas envie que ma mission vire à l’orgie par simple imprudence de ma part… en bien des façons ce n’est pas sain du tout. Il va donc falloir que je sois alerte, et ne pas y aller seule est une garantie.


- Bienvenue sur Zeltros.


Je ne suis pas fâchée d’être dehors… et en plus il fait beau ! Que demande le peuple ? Ça semblerait presque pastoral, avec ces étendues herbeuses à perte de vue, de sources d’eau et de cascades, et les bâtiments taillés dans la pierre. On ne dirait pas ainsi à première vue que c’est une planète bien connue par le monde criminel qui profite de sa neutralité revendiquée envers les grandes institutions. J’espère bien retrouver mes quatre insouciants et les ramener à la dure réalité de l’incarcération corellienne. En tout cas, je ne connais pas bien ce monde donc j’espère que Talus pourra m’aiguiller un petit peu. Mais déjà, avant toute recherche, il faut établir un QG, un Quartier Général, et que je lui donne en toute discrétion quelques précisions supplémentaires, puisque l’on doit coopérer pour cette chasse.


- Plus vert que je ne l’aurais cru mais clairement bien vivant. Ça a l’air chouette comme coin. Tu connais un coin où on pourrait prendre un verre ou en tout cas causer relativement en paix ? Je suis aussi ouverte à des recommandations si tu en as. De nous deux, tu connais mieux le coin.

Ah bah que voulez-vous, c’est la citadine en moi qui s’exprime ! Je veux dire, en tant que Jedi bien sûr que j’ai été amenée à voyager sur différents mondes et à découvrir de nombreux paysages, mais je suis plus habituée aux terres civilisées des mondes corelliens. Je veux dire, même Tython je n’y ai jamais vraiment mis les pieds ! On m’a raconté mille et une merveilles sur ce bastion des cousins Jedi, mais je suis dubitative. Foutreforce qu’on doit s’emmerder sur place, c’est comme Naboo en fait. Tu peux faire quoi, en dehors des activités strictement Jedi ? Méditer, t’entraîner à la Force, t’exercer au sabre-laser, consulter la Grande Bibliothèque, passer un moment somnifère en salle du Conseil ? Ça va deux minutes. Au moins sur Corellia, notre air est moins pur et notre nature moins préservée, mais bordel qu’on s’amuse beaucoup plus ! Alors oui, je ne suis pas habituée à voir un monde à la fois aussi pastoral et aussi réputé pour la bonne vie, très épicurienne et hédoniste qu’on peut y mener. Le monde du jeu et des plaisirs sous toutes ses formes, avec un peuple aux redoutables phéromones… c’est la première fois que j’y mets les pieds, en effet. Ca pourrait être presque euphorisant pour moi, ce pourquoi je m’efforce de renforcer mes boucliers mentaux pour ne pas que les émotions de ceux et celles qui m’entourent ne puissent m’affecter et m’influencer, même un peu, à cause de mon Don.


- On voit bien que c'est ta première fois sur Zeltros. Cette planète est pratiquement l'incarnation même de l'hédonisme. Marche dans n'importe quelle direction pendant une quinzaine de minutes et ce sera presque impossible de ne pas croiser un bar ou un endroit servant des boissons alcoolisés. Disons que le seul moyen de faire mieux, se serait d'avoir des droïdes qui donnent à vue des cocktails à toutes personne qui n'en a pas déjà. Autrement, je connais un endroit où on serait tranquille sans mal. Ce n'est pas très loin d'ici.

- Oh, je n’imagine même pas l’orgie permanente que cela pourrait donner ! J’avoue que c’est un coin de retraite sympa, tant que tu ne finis pas à poil et fauché. C’est bien le genre de coin où, sans ma profession, je me serai rendue pour des vacances bien méritées !


Je me demande si je pourrais emmener Dalek un jour dans le coin. Je suis sûre qu’on pourrait y passer un très agréable séjour, et à deux on ne manquerait pas de rester vigilants. Face à la gaîté qui me gagne comme une douce drogue, je garde à l’esprit le petit appareil que m’a prêté Talus. Je ne sais pas, je me sens de bonne humeur depuis qu’on a posé les pieds ici, même si je m’efforce de rester sérieuse. Je me demande pourquoi Jaylen m’a envoyée là, pourtant le bougre est conscient du Don d’Empathie que je possède bien malgré moi. Est-ce un entraînement, ou bien en raison de mon contact Zeltron ? Je ne saurais le dire. Jaylen est parfois difficile à cerner, ce bougre d’Iridonien qui m’a formée.


- C'est un commerce un peu particulier. Un mélange entre un bar, une cantina, un édifice de réunion et plein d'autres trucs. Dans tous les cas, on peut tout simplement demander une salle de divertissement. Ça ne devrait pas être difficile, normalement. Le propriétaire des lieux était le meilleur ami de mon grand-père. Le connaissant, il acceptera sans hésitation.

- Ça me va ! Je suis curieuse de voir leur carte. Je te suis, Talus.  


Au moins, il a l’air de bien connaître et d’être bien connu des locaux. Ca pourrait se révéler être utile pour mon enquête, ça pourrait instaurer une relation de confiance et peut-être dénouer des langues. Si je garde bien mon enquête en tête et que je compte bien rester fidèle à mon compagnon, je ne refuserais pas une occasion de prendre un peu de repos et de bon temps aux côtés d’un ami. De toute façon, si je reste trop tendue et trop alerte, je vais vite me détacher du lot et me faire griller. Autant assurer ma couverture en restant débonnaire, curieuse et détendue, comme une touriste en fait. Je ne dois pas, pour le moment, me distinguer de la foule d’habitués et de touristes qui vont sur Zeltros.

La Lune Verte… je retiens le nom de l’enseigne alors que je tâche de mémoriser notre chemin et de m’imprégner des alentours et des commerces qui jalonnent notre route. J’entends une petite musique pas désagréable qui égaye un peu l’établissement, dominé par un grand comptoir à l’entrée. Il semble être géré par une Zeltronne plutôt mignonne et légèrement vêtue, je dois bien l’admettre même si je ne suis pas de ce bord-là. Restant aux côtés de Talus, je le laisse engager la conversation avec la barmaid… enfin, essayer d’attirer son attention. Visiblement, elle fait un peu la dure d’oreille quand on lui parle en langue basique parce que dès qu’il se met à parler en dialecte Zeltron, elle daigne réagir et esquisse cette fois un large sourire vers le mandalorien, quitta le comptoir et lui sauta au cou. Je ne peux pas m’empêcher d’avoir un sourire espiègle aux lèvres et sifflai brièvement d’un air amusé.


- Talus! Qu'est-ce que tu fais ici, mon grand ?

-Tu pourrais descendre, mon bras est peut-être mécanique, mais pas mon cou.

- Oh, pardon.

- J'aurais besoin d'une pièce libre. Est-ce que t'en aurais une de disponible ?

- Je vérifies ça.


Je ne commente pas. Je ne me sens pas vexée qu’elle ne me prête pas attention, cela me laisse le temps de repérer l’intérieur de l’établissement, et surtout ses actuels clients et clientes. Rien n’attire mon attention pour l’heure alors que je jette un œil curieux sur la disposition des tables et de l’ensemble. Je ne repère pas les gredins sur lesquels il faut que je mette la main, ça aurait été trop simple… et puis, ce n’est pas un mal. J’ai le temps de profiter un peu du cadre sympa en attendant. Mes yeux gris-bleus reviennent cependant vers la Zeltronne et vers mon ami mandalorien lorsque la première semble enfin remarquer ma présence et semble curieuse de me voir à ses côtés.


- Autant faire les présentations. Allana, voici ma cousine, Dexa. Dexa, c'est mon amie, Allana... de l'ordre Jedi.


Heu, Talus tu es sûr de toi ? J’aurai vraiment préféré rester incognito… et merde, j’aurais dû y penser. Trouver un faux-nom, lui préciser de ne pas mentionner ma qualité de Jedi Vert. Corell soit louée, il n’a pas mentionné mon nom de famille au moins. Ça aurait le moyen parfait de greffer une cible sur ma tête et d’indiquer à tous les amis et associés de mes cibles que j’étais ici et qu’il fallait m’abattre à vue.  Jouant le jeu afin de ne pas davantage éprouver ma couverture, je me décide à esquisser un sourire enthousiaste et de tendre la main vers la Zeltronne afin de serrer sa main en salutations, comme si de rien n’était. Autant faire croire aux autres que je suis une connaissance mutuelle des deux autres. Je retiens cela dit le nom de sa cousine. Dexa, hein… espérons qu’elle sache tenir sa langue, pour elle. Je n'aime pas recourir ni à la Force ni à la force, mais je garde les intérêts de l’Ordre Vert prioritaires. Puis bon si elle parle, elle va susciter l’intérêt de gens peu recommandables. Mieux vaut qu’elle garde le silence, car je pense que d’autres seraient beaucoup moins scrupuleux que je ne le suis actuellement.

Quand j’étais de l’autre côté de la barrière… je n’aurai pas hésité un seul instant à l’éliminer en raison de la menace de fuite qu’elle représente. Heureusement, c’est une époque révolue désormais. Je vais m’efforcer d’être un peu plus civilisée et de ne pas m’attirer les foudres d’un ami si je peux l’éviter. Heureusement, la conversation dérive sur des sujets plus sûrs et donc je garde mon air débonnaire.


-Euh, attends mon grand. Je croyais que ton peuple détestait ce groupe d'individu. Tuer à vue ou ce genre d'absurdité.

- Absolument pas... Du moins, ce n’est pas le cas pour mon clan, ni pour le clan Ordo. Le clan Fett, par contre... disons que ça ne me surprendrait pas...


Ce serait compliqué à expliquer, en effet. Les mandaloriens et leurs subtilités selon leurs différents clans… ce n’est pas facile à gérer et à s’y retrouver, mais ce n’est pas moins intéressants. Je ne sous-estimerai jamais des mandaloriens, ils sont formés pour beaucoup très jeunes à être de redoutables combattants, dont les meilleurs sont capables de défier, de tenir tête voire de tuer Jedi, Sith et Chevaliers Impériaux. Leur neutralité en fait des interlocuteurs à la fois intéressants et imprévisibles.


- Euh, sinon Dexa, qu'est-ce que tu fais ici ? La dernière fois que je t'ai vue, tu travaillais comme hôtesse sur une plage.

-Je me faisais chier. Alors, je suis partie et depuis je travaille ici. Et toi?

-Le boulot.


Bien rattrapé, Talus. Bien rattrapé, une réponse à la fois assez précise et assez vague pour la satisfaire sans en dire plus. C’est l’avantage de sa profession, il peut avoir des contrats assez diversifiés. Je garde le silence tout en restant très attentive à leur conversation, parfois en basique et parfois en zeltron.


-D'accord... Alors, la salle 5 est libre. Je peux vous la réserver pour 2 heures, pas plus. Au fait, si grand-mère vient faire un tour, tu veux que je la prévienne que tu es là?

-NON!!! Tu la connais, elle va vouloir me convaincre de rester pendant au moins une semaine. Je n'ai pas vraiment le temps pour ça.


Sa grand-mère, mm ? C’est rare de le voir réagir comme ça. Elle doit vraiment avoir un certain effet, que dis-je, un effet certain sur lui. Néanmoins, mon pressentiment me dit qu’on croisera tôt ou tard le chemin de cette mystérieuse grand-mère qui m’intrigue. Ah la famille, je compatis. La mienne est un peu dysfonctionnelle avec ma mère chasseuse de primes, mon frère Maître Jedi Vert et mon frère benjamin chasseur de primes dans une autre organisation. Cependant, Hal insiste toujours pour qu’on se voit autour d’un verre quand nous sommes tous deux de passage sur Corellia, et Corran tient aussi à ce que je vienne leur rendre visite, ayant une amitié certaine avec son épouse Ellen et pour que je vois aussi ma nièce Adea. Qu’est-ce qu’elle grandit vite d’ailleurs, cette pétillante petite puce ! Ça doit lui venir de sa mère, je doute que Corran aurait été capable de créer une telle merveille. Comment ça je suis mauvaise langue ? Mais non, je suis tout à fait objective… bon d’accord, je suis partiale. Je suis donc Talus et nous gagnons la salle numéro 5. Par habitude, à peine la porte refermée, mes yeux bleus-gris cherchent et scrutent la pièce en quête de micros ou de caméras cachés. Je n’en vois pas de prime abord, mais va falloir que je fasse attention. On va se faire passer pour une collègue de Talus et on va occulter toute mention à l’Ordre Jedi Vert. J’espère que le mandalorien comprendra la manœuvre.


- Je te sers quelque chose? Sinon, ne t'inquiètes pas pour ma cousine, elle sait tenir sa langue.
- D’habitude j’aurais dit du Brandy, mais si tu as une recommandation d’alcool ou de cocktail local, je suis preneuse. Autant diversifier nos expériences.  


J’aimerai avoir sa confiance envers sa cousine. Je ne peux m’empêcher d’être méfiante pour autant. On va essayer de gommer cette petite maladresse de notre mieux et sans se prendre le chou. Je me décide finalement à m’asseoir tandis que nous commandons nos boissons respectives. Une fois la commande passée, je remarque qu’il y a un terminal permettant de mettre de la musique. De la musique, excellent pour couvrir notre conversation à toute caméra cachée. Je me place de façon à ce que mes lèvres ne puissent pas être lues facilement avant de tourner mon regard amical vers Talus.


- Tiens, pourquoi ne pas mettre un peu de musique ? Si tu n’as pas de groupe de préférence, on peut mettre du blaster-rock. Corellyptica est une valeur sûre. Leur dernier concert était une tuerie paraît-il. Les places se sont arrachées en cinq minutes. Une ambiance d’enfer.


Merci Hal et merci Dalek qui n’arrêtent pas de m’en vanter les mérites et de les passer en boucle ! J’espère que Talus pourra comprendre les raisons de ma proposition anodine alors que je laisse un large sourire plein d’entrain sur mes lèvres.

Allez Talus, cette partition, faut qu'on la joue en duo !

Que voulez-vous, c’est difficile de perdre les habitudes d’enquêteuse ! J’admets que je suis tout autant curieuse que méfiante sur cette terre que je ne connais pas bien. Quelque part, j’envie l’attitude relaxée du mandalorien, qui, je le remarque bien, semble m’observer avec attention. J’ai activé la musique du groupe de blaster-rock corellien puisqu’il n’a pas exprimé de souhait de morceau particulier, avant de me rasseoir une fois que je suis sûre qu’il n’y a pas de caméras dissimulées. La musique n’est pas forte au point de nous assourdir, mais juste assez pour couvrir d’éventuels micros.

Les quatre bouteilles qu’il pose sur la table et qu’il incorpore dans deux verres piquent ma curiosité et me détendent au moins un peu. Je me demande quels alcools il a pu prendre et quel cocktail il est en train de concocter. Je veux dire, je suis corellienne donc bien évidemment que je place en tête le brandy et les vins corelliens, mais j’apprécie l’alcool et j’aime tout autant la découverte, surtout en compagnie de quelqu’un qui ne va pas essayer de me droguer ou de m’empoisonner par la boisson. Le mélange alcoolisé qu’il verse dans nos verres avait pris une teinte mauve inhabituelle mais plaisante et bien uniforme, preuve que les différents éléments alcoolisés ont bien été mixés ensemble. Je saisis avec reconnaissance le verre qu’il me propose, appréciant tant la couleur, la texture que le musc du cocktail. Intéressant… il n’y a pas moins de quatre alcools mais il y a une note douce-amère qui se détache du parfum de l’alcool. Peut-être une liqueur plus sucrée que le reste pour équilibrer le mix ?


- On appelle ce cocktail, une Descente Étoilée. C'est fait à partir de 4 alcools locaux. Enfin, techniquement trois, si on tient à chipoter un peu. De ce qu'on m'a raconté, le quatrième est fabriqué sur une station en orbite. Apparemment, quelqu'un a trouvé que c'était une idée incroyable d'appeler ce cocktail une descente étoilée, car l'un des ingrédients ''descend'' des étoiles. Un peu exagéré, mais bon, j'ai déjà vu des concepts et des idées plus stupides dans une multitude de domaines. J'ai déjà vu un type qui avait baptisé son vaisseau le Mange-Pierre... parce que c'était un vaisseau minier. Comme quoi l'imagination, c'est parfois une denrée rare à travers la galaxie...

- La Descente Étoilée, hein… c’est assez poétique. Ça l’est plus que le Dark Matter Spiced Rhum. Tu as déjà goûté à ce cocktail-là ? Ça te fait l’effet d’une vraie bombe dans tes entrailles, et ça te crame bien le gosier. Crois-moi, c’est un des mélanges les plus explosifs que j’ai pu goûter dans ma carrière. Un peu trop corsé pour moi, d’ailleurs, je trouve que ça massacre les papilles et tu ne savoures pas vraiment le verre… et ça te rend saoul plus vite que l’éclair. Bah Mange-Pierre… ils ne sont pas allé loin clairement, mais ça a le mérite d’être clair au moins.


J’avais goûté à cette mixture lors de ma folle escapade en tant que contrebandière et chasseuse de primes, cette période préparatoire à mon infiltration dans une secte Sith de façon incognito. Je ne connaissais pas Talus à cette époque, et je ne lui en ai jamais parlé non plus. Je n’en ai pas l’intention d’ailleurs, nous avons droit tous deux à nos secrets respectifs. J’ai eu un mode de vie encore plus dissolu que celui que l’on me prête, alors que je suis simplement une épicurienne assumée. Je déguste d’abord du bout des lèvres, puis avec une petite gorgée que je prends le temps de savourer et d’en apprécier toutes les notes. C’est vraiment agréable, il faudra absolument que je trouve ses ingrédients et que je le teste à la maison. C’est tout à fait le genre de cocktail qu’aimerait ma belle-sœur Ellen, elle qui me charrie souvent sur ma préférence marquée pour les alcools forts plutôt que les alcools raffinés.


- D'ailleurs, j'aurais même pu te proposer une autre cocktail d'ici. Sur une partie de la planète, ils appellent ça une Chute et sur l'autre un Oubli Passager. Trois alcools forts, du vinaigre, du jus de fruits et trois autres ingrédients inusité. Faut être bien accroché pour boire ce truc. Les gens normaux en boivent un et ensuite, c'est le noir complet. Généralement, ils se réveillent le lendemain, avec une gueule de bois intense et aucune idée de ce qu'ils ont pu faire entre le moment où ils ont ingéré ce cocktail et lorsqu'ils se sont réveillés.

- Je prends ça comme un défi ! J’ai une bonne descente, sans fausse modestie, et généralement je tiens bien le choc. La Force aide peut-être, mais la génétique aussi. On a toujours bien tenu l’alcool dans ma famille, à de rares exceptions près. Tu piques ma curiosité, Talus, surtout avec de tels noms.  Tu me montreras à l’occasion, et je serais curieuse de connaître les ingrédients de cette « Descente Étoilée ». Je ne la connaissais pas. Sauf si c’est un secret familial, bien-sûr.


Chaque peuple a ses petits secrets culinaires et gustatifs qu’il ne veut pas partager avec les autres. Je sais que les corelliens sont assez protecteurs avec la recette ancestrale du brandy. Bien-sûr, la boisson était désormais commercialisée un peu partout dans les brasseurs de la galaxie, mais nous autres corelliens avons toujours un ou deux petits ingrédients qui lui prêtent un goût incontournable, et que nous gardons jalousement comme des secrets inviolables. Je ne me vexerai pas face à un refus.


- Enfin bref, ce n'est pas vraiment le sujet du moment. En plus, on a pas cet endroit indéfiniment, alors on ferait mieux de se mettre au boulot. Alors, si tu m'expliquais un peu ce qu'on a à faire? Disons que pour l'instant c'était assez flou ton histoire.

- Ouais, sinon on pourrait discuter de secrets de cuisine pendant des heures nous connaissant. Bon, parlons peu mais parlons bien, comme qui dirait. Viens voir un peu ça.


Je me redresse donc et pose mon verre à moitié vide sur la table. D’une main je saisis un datapad qui ne me quitte jamais et invite d’un signe de main Talus à venir s’asseoir à côté de moi. Ce sera plus facile pour lui montrer certains éléments que je ne peux pas risquer face à des caméras éventuelles. J’active l’outil intégré d’holoprojection miniature et projette en image miniaturisée les quatre portraits de mes fugitifs. On distingue facilement deux humains, une plantureuse zeltronne, et une solide zabrak.


- Tu vois ces charmants gaillards ? Ils font partie d’un groupe qui fout un peu le bordel au Quartier Bleu sur Corellia. J’veux dire, on n’est pas les plus tâtillons et on ferme parfois les yeux sur des petites magouilles tant que ça permet de maintenir la paix du coin et que ça ne déborde pas. Ça permet d’avoir des contacts et tout le barda qui va avec. Sauf que le gang de ces loustics a poussé le bouchon un peu trop loin et faut que je les ramène vifs à la maison pour qu’ils puissent chanter.


Je sais que mes collègues de la CorSec sont excellents pour faire parler ceux qui étaient peu bavards. On a nos techniques, on a nos astuces, sans virer jusque dans la cruauté des Services ou des Sith. Je laisse le temps à Talus d’observer leurs visages avant d’éteindre la projection et de poursuivre.


- Ces types pourraient nous mener vers de belles infos sur le réseau de trafic de drogue dont ils font partie. Ce n’est pas la petite poudre blanche ou les cachets que tu trouves à tous les coins du Quartier Bleu, qui te font planer un peu et peuvent provoquer une légère addiction. Nan, là on passe au niveau supérieur. Celle-là, elle est bien méchante et elle a déjà pas mal frappé chez nous. La Zeltronne, elle passe rarement du côté de chez nous et elle est roublarde, alors si je pouvais la choper au passage, ça m’arrangerait pas mal. La coffrer hein j’entends, je ne mange pas de ce pain-là !


Le léger éclat de rire qui ponctue mes derniers propos aspire à détendre un peu l’atmosphère. Non clairement, je préfère savourer un tout autre met et j’ai trouvé ce que je cherchais à ce sujet avec Dalek. Je suis de bonne humeur, très motivée et enthousiaste de faire cette petite chasse en duo.


- Alors, tenté ? Qui sait, tu pourrais peut-être dégoter une tête avec une belle prime au vol. Je ne serais pas surprise, vu le beau morceau auquel ils sont associés. Qu’en dis-tu ? Est-ce que tu as des suggestions d’endroits où ils pourraient se rendre, toi qui connaît le coin et les gens ?

Que voulez-vous, je suis corellienne et je m’assume parfaitement ! C’est bien une chose qui est restée vraie tout au cours de ma vie, que ce soit en tant que Padawan Verte senior, Chevalier Vert, Contrebandière, Chasseuse de primes, Acolyte Sith ou Maître Jedi Vert. Je suis une amatrice des bonnes choses, je suis épicurienne et l’appréciation des différents alcools en fait partie, tout comme une résistance accrue à l’ivresse transmise de génération en génération, par l’exercice tout comme par la génétique corellienne. Goûter aux saveurs locales permet de voyager et, à sa manière, de s’imprégner des coutumes locales tout en facilitant la conversation sans attirer l’attention, ou gagner des sympathies bien utiles ou en tout cas bien appréciables. Ça met dans l’ambiance, aussi. Je suis toujours partante pour apprendre de nouvelles recettes, quel que soit le type de consommation et comme je suis généreuse, j’aime bien aussi partager les petites perles que j’ai pu découvrir… en dehors des secrets du patrimoine corellien, bien entendu ! Ça, c’est secret défense, je ne parlerai pas.


- En soit, les ingrédients n'ont rien vraiment d'un secret. Ce n'est ni un secret familial, ni un secret zeltron. Tu peux en commander dans n'importe quel bar de la planète. Quant à la recette, même chose, très facile à trouver sur l'holonet. C'est davantage les alcools utilisés qui peuvent être problématique. On les trouve facilement sur Zeltros, mais hors de la planète, à moins d'être prêt à payer des frais d'exportation horrible, c'est pas la peine d'espérer en trouver. D'ailleurs, ton Dark Matter Spiced Rhum, j'essayerais bien à un moment. Par contre, tu peux me croire il existe bien plus violent. Me rappel une fois, sur tatooine, lors d'un contrat, j'ai fini par me faire offrir par un gamoréen de goûter à son alcool maison. J'ai vérifié rapidement que c'était pas du poison et cul sec. Disons qu'on aurait dit qu'il c'était contenté de prendre de l'alcool pur et de rajouter 2-3 trucs dedans pour le goût. Dégoutant, une personne normale aurait perdu connaissance sur le champ. Peut-être le coma éthylique... D'ailleurs, je te préviens tout de suite, si tu veux vraiment essayer une Chute, libre à toi. Par contre, je te préviens tout suite, n'essaye pas une seule seconde d'en prendre plus que moi. Tu ne pourras pas et je suis sérieux.  

- Y a un truc que j’ai remarqué en baroudant à droite et à gauche, c’est que tu peux avoir la même recette entre deux bars différents, tu n’aurais jamais le même rendu. Que ce soit par le degré de maîtrise du barman, la qualité et la fraîcheur des ingrédients utilisés, s’ils sont frais ou congelés, ce n’est jamais vraiment la même chose et tu arrives encore à être étonné. C’est comme pour le Brandy corellien, d’ailleurs. Une recette de base similaire, et une infinité de variations subtiles. Merci pour les infos, faudra que j’en ramène avant de quitter Zeltros alors pour éviter de payer trop de frais. Pour le Dark Matter Spiced, soit tu fais un concours de boisson, soit tu vas dans un bon bar. Les cantinas de renom, j’entends par là celles qui valent vraiment la peine, en ont toujours quelque part pourvu que le client mette le prix et que la tête du client revienne au patron et au serveur. J’suis curieuse pour ton alcool local, mais bon on va essayer d’être raisonnable. Fais gaffe, plus jeune je l’aurai pris comme un défi ici et maintenant. Paraît que j’ai atteint l’âge de raison, depuis…

Ma moue boudeuse est toutefois très vite démentie par la malice qui pétille dans mon regard tout comme par l’ombre de sourire espiègle sur mes lèvres. Je ne serai jamais tout à fait sage, ce n’est pas dans mon tempérament. J’aurai toujours ce petit grain de folie qui me va si bien, qui désespère certains collègues de Tython mais qui sait apprécier les bonnes choses sait l’apprécier aussi. Je ne renie aucun aspect de ma personnalité, car chacun d’entre eux fait que je suis une bonne-vivante. Bon, on revient vite aux choses sérieuses parce que sinon je vais me distraire et ça, c’est juste hors de question. Mon visage professionnel revient au galop alors que Talus commence à enrichir ma courte présentation.


- Ça pourra être divertissant. Sinon, j'ai bien quelques idées en tête, de lieux où ils pourraient être. Ou alors qui serait en mesure de nous donner des informations. On pourrait commencer par regarder du côté des épiceries du coin.


Les épiceries du coin… je n’y avais pas songé en première intention, je l’admets. Je commence à sentir ma méconnaissance du monde originel des Zeltrons. Il va falloir impérativement que je m’approprie leur culture afin de mieux les cerner. Je prête donc une oreille attentive aux propos du mandalorien.


- Comme tu le sais, Zeltron c'est la planète des plaisirs, des fêtes et de l'hédonisme. On peut trouver un peu de tout pour s'amuser. Les épices ne font pas exception. Il existe des commerces où il est possible d'acheter et de profiter légalement de toutes sortes de drogues. Ces commerces peuvent mêmes en cultiver et préparer sur place même. Toutefois, c'est très réglementé. Je ne connais pas la totalité des règles, mais je sais qu'il s'agit d'une liste précises de type d'épice, qu'elles doivent répondre à certains standards de qualité. Ainsi que d'autres règles sur la quantité pouvant être vendu, la forme et de nombreux autres détails du genre. Personnellement, si j'opérais dans le domaine de l'épice, ce genre de commerce se serait l'idéal. Je pourrais m'approvisionner en équipement et fourniture pour fabriquer mon poison en toute légalité. Ensuite de quoi, je consacre une partie de l'équipement à faire de l'épice que je vends sur place et l'autre partie à faire mes poisons plus dangereux, destinés hors de la planète. Évidemment, c'est une supposition.


Jusque-là, ça colle avec les brides d’informations dont je dispose sur Zeltros. Carrefour incontournable de neutralité et du commerce des plaisirs divers et variés, véritable symbole de l’hédonisme et de l’épicurisme, c’était un monde auquel mes collègues un peu taquins se plaisaient à m’associer. Les épices sont en effet un commerce très lucratif, au-delà même des frontières du monde natal des Zeltrons, et la pente était assez glissante entre la légalité et l’illégalité dans ce domaine précis.


- Je connais également deux ou trois locaux qu'on pourrait interroger, car ils sont du genre à se tenir informer sur une multitude de sujet, chacun pour des raisons propres. Dans tous les cas, je crois que la bonne méthode serait qu'une fois qu'on a trouvé nos quatre individus, d'éviter de les attaquer immédiatement. On pourrait prétendre être des clients potentiels ou des touristes qui cherchent de quoi s'amuser pendant leur séjour.


Des informateurs ou des indics. Ce sont des éléments précieux quoiqu’imprévisibles au cours des enquêtes, surtout si on prend en compte que tout peut se monnayer contre de l’argent, des faveurs, de l’influence, des avantages ou des paiements en nature de différentes manières. Le paiement immédiat n’est d’ailleurs pas forcément la solution privilégiée. Souvent, il vaut mieux avoir quelqu’un qui a une dette envers soi à ses côtés que quelqu’un qui ne vous doit rien et peut vous payer cash, alors que vous pourriez y gagner des intérêts ou lui faire pression. Ça se fait au sein de la pègre, mais pas uniquement et c’est une des nombreuses raisons pour lesquelles je déteste les sphères politiques. L’idée de se faire passer pour des touristes me plait, un peu plus que celle des clients, mais je le laisse terminer son exposé avant de réagir, histoire de voir ce qu’il me propose de son côté sur le sujet.


- Quant au fait de les faire parler, on a pas forcément besoin de la CorSec. Je connais quelques astuces plutôt efficaces. Par exemple, tu en prends et tu le tiens au-dessus du vide en menaçant de le lâcher. Voire, si j'ai mon jetpack, je le lâche vraiment, je le suis pendant sa chute et j'attends qu'il accepte de parler en échange que je le rattrape et lui évite de finir comme une crêpe sur le béton. Ou encore, un truc que j'ai vu un jedi faire une fois, avec un idiot ne connaissant pas grand-chose sur la Force. En gros, il lui avait fait croire qu'il allait utiliser la Force pour entrer dans son esprit pour chercher les informations et tant pis pour les dommages au cerveau. Cet abruti de criminel y a vraiment cru.

- Eh bien, je ne pensais pas qu’il existerait des types aussi simples d’esprits pour mordre dans un bobard pareil. Je veux dire, même les gamins n’y croiraient pas longtemps. Puis j’t’avoue que j’aimerai bien qu’ils causent avant que je les ramène au bercail. Généralement, ils sont plus bavards quand ils se sentent chez eux plutôt que quand ils sont « accueillis ». Je ne suis pas friande de la torture, mais je sais que certains ne parlent pas sans un petit encouragement. Tant qu’il n’y a aucune mort, aucune blessure irrémédiable et aucune entorse à notre couverture, je peux faire ma part. Après tout, il vaut mieux avoir plusieurs méthodes sous la main plutôt qu’une seule.


C’est un truc que tant Jaylen que Gilad m’avaient mis dans le crâne, plus jeune : quand tu vas enquêter, tu ne retiens jamais une seule option. Il faut toujours avoir plusieurs outils sous la main, pour pallier à un maximum de cas de figures potentiels. Sirotant le cocktail pour le terminer lentement mais sûrement, je songe aux différentes affirmations de Talus avant de poursuivre mon propos.


- Les épiceries me semblent être un bon point de départ, puisqu’il faut bien commencer quelque part. Je me familiariserai comme ça avec les épices et ces histoires de poison dont tu parlais, comme ça je n’aurais pas l’air d’être trop ignorante sur la question, enfin pas trop. On peut aussi interroger les contacts dont tu parlais ensuite, histoire de voir si on peut glaner des renseignements en plus. En ce qui concerne nos personas de référence… j’opterais bien pour les touristes. Je pense qu’ils susciteraient moins de méfiance de la part de nos interlocuteurs que des clients, c’est trop gros comme ficelle et déjà bien utilisé par les commissaires.  Des touristes pas trop ignares non plus, en quête de plaisirs nouveaux, afin de pimenter un peu leur vie. Ou je fais la touriste et toi l’intermédiaire local qui connaît les bonnes adresses et m’a amenée là suite à la recommandation d’un contact commun, afin que vous puissiez m’extorquer subtilement comme il se doit. J’ai une bonne tête de touriste corellienne, après tout !


De nous deux, j’ai clairement le plus l’air d’une touriste. Je suis humaine déjà, j’ai le style d’une pilote ou d’une baroudeuse et même avec la teinte brune de mes cheveux teintés, je ne fais pas locale. Je n’ai pas voulu l’être car je pense que mon jeu n’aurait pas été assez authentique pour convaincre, j’ai donc préféré endosser une couverture qui m’était plus familière, et de fait, sans doute plus efficace.


- Si ça te va, on se met en chemin dès qu’on a accordé nos violons concernant nos identités ? Histoire qu’on ne se contredise pas s’ils essayaient de fouiner d’un peu trop près.

Je n’ai pas vu les choses sous son angle d’approche, en effet. S’il serait aisé pour moi de me passer pour autre chose en endossant une couverture assez proche de ma réelle nature, il est difficilement applicable dans son cas pour toutes les raisons qu’il évoque. Je n’avais pas pris en considération, et je le regrette, à son appartenance à Zeltros. J’approuve donc ce qu’il propose alors qu’il poursuit.


- Alors, pour moi, je crois que le mieux c'est plutôt d'y aller avec une demi-vérité. En gros, la vérité, sauf que si on me le demande, je suis venu sur la planète pour me reposer et me détendre après quelques contrats et missions, ainsi que pour visiter la famille. Ce n'est pas la première fois que je viens ici pour cette raison et ce ne sera pas la dernière, alors ça devrait s'accepter facilement comme explication.


C’est simple et vu l’état d’esprit zeltron, y a de bonnes chances pour que ça passe sans qu’ils ne se posent trop de questions. Le côté mandalorien est intéressant pour sa neutralité envers les trois grandes factions galactiques, et donc sa présence pourrait baisser légèrement la vigilance de mes cibles. Son cas étant réglé, il me reste le mien à bricoler. Que pourrais-je donc être pour avoir l’air d’une touriste sans avoir l’air d’une cible à viser en priorité ? Si seulement moi doit changer son identité, on ne peut plus partir sur le cas assez classique et passe-partout d’un duo que j’avais envisagé. Je ne peux décemment pas me faire passer pour ce que je suis, à savoir une Jedi liée à la CorSec, ça soulèverait des soupçons et une attention que je ne désire pas. Non, il faut quelque chose de corellien, en tout cas quelque chose de la diaspora corellienne ou la Guilde Corellienne pourrait réaliser, qui ne soit pas trop éloigné de ma personnalité et de mes connaissances et compétences non-plus. Je ne donnerai pas le change sans cela et mes chances de convaincre seraient fortement amenuisées. Réfléchissons aux activités de mon camarade de mission… il est dans la chasse aux primes ? Très bien. Je peux me faire passer pour une chasseuse de primes ou mieux, vu qu’ils agissent souvent seuls, autant me faire passer pour une contrebandière. Cela me rattachera fort bien à l’histoire des épices. Je pourrai me baser sur ma courte expérience dans la contrebande juste avant ma « disparition ».


- Si tu veux en savoir plus sur les produits des épiceries, je connais un type qui pourrait nous aider, l'oncle Ovaut. Je précise tout de suite, ce n'est absolument pas mon oncle, aucun lien de parenté de près ou de loin. C'est un zeltron un peu particulier, déjà il veut que tout le monde l'appelle oncle Ovaut, peu importe la race et l'âge. Il travaille en partenariat avec deux ou trois épiceries. En fait, pour être précis, il est propriétaire d'une pâtisserie... et étant donné ses partenaires, je suppose que j'ai pas besoin de préciser le genre de touches ''magiques'' qu'il ajoute à ses créations. Ce type c'est une base de données vivantes sur les épices. En plus, l'oncle Ovaut est extrêmement pointilleux sur ce qu'il met dans ses pâtisseries et avec qui il fait des affaires. Du coup, il fait des recherches approfondit sur ses fournisseurs. Avec un peu de chance, si jamais nos quatre criminels ont tenté de faire affaire avec lui, il pourra nous donner des informations à leur sujet. Sinon, au moins tu pourras te renseigner autant que tu veux sur les épices de ton choix.


Un contact intéressant du coup, dont le profil peut matcher avec ce que nous cherchons en guise d’intermédiaire ou d’informateur. Une ombre de sourire amusé se glisse sur mes lèvres quand il se défend vis-à-vis de la dénomination d’Oncle Ovaut. Ce qu’il met dans ses pâtisseries ne me regarde pas, puisqu’il n’est pas une tête recherchée par la CorSec et qu’il ne cause de nuisance sur les mondes corelliens, il peut donc faire son commerce comme il l’entend tant qu’il ne dépasse pas certaines limites… disons, humainement et moralement éthiques. Le fait qu’il ne soit pas un revendeur m’intéresse aussi pour le bien de cette petite enquête mêlée de chasse aux têtes. S’il connaît bien sa marchandise ce sera déjà un plus, mais si en plus il peut nous aiguiller avec son carnet d’adresses et de relation… alors ce serait un bonus qui ne serait pas de trop non-plus. J’escompte bien entendu privilégier la collaboration, mais je dois mettre la main sur mes criminels d’une façon ou d’une autre. Je suis résolue à ne pas rentrer bredouille et les mains vides sur Corellia, question de dignité oblige.


- Enfin, c'est l'une des options. Une autre, c'est d'aller directement à diverses épiceries, en commençant par celles qui sont le moins susceptibles d'appartenir à nos cibles et de glaner des informations ici et là. Logiquement, ils ne peuvent pas réussir à tous cacher. Les gens parlent et écoutent, les rumeurs se répandent avec le temps... Autrement, reste à régler les détails concernant ta fausse identité, d'ailleurs.


Les deux options ne s’excluent d’ailleurs pas mutuellement, selon comment on procède et comment on se répartit les tâches, éventuellement. Délier les langues des concurrents et des différents fournisseurs peut être très lucratif et fructueux si on s’y prend correctement, sans lever les soupçons. Après, l’inconvénient c’est qu’il faudra distinguer l’info précieuse de la lie de la rumeur, et donc tamiser ce que nous récoltons comme renseignement en conséquence. Je range donc mon datapad précieusement dans mes affaires et termine mon verre de cocktail, sans perdre des yeux Talus.


- Allons au plus simple. Vu que tu garderas ta propre identité, autant que je me fasse passer pour une contrebandière de ta connaissance. Je serai Sulen Terrik, faisant partie de la diaspora corellienne et membre associé à la Guilde Corellienne. On s’est connus lors d’un contrat.  Je suis venue ici pour prendre du repos après une course, on s’est retrouvés ici et on passe du bon temps entre deux contrats. Les épices ont suscité mon intérêt, autant personnel que commercial d’ailleurs. Seulement, je ne cherche pas que de l’épice standard, mais ce qui se fait de mieux, ce qui est le plus juteux.


L’avantage de l’identité corellienne, si tu gères bien le coup, c’est que tu es passe-partout. Je repense aux éléments qu’il m’a apportée et lui suggères d’une voix à la fois assurée et très sérieuse.


- On garde l’option de se renseigner auprès des concurrents sous le coude, des fois qu’on ait pas ce qu’on veuille avec le premier plan. Elle est plus longue que l’autre, mais ça peut aussi permettre de croiser et de corroborer des infos pour éviter de se faire couillonner. Si ça te va comme façon de faire, on se lancera dès que possible. Comme on dit chez moi, le temps c’est de l’argent.  


On va voir si mon équipier de cette petite balade est partant avec ces deux propositions, ou s’il a autre chose à me proposer. Je peux être assez souple, surtout que dans le cas présent, je ne suis pas la locale des deux. Mes deux contraintes sont de ramener mes cibles vivantes et de ne pas les laisser filer. Après, si je peux choper un échantillon de la drogue pour la ramener comme cadeau de voyage à la CorSec ou en apprendre plus sur sa composition voire sur un antidote, ce serait du bonus.

L’avantage, c’est que je ne sors pas ce patronyme de nulle part. C’est une identité que m’a forgée la CorSec depuis des années lorsque j’ai dû opérer pour eux plus discrètement en me faisant passer pour une contrebandière. C’est aussi un alias que je continue ponctuellement d’entretenir, au grès de quelques missions, afin qu’il ne sonne pas trop creux pour des yeux un peu sourcilleux. Il y aura donc un peu de profondeur dans cette identité, bien que pas autant je m’en doute que pour les Ombres Jedi ou pour les agents du Renseignement des grands régimes. Mais bon, pour le genre de criminels auxquels j’ai affaire ici, cela fera très bien l’affaire sauf mauvaise surprise. Je garderai juste mon sabre-laser dissimulé dans la doublure de ma veste et je ressortirai plus mon côté corellien que celui Jedi.


- Bon, très bien, Sulen. Autant commencer si on veut en finir le plus rapidement possible. Au moins, le commerce de l'oncle Ovaut n'est pas très loin d'ici. On en a pour quelques minutes de marches. Après, on verra bien. Certaines épiceries sont à portée de marche également. D'autres par contre, il faudra absolument prendre un speeder ou un autre moyen de transport. Enfin, on avisera sur le moment, si on en arrive là.


Talus joue le jeu, ce qui me fait plaisir. Cela va nous faciliter un peu la tâche. Je l’écoute donc avec attention pour retenir les informations qu’il m’apporte sur notre futur interlocuteur et premier contact potentiel qui pourrait nous renseigner, d’une façon ou d’une autre. Nous fûmes bientôt sortis et partis dans la direction de la fameuse boulangerie et pâtisserie dont le mandalorien venait de me parler. Je profite du trajet pour m’imprégner des lieux, en essayant aussi de ne pas me laisser être influencée par les phéromones particulières dégagées par la population Zeltrone, et de fait, très concentrée ici. En fait pour l’instant ça va, ça me met juste de bonne humeur, mais comme l’alcool, ça peut être trompeur. Va falloir que je sois vigilante lorsque je commencerai à me sentir trop influencée. Si d’un côté on sera moins incognito que ce que j’avais envisagé, de l’autre, Talus en tant que figure familière les aidera peut-être à être un peu plus bavards. Nous verrons bien vers quoi cela nous emmène.

Voyage au pays des merveilles… tel était le nom de l’enseigne où nous nous sommes arrêtés. Un nom assez amusant en soi, à la fois très innocent et très révélateur, un jeu de mot plutôt bien trouvé.


- C'est Dexa qui m'a fait découvrir cet endroit. Je suis déjà passé devant à de nombreuses reprises et avant qu'elle ne m'apprenne la nature de ce commerce, avec un tel nom j'étais persuadés que c'était une boutique de bonbons, de jouets ou d'autres produits destinés aux enfants.


Pas mal de bouche-à-oreilles, donc… ma foi, pourquoi pas. Je vais voir si cette boutique est à la hauteur des mille-et-une merveilles qu’elle laisse présager… mais non, pas pour goûter enfin ! Pour qui me prenez-vous ? Pour ce que je suis, me diraient certains culottés ? Disons… on verra si j’ai le temps après la mission d’en rapporter avec moi. C’est pour l’aspect culturel, mes bons amis ! Et peut-être aussi pour dérider un peu le Conseil Vert après le débriefing auquel je devrais me coller à mon retour. Ne serait-ce pas un petit tour amusant, après m’être assurée qu’aucun doyen vert n’ait de problème de santé interdisant la consommation de telles douceurs facétieuses ? Ou même à mes deux chers frangins ou à ma tendre mère ? Pour l’heure, la mission prime, et je ne me laisserai pas être déconcentrée.

Je jette un regard curieux à la disposition de l’intérieur de la boulangerie. Je note la présence d’un couloir menant à différentes salles privées, dont une était occupée par un client visiblement hilare. Je m’intéresse ensuite aux présentoirs et aux différentes douceurs qu’ils proposent, remarquant la présence d’un présentoir plus éloigné avec des pâtisseries et biscuits aux couleurs plus vive et presque innocentes. Pour le présentoir qui me fait face, je note avec amusement les noms des pâtisseries. Quelqu’un a de l’humour… et ce n’est pas difficile de déduire lesquelles sont réservées aux adultes.

Je laisse Talus engager la conversation avec le vieux Zeltron qui se révèle vite être le patron des lieux, auquel je donnerai environ la soixantaine à vue d’œil, dégarni de tout cheveu et quelque peu ridé. Un sourire clairement amusé se tisse sur mes lèvres alors que le patron révèle que le mandalorien est lui-même client de la boutique et vu le nom des douceurs qu’il lui propose, je n’ai pas un grand effort à faire avant de deviner qu’il consommait de temps à autres des épices. Il fera un bon associé. Du temps où j’étais Padawan, les rares fois où Jaylen avait dû se rendre sur Zeltros, il avait toujours refusé de me ramener les pâtisseries épicées, même une fois majeure. Il est trop sérieux parfois, franchement… je lui en ramènerai une ou deux pour la peine, sans lui dire au préalable qu’elles sont épicées bien-sûr.


-En fait, ce n'est pas tout à fait pour ça que je suis là, oncle Ovaut. Laisse-moi te présenter quelqu'un. Une amie... Je suppose qu'on peut dire ça oui, Sulen Terrik.

-Bonjour, bienvenue au Voyage au pays des merveilles. N'hésitez pas, appelez-moi oncle Ovaut, comme tout le monde.  Vous vous connaissez comment, au fait ?

-C'est une longue histoire. Pour bien comprendre, il faut que je te donne un peu le contexte de la chose, il y en a pour quelques minutes et-

-STOP! Je préfèrerais la version courte, avec mes gâteaux qui attendent dans le four et des clients qui peuvent arriver n'importe quand.

-Ok, on s'est connu lors d'un contrat.

-D'accord. Alors qu'est-ce que je peux faire pour vous ?

-On aurait quelques questions?


Je laisse Talus gérer la conversation pour l’heure, préférant écouter avec attention ce qui s’en dégage, après avoir retourné avec cordialité et entrain les salutations du gérant. Deux clientes, une mère et sa fille nautolanes, entrent dans la pièce et interrompent temporairement notre conversation. Au moins, le patron a évité le drame en réorientant aimablement la petite et sa mère vers le bon présentoir, et en leur faisant une offre plutôt commerciale. Un bon commerçant donc, qui sait parler à ses clients et s’adapter, je n’en doute pas, en conséquence. Mère et fille repartaient avec chacune leur consommation – les premières épicées et la dernière simplement sucrée – et je saluai d’un sourire joyeux et d’un signe de la main l’enfant, qui me salua en retour avec un grand sourire espiègle.  Je reprends ensuite un peu de sérieux alors que le patron revient vers nous et reprend la parole.


- Pardon, on en était où?

- Je me posais des petites questions. Voyez-vous, je sillonne pas mal dans la galaxie et je connais l’espace corellien comme ma poche, mais je n’ai jamais eu le temps de me poser longtemps sur Zeltros alors je me disais que j’allais en profiter cette fois pour découvrir le coin et ses spécialités. C’est alors que j’ai croisé ce bon vieux Talus, qui avait du temps devant lui également et qui s’est proposé de me guider. Il m’a parlé de votre boutique, et forcément, ça a piqué ma curiosité.


On va voir comment il réagit, mais mon amabilité et mon enthousiasme ne sont pas feints. La curiosité n’est certes pas mon principal motif, mais il n’en reste pas moins que je suis sincèrement curieuse de connaître un peu mieux le personnage au grès de ses réactions et précisions. N’étant pas douée en mensonge, je ne m’aventure par sur la flatterie servile et je préfère rester sur le naturel et la simplicité sans m’embêter. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?

L’enquête n’est pas quelque chose qui s’improvise, si on veut la mener correctement. Il faut avoir des bases en interrogatoire, des facilités de communication et plus généralement d’interaction avec autrui. Il n’est pas prudent de poser d’emblée des questions très précises, car trop de précision pourrait lever des soupçons dont on pourrait bien se passer, tout comme il ne faut pas rester trop sur des généralités, enfin trop longtemps. J’entremêle donc des éléments de fiction à des éléments de la réalité, afin que Talus puisse éventuellement se raccorder dessus sans trop de difficulté. Je teste mon interlocuteur dans le même moment, mes yeux gris-bleus rivés sur lui et attentifs derrière mon attitude débonnaire.

Le vieil homme est prudent, et s’interroge sur ma curiosité en se tournant vers le mandalorien. Heureusement, ce dernier sait rebondir et apporte quelques éléments de contexte nouveaux pour enrichir notre background. Je note la mention de l’échange commercial qu’il mentionne, afin que je puisse la prendre en compte de mon côté. Il amène la question de la qualité médiocre de marchandises, ayant pris en considération les éléments de contexte que je lui avais suggérés. Très bien. Un sourire aimable et enjoué aux lèvres, j’écoute donc avec grande attention la réponse de l’Oncle.


- Il a raison. Avec moi, c'est le bien-être du client avant tout. Alors, je ne mets pas n'importe quelle merde dans mes créations. Chacun de mes fournisseurs est trié soigneusement par mes soins. Si c'est dans un de mes gâteaux, c'est parce que je sais que je peux faire confiance dans la qualité des fournisseurs et des ingrédients qu'ils m'ont vendu. Cela s'applique aussi bien pour des trucs aussi simples que le sucre, qu'aux épices même. Je ne sais pas pour vous, mais dans mon cas, c'est une politique personnelle que j'ai implanté après avoir appris à la dure.


Nous avons donc réussi à le flatter en douceur, naturellement. Pour l’heure, ça va dans le sens que j’espérais. C’est un commerçant, donc il va logiquement défendre les mérites de ses productions et le soin qu’il prend à choisir les produits qu’il utilise pour les confectionner. Indirectement donc, je comprends qu’il a une liste de fournisseurs qui pourraient soit nous rapprocher d’autres fournisseurs, soit connaître des fournisseurs moins scrupuleux ou moins bien réputés en interne dans leurs réseaux. C’est un petit monde le marché local, il y a toujours moyen d’obtenir une info en s’adressant à quelques personnes. J’acquiesce de la tête quand il parle de la leçon apprise à la dure de bien savoir choisir ses interlocuteurs et ses fournisseurs. C’est une leçon à laquelle j’avais aussi été confrontée lors de mes mois « d’errance » dans la galaxie à agir en tant que contrebandière sous contrat, en vérité.


- C'est pas l'âge qui m'a rendu chauve, mais un accident. J'étais dans la vingtaine, j'adorais faire de la vitesse. C'était une course qui aurait dû être comme toutes les autres. Je m'étais pris un peu d'épice avant le départ, rien de délirant ou qui donne des hallucinations. Juste de quoi donner un petit coup de fouet pour être bien alerte. Allez savoir ce qui a été mélangé dans ce truc, mais l'important c'est qu'en plein milieu de la course, je me suis mis à voir des choses... J'ai percuté un arbre à pleine vitesse et mon speeder s'est enflammé. Brûlures au deuxième et troisième degré un peu partout. Des longues séances en cuve à bacta m'a remis sur pied, mais le bacta ne permet pas de réparer les racines de cheveux. Ça m'a appris à faire attention à ce que je prends, en toute chose. Et puis bon, j'ai déjà de la chance d'avoir survécut.


J’écoute l’anecdote qu’il raconte afin d’illustrer son propos. C’est assez fréquent comme procédé, et je joue avec bonne volonté le jeu de la bonne auditrice attentive et intriguée. Avant que je ne puisse renchérir cependant, une tonalité attire l’attention du vieux commerçant en arrière-boutique et Talus en profite pour me faire une petite suggestion discrètement, à savoir essayer de se renseigner sur une éventuelle liste que le commerçant aurait pour aiguiller nos recherches et écarter quelques possibilités. J’ai à peine le temps d’acquiescer que le vieux Zeltron est de retour et reprend la parole.


- Tout chaud sortit du four. J'y pense Talus, si tu en veux un, je te fais un rabais, pour la publicité. Et vous, Sulen ? Intéressée ?


Je n’ai cependant pas le temps de lui répondre aimablement que je vais considérer son offre que Talus enchaîne en réorientant la discussion sur le sujet qui nous intéresse plus particulièrement. Je l’aurai fait sans cela, mais puisqu’il le fait de sa propre initiative, je vais le laisser mener pour l’heure.


- Je vais y penser. D'ailleurs, je me demandais, pour tes fournisseurs de confiance, ça fait longtemps que tu fais affaire avec eux.

- Ça dépend, pour les plus anciens, ça doit faire environ 25 ans. Pour les plus récents, je dirais... environ 6 mois. Des gens biens, une bonne offre de diversité.


Cela nous donnerait un bon panel déjà, de ce que j’en entends. Des vieux de la vieille avec des jeunes pousses du marché. Dans le premier cas, des gens robustes dans le métier et dans le commerce, qui se sont bâtis leur réputation avec le temps… mais qui ne sont pas à l’abri de cacher quelques combines. Dans l’autre cas, des plus récemment arrivés qui essayent de percer malgré la concurrence, mais qui se sont déjà assez bien développés pour traiter d’affaire avec le vieux Zeltron. La variété lui permet sans doute d’éviter une situation de monopole et de mettre en concurrence ses fournisseurs, afin d’obtenir un meilleur prix ou les épices d’une meilleure qualité selon ses besoins spécifiques.


- Depuis le temps, tu as dû en voir beaucoup.

- Oh ça oui, des bons, des moyens avec du potentiel et des exécrables. En général, les troisièmes font soit rapidement faillite ou ils exportent leur cochonnerie ailleurs dans la galaxie. Même s'il tente parfois le commerce avec des commerces locaux. Excusez-moi, une seconde.


Je n’ai une fois de plus pas la possibilité immédiate de renchérir puisque le commerçant s’absente pour réarranger ses rayons de comptoir, selon une logique que je ne cerne pas encore. Au moins, cela me laisse quelques instants pour songer à ma question et surtout comment il m’est possible de la formuler sans lever de soupçons. Je dois rester dans mon rôle de contrebandière curieuse qui se renseigne sur les produits locaux et les éventuels commerces qui pourraient l’intéresser pour de nouveaux marchés. Je saisis au vol l’opportunité qui m’est présentée dès lors que le boulanger-pâtissier revient vers nous.


- Pourquoi pas, histoire que j’en fasse profiter la famille. Vous me feriez un prix si j’en prends une quinzaine, dont six sans « poudre magique » pour les gamins ?


Naturellement, le vieil homme sera plus enclin à être bavard si j’achète quelque chose de sa boutique, cela mettra de meilleures relations. Et puis, si le prix qu’il me propose est correct, cela me fera un souvenir pour mes proches et mes collègues. Je ne vais pas donner à la petite Adea des trucs avec des épices, ou je suis à peu près sûre que Corran et Ellen auraient très vite ma peau, sans parler de Dalek. Puis Foutreforce, je suis quelqu’un de responsable. J’en profite pour poursuivre, mine de rien.


- Je connais des contacts qui payeraient grassement pour avoir des épices de bonne qualité. C’est devenu un parcours du combattant de trouver des fournisseurs décents et fiables. Vous avez des fournisseurs à me recommander, ou d’autres que je devrais éviter ? Après tout, personne n’est mieux placé que des locaux pour savoir ce qu’il y a de mieux sur le marché local. Je ne m’attends pas que l’info soit gratuite aussi je peux mettre le prix pour l’avoir… en sachant que si elle s’avérait fausse, je viendrai vous en demander des comptes. J’ai moi aussi une réputation à tenir pour mon commerce.  


En tant que contrebandière, j’aurai eu effectivement une réputation de sérieux à garder sans quoi je ne trouverai plus de clients qui accepteraient mes courses et donc je n’aurais plus de contrats. C’est une réflexion logique et une demande naturelle, pour qui veut vivre de sa profession. Ma voix n'est pas menaçante, toujours très décontractée, mais ferme pour décourager toute tentative de me la faire à l'envers.

Ah parfait, le message est passé pile comme je le voulais ! Je n’ai pas eu besoin de faire de menace plus précise qu’il a compris que j’étais sérieuse et qu’il l’a bien pris, prenant le parti d’en rire. Je ne m’en vexe pas pour autant, pourvu qu’il fasse attention à ce que j’ai dit et qu’il en est conscient.


- Je l'aime bien ton ami, elle me fait légèrement penser à ma sœur. Si tu as l'intention de lui mettre la bague au doigt, je te conseille de pas attendre trop longtemps, un autre gars pourrait tenter de la piquer.

- Comme j'ai dit, on est ami, on est pas amants ou quoique ce soit de ce genre.


Un sourire amusé se tisse sur mes lèvres. Oh oui, si sa famille côté beskar de la Force est similaire à l’état d’esprit mandalorien le plus courant, c’est clair qu’ils ne verront pas d’un bon œil qu’un mando’ad veuille se marier avec une utilisatrice de la Force. C’est donc une bonne excuse de Talus, tout en n’étant pas un mensonge qui plus est. Il n’y a pas l’ombre d’un doute sur cette question. Quant à moi… j’ai déjà trouvé chaussure à mon pied, et je suis fort contente de ma relation avec ce cher hapien à la langue bien acérée et bien pendue. Je n’ai pas besoin ni, surtout, envie d’aller voir ailleurs. Si j’ai autrefois papillonné et eut plusieurs expériences en la matière, je suis désormais casée.

Pour en revenir à nos moutons, je suis tout à fait d’accord avec le rabais de 15% qu’il me propose. Ça me convient. En demander plus serait être un peu gourmande, et je ne suis pas venue marchander.  Pour ne pas me griller, je décide de rester simple sur les glaçages, la simplicité était parfois fort bien.  Je ne sais pas en outre si nous aurons le temps de revenir à la boutique par la suite, alors autant être prudente. Je laisse donc le vieux Zeltron reprendre la parole, dont la langue semblait s’être déliée.


- Sinon, pour ce qui est de mes fournisseurs, je peux bien vous en recommander trois particulièrement. Tout d'abord, il y a les frères Zaun. Deux sullustéens auprès desquels je fais une quantité de mon stock. Leur truc à eux, c'est le biologique. Que ce soit les épices issus de plantes ou bien d'insectes, ils le font aussi naturellement que possible. Aucun engrais chimique, que du composte et de l'eau pure. Ils sont plutôt sympathique. Il faut juste faire attention aux périodes de l'année. Comme c'est naturel, il y a évidemment certains moments où la production est en baisse. Ensuite, vous avez un Duros, Gol Jo. Très bonne qualité aussi, par contre il ne vend aucun produit composé uniquement d'une seule épice. Il fait des mélanges qu'il appelle les surprises du chef. Quand vous commandez auprès de lui, il demande l'espèce à qui le produit est destiné et les effets non-désirés. Du coup, avoir de consommer, impossible de savoir vraiment l'effet que vous allez obtenir avec ses produits. Finalement, je peux vous conseiller Bammia, une wookie qui est en affaire depuis environ 6 ans. Méfiez-vous de son humour par contre. La première fois que j'ai fait des affaires avec elle, elle m'a fait essayer une mousse, puis de me dire que c'était issu de sa fourrure, avant de rire car c'était une blague. Elle fait pousser toutes sortes d'épices exotiques. D'ailleurs j'y pense, inutile de me donner quoique ce soit pour ces informations. Contentez-vous de leur dire que vous avez entendu parler d'eux par moi.


Je note mentalement tous ces noms. Ils ne sont pas liés à mon enquête, mais qui sait, des fois même les meilleurs peuvent cacher quelques ombres. Cela fait aussi des personnes que l’on pourra éventuellement aborder pour avoir quelques informations au cours d’une discussion informelle. Les frères Zaun, des Sullustéens, Gol Jo, un Duros, et Bammia, une Wookie. Cela nous fait donc quatre contacts additionnels potentiels. J’écoute avec attention chaque détail qu’il consent à nous apporter. J’entends aussi qu’il en a d’autres, mais comme je disais, ce ne sont pas eux qui m’intéressent le plus. Talus pose une excellente question sans même que je n’ai à le faire, apportant de nouvelles précisions.

Je m’en doutais pour le protectionnisme local. On est un peu pareils, nous autres corelliens. On est toujours un peu protecteurs sur le marché local et même si nous sommes une véritable plateforme commerçante, il y aura toujours des choses qui sont vendues sur un commerce très local. Je note pour l’histoire du bannissement et des cas de faillite. J’espère que ce ne sera pas le cas dans l’affaire de nos quatre lascars. J’écoute l’histoire du Dévaronien. Ah ça, les membres de cette ethnie n’ont pas bonne presse, et ont beaucoup de représentants dans les sphères de la criminalité, y compris sur Corellia.

Néanmoins, l’anecdote suivante retient toute mon attention, se rapprochant de notre affaire en cours.


- Également, il y a ce nouveau groupe qui a voulu faire de moi un de leur client, il y a quelques temps. Leurs épices étaient plus du poison qu'autres chose, de mon point de vue. Ils doivent probablement être quatre... peut-être plus.


Quatre ? Ce chiffre m’interpelle. Je tends donc l’oreille encore plus attentivement à leur discussion.


- Euh, pourquoi doivent probablement être quatre?

- Quand ils sont venu me rencontrer, ils étaient trois, un humain, une zabrak et une zeltronne. Ils m'ont fait leur petit discours de vente et m'ont donné un échantillon. Quand j'ai refusé, ils ont tenté de me convaincre de nouveau. Ils sont partis fâchés après que j'ai de nouveau refusé et ils ont appelé une autre personne par holo, juste devant ma boutique. Je n’ai pas eu l'occasion de voir qui c'était, mais c'était clairement un homme et il les a engueulés en basic. Si je me souviens bien, ils disaient avoir repris le commerce à côté du restaurant Le navire échoué... Comment ça s'appelait avant déjà ?


Oh, les espèces et les profils collent bien dites-moi. Et en plus il aurait un cinquième larron auquel on pourrait remonter ? Oh, cela m’intéresse bien même si je tâche de ne pas le montrer. Je ne perds pas en tête le personnage que je suis censée incarner, à savoir une contrebandière corellienne. Un homme, qui engueule en basic… dommage qu’il n’ait pas eu des informations sur son espèce ou ses traits. Pour le restaurant, je pense que Talus pourra m’y emmener vu qu’il connaît bien les lieux. Je me contente donc de commenter d’un ton débonnaire, sans prendre la peine de cacher mon accent corellien.


- Si ça vous revient, ça m’intéresse. Je saurais comme ça qui je dois éviter. Tout comme je sais maintenant à qui je peux m’adresser et qui conseiller à mes clients. S’ils sont contents, ça promet de belles courses à la clé et de beaux profits à faire. Tout le monde y sera gagnant.


Et naturellement, même si je ne le dis, évidemment qu’il y trouvera aussi son compte puisque la contrebandière fera de la publicité tant pour ses produits que pour ses recommandations fiables. Je le laisse donc réfléchir pour voir s’il arrive à se souvenir des lieux, nous ne sommes pas aux pièces.

Que voulez-vous, je sais que je dois être sérieuse mais je n’ai aucune envie de revenir les mains vides lors de ma prochaine visite à mon frère Corran et à Ellen. Leurs deux petites têtes blondes seront contentes de voir que je leur ramène des cadeaux qui plus est « exotiques » car étrangers à Corellia. Enfin, l’une des deux gamines est devenue un peu grande quand même, … mais quand même. Ses parents me tueraient si je venais à avoir la folle idée de lui faire goûter d’une façon ou d’une autre aux épices… et je suis responsable, quand même. Cela peut devenir vite addictif, ces petites substances-là. J’observe avec appréciation que le commerçant prend soin de bien distinguer les biscuits « épicés » des pâtisseries réservées aux enfants, comme cela il n’y aura pas moyen de confondre les deux lots. Talus se décide à également passer commande de son côté, alors que le vieux Zeltron reprend.


- Désolé, mais j'ai beau réfléchir, ça ne me revient absolument pas. Tout ce que j'arrive à me souvenir, c'est que c'était une boutique particulièrement appréciée des enfants qui étaient en affaire, avant d'être remplacé par ces escrocs. De toute façon, vous ne devriez pas avoir de mal à la trouver. Talus connait bien ce coin de Zeltros et leur ''boutique'' a un bouquet de plantes diverses comme emblème. Ils doivent probablement tenter de faire croire que c'est ce qu'ils utilisent pour faire leurs épices. Je trouve ça pathétique, un bon homme d'affaire ne devrait jamais à avoir à mentir à ses clients. Certains pourront dire que nombreux sont devenus extrêmement riches en racontant de la merde, ça ne change pas le fait que ce sont des connards. Un jour où l'autre, il y a toujours un retour de bâton.


Dommage, on aura essayé au moins. Une boutique appréciée par des enfants qui a été remplacée par un commerce illicite… c’est regrettable, mais malheureusement cela n’a rien de nouveau. J’ai souvent remarqué que les commerces « innocents », comme ceux vendant des hololivres et autres objets culturels, des jeux de société ou autres jeux ne durent souvent pas longtemps.  D’un côté, cela répond à une logique certes froide, mais intelligible sur le plan commercial : ce sont les activités les plus en vogue et les plus lucratives qui prennent le pas sur les meilleurs emplacements et prolifèrent. C’est d’autant plus vrai sur des mondes très touristiques ou très urbanisés, et un œil alerte sait les repérer. Un retour de bâton, hein… oui, d’une façon ou d’une autre, chacun finit par écoper de ce qu’il mérite. Nulle action n’est sans conséquence… et j’imagine que cela vaut aussi dans le monde de la pègre.

Talus a la bonne idée de suggérer la livraison, je le laisse donc mener la conversation pour l’heure et me contente d’y prêter une oreille attentive. Très bon prétexte d’ailleurs que de jouer sur la réputation des mandaloriens et le risque encouru ici par des étrangers tels que je le suis sur Zeltron. Au moins, on n’aura pas les paquets dans les pattes mais cela me permet de ramener quand même quelques souvenirs. Je pense avoir fait une bonne affaire, vu les informations que nous avons obtenues. Je ris de bon cœur face à sa plaisanterie sur la réputation des mandaloriens, avant que nous ne quittions les lieux. Ce n’était pas une perte de temps, songeais-je tout d’abord dans le silence de mes pensées.


- Je connais le restaurant dont Ovaut à parler, ce n'est pas à côté, mais ça se fait bien à pieds. Si l'occasion se présente, il faudra que je te fasse essayer ce restaurant. Ils ont des plats, c'est fou. Il y en a même certains où ils te font choisir ton poisson encore en vie dans un aquarium.

- Oh, tu sais que je suis toujours partante pour tester de nouvelles saveurs ! C’est la cerise sur le gâteau des voyages, c’est que tu peux découvrir tout un tas de nouvelles choses et tout un tas de gens. Tant que tu peux retourner au bercail de temps à autres, cela va de soit.



Je ne pourrais jamais me passer de Corellia et des Quatre autres Frères de Correl bien longtemps pour ma part. Ne pas pouvoir m’y rendre pendant cinq années avait déjà été un supplice, alors ne plus jamais m’y rendre… cela me donne des frissons d’horreur juste à la pensée. Personnellement, je ne suis pas contre de me rendre à pied sur place. J’ai toujours aimé me dégourdir les jambes et si j’ai l’air totalement débonnaire, je suis en réalité tout à fait attentive à mon environnement, à mon entourage et à la Force… et c’est ce qui me permet, au milieu du marché en plein air que nous traversons, de sentir une présence animale en approche rapide vers nous. Je fais aussitôt volte-face, une main posée sur la poignée de l’un de mes pistolets-blasters corelliens lorsque mes yeux bleus-gris repèrent la silhouette d’un Vornskr. Qu’est-ce que cette bestiole fait ici ? Heureusement, ce qui émane de sa présence n’a pas l’air franchement hostile, ce que l’attitude de la créature envers Talus confirme bien assez tôt. J’éloigne donc ma main de mon blaster et observe, curieuse, la petite scène de retrouvailles. Sacré bestiau, bien plus grand que moi et je lui donnerai près de deux mètres de hauteur. Si je regarde de plus près d’ailleurs, je pense qu’il est domestiqué : il lui manque la typique queue bardée de piquants venimeux. On croirait ici presque avoir affaire à un canidé domestique, pour être franche. Bon, pas de danger immédiat à l’horizon. Amusée et intriguée, j’observe le mandalorien et l’animal.


- C'est bien, Jekk. Ça c'est un bon vornskr. Si tu es là, ça veut dire qu'elle ne doit pas être bien loin non plus.


« Elle » ? Je me demande bien de qui il parle. Je ne pense pas qu’il s’agisse de la Zeltronne qu’il m’avait présentée un peu plus tôt au bar, il me l’aurait dit directement sinon. Le Vornskr, Jekk, a l’air de se tenir tranquille, désormais assis et satisfait des caresses que lui apporte le mandalorien. Une Zeltronne s’approche bientôt de nous, plus âgée si j’en crois les mèches grisées glissées dans sa chevelure sombre et les rides qui ornent son visage encore fort beau et sa silhouette fort gracieuse. Quelqu’un de la famille de notre cher ami mandalorien ? Je serais bientôt fixée, dans tous les cas. Ca ressemble en tout cas à l’accueil d’un membre de la famille, et j’admets que cela fait assez chaud au cœur.


-Talus, tu aurais dû me dire que tu venais sur Zeltros.

- Salut, grand-mère.


Grand-mère ? Fichtre ! J’aurai bien aimé que ma propre grand-mère soit aussi bien conservée, même si elle m’engueulerait en bon Vieux Corellien qui se respecte si elle m’entendait persifler de la sorte. Je soutiens le regard de la digne Zeltronne, sans hostilité et sans mépris mais avec affable aplomb.


- Grand-mère, voilà mon amie, Sulen Terrik. Sulen, je te présente ma grand-mère du côté de mon père, Meera Nyx. Et ici, c'est Jekk.


Naturellement, je tends une main vers la grand-mère de mon ami mandalorien et prend la parole.


- Bonjour, madame Nyx ! Vous pouvez m’appeler Sulen. Talus est un vieil ami.


Sans quitter des yeux la nouvelle venue, je me penche vers le Vornsk et prudemment, je viens lui caresser la tête, confiante en moi. Je n’ai pas peur des animaux, en règle générale, sauf quand ils font parti d’un syndicat pro-animalier qui les dresse pour massacrer des gens. J’espère que cela ne sera pas un contretemps dans nos recherches, mais on peut difficilement filer à l’Alderaanienne.

C’est bien une philosophie zeltronne ça, assez humaine en fait, dans le fait de refuser d’accepter l’effet de l’âge et l’âge avançant. Sans doute les Zeltrons s’en sortent mieux que nous dans cette affaire, nous autres humains. Et encore, je sais que les utilisateurs de la Force sont quelques peu favorisés en termes de vieillissement, y compris ceux qui comme moi, appartiennent à la race humaine. Naturellement, si nous ne mourrons pas accidentellement, de la maladie ou autres aléas extérieurs, nous vivons généralement un peu plus longtemps que la moyenne et nous vieillissons aussi un peu plus lentement. Mais pour ça, encore faut-il que nous vivions jusqu’à notre espérance maximale de vie et que nous atteignions l’âge de la retraite, et que nous acceptions aussi de nous retirer de la vie active de Jedi. Un peu comme mes grands-parents paternels, d’anciens Jedi Verts, l’ont fait après de longues années de service en tant que Chevaliers Verts. Encore faut-il, comme je disais, réussir à vivre jusqu’à ce point.

Ça commençait trop bien. Fallait forcément qu’il y a ait un souci et pour une fois, c’est ma maladresse qui est en cause. FoutreForce, j’entends déjà le sermon prochain de Jaylen des années-lumière à la ronde, dès l’instant où j’ai fait malencontreusement la bourde en relâchant trop ma concentration. Par Corell, c’est sûr que même si je suis désormais Maître Jedi Vert, le vieil Iridonien va me tirer les oreilles. Le pire est que je ne pourrais même pas le lui reprocher, en fait. Je vocifère moi-même, intérieurement, de ma propre bêtise du moment. Eh voilà, à trop laisser le naturel s’exprimer, j’en oublie la prudence la plus élémentaire. Comment j’ai pu oublier, dans la fougue du moment, les particularités des Vornskr, même domestiqués ? Et va falloir rattraper ça. Du nerf, Fern, assume ! Ça ne va pas se faire tout seul ! Heureusement, Talus mieux informé concernant ce spécimen spécifique vient à mon aide et calme la créature. Je tâche de garder mon propre calme malgré mon mécontentement envers ma propre bourde et flatte quand même la tête de la créature, plus vigilante. Je ne peux même pas en faire ma bouc-émissaire malgré ma frustration personnelle, elle est ce qu’elle est, et j’ai été trop tête en l’air. Ce n’est pas de sa faute que de répondre à son instinct, aussi j’essaye de ne pas lui en tenir rigueur. Je me force à la discipline. Ce n’est pas le moment, mais celui de réparer les pots que j’ai cassés.


-Intéressant, Vous êtes donc une…

- Une amie, absolument.

-En fait, je voulais dire une-

- Marchante indépendante ? Contrebandière ? C'est une corelienne, sur cette planète c'est assez banal et commun, rien de bien méchant.


J’aurai pu dire aussi ancienne Jedi, ça aurait pu passer crème. Ou que j’étais juste sensible à la Force mais non formée, ce qui a pu faire réagir la créature. Ce sont mes deux options. Après tout, même si ce n’est pas fréquent et bien sûr ce n’est pas ébruité, il est déjà arrivé que des membres de l’Ordre Jedi décident de rendre, figurativement, leur sabre-laser et de quitter l’Ordre Jedi, par exemple pour regagner la vie civile, s’engager en politique sans forcément être des Dames et Seigneurs Jedi, ou joindre entièrement les rangs de l’armée. Et y a aussi les cas qui ont mal tournés, mais ça n’arrangerait pas mes affaires, encore moins même. Bon, la grand-mère a l’air de ne pas insister et Talus connaît mieux que moi la vieille dame, aussi je vais me fier à son flair pour gérer ce problème spécifique.

Talus arrive donc, connaissant bien sa propre aïeule, à noyer le poisson et à l’interroger sur ses propres raisons de venir au marché. Je suis la conversation d’une oreille distante mais attentive, réfléchissant à comment je peux m’y prendre pour éviter d’aggraver ou de réitérer ma bourde de la journée. On ne peut pas souffrir de perdre de temps malheureusement si on ne veut pas perdre notre piste. Je flaire le sujet délicat quand la grand-mère suggère fortement que nous passions le dîner et la nuit chez elle. C’est mauvais, ça limiterait nos actions et notre liberté de communiquer sans risquer d’être écoutés. Je ne suis pas habile en conversation subtiles, bien hélas, ce n’est pas mon forte. Je ne suis pas une Jedi Diplomate, crénom de Force !


- Il y a l’air d’avoir pas mal de coins sympas à visiter par ici, et le temps file à une vitesse ! Je ne peux pas rester très longtemps sur place vu que faudra que je retourne à mes courses, alors on optimise le temps dispo.  Mais on vous préviendra si on a le temps de passer.


Quitte à ce que ce soit un impératif et une perte de temps inéluctable, je préfère que cela survienne après notre chasse ou en tout cas que l’on soit sûrs que nos oiseaux ne puissent pas s’envoler du nid. Je ne veux pas compromettre nos chances de les coffrer et si on doit honorer une obligation familiale, mieux vaut que ça se fasse après. Ma voix n’en reste pas moins cordiale.

Bon, on dirait que j’ai réussi à noyer un peu le poisson dans l’eau pour une fois. Il fallait bien que je rattrape ma bourde concernant le Vornsk de compagnie après tout. Cela ne veut pas dire qu’on soit pleinement sorti d’affaire si j’en crois son injonction à mon ami mandalorien à la prévenir si nous venions à avoir le temps, mais cela nous donne autant une porte de sortie immédiate que prochaine. Force que cela fait du bien d’avoir affaire à des gens simples – pas dans le sens d’imbéciles hein, dans celui de directs – histoire de changer un peu des babillages insupportables de politiciens. Je laisse Talus gérer les aurevoirs avec sa grand-mère, tandis que j’interromps mes caresses au Vornskr presque à regret. Je n'en veux pas à l’animal, il n’a fait qu’écouter son instinct et que j’ai été imprudente pour ma part. J’entends déjà Jaylen me répéter qu’il me l’avait bien dit que mon inattention en cours me jouerait des tours un de ces quatre… on ne va pas relater cet incident en détail lorsque je ferais mon debriefing. Enfin, je ne le cacherai pas non plus, ça ne sert à rien de mentir, mais je ne m’y attarderai pas pour sûr. Sur une toute autre note, elle est quand même vraiment bien conservée sa grand-mère, gracieuse dans ses gestes. Si seulement je pouvais aussi bien vieillir quand je serais plus âgée, avec les crins argentés !

Nous nous sommes remis en route une fois que la Zeltronne et son garde du corps canin soient partis dans la direction opposée. Nous reprenons notre itinéraire dans un silence plutôt confortable jusqu’à cheminer dans une ruelle déserte, sans que personne ne puisse surprendre notre conversation.


- Tu l'as probablement compris, mais Jekk t'as grillée auprès de ma grand-mère. Elle me connait bien et sait par élimination que tu ne peux pas être chevalier impérial ou sith. Les premiers car c'est à peine si j'en ai croisé et les seconds car ce n’est pas le grand amour. Je ne lui ai jamais caché que je m'étais fait des amis parmi les jedis, mais sans rentrer dans des détails plus précis. Bon évidemment, elle ne peut pas savoir que tu fais partie des verts, mais quand même.


Ma fierté est assez piquée de ce rappel de cette bourde de ma part, et je secoue légèrement la tête sans pour autant protester et chercher à nier. Je résorbe mon inquiétude en faisant un constat relativement pragmatique : être sensible à la Force ne veut pas forcément dire être un membre de l’Ordre Jedi, de l’Ordre Sith ou des Chevaliers Impériaux. Il y a beaucoup de sensitifs à la Force qui n’ont jamais été formés, parce qu’ils n’ont pas été trouvés, parce que leurs familles ou eux-mêmes ont refusé d’être séparés, parce que leur sensibilité à la Force n’était pas assez forte ou juste par propre choix. Ma couverture de contrebandière ne me semble pas compromise si je joue bien mes cartes, je peux m’inspirer de l’exemple de mon plus jeune frère Hal. Il faudra juste que je fasse gaffe la prochaine fois que nous aurons affaire à sa grand-mère, afin de ne pas trébucher une fois de plus de la sorte.


- D'ailleurs, pardon de ne pas t'avoir prévenu avant pour Jekk. Il n'est pas méchant, mais à l'habitude de réagir ainsi face à des utilisateurs de la Force qui s'approche un peu trop près. J'en sais quelque chose, j'ai été le tout premier qu'il a attaqué. Il était encore très petit à ce moment-là, mais tout de même. Au moins, grand-mère sait comment le contrôler pour éviter les incidents et j'ai appris aussi. Pas besoin de t'inquiéter, il ne va pas recommencer, maintenant qu'il te connait. J'y pense, surprise de découvrir l'animal de compagnie assez peu commun de ma grand-mère ?

- Faute partagée, j’aurai dû davantage faire gaffe aussi. Après, si je peux garder ma main, ça m’arrange ! J’y tiens. On se connaît depuis longtemps, elle et moi. Un peu surprise je t’avoue, je ne m’y attendais pas. Ça a dû te faire une sacrée frayeur quand il t’a attaqué, gamin.


Excuses acceptées, ce que je signale par ma petite touche d’humour. Je grommelle un peu mais j’acquiesce silencieusement pour le lui indiquer. J’espère que ce contretemps ne nous aura pas fait manquer nos cibles et que nos proies ne se seront pas envolées. Quand même étrange comme animal de compagnie mais bon, je n’ai pas envie de creuser cette piste, j’ai déjà d’autres choses sur le feu.

Nous sortons de la ruelle et on regagne les plus grandes artères de la ville, dans un carrefour plus fréquenté. Sans surprise, on trouve aussi d’autres bars, des parcs et d’autres enseignes qui laissent présager leur appartenance au monde des amusements divers et variés. Pour l’instant, ça va, ça reste dans l’ordre du légèrement grisant, euphorisant si vous voulez. Bon, je me sentais mieux j’admets quand on était dans la ruelle, là je suis plongée en pleine rue passante, avec plein de phéromones zeltronnes qui virevoltent sans doute dans l’air. Je n’oublie pas non plus le petit appareil que m’a passé Talus, je le sens au fond de ma poche mais je décide pour le moment de ne pas m’en servir. Je peux supporter pour le moment. Je ne connais après tout pas les effets secondaires possibles du remède.

On trouve rapidement le restaurant que le pâtissier nous avait mentionné, le fameux « Navire Échoué ». La soupe doit être bonne dans le coin, si j’en crois les clients qui grouillent entre ses murs et l’interminable file d’attente qui se déroule jusque dans la rue. Une bonne adresse, potentielle en tout cas. Ce n’est pas le commence de gauche qui retient mon intérêt mais bel et bien celui de droite. Une épicerie qui portait le nom des « Sens Éveillés ». Un nom curieux pour un commerce d’épices, c’est presque une note d’humour que j’aurais pu apprécier si le commerce avait été légal. Un coup d’œil vers mon associé mandalorien me permet de constater qu’il ne goûterait pas la note d’humour, il n’a l’air guère d’humeur si j’en crois son soulagement et l’irritation aussi visible que tangible dans la Force.


- Je me disais bien que l'endroit m'étais familier. Je me rappelle maintenant, avant cette épicerie, c'était une boutique très fréquentée par les enfants. Mon grand-père m'y emmenait, avec mes frères et mes sœurs lorsqu'on venait rendre visite à la famille. Dans cette boutique, ils faisaient des jus de fruits frais. On choisissait les fruits qu'on voulait et on recevait le mélange pressé par les employés. Je me rappelle qu'on adorait l'ambiance et surtout mélanger n'importe quoi ensemble, par curiosité ou par défis. Je me rappel particulièrement d'une de nos visites. Pas moyen de me rappeler ce qu'on avait mélangé, mais bon sang que c'était sucré. On était surexcité à l'extrême par le sucre. Je me souviens qu'on courrait, criait et plein d'autres trucs chez mes grands-parents pendant une bonne heure. Puis, la surcharge de sucre a été dépensés et on est tous devenu amorphe, on avait trop brûlé d'énergie pour le reste de la journée.


J’écoute avec une patience assez relative les souvenirs que m’évoque le guerrier du clan Skirata. Il y a cependant des informations potentiellement intéressantes dans ce qu’il me dit là : une boutique qui avait été très appréciée par les enfants, donc probablement une adresse connue par les familles. Ça me débecte de savoir qu’un commerce aussi innocent a pu être remplacer par un marché criminel. Ce n’est pas que je n’aime pas entendre et partager des souvenirs, surtout des bons souvenirs, mais je suis assez impatiente présentement et je n’aime pas beaucoup le contretemps occasionné par notre rencontre inattendue avec la grand-mère de Talus. Qu’est-ce que je peux dire, dans ce cas-là ? Je ne suis pas très douée avec mes mots, je risque d’être assez gauche et abrupte dans mes propos.


- Mes grands-parents étaient stricts sur le sucre pour cette raison. Ils n’arrivaient pas à nous gérer sinon, mes frères et moi. Je n’ai pas trop envie qu’une adresse bien connue des familles continue à être le théâtre de sinistres magouilles.  On a plusieurs options devant nous : on se met en planque et on attend qu’un sbire ou un client se pointe, on se fait passer pour des clients mais ça prend plus de temps, ou on s’infiltre en essayant de se la jouer discrets et on essaye de les choper la main dans le sac. Est-ce qu’il y en a une qui retient le plus ta préférence, ou tu as une autre option ?

La stratégie de la planque n’est pas non plus ma préférée. Si elle est sans doute la plus prudente de nos options, elle a aussi le potentiel d’être la plus chronophage d’entre toutes, avec des chances de succès plus incertaines. Et pour le coup, je ne pense pas que le temps soit en notre faveur. Je n’ai pas envie que mes oisillons s’envolent de leur nid après avoir eu tant de mal à les traquer jusqu’ici. Et si en plus les coutumes locales ne feront qu’accentuer le risque qu’on nous épingle comme des types suspects sur place… alors non, j’enterre cette première possibilité bien lente et passive à mon goût.


- Les deux autres options restent plus pratiques, selon moi. Si on décide d'y aller par la grande porte, j'aurais bien un scénario rapide en tête. Tu serais la cliente, à voir si ce serait pour l'achat d'une dose de consommation personnelle ''spéciale''. Ou alors, une cliente venue offrir l'opportunité d'élargir leur portée commerciale ou quelque chose dans ce genre. Quant à moi, je serais l'homme de main et garde du corps impassible qui parle pas, sauf pour interdire qu'on s'approche trop de sa patronne. Si on choisit l'approche discrète... Je me rappelle qu'il y avait un accès à l'arrière et aussi une trappe d'accès pour aller directement au sous-sol depuis l'extérieur. Bon évidemment, difficile de savoir sans aller voir s'ils ont modifié le niveau de sécurité de ces deux accès. Quand c'était la boutique de jus de fruits, c'était juste un verrou basique, car les propriétaires n'avaient aucune raison particulière de sécurité fortement leur boutique. Leur matériel était énorme, donc impossible à passer par un accès à moins de le démonter. En plus, rentrer par effraction pour voler des fruits? Ce serait tellement débile.


Mm… serons-nous capables tous deux d’être véritablement discrets ? Permettez-moi d’en douter, surtout quand je considère mon propre passif et mon facteur particulièrement variable de chance. Je suis assez embêtée que nous manquions de temps et d’informations en amont sur les installations. Nous ne savons pas depuis combien de temps exactement l’entreprise de ces zigotos est sur place. La discrétion n’est pas franchement mon fort, admettons-le. C’est aussi la façon de faire assez classique des Inspecteurs habituels. J’admets que je suis plutôt tentée de pousser l’audace jusqu’au culot. Après tout, je suis venue ici sous un alias, et non pas avec l’autorité officielle de mon rang de Jedi Vert. La première idée me plaît bien, si j’arrive à donner le change. Il faudrait juste que je me souvienne de comment je faisais à l’époque pas si lointaine où j’avais quitté l’Ordre Vert et vécu dans la contrebande. Cette deuxième option me séduit aussi car nous pourrons les prendre directement la main dans le sac.

J’écoute d’une oreille discrète ses explications sur le gardien à quatre pattes de sa grand-mère, esquissant un sourire amusé à l’évocation du souvenir et de la trace qui était présente sur sa main naturelle, qu’il avait en partie perdue désormais et remplacée par un membre de nature artificielle.


-Au fait, j'y pense. Il y a peut-être une autre possibilité... Enfin, je dis ça, mais je n'en suis pas totalement sûr, car ce n'est pas moi le Jedi. Il n'y aurait pas la possibilité d'utiliser le pouvoir de persuasion par la Force. Le machin que bien des Jedis font en suggérant une idée, tout en faisant des gestes de la main. Certes, je sais que ça a ses limites et que ça ne marche pas sur tout le monde. J'ai eu droit à quelques Jedis qui ont tentés de me faire ce truc... Je dois admettre que c'était divertissant de leur répondre en agitant de la main aussi et en disant un truc du genre: Tu vas te sentir très con.


Effectivement, c’est toujours tentant de vouloir recourir à la Force. C’est une facilité, peut-on dire, dont nous disposons nous autres sensitifs à la Force. Après, le hic, c’est que ça ne représente pas forcément ma spécialité, mes collègues disent souvent que je manque de subtilité pour ces choses-là. Je n’ai pas idée de la force de caractère dont disposent mes cibles, aussi petites frappes soient-elles. Je ne pense pas qu’on puisse reposer seulement là-dessus, ce n’est qu’une option opportuniste. Je me permets quelques instants de réflexion supplémentaires avant de répondre à mon acolyte de mission.


- Écoute, on va tenter au culot. Je veux bien jouer le rôle de la cliente, mon alias de contrebandière peut bien nous servir et ça ne rentrera pas en contradiction avec ce que nous avons dit plus tôt. On sait qu’ils commencent à faire du trafic sur Corellia dans le Secteur Bleu, ça ne les choquera pas que je m’y intéresse s’ils ont de la bonne came à offrir, des tarifs intéressants pour la course pour des clients bien placés. Ils ne diront jamais non à de nouveaux coursiers, et en la matière, c’est bien connu que les corelliens font partie des meilleurs et des plus intrépides.


J’étais même bien tentée de dire que nous autres corelliens étions les meilleurs en la matière, patriotisme oblige, mais j’ai fait un effort pour ne pas froisser la fierté mandalorienne de mon associé.


- Accordons nos violons, puisque tu prendrais le rôle du garde du corps. Il me faut une couverture qui tienne assez la route pour une inspection basique de leur part. Ils sont cons, certes, mais pas totalement débiles. J’ai des contacts dans le métier sous cet alias, ils ne poseront pas trop de questions si on venait à leur demander des infos. On va dire que j’ai ma petite réputation…


On va réutiliser les graines que j’avais semées quelques années plus tôt sous cette identité de contrebandière réputée pour être une corellienne bien dans son jus : casse-cou au possible, amatrice des courses à risques et ayant le potentiel d’être bien rentables, et briseuse de noix si on l’emmerde. J’ai eu une excellente inspiration en la personne de ma très chère mère chasseuse de primes corelliennes et des idées issues des histoires racontées par mon petit frère Hal lors de ses passages.


- On ne prend pas de risque de perdre nos ouailles et on tente le coup direct ou on attend demain et on fignole les détails en espérant qu’ils ne soient pas carapatés d’ici là ?

Du peu que je connaissance de ces animaux-là, ils peuvent être fort élusifs quand ils le veulent, donc le plus tôt on s’affairera à les coffrer, le mieux ce sera à mon avis, mais voyons ce que Talus en pense.

Nous avons donc décidé d’y aller sans plus attendre, et j’ai choisi la méthode franche et directe. On va passer par la grande porte. J’admets que je ne suis pas contre un peu d’action, et je n’ai pas peur de mettre les mains dans le cambouis. C’est comme ça qu’on ne perd pas la main, comme je le clame avec fierté au sein du Temple des Jedi Verts. Cela ne fait sans doute pas très Jedi, mais j’admets que cela m’avait manqué aussi ce petit souffle de liberté dans ma manière de procéder depuis que je suis officieusement « rentrée ». Les choses sont tellement cadrées chez les Jedi qu’on étouffe parfois.

Je signale rapidement mon accord concernant ce qu’il suggère. Option un, si la Force et Corell sont avec nous, on arrive à leur mettre à tous la main au collet en une fois. Option deux, si on n’y arrive pas ou que d’autres nous échappent, on se réorganise, quitte à se répartir les tâches s’ils se séparent. Je ne suis pas mauvaise en traque, même si je sais que les mandaloriens excellent en la matière. Je doute de la faisabilité de les capturer tous et toutes manu-militari par la force. Il va nous falloir être un peu plus rusés et effectivement, la conviction serait la meilleure des possibilités possibles. On pourrait les attirer dans un endroit plus propice et où ils seraient moins à leur avantage. Un sourire amusé étire brièvement mes lèvres à la mention de « patronne », nous nous mettons vite en route dès que j’ai dissimulé quelque peu mon sabre-laser double-lame dans la doublure de ma veste. Ne laissons voir que mes pistolets-blaster corelliens, cela m’aidera à maintenir mon alias pour l’heure.

J’entre d’un pas à la fois assuré, débonnaire et serein le commerce où sont supposées se trouver nos cibles. Mes yeux gris-bleus observent les alentours avec un désintérêt apparent, alors qu’en réalité ils analysent mon environnement avec attention. Déformation professionnelle oblige, surtout depuis ma brève incursion secrète chez les Sith, je perçois mes alentours en termes de menaces potentielles quand je ne suis pas sur ma mère-patrie même. Je note ainsi la présence des cabines à l’usage des clients qui savouraient leur consommation directement sur place, avachis dans des canapés ou affalés directement au sol. Ça doit être de la bien concentrée qu’ils consomment, les bougres ! Ils n’ont pas l’air d’être bien méchants et je devrais pouvoir les maîtriser au besoin s’ils venaient à se montrer trop collants ou trop entreprenants : la majorité avait l’air d’être vraiment en plein trip. Je songe un moment au risque de me faire intoxiquer accidentellement, par les conduits d’aération ou par une seringue mal placée, mais j’ai confiance en mes aptitudes mineures de soin Jedi pour résister assez longtemps tant que la drogue n’est pas trop puissante ou injectée de manière trop concentrée. Je ne note pas de présence d’autres issues, dans cette salle en tout cas, que les portes de l’entrée. Il n’y a guère autre chose que deux toilettes. Quoique, on peut noyer quelqu’un, ou en tout cas assez pour le rendre inconscient, ou dissimuler pendant un moment quelqu’un dans une cabine de toilette.

Ce qui retient cependant mon attention par la suite est un comptoir tout en vitres, regorgeant comme une corne d’abondance d’épices en tout genre et sous toutes formes outre les attendus bocaux. Si j’en crois ce que je vois, ils semblent vendre de l’épice pure et les outils pour la consommer plutôt que sous des formes dérivées… c’est couillu s’ils vendent aussi de l’illégale. Tiens, mais qui voilà ? A première vue, on dirait bien l’une de mes cibles que je dois ramener au bercail. Après, rien ne me garantit que c’est bien le cas et je devrai m’en assurer. Je n’ai pas encore rencontré personnellement les criminels que je suis en train de chasser, je ne connais donc pas leur présence et je ne peux donc pas les identifier via la Force comme je pourrais le faire avec un proche ou un ennemi que j’ai déjà rencontré. Dans tous les cas, je pense qu’elle pourrait être un bon point de départ pour se présenter et pour glaner des informations pas trop compromettantes.

C’est alors qu’une sale gueule bien enivrée se pointe des toilettes pour mec, un gars qui s’est bien bourré la gueule et qui pue l’épice d’ailleurs, qui doit être en train de planer je pense. Moi qui me demandait comme j’allais briser la glace, le malotrus le fait pour moi en percutant le comptoir. Quand il passe devant nous, il me jette un regard étrange et je ne baisse pas des yeux pour autant. Une corellienne ne baisse jamais son froc pas plus que les yeux face à ceux qui leur veulent des emmerdes. Je ne pige rien à son charabia mais avant que je puisse en placer une pour le remettre à sa place, mais Talus m’en dame la possibilité en rentrant parfaitement dans son propre rôle. Une bonne remise en place comme on aurait pu le faire à la CorSec, on secoue un peu sans rien casser.

Bon, puisque Talus prend autant son pied dans son rôle, autant que je poursuive le mien aussi ! Un sourire un peu sardonique aux lèvres, je m’approche du comptoir et me tourne vers la barwoman.


- Il n’en mène pas large, hein ? Il a l’air de bien planer. Ca doit faire un petit moment qu’il est là. Ça, ou il a prit une bien corsée, une de celles que veulent les « vrais » bonhommes. Enfin, pas que j’appelle ça un vrai homme. Perso, j’préfère ceux qui amènent les épices à bon port que ceux qui se font couler par elles. C’est pas la même classe.


Je pourrais dire aussi les « vraies bonnes femmes » d’ailleurs, mais je constate que c’est souvent les mecs qui font ce genre de conneries. Ils ne savent pas s’arrêter, les femmes elles, elles ont plus de finesse, de bon-sens et de sang-froid.


- Bon, des potes m’ont dit que si je cherchais des bons produits, fallait que je vienne ici. J’voulais savoir si c’était la vérité ou juste une légende avant d’m’en retourner au pays.


On va voir où cette ouverture va nous mener. Je ne peux pas percer trop vite au risque de tout démolir et de ruiner l’approche que je cisèle. Dans l’idée, je suis une contrebandière qui s’en retourne bientôt sur Corellia et qui cherche à voir s’il y a une bonne affaire potentielle à flairer ici ou si je passe mon chemin pour fureter plus intéressant. Après, je ne fais pas qu'au bluff et au culot. J'ai bien évidemment en tête des contacts dans la contrebande corellienne et des noms pour couvrir mes propos. Comme je disais, c'est pas la première fois que je traîne dans des commerces pas tout à fait louables si on se cantonne à respecter comme un parangon de vertu la loi républicaine. Mais bon, c'était pour une bonne cause... à peu près.

On tente la prise de contact directe, avec mon côté abrupt et culotté de corellienne. Cela fait du bien parfois de pouvoir laisser mon côté presque naturel s’exprimer plutôt que mon masque de Jedi. Je ne me laisse pas être déstabilisée par le regard de l’Iridonienne, l’observant avec calme aplomb et un sourire assuré, un brin insolent. Cela semble payer puisque mon interlocutrice finit par répondre.


-Je comprends. Un instant, je vous prie. ALGIS!


Ce fût naturellement que je tournais une partie de mon attention vers ladite porte située dans un coin de la pièce, un peu plus en recul. Je ne savais pas où elle menait, je devrais faire confiance à mon équipier mandalorien pour nous repérer dans ces lieux. Tout ce que je peux déduire, c’est que cette porte doit mener vers un sous-sol, de ce que j’en crois à l’angle du plafond et au sens emprunté par les escaliers. Peut-être trouverais-je un deuxième oiseau de mon nid de quatuor de criminels. Notre patience est récompensée lorsque je vois l’une de mes cibles se révéler, qui serait le dénommé Jorv.


-T'as finis de crier? C'est lourd.

-Jorv, qu'est-ce que tu fais là? C'est Algis qui aurait dû monter.

-Il arrive, il est en train de faire l'inventaire et refuse de s'arrêter avant d'avoir terminer de faire le compte de ce qu'il avait commencé. Au fait, tu veux quoi?

-On a quelqu'un qui cherche des produits de qualité.


Bien, nous avons trois de nos ouailles. Plus que la quatrième, la zeltronne, et nous pourrons refermer nos filets sur eux. Je les observe avec une nonchalance bien calculée. Le dénommé Jorv s’approche de nous, observant tour à tour Talus et moi. Bon, je préférerai qu’on arrive dans un espace plus propice à leur capture, plus privé, que dans cet espace public. Je ne me trouve pas sur Corellia après tout, mon autorité est donc plus limitée en terre zeltronne. J’observe le comportement des trois acolytes. Le dénommé Algis semblait avoir la tête plus sur les épaules que son comparse Jorv, lequel me snobe totalement en se dirigeant vers Talus. Je ne suis pas inquiète pour autant vu leur différence de gabarit, Talus pourrait le gérer sans le moindre souci.  Le type est petit et maigrichon, peu armé.


-Eh bien, je constate qu'on a une montagne comme potentiel client. Si vous voulez parler affaire, il y a toujours moyens. Vous n'avez qu'à laisser votre copine, fille du moment ou autre, attendre ici pendant que-


J’aurais bien été tentée de lui en foutre une, mais je suis contrainte par mon rôle de couverture et Talus m’en a damé le pion en le remettant à sa place. Un instant je demande s’il n’est pas en train de passer à l’action plus tôt que convenu entre nous, mais fort heureusement il ne presse pas davantage. Voyant que le second larron révèle au grand jour un couteau, je pose une main sur la crosse de l’un de mes pistolets-blaster. Heureusement pour leur derrière et pour leurs affaires, la Zabrak les rappelle à l’ordre. Détendant légèrement ma main posée sur la crosse, j’écoute leurs dires.


-Du calme, Algis.

-Il vient d'attaquer Jorv.

-Jorv l'a cherché. Ce type n'est pas le client, c'est la dame qui est là pour faire affaire. Le grand gars, c'est l'homme de main. Ce crétin de Jorv vient d'insulter sa patronne, tu croyais qu'il allait réagir comment?


Ah j’aime bien ça quand nos ennemis font le travail à ma place. Je prends donc mon mal en patience tandis que les hostilités s’apaisent et que la lame du couteau disparaît. Bon, un peu plus musclé que prévu cette première prise de contact, mais au moins cela aura calmé les ardeurs des téméraires. L’humain plus raisonnable – Algis, de mémoire – s’approche de moi tandis que la barwoman s’occupe de relever le plus idiot de ses compagnons.


-Bonjour, madame. Désolé pour ce petit… désagrément. Jorv est un crétin. Alors, comme cela, vous recherchez de la marchandise de qualité. Vous désirez quelque chose de spécifique? Quelle quantité?

- J’espère que vous r’cevez pas tous vos clients comme ça ! J’accepte de fermer l’oeil pour cette fois, vu que la bêtise est une maladie encore incurable. Bon, maint’nant qu’nous sommes entre gens raisonnables, causons affaires. J’me doute que vous d’vez avoir du Ryll ou de la Tempête, c’est commun. mais paraît qu’y a une nouvelle épice qui fait fureur en ce moment. Plus puissante que le Glitterstim et le Glitterryll d’après c’qui s’dit ! J’connais plusieurs d’mes clients qui payeraient grassement pour mettre la main d’ssus. C’est vrai ou c’est juste du vent, c’t’histoire ?


Les quatre épices que j’ai mentionnées, que l’on peut appeler drogues addictives d’ailleurs, sont trois substances bien connues dans le milieu de la pègre. Il y a beaucoup de marchés là-dessus, y compris au black, et je ne doute pas que des milieux comme l’APEX doivent avoir leur propre commerce. Le Glitterstim est une épice très prisée, qui dit-on prête à son consommateur des aptitudes télépathiques temporaires et un esprit plus alerte que d’ordinaire. L’un de nos ancêtres chez les Verts, Corran Horn, affirmait que ces bienfaits n’étaient que le fruits de l’imagination des addicts, tandis qu’un autre corellien bien connu, Han Solo, affirmait qu’elles étaient bien réelles. Là où les débats font consensus, cependant, c’est que la drogue endommage les connexions nerveuses et cérébrales à forte et longue consommation, menant à la cécité, aux tremblements incontrôlés, un état de panique chronique, ainsi que de la paranoïa. Quant au Glitterryl, mélange du Glitterstim et du Ryll, elle provoque des troubles de la mémoire sur ses consommateurs. Pour la Tempête, c’est un mélange d’épices incluant du Ryll, connu dans ses effets secondaires pour noircir les vaisseaux sanguins de ses consommateurs et provoquer chez eux d’intenses accès de rage.


- Si vous connaissez quelqu’un qui aurait de cette pépite, j’serais bien tentée de faire affaire avec eux ! V’savez bien, c’est facile pour les poulets de griller un même vaisseau à la longue. Tandis que celui qui en utilise plusieurs, il est moins suspicieux et il se fait moins gauler.

Je n’étais pas certaine que mes poissons allaient mordre à l’appât afin que je puisse les ferrer avec l’hameçon de ma canne à ma pêche symbolique. Qui ne tente rien, n’a rien, et en tant que Maître Vert, ce n’est pas à moi qu’on allait apprendre ce que je devais faire ou non. J’ai ma façon de faire les choses, qu’elle plaise ou non à mes collègues corelliens ou à nos cousins de Tython. Ceux-là que doit se coltiner Jaylen quand il se rend aux réunions du « Haut-Conseil », qui trône sur leur tour d’Ivoire lointaine. Jamais je n’y mettrais les pattes, jamais on ne m’y prendra. Puis bon, Jaylen est encore en pleine forme et a encore tout plein d’années devant lui avant qu’il ne raccroche. Ça n’arrivera jamais de mon vivant.

Je sens dans la Force l’impatience relative de mon allié mandalorien. Bientôt, mais pas encore. Idéalement, je voudrais ratisser tout le petit monde concerné et le faire dans un coin plus calme,  loin des clients et encore plus idéalement, avec une preuve bien fraîche à ramener en plus de mes cibles.

Bon, ça semble prendre. J’emboîte le pas à l’une de mes proies, sentant très bien la présence du mandalorien qui nous suivait, respectant très bien son rôle de garde du corps. Nous descendons au niveau inférieur, traversons une porte et parvenons dans une espèce de sous-sol, comme je m’en aperçois tant d’un coup d’œil que surtout un bref regard jeté à travers le prisme des Sens de Force. Je ressens mon environnement plus que je ne le vois, cela m’aide à mieux le visualiser dans l’ensemble. On nous amène pour le moment dans la partie « légale » je pense, si j’en crois les épices présentes sur les étagères et les étiquettes des bocaux. Évidemment, ils sont un peu cons mais pas trop. Je ne m’attendais pas à ce qui nous embarquent directement dans la partie illégale, qui doit être pas loin. Je ne connais pas les plans de la baraque, alors je compte m’appuyer sur l’aide de Talus qui connaît mieux si je crois ce qu’il m’en a dit. Bon, la quatrième remonte, faudra qu’on la cueille par la suite. On va déjà resserrer les filets sur ces trois-là sans alerter l’étage supérieur et choper une preuve de leur crime.


- Bien, ici nous serons à l'abri des oreilles indiscrètes.


La porte du fond est dûment repérée, avec cette curieuse machine, la présence de notre troisième lascar dedans et surtout le fait qu’on la referme aussitôt. Qui dit accès restreint dit souvent des choses bien intéressantes à récupérer ! Mais aussi piège potentiel qui peut se refermer sur nous. Je suis bien contente que Talus m’ait filé quelque chose contre les phéromones dégagées naturellement par les Zeltrons. Entre ça et les épices, j’aurais pu risquer d’être dans un état pas piqué des hannetons. Je n’ai plus que deux des quatre loustics ici, mais nous savons où sont leurs deux autres compatriotes. On est loin du regard des clients imprévisibles, je ne vois pas ni se ressens de présences d’autres gardes, je n’ai pas constaté de droïdes de sécurité en particulier pour le moment… ça s’annonce plutôt bien.


- Vous disiez donc rechercher de nouveaux produits. J'ai bien ma petite idée en tête de ce que vous désirez. J'aurais cependant besoin d'un peu plus de précisions. Nous avons à notre disposition beaucoup de nouveaux produits. Nous ne faisons pas que produire, nous tentons aussi de créer de nouvelles épices. Ce n'est qu'ainsi que l'on peut devenir les meilleurs sur le marché et surpasser ces connards de l'APEX.  


Approche prudente, je dois bien l’avouer. Puisqu’il a envie de parler, je le laisse déblatérer à loisir, lui portant une oreille attentive tout en gardant un œil sur mon environnement proche. Pas étonnant non plus qu’ils essayent de se faire passer pour plus gros qu’ils ne le sont. La mention de créateur plutôt qu’uniquement producteur est intéressante. Ce que je cherche serait-il une création originale de leur part, plutôt qu’un simple maillon de la chaîne ? C’est une hypothèse parmi d’autres.


- Oui, je sais que vous n'êtes pas de l'APEX. Comment je le sais ? Facile, chaque fois qu'un de ces cons est venu ici, ça commençait immédiatement par des menaces ou une proposition de rejoindre leur groupe. Cependant, comme vous, mes collègues et moi-même préférons rester indépendant. Et je dois admettre que c'est amusant de les voir rager, à chaque refus.


Je ne me débine pas pour autant et affiche plutôt un sourire très fier voire arrogant, typiquement corellien je dirais. Les inimités entre l’APEX et la Guilde Corellienne sont bien connues, même s’il n’y a pas encore de guerre ouverte entre le monstre et le pôle local. Oh, je ne me fais pas d’illusions, ça viendra un jour. Un jour, l’APEX va vouloir s’installer plus qu’il ne l’est déjà sur le sol et dans le marché des Cinq Frères de Corell, et ça va faire grincer des dents la plus petite Guilde Corellienne. Petite, mais tenace et bien informée. Voilà un cercle qui ne va pas être aisé à cannibaliser pour l’APEX, et encore moins à soumettre aisément. Je connais bien les Corelliens, puisque j’en suis une moi-même.


- J’peux comprendre ça. Y a des baffes qui se perdent. Ils nous cassent les couilles et pas qu’un peu à la Guilde, comme ils lorgnent sur not’ marché. S’croient tout permis, les cons, parce qu’ils sont plus gros !  C’la différence entre eux et nous ! On est plus civilisés, nous corelliens.  


Force que ma mère serait fière et que mon frère me ferait les gros yeux en retour ! Je n’ai jamais voulu prendre parti lors des rares repas où toute la famille ou presque était réunie autour de la table, chez Corran et Ellen ou dans une cantina corellienne. Désolé p’tit frère, c’est pour la bonne cause ! J’vous jure, c’est presque aussi pire que des discussions d’ordre politique entre les pro-Guilde et les pro-APEX.  Je ne dois pas être la première à leur donner ce son de cloche, s’ils font affaire avec le Secteur Bleu.


- C’est l’occasion de faire une affaire juteuse pour mes clients et pour moi, surtout si l’APEX ne l’a pas accaparé avec ses sales pattes. Ce serait un plaisir de les faire chier en leur damant l’initiative sur un marché prometteur. Pour r’v’nir à nos banshees : j’cherche la pépite du moment, la came qui te fait planer et t’fais nager dans l’bonheur. Parait qu’elle t’fait r’vivre tes meilleurs moments. Sûr qu’dans les temps qui courent, y en a plein qui tueraient pour un peu d’c’t’extase.


Ça veut dire aussi que mes clients voudraient aussi mettre la main dessus non seulement pour ce marché juteux en devenir, mais aussi pour le côté plus sombre de la drogue : sa forte dépendance, sa déconnexion avec la réalité, l’isolement progressif et la débilité induite à petit feu. C’est excellent pour torturer ou asservir quelqu’un, si je me mets à leur place. Raison de plus pour moi pour leur couper l’herbe sous les pieds et ramener tout ça à la CorSec, qu’on mette le hola sur leurs conneries.

Je laisse une carte blanche certaine à Talus pour qu’il prenne aussi des initiatives tout en tenant son rôle de garde du corps pendant que je fais la causette avec l’un des vendeurs, l’une de nos proies.

Ça se passe bien pour le moment, peut-être un peu trop bien par rapport à ce que mon cycle de veine et déveine me réserve d’ordinaire. J’arrive à bien embobiner le gars que je le souhaite, je me fais bien plaisir dans mon rôle – Corell que cela fait du bien parfois de laisser tomber un peu le masque de Jedi ! – et je me permets un petit peu plus de risques que d’ordinaire comme j’opère en solo côté Jedi. Certainement je n’y aurais pas été aussi franchement si j’avais eu ma chère nièce Kayla. Enfin, quoique… nan, connaissant nos caractères respectifs, je n’aurais probablement pas pu l’éviter. Ma Padawan Verte est aussi intrépide que moi, courageuse comme son père et terriblement curieuse. Je suis ravie de l’avoir dans mes pattes en mission, bien entendu, et je lui fais confiance pour assurer mes arrières et assumer certains objectifs quand on opère ensemble, mais je fais un peu plus gaffe. Jaylen aime bien qu’elle m’accompagne. Le vieux bougre dit que je me fais un peu plus sage avec elle. Besj ! Je suis toujours sage… ! Enfin, aussi sage qu’une corellienne de pur-sang est capable de l’être.


Bon, plus sérieusement. Je ne relâche à aucun moment mon attention et mon jeu de rôle. J’aime bien ma couverture, et ça m’emmerderait gravement de la compromettre connement. Honnêtement, c’est là que je me rends compte que j’ai affaire à des indépendants et non à des criminels associés à des réseaux crapuleux qui se respectent. Un gars ou une fille de l’APEX ou de la Guilde Corellienne n’aurait pas été aussi facile à hameçonner, j’en sais quelque chose, le jeune frangin bosse à leur service. Il est presque cuit. J’attends juste de pouvoir mettre la main sur sa came – histoire d’avoir une preuve – avant de le ferrer, de l’entraver et de le mettre hors d’état de nuire et aux arrêts. J’imagine que la perspective de faire du profit malgré l’influence et le réseau tentaculaire de l’APEX et de la Guilde est trop alléchante pour écouter un semblant de prudence. On commençait à discuter échantillons et tarifs qu’un petit imprévu vient pimenter notre manœuvre, sous la forme de pas et d’une nouvelle voix.


-Eh, on a un client qui vient d'arriver et qui se plaint qu'on lui a vendu un brûleur merdique. Je lui ai servi la routine habituelle, mais il veut rien entendre. J'en fais quoi?

-Fais le descendre un instant, je lui file une merde et il dégagera.


La Zabrak est de retour parmi nous, excellent. J’aime quand mes cibles viennent d’elles-mêmes dans mes environs immédiats, cela me facilitera la tâche. Je feins des traits légèrement agacés par le contretemps commercial, mains posées sur mes hanches – et une très rapprochée de l’un de mes blasters jumeaux, mais je garde le silence et prend le parti de prendre mon mal en patience. Ça m’embête par contre qu’un civil se rapproche d’ici, vu que ça risque fort de chauffer d’un moment à l’autre. Je sens que Talus est tout autant sur ses gardes et prêt à agir que moi. J’ouvre également l’œil, car me connaissant, j’aurais du mal à laisser mes cibles s’en prendre à un civil, même non corellien. Espérons que tout se passe bien. Une dernière série de pas se fait entendre, descendant l’escalier.


-Ah tiens, qu'est-ce que tu fais là?


Un Zeltron d’un certain âge s’approchait de nous et fixait Talus d’un air surpris. Il connaissait le mandalorien ? Doytr, ce n’est pas bon signe ça ! J’allais saisir l’un de mes blasters réglé sur mode paralysant lorsque Talus ouvre le bal et me dama le pion en paralysant avec sa propre arme à distance l’une de nos cibles, la Zabrak. Pour ma part, je prends au poing l’un de mes blasters jumeaux.


-DEHORS, TOUT DE SUITE!!!


Je n’attends pas davantage pour fondre vers l’une de nos cibles, Algis. Malgré la menace modérée des deux bocaux balancés dans ma direction, je ne perds à aucun instant mon attention et instinctivement m’appuie de mes Sens de Force et de la Vision de Force pour ne pas perdre des yeux mon adversaire. S’il croit pouvoir m’échapper avec un tour de ce genre, qu’il est naïf. Me fiant à la Force en complément de mes propres yeux, j’esquive ses attaques désespérées et le mets en joue de l’un de mes blasters authentiquement corelliens. Dès que j’ai une ouverture, je m’empresse de presser la gâchette afin de le mettre à terre à l’aide d’une bonne décharge de tir paralysant. Aussitôt immobilisé et sonné, je m’empresse de l’entraver aux poignets et aux chevilles à l’aide de menottes que j’ai emmenées avec moi. Bon, autant pour la méthode douce et les négociations qu’affectionnent tant les coincés du derch’ qui font partie des gens de Tython. La douceur ? Connaît pas, ou peu, surtout quand mes cibles n’y sont pas réceptives non plus. Bon, ça fait un gaillard de chopé. Avisant le Zeltron âgé, je m’occupe de le convaincre de remonter à l’étage pour sa propre sécurité et dès que j’en ai la possibilité – bah oui, ça me prend du temps de ramener le vieux bonhomme sans répondre à ses questions au rez-de-chaussée – je me précipite au sous-sol pour venir en renfort à Talus, ou pour voir comment il s’en sort.

Et c’est là qu’une partie de la mêlée tourne au drame, après que la Zabrak se soit mangée un tir ami de son partenaire encore debout, au plus mauvais endroit et au plus mauvais moment. N’ayant pas un cœur sensible pas plus qu’un cœur de pierre, une grimace échappe à mes traits. Par Corell, c’est moche ! J’aimerai bien dire qu’au moins comme ça elle ne fera plus de mal à personne, mais quand même… je ne souhaiterai pas une fin aussi horrible et une telle boucherie même à mes pires ennemis. Bon, Talus s’est défendu face à son agresseuse, mais ça va être moche à raconter ça au Conseil Vert… ça va faire tourner de l’œil si je rentre dans les détails, ou au moins retourner l’estomac de quelques-uns. Moi ? J’ai déjà vu pire, tant lors de la campagne de Lord_Over que lors de mon obscure errance. Bon… Jaylen ne va pas être content, enfin pas tout à fait satisfait. Je l’imagine déjà lever les yeux au ciel ou se passer une main sur le visage. Je me débrouillerai. On va déjà sécuriser les trois gus qu’il reste. Je compte mes loustics. J’ai l’impression que le compte est bon. La récolte est terminée. Je m’approche de Talus et de la broyeuse une fois que je me suis assurée d’entraver pareillement Jorv, jetant un coup d’œil vers la bouche de l’engin à l’arrêt. Fichtre, c’est moche. Je ne vais pas pouvoir la ramener comme ça. Je veux bien croire que j’ai des goûts particuliers disent certains, mais je ne suis pas férue du macabre et du glauque des cabinets de curiosité.


-Hum... alors ça c'était pas vraiment prévu... et vraiment brutal... Euh... au moins, on a capturé la majorité des cibles...

- Ouais, c’est moche. J’peux pas la ramener dans c’t’état. On risquerait de perdre une main à essayer de récupérer ce qu’il reste, ça vaut pas la peine je pense. On ne peut pas la laisser là par contre, ça va faire jaser sinon. On récupère les trois autres et on va aller les coffrer, ça te va ? Ah, et si on peut faire disparaître ce coin ce serait mieux. Histoire que des charognards n’aillent pas farfouiller dans leur production.  Y a moyen de faire passer ça pour un accident genre une fuite de gaz ou un incendie, j’pense, et on fait évacuer l’étage avant que l’tout s’affaisse. On coupe la mauvaise herbe par la racine et on brûle ce qu’il en reste pour éviter que ça repousse. T’en penses-quoi ?


Je peux paraître froide, sans doute. Je pense juste pragmatiquement. Si c’est un accident, le propriétaire éventuel des lieux peut se faire dédommager en faisant jouer ses assurances. Par contre, mon rapport au Conseil Vert puis à la CorSec n’omettra aucun élément de la mêlée et de son dénouement, par souci d’honnêteté. En vrai, j’ai pas envie que d’autres victimes tombent dans le panneau et dans le piège de cette merde qu’ils commercialisent.


- On prend les trois restants sous le bras, le mieux serait par une autre sortie, et on glane quelques preuves irréprochables et transportables au vol. Par contre, je t’avoue que je ne traînerai pas après si possible. Ça m’a coupé l’appétit, et j’préfère les coffrer tant qu’ils s’tiennent tranquilles. J’imagine que tu voudras pas trop t’attarder dans le coin, le temps que ça se calme ?    

La comparaison avec des membres du clan Viszla, l’un des plus… disons, froidement méthodiques et violents clans mandaloriens ne suscite pas chez moi une protestation ouvertement outrée. Mes traits restent impassibles, et peut-être un peu plus fermés qu’habituellement. Tiens donc, on dirait que notre cher ami mandalorien ne me connait pas tout à fait bien… mais qui suis-je pour l’en blâmer ? Il a sans doute une certaine image des Jedi, des épitomes de ces « guerriers de lumière ». Peut-être me donne-t-il plus de crédit que je m’en mérite. Je ne suis pas comme les Jedi issus de la philosophie de Tython. Je ne suis pas un « ange gardien de la République » … si tant est qu’un jour j’eus la pureté d’âme et la beauté éthérée que l’on prête à ces êtres mythiques de la légendaire lune d’Iego. Je suis l’un des protecteurs des mondes corelliens. Je suis lucide sur ce point. Je ne suis plus tout à fait la jeune Chevalier Verte qu’il avait connue, dans mes tous débuts. Quelque part, ma part plus sombre, « Eri’ana », ne m’a jamais quittée depuis que je suis revenue en terre républicaine. Ma mission « entourée de ténèbres » que j’ai réalisée au nom du Conseil Vert m’a un peu altérée. Je ne suis jamais rentrée immaculée de cette mission d’infiltration… quelque part, mon âme a été ternie, et j’en suis parfaitement consciente. J’avoue que je considère mon approche plus pragmatique, mais ce qu’il dit n’est pas dénué de sens si l’on veut agir strictement du côté de la loi, aussi peu fiable fût-elle.


- Eh bien, on dirait que c’est mon pessimisme envers les institutions judiciaires qui parle. J’ai appris auprès d’un proche à m’adapter aux principes de réalité. Tu sais, j’en ai vu tellement de vertes et de pas mûres ces dernières années… Je me demande quand même comment ils ont pu s’installer là et surtout s’enraciner à ce point tout en échappant aux contrôles. Je veux bien croire que les choses soient plus souples ici… enfin. Si tu dis qu’ils vont se bouger le cul, moi ça ne me regarde pas. Tu as raison, autant ne pas se faire chier, ce ne sont pas mes affaires. C’est le droit de Zeltros qui s’applique ici. On récupère les gus ci-présents, on signale le repère aux autorités locales avec quelques preuves grappillées, on plie les voiles et on colise ces loustics à la CorSec.


Je fais quelques appels de mon côté pour donner un pré-rapport à l’un des agents de liaison de la Corsec et pour prévenir l’Ordre Vert de la situation, avant un rapport complet à venir tant par écrit dans les deux cas que face au Conseil Vert quand je serai de retour au Temple. J’écoute d’une oreille distraite la conversation entre le mandalorien et son aïeule, tout en pianotant le brouillon de mon rapport à venir tant que les idées sont encore fraîches, après avoir saisi avec toutes les précautions policières de rigueur des preuves sur place et tout en surveillant nos cibles. Loin d’en rougir, je prends le parti d’éclater de rire – ça détend après les derniers faits et répond, avec un clin d’œil espiègle et un sourire facétieux aux lèvres, tout en posant un doigt sur mes lèvres en signe de silence :


- Un magicien ne révèle jamais ses secrets. Je me contenterais donc de dire qu’entre sensitifs à la Force, ça peut faire quelques étincelles !


Je ne me suis jamais trop posée la question, au cours des quelques aventures que j’ai eu dans ma jeunesse d’adulte et lors de ma relation posée et pérenne avec mon ancien mentor Sith et ex-élève. Je ne me suis pas servie de la Force dans ces moments-là, ou alors pas consciemment si c’est le cas. Je mets une seule exception avec mon don d’Empathie de Force, mais ça, Talus n’en aura jamais connaissance. Un sourire malicieux perdure sur mes traits alors que je repense à quelques propos de ma mère chasseuse de primes, qui m’avait répondu que « les secrets rendent les femmes encore plus attirantes ». Dalek et moi n’avons jamais été friands des approches brutales de ces pratiques de « gymnastique de chambre », même en tant que Sith après tout. Ce n’est pas notre came, en fait.  


- Tu crois qu’elle te fichera la paix quand tu trouveras quelqu’un ? Remarque, ça pourrait empirer la chose vue comment elle a l’air curieuse. Allez, viens. On suit ton idée : on remballe ceux-là, on fait l’arrêt signalement du coin et on rentre au bercail. Je te payerai ce que je te dois pour ton aide et je t’offrirai un bon brandy corellien une fois sur le plancher des vaches.


Il me tarde de me délester de ce colis à la CorSec et de rentrer dans mes pénates. Va falloir que je prenne des forces après tout. Ça ne va pas être une partie de plaisir, le debrief au Conseil Vert.