Livre III – Esprit de Vengeance
Les Esprits pouvaient-ils se tromper ? Était-ce là l’inespérée découverte du talon d’achille de la Matriarche ? Toujours est-il que l’existence de Prophètes du Côté Obscur gagna du crédit aux yeux de Morgana lorsque la nouvelle lui parvint. Soizic ne réapparut jamais devant les siennes. Les comparses de la sororité ignoraient ce qu’il était advenu de leur cheffe, mais les mois suivants leur permirent de se rassurer quant à l’utilité de sa mort. Il semblait en effet que leurs rivales se fussent volatilisées du jour au lendemain. Et pour cause, Soizic avait emporté un grand nombre de ses opposantes avec elle, sa Némésis compris. Ainsi, ce clan décapité s’était livré à une guerre de succession n’ayant pas permis de définir une héritière, lorsque l’ingérence d’autres clans se manifesta. Sœurs comme aspirantes avaient été emportées dans d’autres sororités ou leur avenir se résumait en trois mots : acceptation ou péril.
De cette purge, naquit néanmoins une opportunité : l’abandon complet d’un territoire qui ne demandait qu’à être redistribué. Un sanctuaire n’étant pas des moindres, puisque l’on racontait effectivement que les terres des Eaux de Jouvence permettaient d’accroître la longévité de leurs consommatrices. Hélas, aucune Sœur n’avait encore vécu assez longtemps pour confirmer cette rumeur, ni même l’infirmer. Toutefois, outre ce folklore, Morgana voyait surtout l’occasion d’agrandir ses terres se profiler. Ses terres, oui, car elle s’imaginait déjà nouvelle Matriarche. Néanmoins, ce statut demeurait officieux. Le jugement des Esprits devait encore être administré.
Les plus âgées des guérisseuses feraient office d’organisatrices. Elles, qui avaient vu la mère de Morgana succéder à la précédente Matriarche, ayant même vu cette dernière grandir, surent imposer leur jugement comme impartial au sein de la tribu. Les huit prétendantes auraient ainsi le loisir d’honorer le nom de la défunte dont elles cherchaient à poursuivre l’œuvre. Et même par-delà la mort, Soizic choisirait celle qui lui succéderait, le cru d’épreuves étant de son propre fait. La Sœur partageant son sang n’aurait bien évidemment aucune facilité face à la volonté des Esprits, en dépit des quelques avantages dont elle bénéficie sur le plan terrestre.
Huit prétendantes donc, pour lesquelles leur forêt natale n’avait plus aucun secret. Toutes furent guidées par binôme à l’un des points occupés par chacune des lunes planétaires lors de leur zénith. La consigne était claire : pour cette première épreuve, les aspirantes Matriarches devraient se constituer un harem à la hauteur de leur réputation. La défunte était partie sans emporter le sien, aussi serait-il remis en jeu aux côtés des prises récentes du clan à cet effet.
Parmi la sororité de Morgana, le rapport aux Esprits primait, ce pourquoi le Noir Parler était considéré comme sacré. Mais elles demeuraient des mortelles imparfaites, celle au sommet bénéficiant d’avantages interdits aux simples Sœurs. Comme le droit d’enfanter des hommes les plus réceptifs au « Côté Obscur ». Ou simplement les meilleurs survivalistes. La beauté n’était pas réellement un facteur déterminant sur Dathomir. Ainsi, une Matriarche devait en premier lieu prouver sa capacité à être à l’origine de la meilleure descendance possible. Critère ironique s’il en était dans une telle société, selon l’interprétation donnée.
Pour cette première partie du périple, Morgana se trouverait aux côtés d’Azenor, une Sœur ayant embrassé complètement la voie de la Mort, créant de fait un binôme antipodique. La fille de Soizic, sans s’être enfermée dans un domaine comme sa comparse, montrait en effet un intérêt tout particulier à soumettre la faune de Dathomir à ses caprices. Toutes deux pouvaient néanmoins opposer un armement supposément immortel à leurs adversaires, s’assurant ainsi de pouvoir rassembler l’entièreté des mâles de feu Matriarche Soizic. Et même un petit bonus, toujours sur le plan théorique.
Les reproducteurs, eux, vadrouillaient dans une partie du territoire qui serait quadrillé par les binômes. Ils avaient interdiction de tuer, mais ne comptaient pas pour autant vendre leur peau au rabais. Tous n’étaient pas rompus aux Pouvoirs Obscurs, mais leur maîtrise de l’arc égalait celle des Sœurs qu’ils affrontaient. Et s’ils ne connaissaient pas l’environnement comme les natives, leur débrouillardise compensait cette lacune. Aussi jouer la montre ne servirait à rien ici, sinon à rentrer bonnes dernières, bredouilles et sous la huée. Heureusement, les chasseresses savaient combien de proies il leur incombait de capturer. Malheureusement pour Morgana et Azenor, elles tombèrent sur l’une des plus coriaces dès leur pistage entamé.
Cet humain, avec son sabre-laser rouge, n’avait même pas cherché à se cacher des deux femmes au détour d’un rocher. En vérité, il aurait eu du mal à le faire, son arme dégoulinant encore du sang du Moog qu’il venait d’abattre pour se nourrir. Mais il avait sciemment accueilli les natives, les bras écartés comme pour les inviter à s’emparer de lui. Bien évidemment, cet appât grossier n’eut aucun résultat, deux manieuses de fouet n’ayant aucune chance de victoire face à un sabreur sans une certaine distance de sécurité. Elles devaient le mériter, pas le voler. Ce genre de bassesses avait cours entre les clans, mais pas en leur sein. Du moins, pas dans celui-ci.
L’affrontement fut malgré tout une formalité, à l’avantage de deux contre un. Morgana désarma l’humain d’un claquement habile de son arme, sa comparse n’ayant qu’à le blesser de sa dague enduite de somnifère pour terminer le travail. Le binôme avait en effet décidé de se sédentariser dans une clairière voisine afin que leur groupe ne se trahisse pas par son nombre. Si le rapt n’était pas toléré entre elles, les deux chasseresses s’alterneraient bien sûr ce rôle avec celui de vigie, afin de protéger les prises des griffes cupides de leurs opposantes temporaires. Azenor fut la première à endosser le rôle de trappeuse, mais demeura bredouille jusqu’à sa troisième sortie ou elle enrichit leur butin de trois hommes. Morgana, elle, crût un instant que les Esprits lui souriraient durablement. Elle récupéra une autre des proies les plus coriaces et la ramena à leur camp de fortune. Hélas, ses sorties suivantes furent tout aussi infructueuses que celle initiée par sa comparse. Mais leur principale crainte venait ironiquement du fait de n’avoir encore croisé aucune autre Sœur.
Un fait qui serait dissipé, comme souvent sur Dathomir, au beau milieu de la nuit, lorsque les lunes laissaient la planète dans l’obscurité propice aux prédateurs. Les deux Sœurs, adossées l’une à l’autre dans un sommeil léger, furent réveillées de concert par un craquement sourd : une branche venait de céder, quelque part aux alentours. Leur premier regard fut pour leur gibier : il était heureusement intact. Les deux autochtones n’étaient pas idiotes, une telle erreur de la part de leurs rivales ne pouvait être que volontaire, pour les éloigner du feu leur permettant de voir un minimum. Qu’elles disparaissent dans l’ombre ou elles se tapissent si elles ne souhaitaient pas être braves. Le combat, lui, se livrerait au crépitement du bois. Et sous le regard des Esprits, bien entendu.
Versée dans ces derniers, Azenor pressentit un sifflement dans l’air, une flèche manquant de peu de la rendre borgne. Un comportement qui trahissait déjà l’archère responsable de ce tir. La mauvaise nouvelle ? Il s’agissait de la plus adroite d’entre toutes. Ce craquement de branche fut probablement destiné à lui conférer un meilleur angle de tir sur ses cibles… mais elle venait de prouver pouvoir s’en passer. Morgana pestait intérieurement de ne pas avoir une de ses créatures nyctalopes pour les aider dans cette configuration. La Soeur archère étant une Fay, rester immobiles ne les aideraient pas. Malgré tout, l’incertitude d’une autre rivale tapie quelque part les empêchait de trop s’éloigner de l’enjeu de cette confrontation.
Mais la pluie de flèches finirait bien par les tuer si rien n’était fait. Ironiquement, ce fut l’un des mâles qui permit à ce statu quo d’évoluer : un Zygerrien nyctalope repéra l’archère pas si furtive, Sœur Azenor ne tardant pas à lui fondre dessus armée de sa dague et de la même fougue lui ayant permis de neutraliser un sensitif auparavant. La Fay, de constitution moindre, sombra rapidement dans un sommeil dont elle ne se réveillerait pas. Et malgré les longues minutes durant lesquelles Morgana et Azenor restèrent sur leurs gardes, la deuxième Sœur ne se montra jamais. La décocheuse était venue les confronter seule, ce serait sa dernière erreur.
Au lever du jour, le binôme était parvenu à conserver son troupeau intact. Ignorantes des positions de leurs rivales, elles supposaient être, au pire, encore sept. Au mieux, encore trois, puisque la comparse de la Fay demeurait introuvable. Ainsi que leurs reproducteurs, si elles en avaient trouvé. Pendant cette journée, leurs pas les guideraient donc vers les dépouilles de deux de leurs Soeurs, probablement celles ayant rassemblé le plus de proies au vu de la quantité de traces présentes aux alentours. Ce macabre spectacle fut l’occasion pour l’humaine et sa consœur de pactiser : quand bien même l’épreuve n’accepte qu’une gagnante, elles devraient bel et bien s’entraider jusqu’à ce que ce choix ne leur soit exclusif. Néanmoins, cette précaution se révélerait à terme superflue.
Les heures défilaient, et les chasseresses demeuraient désespérément bredouilles. De rares hommes, les plus discrets, tombèrent dans leur filet, mais le gros de la meute comme leurs rivales demeuraient introuvables. Ce jusqu’à ce que les Esprits ne daignent leur accorder un signe : d’abord négligeables, des sons de lutte finirent par attirer l’attention du binôme qui fit de son mieux pour se rapprocher discrètement, tapi dans les buissons. L’intensité de l’affrontement joua heureusement en leur faveur, tant et si bien qu’ils purent compter les hommes attroupés dans un coin, tous captifs du trio qui se livrait bataille ici.
Sœur Armelle était aux prises avec le dernier binôme qui semblait progressivement perdre du terrain. La tutrice de Morgana avait toujours été une bonne bretteuse, ce qui lui permettait ici de les dominer sans grande peine. Lorsqu’Azenor s’extirpa des buissons sans crier gare, la fille de Soizic n’eut d’autre choix que de lui emboîter le pas, fonçant malgré elle dans ce guet-apens qui écarta définitivement l’une des adversaires d’Armelle. La dernière, elle, fût assez déstabilisée pour que la bretteuse en tire un profit définitif. Voilà que la magicienne se trouvait face au plus grand duel de lames que sa génération aurait pu lui offrir. Si ces deux lames ne s’étaient pas retournées contre elle de concert.
La lignée de Soizic aurait pu s’éteindre ce jour-là. Elle aurait même dû le faire, un regard désapprobateur rivé sur Sœur Azenor. Mais cette dernière fût la première à expérimenter du courroux de l’auburn, qui incanta un sort de Violence Physique en sa direction avant de venir la défier d’une faucille fabriquée grâce à sa propre magie. Sur le terrain adverse, mais avec ses propres règles. La polyvalence de cette création d’alchimie lui permit de danser avec sa rivale, de sorte à l’utiliser pour tenir Armelle à distance jusqu’à ce que Sœur Azenor ne finisse égorgée comme une chienne, d’un coup de faucille à l’adresse insoupçonnée. Une mort digne de celle méritée, commenta la fille de l’ancienne Matriarche en Noir Parler.
Son attention quitta un instant sa dernière opposante pour observer son environnement. À nouveau commenta-t-elle sur l’ironie de cette revanche accordée par les Esprits, dans l’exact même lieu ou elle avait dégusté la fange sept ans auparavant. L’ancienne aspirante était toutefois bien plus confiante cette fois, en témoigna l’éclat mordoré, bien plus vif, de son regard d’alors. Et une nouvelle danse macabre s’initia. Les armes-laser des concurrentes ne firent pas long feu, chacune visant à détruire l'autre, laissant le soin aux Incantations de les départager. Plusieurs fois, les corps d’Azenor et des deux autres se relevèrent. Tantôt au profit de Morgana, tantôt au profit d’Armelle. L’assemblée de mâles, maintenant au complet, attendait de voir laquelle de ces deux femmes à la fougue terrifiante les mériterait. Les plaies de faucille de la dernière commençaient à l’affaiblir sérieusement par la perte de sang. Mais l’auburn n’était pas en bien meilleure forme : son énergie étant grassement drainée par le Soin dont elle pouvait faire usage afin de compenser, cela ne durerait pas.
Elle jeta donc d’elle-même sa faucille à terre, optant pour sa lame invisible afin de terminer ce combat. La lueur maligne émanant de ses pupilles ne trompait pas : elle souhaitait par ce geste prendre une revanche plus symbolique encore, terrassant celle l’ayant mise au sol par le passé de la même façon qu’elle fut humiliée. La lutte se poursuivit, l’orgueil de Sœur Armelle ayant mordu de plein fouet à cet appât. Le silence s’installa alors dans cette rixe spirituelle, tandis que les lunes marquaient une passation de règne imminente. Et lorsque finalement l’une des Sœurs s’effondra, Morgana en profita pour asséner le coup fatal à sa rivale, celle qui avait autrefois tenté d’usurper symboliquement sa place d’héritière. La nouvelle matriarche jeta un bref regard en direction de la lune, la même qui l’avait vue naître, avant de céder à son tour sous le poids des blessures et de la fatigue.
Livre IV – Prestige Sauvage
Sa conscience dérivait dans les méandres du monde des Esprits. Jusqu’à ce qu'un sursaut psychique la ramène à elle. Et le temps que l’exercice de ses sens ne lui permette à nouveau de cerner son propre corps, Morgana se redressa subitement. Encore gênée par la lumière naturelle puisqu’elle sortait d’un rêve obscur, il lui fallut un moment pour reconnaître ses alentours. Un environnement familier, et une figure tout aussi familière qui se manifesta en réponse à l’agitation de la jeune femme. Evam, le Serennien ayant une place un peu plus développée dans les pensées de la Dathomirienne que les autres reproducteurs pour lesquels elle avait livré ce duel, entre autres.
Le sensitif de Serenno fut la première personne à ramener l’esprit de la Sœur au présent. Ou plutôt, l’esprit de la Matriarche qu’elle était devenue. Les guérisseuses n’avaient pas caché leur déception de voir une seule des candidates rentrer en vie plutôt que l’un des binômes victorieux et les trois autres défaits. Sept guerrières tout à fait capables avaient perdu la vie dans l’élection de leur nouvelle figure dirigeante, ce qui ne faciliterait pas l’essor des Sœurs de la Forêt Brumeuse dans le territoire laissé vacant par leurs anciennes némésis. Cependant, la volonté des Esprits était inaltérable, Morgana ne comptait donc pas laisser à ce dossier brûlant le temps de refroidir.
En effet, d’autres sororités avaient déjà revendiqué par diverses motivations leur annexion exclusive des Eaux de Jouvence. Un conflit d’intérêt qui ne tarda pas à basculer des injonctions à la confrontation pure et simple. Ce serait au clan qui affirmerait sa présence sur la terre vacante avec le plus de fermeté que reviendrait l’honneur de le posséder. Consciente de la nullité de ses chances de victoire sur ce terrain, Morgana hésita longuement à s’en retirer. La mort de Sœur Armelle avait écarté l’une des entraves principales à son règne, mais il en restait d’autres, ironiquement plus influentes qu’une jeune matriarche prédestinée, bien que pas plus respectées. La nouvelle cheffe de la sororité craignait que cette couardise ne mène son titre à être contesté et donc, son clan de nouveau affaibli par voie de conséquence.
Heureusement, les volontés suscitées par sa nomination de Matriarche seront tuées dans l’œuf. La Reine Sauvage en personne eut vent de ce sanctuaire laissé à l’abandon et fit en sorte de réunir toutes les Matriarches concernées, ainsi que les Sœurs liées à ce sol par le droit du sang. Celles qui furent arrachées à leur tribu une fois celle-ci neutralisée. Chacune s’attendait à pouvoir plaider la justesse de sa cause auprès de leur régente suprême. Morgana se mit en tête que le rôle de sa mère dans la chute du clan local pourrait lui conférer une certaine légitimité quant à la revendication du territoire. Mais ce qui se passa fut tout autre.
La Sœur de la Nuit la plus puissante d’entre toutes clama haut et fort que puisqu’aucune d’entre elles ne parvenait à se diviser équitablement l’objet de leur querelle, ce serait elle et personne d’autre qui s’en constituerait la nouvelle administratrice. Une Matriarche eut l’audace de contester cette décision. Son clan fut congédié avec l’insigne honneur d’élire une nouvelle représentante auprès de la Reine de Dathomir. La précédente avait en effet servi de pitance à son propre Terentatek, avant que la Grande Matriarche ne récupère également tout ce qu’elle possédait de son vivant. Après cela, un silence approbateur vit l’assemblée se dissiper. La parole de la Reine Sauvage fut respectée, l’une de ses filles devenant la nouvelle Matriarche du clan l’ayant confrontée et donc la nouvelle voisine de Morgana et de ses Sœurs.
Être dans le voisinage du sang de votre supérieure n’a pas que des avantages. Premièrement, en cas de conflit, vous êtes certaine d’être systématiquement ramenée à votre limite hiérarchique par peur de voir l’échelon supérieur se manifester. Une peur particulièrement exacerbée par la démonstration spirituelle du dit échelon. L’auburn décida donc de jouer profil bas, son bagout face à la Grande Matriarche n’étant pas passé inaperçu, ainsi que ses vues sur le territoire des Eaux de Jouvence. La progéniture de la Reine Sauvage semblait heureusement n’y accorder aucune importance, les deux clans ne se croisant que très rarement pendant les premiers mois. Bien trop rarement pour se menacer mutuellement.
Cette problématique élucidée par l’instance supérieure permis à la nouvelle Matriarche de se focaliser sur ses affaires internes. Peu à peu, elle entra en contact avec certaines des cheffes de sororités voisines, à l’exception de celle des Eaux de Jouvence. D’autres la contactèrent à leur tour directement. Des échanges toujours réalisés avec une prudence nécessaire à les masquer. Le but de ces manœuvres était clair : bâtir un semblant de solidarité visant à empêcher la Grande Matriarche de s’emparer de leurs terres par le biais de sa fille. La Reine avait, comme chacun de ses sujets, montré un grand intérêt pour les légendes contées sur ce lieu.
Mais les territoires voisins n’étaient pas exempts d’un folklore pouvant apporter du profit. Le Clan de la Forêt Brumeuse, par exemple, était réputé pour vivre sur une terre particulièrement hostile, de par sa faune plus conséquente qu’aux alentours. Une rumeur née du fait que les premières générations entretenaient un brouillard illusoire dont les intruses se risquant à le braver ne revenaient jamais. Jamais indemnes. Les nouvelles générations s’étaient efforcées de perpétrer le bien-fondé de ce mythe, puisque cela signifiait que la viande y était plus abondante… mais aussi plus risquée à obtenir.
La coutume était pourtant tombée en désuétude au fil des successions matriarcales. Jusqu’à ne pas être renouvelée par la prédécesseure de Soizic. Ainsi, la Matriarche actuelle n’avait plus de légende à sa disposition pour camoufler la fructuosité d’une chasse sur ses terres. Cette contrariété allait de toute manière avec la volonté de Morgana de trancher radicalement avec l’œuvre des précédentes cheffes de ses consœurs. L’une de ses voisines, néanmoins, avait beaucoup plus à perdre. Son territoire fut celui sur lequel Morgana récupéra son premier cristal, l’un des quelques fiefs sur lequel trouver des cristaux était garanti. Parmi les Dathomiriennes, même une chose aussi basique que l’accès à un fouet-laser pouvait se monnayer. L’avantage liant les sororités de la Forêt Brumeuse et des Cavernes Salines était toutefois orienté vers un aspect étranger à l’économie.
Ce partenariat se résume avant tout à la sécurité. Les Sœurs des Cavernes étaient de celles n’ayant que trop payé le prix du sang par le passé, se repliant sur elles-mêmes dans leur monde natal après que des mécènes externes à Dathomir ne se soient joués d’elles au profit d’une autre sororité. Tout l’inverse de l’avenir que voulait offrir Morgana à ses consœurs, donc. Ainsi ces deux clans n’en formaient plus qu’un seul lorsque les conditions l’exigeaient, de part et d’autre. Un clan fournissait l’intégralité des cristaux demandés selon les modalités du demandeur. L’autre s’engageait à préserver l’intégrité de son fournisseur au moindre signe de menace encourue. Cet accord constituait de plus un vivier d’âmes moins inépuisable que les deux sororités prises séparément.
Lasse de voir ses pairs s'entre-déchirer, la spirituelle s’était surprise à songer au concept d’union, idyllique dans bien des esprits et impossible à concrétiser dans un monde réel empreint de toutes les subtilités inhérentes au nombre d’individus le composant. Particulièrement dans une part de la Galaxie empreinte du Côté Obscur. C’est pourtant à ce moment-là que Morgana mit le doigt sur une approche qui lui permettrait certainement de rassembler toutes ses consœurs en un seul et même but. N’oublions pas qu’elles ont toutes bien moins de différences que de points communs. Le fait de ne pas voir ces points communs ne signifiait pas qu’ils n’existaient pas. Les Esprits, eux, ne faisaient pas si grand bruit envers la diversité des âmes les rejoignant.
Alors cette première alliance s’étendit peu à peu à d’autres clans soucieux de leur identité. L’exercice demeurait périlleux, les rivalités étant grandes et les passifs pour le moins belliqueux. La menace d’anéantissement faisait parfois plier les récalcitrantes. Mais le moyen le plus efficace de les faire adhérer était bien de leur faire comprendre leur intérêt à oublier le passé pour observer l’avenir. Une application qui se limitait bien sûr à leurs histoires communes et non aux traditions qu’elles perpétraient. Morgana n’entendait pas réformer Dathomir en profondeur : il s’agissait là d’un projet impossible à mener en une seule vie. Ni même en plusieurs vies, d’après elle. Tout ce qu’elle chercha à instaurer pour les Matriarches concernées était l’assurance d’une autodestruction commune si la plus Grande d’entre elles en venait à les attaquer par leur frontière indirecte.
Dans le même temps, le regard de l’auburn se tournait aussi vers ses potentiels alliés extérieurs. La renommée de son clan en dehors de Dathomir dépendait directement de la quantité et de la qualité de missions accomplies par celles se revendiquant de la Forêt Brumeuse. Aussi la plus élevée de ces Sœurs n’hésitait que rarement à accepter les contrats présentés comme au-dessus de son potentiel : d’une part, cela rabattait le caquet de ces interlocuteurs masculins qui osaient la sous-estimer. D’autre part, l’exercice de ses limites était une excellente façon de pousser plus loin son expertise des Arts Noirs, la pratique éclipsant de loin la théorie dans la maîtrise de cette discipline. Les retombées de cette audace étaient ensuite saisies par les Sœurs qui ne brillaient, à leur échelle, pas moins que leur Matriarche.
Une importance extra-planétaire qui ne sera pas sans influence sur Dathomir. À son échelle, l’auburn fit en sorte que l’essor des relations tissées avec sa clientèle bénéficie à ses consœurs.
Des relations qu’elle cimenta, pour sa part, en offrant ses deux premiers enfants à d’influents Siths dès lors que leur sensitivité se manifesta. Fils de Matriarche ou non, un individu masculin n’avait pas d’avenir radieux sur Dathomir. Morgana, en tant que mère, préféra s’assurer des dettes auprès d’individus extérieurs à son monde, ayant déjà subordonné certaines de ses équivalentes à sa cause. Son objectif fut de se garantir le temps d’une croissance pérenne afin de pouvoir se montrer à la hauteur de ses ambitions.
Mais le Pouvoir ne sourit pas à ceux qui demeurent dans son attente. La chance sourit aux audacieux, dit-on. Alors Morgana avait pris soin de ravaler son intérêt pour les sources des Eaux de Jouvence. Pendant toute la période ou elle s’estima inférieure à la Matriarche les possédant. Mais jamais l’auburn n’avait cessé de diversifier ses incantations, dans l’unique but de voir ce jour arriver. Ce jour ou elle décida de commettre la même erreur ayant mené Soizic au royaume spirituel des années auparavant. La spirituelle brava seule le territoire des Eaux de Jouvence remaniées. Seule, en compagnie du fruit de ses expériences. L’intégralité de sa ménagerie actuelle, puisqu’elle avait juré revenir, sans même se fier aux Esprits. Ainsi, l’éventualité ou elle ne reviendrait pas verrait par la même toute trace physique de son existence s’effacer. Et sa rivale aurait tout le loisir d’effacer le souvenir culturel de son passé.
Mais s’il est une chose que les Esprits dévaluent plus que de ne pas les écouter, c’est de décider en leur lieu et place. En effet, la Grande Matriarche avait décidé seule de placer sa fille à la tête d’un clan, sans aucune forme rituelle légitimant cette décision. En bafouant les traditions du clan en question. Ainsi, si toutes les Sœurs faisaient profil bas, certaines désavouaient cette prise de pouvoir. La Matriarche de la Forêt Brumeuse avait su s’imposer comme une meilleure alternative que les autres prétendantes à l’époque, mais il semblait que sa consœur n’ait rien fait de tel. A quoi bon se justifier auprès d’une tribu qui nous a été offerte en cadeau, après tout ? Cette sororité là aura donc vu son glas retentir au nom de ses propres divisions, trop longtemps endormies jusqu’à leur réveil. Un réveil qui vit l’unité se scinder en deux et s’entre-déchirer. La Mort n’avait pas fini de s’abattre sur les Sœurs des Eaux de Jouvence, mais cette fois, elles ne tomberaient pas dans l’anonymat. Celles attachées à leur intégrité se verraient réattribuer leurs terres, en échange d’une allégeance au clan à l’origine de cette reconquête. Les mauvais éléments seraient purgés, ni plus, ni moins. La Matriarche est morte, vive la Matriarche. C’est ce qui fut scandé sporadiquement en ce lieu de légendes ce jour-ci. En effet, la Grande Matriarche venait de voir l’une de ses filles s’éteindre, au profit d’une certaine spirituelle auburn qui l’avait progressivement surpassée en tout point lors de leur duel.
Livre V – Obscure Postérité
Ce coup d’éclat braquerait les projecteurs sur Morgana, qu’elle le veuille ou non. Et la façon dont elle avait supprimé la Matriarche lui vaudrait sans doute autant d’intérêt que de colère de la part de la Grande Matriarche. Morgana n’avait pas ôté la vie d’une de ses congénères sur un coup de tête : elle s’imaginait prête à combler le fossé qui la séparait encore de sa régente. Tout comme elle s’estimait digne d’hériter des terres dont elle avait tué l’occupante. Néanmoins, la vie sur Dathomir étant ce qu’elle est, le temps que la nouvelle de cette mort se répande constituerait son ultime répit.
Evam la suivrait dans cette épreuve, de façon plus impliquée que lors des précédentes. Effectivement, de simples mots d’encouragements et la réitération d’une confiance absolue risquaient de ne pas suffire cette fois. En partant du principe que cela ait eu une influence les fois précédentes évidemment. Morgana laissait son esclave penser comme tel, afin de flatter son ego masculin. Un ego soumit à rude épreuve le reste du temps, le sensitif étant ramené à sa condition servile par sa maîtresse dès lors que des ailes commencent à lui pousser. Si cette servitude fut généreusement récompensée durant toute sa durée, c’est dès cet instant qu’elle allait réellement se montrer utile pour Morgana.
Bien sûr, il ne s’agissait pas pour les partenaires de défaire la Reine Sauvage ensemble. Une telle entorse à la tradition aurait été inacceptable pour une Matriarche, en plus d’être contre-productive pour son image auprès des autres meneuses de Sororité. Qui plus est, penser qu’un seul mâle puisse être déterminant au combat est assez contraire à la pensée des consœurs de Morgana. Une pensée qu’elle partage bien évidemment. L’utilité de son esclave serait plus anecdotique.
Le Serennien ne serait qu’un supplément de mise pour la Matriarche ayant le plus à perdre sur ce coup de poker. La plus Grande d’entre elles était d’une longévité suffisante pour connaître les traditions de tous ses clans subordonnés, dès lors qu’ils ont une signification pour elle. Autant dire qu’elle s’est empressée de se renseigner sur la sororité responsable de la réduction de sa progéniture. Elle fut donc renseignée sur la sensibilité spirituelle de cette parvenue, ainsi que sur sa capacité à s’imposer auprès d’autres tribus.
Loin de se sentir menacée, la Reine fut prise de curiosité quant aux intentions de cet élément jusque-là négligeable de son royaume. Ce n’était pas la première à souhaiter la détrôner, ni la dernière, aux yeux de la souveraine de Dathomir. Habitués à ces jeux de pouvoirs de par leur entourage Sith, les deux femmes savaient très bien que ces querelles nuisaient à la stabilité nécessaire sur Dathomir. Aussi cela devait être réglé avant que les clans ne se polarisent autour de la tenante du titre ou de celle aspirant à s’en emparer, selon leurs affinités avec l’une ou l’autre.
La vision de Morgana serait ici mise à l’épreuve. Ce qu’elle offrirait à Dathomir si jamais elle venait à triompher de la souveraine actuelle. La présence Sith sur sa planète natale fut toujours l’un des sujets sensibles de l’auburn. Il fut aussi ardu pour la Matriarche de diluer son vin que ne l’était l’apprentissage du Basique pour un Wookie. Si ce n’est que la première, elle, finit bel et bien par s’en montrer capable. Le statut des mâles s’était considérablement dégradé lors de son mandat, mais chacune de ses Sœurs demeurait libre de les considérer selon son bon vouloir. En ce qui la concernait-elle, toutefois… la vision Hapienne n’était pas si éloignée de la sienne. Même si Evam était l’une de ces exceptions confirmant la règle. Un privilégie suscitant des envies qu’il devait faire taire ou bien, s’il s’en montrait incapable, les laisser prendre le pas sur sa position, sur sa vie. Morgana ne voyait en la doctrine Sith que le moyen de s’assurer un partenaire à même de ne pas nuire à la qualité de sa descendance plus que de raison. Ni plus, ni moins.
Morgana avait donc bien plus à mettre dans la balance qu’Avem, pour voir son poids approcher celui de la Grande Matriarche. Ses discours ne serviraient à rien, mais ses Mots de Pouvoir eux, pouvaient faire la différence. Si la plupart d’entre eux seraient une ressource personnelle lors du combat, elle en avait aussi utilisé afin de se constituer de véritables alliés répondant à sa volonté comme à l’évangile.
Et la Matriarche espérait surtout que la dernière d’entre elles ferait la différence. Incarnation même de sa philosophie, son dragon alchimique était l’alliage de deux des plus redoutables créatures locales. Subjectivement, les deux lui ayant causé le plus de problèmes. Son dernier coup d’éclat, fruit d’une décennie d’expérimentations, n’en était encore qu’à ses balbutiements. Elle n’avait qu’un seul et unique adulte draconique à mettre à la tête de sa horde, mais elle eut l’audace de considérer que cela suffirait. Ses autres créatures, elles, étaient plus abouties par leur nombre.
Elle entendait bien jeter tout ce qu’elle avait dans cette ultime bataille. Pas ce dont elle avait bénéficié, mais bien ce qui constituait sa propre œuvre. Car l’éventualité d’une défaite demeurait ancrée dans son esprit comme une tache d’encre indélébile. Ne pas se montrer à la hauteur de son ambition nouvelle jetterait un déshonneur sur son nom, mais nuirait surtout à son clan qui devrait en assumer les conséquences à sa place. Telle était la philosophie de la Reine qu’elle comptait détrôner. En cas d’échec, que dirait-elle à sa mère, lorsqu’elle la retrouverait parmi les Esprits ? L’auburn préférait ne pas y penser.
Sa propre âme fut exempte de toute considération lorsqu’elle fut honorée de la présence de la Reine Sauvage. Celle-ci avait pris soin de tenir compte des revendications de Morgana. Tant qu’elle serait vivante, cette histoire ne les concernerait que toutes les deux, pas leurs clans respectifs. Surtout qu’il ne s’agissait pour la souveraine que de remettre au pas l’une de ses obligées devenue un peu trop turbulente. Ne pas mêler plus de ses sujets que nécessaire à cette purge lui demeurait profitable. Son ego n’avait de toute manière pas besoin de quiconque sur qui s’appuyer.
Une décennie plus tard, le lieu de leur affrontement en porte toujours les stigmates. Prédatrice ou non, la faune semble éviter cet endroit comme la peste, ou l’un de ces lieux empreints d’une telle énergie que s’y tenir suffit à provoquer l’inconfort. La végétation elle-même semble peiner à y reprendre ses droits, chose pour le moins ironique sur une planète comme Dathomir. Il ne fait aucun doute devant ce spectacle que les deux adversaires ont été suffisamment capables dans leurs Arts Spirituelles pour plier leur monde lui-même à leurs volontés. Certaines disent même que l’endroit est devenu un point d’intérêt pour les Esprits qui aiment à revivre de temps à autre ce jour ayant vu l’avenir des Sœurs de la Nuit se jouer sous leurs yeux. Simplement par plaisir, ou bien pour s’assurer que les actes de la teneuse du titre ne diffèrent pas de ce qu’elle a montré ce jour-là.
Lorsqu’ils tombent sur cet endroit, même les étrangers peuvent trouver étonnant le degré de ruine de l’environnement. Qu’il s’agisse des arbres déracinés et jetés comme des javelots de part et d’autre. Ou bien des squelettes débarrassés depuis longtemps de leur viande, les bactéries étant moins conscientes et donc plus téméraires que le règne animal plus évolué. L’énergie et les aptitudes déployées pendant cette lutte furent de celles rendant envieux même les plus puissants Seigneurs Siths incapables de reproduire ces procédés. L’aspirante elle, prouva le bien-fondé de sa confiance, abattant ses cartes l’une après l’autre tout en épuisant le jeu de sa rivale et Reine. Son propre jeu aura été clairement amoindri, le prix évident d’un accès à toute la sérénité nécessaire pour le reconstituer, et même l’améliorer par la suite.
Car c’est bien autour du cou de Morgana que repose le talisman de résurrection de sa prédécesseure. Nul témoin ne peut prétendre savoir combien de temps dura cette lutte de pouvoir, mais la Matriarche du clan de la Forêt Brumeuse en ressortit grande vainqueur, étendant indirectement son règne à toutes les autres sororités de Dathomir. Ainsi qu’à tous les mâles possédés par ces dernières, sur lesquels elle ne cachait pas un droit de vie et de mort dépendant uniquement de ses humeurs. C’est que l’annonce de la défaite de la Reine Sauvage provoqua un certain émoi : la nouvelle souveraine rencontra bon nombre de Matriarches dont elle ignorait l’existence jusqu’alors. Sa propre réputation l’ayant néanmoins précédée, elle réalisa être beaucoup plus connue qu’elle ne le supposait. La subordination de plusieurs clans avait répandu son nom malgré elle. Certaines Matriarches s’avouèrent curieuses de voir le jour où cette audacieuse consœur oserait se dresser contre leur souveraine à toutes, peu dupes de ses réelles intentions. Mais si certaines la félicitèrent de sa victoire, d’autres éprouvèrent des regrets quant à la jeunesse de la nouvelle occupante du trône local.
Le premier acte de Morgana fut alors de s’assurer de se faire connaître de toutes les cheffes locales comme leur supérieure, afin de tuer dans l’œuf toute contestation immédiate. Bien sûr, l’une d’elles était libre de contester son règne, comme l’auburn l’avait fait avec sa prédécesseure, mais elle devait encore laisser son empreinte sur sa planète avant de considérer ces contestations comme légitimes. Il s’agissait là d’un cycle naturel entretenu par les Esprits afin que chaque génération ne rende la planète plus prospère que la précédente. La Soeur issue de la Forêt Brumeuse comptait bien apporter sa pierre à l’édifice : une pierre taillée plus richement que toutes les autres auparavant.
Ambition Sith par excellence, la nouvelle Reine comptait justement minorer l’importance de ce culte qu’elle considère comme erroné. Cependant, dans cette Galaxie, le nombre signifiait bien plus que la justesse de la pensée, aussi demeurait-elle consciente de son impossibilité de voir quelconque changement planétaire se répercuter en dehors de son système sans autre canal de diffusion que Dathomir. Il était temps pour la planète des Esprits de sortir au grand jour. Le moins qu’on puisse dire, c’est que la façon dont Morgana fit connaître sa position de régente au reste de la Galaxie retint l’attention.
Habituellement, ce sont les Sœurs qui s’acquittent de missions destinées à financer leur sororité, de façon individuelle. Alors imaginez la Reine Sauvage en personne se proposer de prendre part à une opération militaire visant à affaiblir la République. Pas personnellement, bien sûr, mais par l’envoi d’une force purement animale. Des créatures faisant office de testament des capacités des Modeleuses Dathomiriennes, loin des Léviathans possédés par la Maîtresse de cette discipline comme par la réincarnation d’Alianka Djo, mais tout de même, un ajout conséquent à la force de frappe du Consortium. Des vies que la monarquesse de Dathomir jugeait remplaçables, en plus d’être un bon moyen d’attirer l’attention de sa contrepartie Hapienne. La spécialité de la dernière Darth Ânkh n’était pas un secret d’état, tant ses prouesses dans leur globalité étaient considérées comme des marqueurs de divinité. Une divinité qui eut le mérite de capter l’attention d’une Reine issue d’un monde sauvage et doté d’un Dieu Unique.
Cette même Reine qui avait jusque-là boudé les réunions du Conseil Noir, faute de temps et d’intérêt. C’est qu’entre les litiges impactant ses intérêts et le temps nécessaire à la pérennité de ses élevages, la politique externe de Dathomir n’aura eu que peu de place dans l’agenda de Morgana, les offensives menées par le Consortium n’étant pas d’envergure démesurée. Il restait néanmoins une problématique sur laquelle la souveraine des Esprits devrait bien finir par se pencher, pour véritablement mériter cette fonction.
Celle des Sorcières de Dathomir, disparues mais pas anéanties. Les modalités de culte envers le Dieu aux Crocs sont une des questions sur laquelle Morgana laisse chaque clan décisionnaire. Et plus globalement, le sort de ces enfants terribles éloignées de leur terre sainte fût pendant longtemps éclipsé des pensées des Matriarches. Jusqu'à ce que la Reine Sauvage perçoive une vision d'une individu bien trop différente de ses consoeurs ou des autres sensitifs pour que le doute soit permis. Une sorte de premier contact, début d'une série de preuves de la survie des exilées. Quel était l'état de leur dogme, de leur tribu ? Morgana l'ignorait, mais comptait bien ramener ces expatriées dans le droit chemin de gré ou de force. En résulte une situation que la Sœur Noire espérait investiguer personnellement, en se montrant d’une assez grande aide dans ce conflit enlisé. La Dathomirienne était au fait des difficultés de la tête doublement couronnée à asseoir son règne sur l’intégralité de la Galaxie. Et outre l’ironie d’une divinité n’étant pas encore omnipotente, Morgana voyait surtout dans cette situation l’occasion d’honorer un pacte conclu entre Hapès et l’une des plus anciennes ressortissantes de Dathomir que l’Histoire ait retenu. Celle-là même qui avait échoué à nettoyer leur planète-mère des usurpatrices Lumineuses. La nouvelle souveraine prouverait l’utilité de la gestion autonome de sa planète en étant l’un des facteurs permettant une sortie en grandes pompes de cette Guerre à Darth Ânkh. De ce fait, son nom resterait dans l’Histoire, tout comme celui de Dathomir. Cela lui conférerait sans doute la longévité nécessaire pour voir s’étendre le modèle Hapien, et donc son idéal Dathomirien par la même, à l’ensemble du territoire Sith. Puis au reste de la Galaxie.
Après tout, ce ne serait qu’une énième utilisation d’un potentiel la dépassant à son avantage. Si cela pouvait permettre d’éliminer pour de bon l’hérésie de part et d’autre du Consortium, cela valait le coup de tenter de remodeler ce monde en une image lui étant plaisante.